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Vox Ludi le blog d'Illuminati

Rogue Trader

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    Illuminati

    le 06/12/2024 à 15:24 Citer ce message

    Une semaine passa, durant laquelle Uriah et son équipe restèrent à bord de leur frégate. Il en fut de même pour Ludivine. D’une part, il était temps de passer inaperçu pour planifier les stratégies à venir, mais surtout une partie de ses officiers étaient en convalescence à cause des dernières graves blessures reçues lors de l’assaut dans les mines des Cyclades. Les hommes du lieutenant Hastings étaient parvenus à en sortir vivant un navigator captif, celui-là même qui avait contacté Jocasta via son tarot. Malgré la fuite des derniers cultistes et d’au moins un sorcier, ils étaient aussi parvenus à mettre la main sur un stock d’armes non négligeable. En attendant, le navigator, dénommé Ezra, était au bloc medicae, tout comme la Brute, Jocasta, Säde, Praxx et Nessa.
    Ces jours furent aussi mis à profit pour envoyer des équipes réduites d’informateurs et d’espions à la surface d’Onidès afin de surveiller les agissements des forces locales. Il était clair désormais que les actions des libres-marchands n’étaient pas passées inaperçues pour les hommes de Krieger. D’abord le massacre en pleine rue d’un de ses caïds locaux, Ambrosius Gantz et de ses hommes avait fait le tour de la ville. Gantz était un des principaux barons de la pègre dans Hyboros Tertius et son assassinat fit grand bruit à en juger par les informateurs de Säde dépêchés sur place. Il en fut de même après la toute récente attaque des mines des Cyclades. Le coup porté, bien que rude, avait tout de même laissé une trace et avait placé un bon coup de pied dans ce nid de frelons. Enfin, le fait que Praxx avait dérobé cette tablette xenos permettant d’activer les portails, faisait que Krieger n’était plus sans ignorer qu’une force ennemie le ciblait directement. La situation devenait même compliquée pour les espions de Säde qui furent rapatriés en urgence. Le chef de guerre sur Onidès était désormais en alerte et comptait bien accélérer ses plans de conquête pour Bremedia. Les rapports le confirmaient. Partout, des engins de guerre étaient assemblés et semblaient bouger de ville en ville, sans qu’un schéma très clair se dessine. La stratégie paraissait incohérente par certains aspects, mais selon les officiers de Ludivine, cela pouvait aussi faire partie de leur plan qui était juste de chercher à brouiller les pistes, ne dévoilant aucun indice sur les tactiques militaires à venir.
    A la suite du dernier combat, Altaïr, lui, s’en était plutôt bien sorti, sans la moindre égratignure, tout comme Uriah. Pour l’heure il s’était mis en tête de dénicher un fusil de précision et malgré ses vaines recherches – même auprès de ses informateurs, il finit par passer voir la Magos Argentus. En lui offrant une caisse de fusils laser, il parvint à trouver un accord. Elle lui fabriquerait un fusil laser long d’ici une semaine.
    Finalement, Altaïr apprit de Säde, son maitre des murmures, une fois sortie du bloc, qu’elle était parvenue à en trouver un avec ses informateurs au marché noir sur Onidès, mais Altaïr préférait quand même disposer de son arme propre, quitte à attendre un peu. De toute manière, il profita des jours suivants pour s’entrainer avec Kenway. Il lui fallait travailler ses réflexes et sa furtivité, ce qui lui avait fait défaut durant leur dernier accrochage.
    Le reste du temps il le passa à discuter avec Praxx et Nessa. Le félinide lui confia trois points qui le chagrinaient : le premier était de laisser sa planque d’Hyboros et notamment tout le matériel qu’elle contenait et Altaïr ne pouvait que lui donner raison. Il se rappelait les caisses d’armes, de munitions et notamment d’un robot de combat, un authentique automate Kastelan de la Legio Cybernetica. Praxx n’était jamais parvenu à le remettre en marche mais Altaïr savait que la magos Argentus devait bien connaitre les protocoles secrets d’activation d’une telle machine. Il était en effet d’accord sur l’idée de récupérer de tels trésors, en revanche le moment était plutôt mal choisi et Praxx craignait que les ennemis aient déjà mis la main sur ses stocks.
    Le second sujet qu’il évoqua, concerna la tablette xenos qu’il avait dérobé à Krieger. Il connaissait quelqu’un qui savait la déchiffrer mais aussi s’en servir et pour cause car c’était une aeldari. Le souci était qu’elle travaillait actuellement comme mercenaire – comme la plupart des xenos présents sur Onidès, pour le compte des hommes de Krieger. Mais Praxx la connaissait bien et avait bon espoir de la faire changer d’avis. Du moins, il comptait aussi sur Altaïr et l’ouverture d’esprit de son capitaine – lui dit-il en dévoilant toutes ses canines dans un semblant de sourire, précisant que ces aeldari ont toujours des goûts, vraiment des plus particuliers. Pourtant, selon lui, la tablette était la clé qui allait permette d’ouvrir les portails et si cela se faisait depuis Bremedia – encore allait-il falloir localiser un portail warp sur la planète – cela allait signifier qu’une armée de Chevaliers impériaux pourraient se téléporter au cœur des forces armées de Krieger. Cela impliquait évidemment aux libres-marchands de se rendre sur Bremedia et Praxx resta clair sur ce point, en tant que mutant, sur un tel monde féodal, il ne serait certainement pas le bienvenu.
    Enfin, le troisième et dernier point concernait Krieger et il lui confia que selon certaines rumeurs, le bonhomme aurait pu être un ancien Astartes renégat. Il ajouta que les légendes locales étaient très certainement exagérées, même si lui, était clairement prêt à y croire en ayant déjà vu le personnage qui devait frôler les deux mètres trente sans armure.
    Ce point n’était pas le plus rassurant et conforta Altaïr dans l’idée d’améliorer leur puissance de feu, mais il faisait confiance en la Brute sur ce sujet.
    Cela amena le sujet vers Nessa puisque cette dernière étant polyglotte, elle pourrait leur permettre d’entamer des négociations avec les maisons de Bremedia. Le souci était qu’Altaïr avait vite décelé un certain mal-être chez la gamine et n’en comprenait pas la raison, du moins au départ, mettant cela sur les circonstances liées à ce futur conflit. Pourtant, en creusant il comprit vite que ce n’était pas tant la bataille à venir qui la chagrinait que le simple nom de Goldberg qui lui faisait l’effet d’une bombe. Intrigué et curieux, le sénéchal creusa le point et comprit que la jeune fille ne disait pas toute la vérité et cherchait à dissimuler qui elle était véritablement. N'insistant pas, il finit par en toucher un mot à Uriah mais surtout à Jocasta et Antinoé qui sondèrent discrètement son esprit. Jocasta ne repéra rien de compromettant, sinon quelques troubles, ce qu’Antinoé confirma en ayant lu dans ses pensées. La petite cachait bel et bien son identité, étant visiblement la fille de Victus Callidon l’ancien gouverneur de Badab et de son épouse Luzillia. Altaïr se remémora que vingt ans auparavant, l’actualité avait fait grand bruit en effet dans tout le secteur. Le gouverneur Callidon, dont la lignée était en place depuis la fin de la Guerre de Badab, un siècle plus tôt, avait été victime d’un terrible coup d’état, fomenté par des nobles locaux. A la suite du renversement, un des nobles, le prince Enoch Lazarus Ishmael avait pris le pouvoir mais comme bien souvent lors de coups d’état, le pouvoir bien mal acquis ne dure jamais. Ishamel fut assassiné à son tour par ses propres mercenaires drukhari et à l’issue d’une purge menée par les autorités, l’Administratum reprit le contrôle en nommant plus tard l’actuel gouverneur, Dariel Jericus Acadia, toujours en place de nos jours. Ce point, Altaïr s’en rappelait bien puisque quelques années auparavant, après un accrochage avec des corvettes drukhari, lui et Isabella avaient eu à traiter avec Acadia sur Badab. Ils avaient pu entamer les réparations de leur navire et recruter en urgence des forçats afin de renforcer l’équipage. Accessoirement, il y avait aussi croisé Ephèse Solaris, une de ses ex, une brillante archéologue. Comme à son habitude avec ses anciennes conquêtes, ces histoires se finissaient souvent mal du fait de ses inévitables escroqueries. Et le fait d’avoir revendu des copies de reliques de saints n’avait clairement pas plu à sa belle, à l’époque.
    Quoi qu’il en soit, les informations relatives à ce coup d’état avaient été parcellaires et étouffées, comme c’est toujours le cas dans l’Imperium. Pourtant des informations confidentielles étaient parvenues à Isabella à l’époque, par le biais de ses connexions avec l’Inquisition. De manière officielle, l’Administratum présenta les évènements comme un simple coup d’état entre maisons rivales, ce qui n’est ni rare ni interdit dans l’Imperium. En revanche, l’usage de mercenaires drukhari par les forces séditieuses et perpétrant des massacres, fut totalement passé sous silence car étant le signe d’une grave hérésie. Il en fut de même pour la présence d’un inquisiteur renégat dont le nom était banni, d’une possédée dont l’existence était réfutée et de l’aide d’un libre-marchand déjà très compromis dans ce type de complot. Leurs noms ne figurèrent dans aucun rapport officiel en dehors de ceux des Ordos. Et Isabella fut mise évidemment dans la confidence puisque le Morning Star était le sujet central de toute cette affaire. A l’époque, elle n’était pas encore libre-marchande mais juste la fille de. Elle sauva cependant sa vie en aidant l’Inquisition à éliminer son propre père. C’était là, la condition préalable à l’étude de son potentiel affranchissement. Ce furent ces évènements qui scellèrent le destin d’Abdul Goldberg, exécuté sans la moindre pitié, peu après par cette assassin Callidus au service de l’Ordo Malleus.
    Sur Badab, lors du coup d’état, Ishmael avait fait exécuter le gouverneur Callidon sous les yeux de sa femme enceinte, Luzillia. Elle-même devait être offerte comme convenu aux drukhari, comme quelques milliers de captifs mais Goldberg parvint à la récupérer comme butin, elle et plusieurs nobles locaux, espérant en tirer un bon prix. L’histoire se perdit à l’époque car le destin de Luzillia Callidon ne fut jamais connu, du moins jusque-là car Altaïr venait de recoller un morceau de ce puzzle tragique. Selon les dires de Nessa, Luzillia et les autres captifs furent emmenés ici, sur Onidès et vendus comme esclaves, à la demande d’Abdul Goldberg, les condamnant à y périr puisque Romeus y lâcha ses charges virales pour une raison qui lui était propre. Sa mère mourut quelque temps plus tard, les poumons rongés par l’acide, le temps de mettre au monde sa fille. Nessa.
    Même Altaïr restait troublé par toute cette affaire d’autant plus que la petite semblait toujours inconsolable. Il se demanda s’il était justement dans leurs moyens de la faire un jour revenir sur le trône de Badab bien que Nessa semblait bien loin de ce genre d’envie. Il chercha bien à exposer les faits à sœur Alexia, la famulus de Ludivine et cette dernière lui garantit que tout était possible si sa lignée était confirmée, mais encore allait-il falloir transformer cette petite sauvageonne et son horrible chien en une parfaite princesse héritière. Selon elle et vu que la jeune fille dépassait déjà les dix-neuf ans, cela allait devoir prendre du temps. Ils exposèrent son cas lors d’un conseil du stratégium et il fut acté que pour le mieux de Nessa, elle resterait au sein de leurs équipes. Il serait alors préférable de la confier pour l’instant aux bons soins de Ludivine et de sœur Alexia. Uriah en pensait de même pour Praxx quant à son intégration au sein de l’équipage, mais dans son cas, et après discussion avec lui et Altaïr, Praxx allait travailler directement sous les ordres d’Uriah sous le titre opaque de Maitre espion.
    Lors d’un des conseils, Alexia aborda justement un autre sujet avec Altaïr, à savoir la préparation du mariage de Ludivine et Uriah, car selon elle, le sujet était déjà sur la table depuis un moment et il était grand temps de planifier les futures noces, regrettant, vue la région, de ne pas pouvoir réquisitionner une cathédrale et un cardinal pour l’occasion sur un monde digne de ce nom. Altaïr s’en tira avec habilité comme il savait le faire, en évoquant justement la possibilité, une fois Bremedia libérée, de profiter de la présence de six maisons légendaires – et non des moindres. Les nobles réunis seraient alors conviés à assister à un mariage grandiose ainsi qu’à la naissance d’une dynastie marchande au cœur même de leur grande cathédrale millénaire. Alexia, pourtant difficile à impressionner ou à faire sourire, faillit presque défaillir et embrasser Altaïr pour cette lumineuse idée, comme si elle venait de Saint Sebastian Thor en personne. L’idée était donc prise. Il ne restait plus qu’une simple formalité à régler : Unifier des maisons nobles en conflit, les convaincre de se lancer via un portail xenos et gagner une guerre face à des hordes du Chaos. En purgeant ce monde de l’hérésie, ce mariage n’en sera que plus beau, finit par conclure Alexia, sur son petit nuage.
    Cela la réconforta d’autant plus qu’elle avait pu assister sur Onidès, lors des enquêtes menées par Ludivine et son équipe à la découverte d’un ancien monastère de la Sororitas. L’endroit avait été vidé et pillé de longue date, pourtant, la statue colossale de Sainte Valeria la Céroféraire était toujours debout malgré les outrages subis et les graffiti impies qui la recouvraient. La famulus savait que ce lieu saint allait pouvoir être reconsacré et serait non seulement le renouveau d’un culte puissant mais aussi le lieu sanctifié d’un pèlerinage. La souillure qui maculait Onidès serait lavée comme la pluie lave les rues et la Sainte qui incarnait la lumière, serait le flambeau dont ce système impie avait tant besoin. Ils devaient juste en être les artisans. Et si un jour, par la grâce de l’Empereur, ils pouvaient remettre la main sur les reliques perdues dans cette région, ils recevraient non moins que le respect de la très puissante Adepta Sororitas en retour.
    Uriah n’était pas resté inactif non plus durant tous ses jours. L’histoire du mariage avait beau commencer à le stresser au plus haut point, il ne pouvait éviter les soirées avec Ludivine malgré le regard désapprobateur de sœur Alexia qui espérait toujours que sa jeune protégée demeurât encore vierge avant son mariage. Cela amusait intérieurement Uriah, même si Alexia lui faisait un peu peur parfois. Les manigances politiques et géniques intrusives des famulus l’agaçaient profondément. Mais selon Altaïr, c’était là, le prix à payer pour épouser toute une maison noble aussi prestigieuse. La fille était accessoire selon ce vieux brigand, mais la dote faramineuse et inespérée valait bien ce petit sacrifice. Comme aimait à le dire son sénéchal, Uriah incarnait l’ombre, autant que Ludivine incarnait la lumière. Les deux ne pouvaient donc que s’épouser à la perfection.
    Cela le ramena à des contingences plus terre-à-terre, tel que l’état de santé de la Brute et de sa jeune navigator. Ces deux-là avaient été les plus durement touchés et avaient frôlés la mort. Pour la Brute c’était un euphémisme, en réalité, les impacts de gros calibre qu’il reçut dans le torse aurait bien dû le tuer deux ou trois fois. Mais ce bon vieux colonel Lysander avait été taillé dans un bloc d’adamantium et rien ne semblait pouvoir le tuer. Pourtant, cette fois, les dégâts étaient sérieux mais une fois de plus, rien que le bloc medicae du Morning Star et son excellentissime chef chirurgien Benessis ne pouvaient réparer. Alors certes, il avait fallu lui remplacer le cœur, les poumons, quelques côtes et un peu de tuyauterie pendant une intervention qui dura plus de vingt-quatre heures mais finalement, il se réveilla presque d’une nuit normale. D’ailleurs Altaïr ne put s’empêcher de le comparer à un néophyte désormais paré à intégrer une escouade de scouts space marines. Benessis et la magos avaient fait un excellent travail sur lui, car son rythme cardiaque et sa puissance en étaient désormais accrus, ce qui lui conférait une mobilité bien plus grande. Il pouvait aussi se passer de masque respirateur et ne craignait plus les gaz ou toxines – du moins pour la plupart et pouvait même respirer en atmosphère raréfié. Enfin, la cerise sur le gâteau était une des armes récupérées dans le stock des hérétiques dans la mine. Il s’agissait d’un gantelet énergétique modèle Mezoa et Uriah l’avait fait apporter pour la Brute. L’arme parfaite pour son gabarit, taillée justement pour le corps à corps. La magos le lui ajusta en l’équipant de plots de connexions neuraux. Avec une telle arme, il pourrait éventrer un véhicule et en arracher le blindage s’il le fallait. C’était exactement le genre de jouet qu’il affectionnait dans toute sa panoplie.

    Uriah passa aussi du temps au chevet de Jocasta. On pouvait même dire qu’il avait une certaine affection pour elle. Mutante et mal aimée, pourtant son jeune âge et une certaine folie qui l’animait, faisaient qu’il se sentait parfois proche de ce genre de fille imprévisible et sombre, un peu à son image ténébreuse – du moins dans son tempérament ou pour ce brin de folie qu’il aimait montrer parfois. Il ne lui avait pas dit directement, même si la modestie était une qualité rare chez lui, mais il avait demandé au docteur Maxim Benessis, son chef chirurgien ainsi qu’à Argentus, sa magos de lui remplacer le bras qu’elle s’était faite presque arraché. A sa demande, ils lui avaient ainsi posé une prothèse augmentique d’une qualité tout simplement exceptionnelle. Fine et élégante, elle épousait la forme exacte de son bras d’origine, à la différence qu’elle était en poly-alliages. Son armature en titanium était recouverte de synthémuscles en polyflex à mémoire de forme bien plus efficaces que ses muscles biologiques. Même les sensations du toucher avaient été reproduites à l’identique à l’aide de nanocapteurs neuronaux. La magos avait même poussé la fantaisie à lui intégrer un pistolet radiant compact implanté. Le canon de l’arme pouvait ainsi jaillir de son poignet et tirer des salves laser à pleine puissance, au besoin. Enfin, idée de symboliser toute la prouesse technique du Mechanicus, la magos avait recouvert le bras d’un fin blindage en céramite, plaqué or et argent, aux ciselures tout simplement exquises, reprenant les armoiries entremêlées de la maison Jenassis. Cette fille avait été déchue de son titre et pourchassée par une maison rivale, mais n’en demeurait pas moins une authentique princesse de la noblesse navale. Uriah en avait fait sa protégée et il comptait bien lui accorder les faveurs dues à son rang. Surtout, il avait su retenir un conseil de sa tante et il savait qu’un libre-marchand associé à un navigator moribond et en guenilles allait tout bonnement refléter l’étendue de son statut social et la décadence de sa maison. En revanche, se présenter devant des dignitaires ou des officiels en compagnie d’une navigator qui incarnait l’opulence ne pourrait qu’impressionner ses pairs. La noblesse avait ses codes et l’étiquette tout comme le paraitre, en faisaient éminemment partie.
    Ce fut la raison pour laquelle il alla s’enquérir de la santé de ce nouveau navigator qu’il venait de sauver. Là aussi, il faisait pleinement confiance en Jocasta pour connaitre son avis sur ce nouveau curieux personnage. Selon elle, il s’appelait Ezra Mendoza et son apparence, comme sa voix étrange ne permettaient pas véritablement d’indiquer s’il s’agissait d’un homme ou d’une femme. Son physique était plutôt féminin même si les médecins le définissaient comme androgyne et lui-même se définissait comme « il ». En plus de son œil warp, ses yeux naturels étaient rouges et il voyait parfaitement dans l’obscurité. En dehors de cela, il avait une peau pâle et des cheveux noirs comme le vide.
    Les Mendoza constituaient une maison nomade qui avait l’habitude de travailler avec l’Ecclésiarchie, ce qui était plutôt étrange à bien y réfléchir. Mais cela n’était pas rare et d’après ce qu’en savait Jocasta, cette maison avait contribué à apporter la lumière de Terra dans des coins isolés de la galaxie. Quoi qu’il en soit, Ezra n’avait jamais travaillé pour eux mais s’était retrouvé depuis des années avec des pirates, comme ceux d’Arioch Drake, le fameux capitaine recherché de longue date pour continuer de harceler certains systèmes. Celui-là même qui avait ce lien avec la corvette disparue, le Princess Disillusion, dont avait parlé Mym, l’ancien navigator d’Isabella. Ezra avait travaillé pour Drake mais une mutinerie avait éclaté après certaines dissensions. Il avait été du mauvais côté et tandis que les mutins furent exécutés, lui et certains psykers de bord furent vendus aux hérétiques de Krieger lors d’un récent passage. Ce qui correspondait très certainement aux deux corvettes aperçues quelques jours auparavant qui s’étaient approchées de la lune. Uriah l’interrogea sur ces pirates justement. Selon Ezra ils avaient plutôt l’habitude de s’abriter dans le système éponyme de la région, le système Morgans’s Reach et bien qu’ils ne disposassent pas véritablement de base fixe, leur navire amiral, le Deathbringer d’Arioch Drake leur tenait lieu de base mobile. Uriah en profita pour évoquer le Princess Disillusion et selon Ezra, cette corvette n’avait jamais été retrouvée et se trouverait selon lui, très certainement dans le système Zatathetus là où se situaient d’anciens cimetière de vaisseaux, restes de conflits spatiaux de grande ampleur. Selon lui la zone avait été fouillé de longue date mais elle restait vaste et des navires s’étaient agrégés depuis, sans que l’on ne sache ni pourquoi ni comment. Ce qui en faisait une zone éminemment dangereuse.

    Ezra savait qu’il devait désormais la vie sauve à Uriah et à ses hommes et paraissait plus que reconnaissant d’accepter la proposition qu’il lui fit de travailler à son service. Ses talents allaient se compléter parfaitement avec ceux de Jocasta car il avait la capacité de détecter des objets warp sur une longue distance mais aussi de masquer toute signature warp du vaisseau aux yeux d’autres navigators. Ce qui n’était pas négligeable. De fait, il allait entrer au service de Jocasta, en tant que navigator subalterne et en paraissait très satisfait.

    Les jours qui suivirent permirent aux convalescents de se remettre de leurs blessures ou de maitriser leurs nouveaux implants. Uriah avait réuni ses équipes ainsi que Ludivine en vue des prochaines actions qui avaient été planifiées. Il avait été décidé que ce serait Ludivine et ses officiers qui allaient descendre en premier sur Bremedia, accompagnés de Nessa pour tenter une première approche auprès des six maisons. La tâche était d’une importance vitale et Ludivine en prit toute la mesure, se sentant digne d’une telle responsabilité. En même temps, cela la rassurait car, comme elle le fit remarquer avec humour à Uriah, au moins, elle et ses officiers n’allaient pas commencer à tuer des gens dès la première heure.
    Tandis qu’elle s’occuperait de la partie diplomatie, Uriah et son équipe, accompagnés de Praxx allaient redescendre sur Onidès, dans la région des ruines de Tartaros, au nord de la côte est. C’est là, selon le félinide qu’ils allaient trouver Naazarith, cette aeldari qu’il allait falloir rallier à leur cause. La zone est question, jonchée d’anciennes ruines, était abandonnée et plutôt traitresse car située en plein désert. Ils s’en rendirent compte assez vite. A peine posés, ils se déployèrent et inspectèrent les ruines alentours quand Jocasta leur signala un danger tout proche. Une dizaine de tarelliens, des mercenaires xenos reptiliens jaillirent des sables et leur tombèrent soudain dessus.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 16/12/2024 à 19:45 Citer ce message

    Praxx fut le plus prompt à réagir, identifiant tout de suite, derrière un muret, le chef des tarelliens. Il décida de contourner un bâtiment en ruine afin de le prendre par surprise. Altaïr, voyant un groupe de xenos leur foncer dessus, tenta de se mettre à couvert mais glissa sur un tas d’éboulis et dégringola à l’intérieur d’un bâtiment à demi effondré. En l’espace d’un instant, un groupe de Tarelliens était sur eux, poussant des sorte de cris roques et gutturaux, semblables à des aboiements mêlés de claquement de langues. Ils étaient musculeux avec un cuir écailleux épais, bien qu’étant un peu plus petit qu’un humain standard. Comme la plupart des sauriens, ils disposaient d’une longue queue et d’une gueule garnie de crocs. Ils portaient tous un assortiment d’armes disparates, impériales et xenos à la fois. Uriah cria au pilote de leur navette, qui était descendu aussi avec son arme à la main, de vite remonter à bord tandis qu’ils absorbaient la première charge. Des cultistes humains suivaient juste derrière, similaires à ceux déjà affrontés aux mines des Cyclades. Le combat fut brutal car Uriah et ses hommes n’eurent même pas le temps de s’y préparer. Le libre marchand et le Brute furent blessés par des coups de lames. Säde aussi même si elle parvint à vaporiser le torse d’un des xenos à l’aide de son pistolet Inferno. Kenway évita un tir et riposta mais ce fut la réaction de Jocasta qui évita qu’il fut pris à revers, lui, Praxx et Säde. Deux cultistes leur fonçaient dessus et elle les foudroya instantanément à l’aide de son œil warp. L’éclair rouge sang qui les frappa, embrasa leurs yeux et leur cerveau en même temps. Ils s’effondrèrent au sol, comme des sacs sans même avoir le temps de hurler. Malgré les cris de Säde, le pilote fut rattrapé tandis qu’il remontait la rampe arrière, tentant de la refermer derrière lui. Un des cultistes l’attrapa par le col, le tira en arrière sur le sol et lui fracassa le crâne à coups de masse en hurlant sa joie. Altaïr avait vu la scène lui aussi mais avait perdu du temps pour intervenir, il se redressa en grimaçant et ouvrit le feu en rafale à l’aide de son bolter, exterminant le cultiste qu’il démembra en plusieurs morceaux.
    Praxx était sur le chef tarellien et tentait de le planter de sa lame. Il avait un peu présumé de ses forces car le xenos en face de lui était un sacré gaillard, solidement armuré et un féroce combattant aussi. Il planta ses crocs dans le bras de Praxx, cherchant à le forcer à lâcher son épée. Säde se rua à sa rescousse, voyant le félinide en fâcheuse posture. Pendant ce temps, la Brute et Uriah combattaient un groupe d’ennemi, épaulés par Kenway et Altaïr. Ils parvinrent à faucher deux ou trois ennemis pourtant le situation ne tournaient pas encore à leur avantage. Uriah et la Brute étaient encore plus blessés, tout comme Praxx et même Säde s’était pris un tir sans trop de gravité, mais elle saignait beaucoup. Jocasta de son côté, était parvenue par miracle, à éviter les tirs et les coups et continuait de foudroyer tous les imprudents qui se tenaient dans sa ligne de vue. Pour cela, elle se déplaçait habilement, de manière à toujours avoir ses équipiers dans son dos ou sur les côtés. Deux Tarelliens tombèrent eux aussi, la face explosée tandis que leur crâne éclatait tel un fruit mûr sous la pression de la chaleur insoutenable des éclairs warp.
    C’est alors qu’un grondement sourd et un fracas de métal torturé se répercuta alentours. Une énorme masse venait d’apparaitre sur une des ailes de la navette Aquila qui bascula sur le côté, à cause du poids. Une machine infernale de la taille d’un dreadnought était en train de monter sur l’Aquila. Faite de métal, elle avait l’apparence d’une sorte de prédateur, ramassé sur lui-même et dont les pattes au nombre de six, étaient garnies de griffes et de lames aussi longues qu’un homme adulte. Sa tête bestiale, bien que machine, était clairement animée d’une pulsion maligne, hurlant un son subsonique qui ébranla tout le monde. A ses côtés, trois individus gravissaient aussi la navette. Des hereteks, à en juger par leur tenue et leurs implants.
    La Brute se mit aussitôt à ouvrir le feu de son pistolet bolter tout en hurlant et mitraillant. Uriah allait pointer aussi son arme mais une hideuse créature jaillit du ravin qui se trouvait en contrebas, lui sauta dessus. Il s’agissait d’un solide xenos reptilien lui-aussi mais différent des Tarelliens. Il était quadrupède alors qu’ils étaient bipèdes et son cuir était plus foncé aussi. Il était armé d’une sorte d’arme automatique monté en baudrier et il empestait le lait caillé et la menthe. Il se rua sur lui avec son haleine qui empestait et lui planta un coup de griffes. Uriah recula de plusieurs pas tandis que l’abomination se jetait sur lui en faisant tirer son arme automatique dont la rafale le manqua de peu. Il avait pris le temps de se saisir du fusil drukhari qu’il avait emmené et portait dans le dos. Il ne maitrisait pas bien une telle arme mais se dit qu’en se dégageant, il espérait lui tirer dessus à bout portant.
    Plus loin, sur sa droite, Säde venait d’abattre le chef des Tarelliens, d’un tir qui lui vaporisa son horrible tête de reptile. Praxx et elle étaient sérieusement blessés et n’avaient pas grand-chose à opposer à une telle machine infernale. Säde venait de vider son pistolet Inferno et se saisit de son bolter.
    Kenway et Altaïr se mirent à tirer sur la machine qui sauta vers eux, faisant trembler le sol. Leurs bolts ne firent aucun dégâts sur l’épais blindage, laissant juste des marques noircies à chaque impact. Uriah venait tout juste de se débarrasser du gros lézard qui lui collait le train en le criblant de microcristaux toxiques à l’aide de son fusil éclateur. Le corps de la bête bascula dans la ravin et c’est là qu’il la vit. A quarante mètres de là, sur l’autre versant de la falaise, au-delà du ravin juste après les ruines. D’abord un tir qui percuta la machine infernale dans un flash de lumière et qui l’ébranla. La machine se mit à pousser une sorte de hurlement strident au moment où ses lames allaient tailler en pièce Altaïr et Kenway, les manquant alors de peu. Jocasta en profita pour contourner la navette par la gauche, prenant ainsi les hereteks sur le côté. Avant qu’ils n’aient eu le temps d’intervenir, elle était à portée et les foudroya eux aussi, grillant les cortex des deux premiers et faisant basculer le troisième, celui qui était le plus modifié des trois. Elle devait encore s’en approcher pour le finir mais il n’était pas mort. La machine se redressa et s’apprêta à charger de nouveau mais le même tir d’énergie la percuta de nouveau en même temps que les bolts de Säde. La brèche béante ouverte dans la créature infernale venait d’être fatale. Des fluides noirs et des éclairs rouges s’en échappaient en même temps qu’une fumée grasse emplie de formes terribles. La Brute continuait de tirer en hurlant et se fut Kenway qui finit par lui sauter dessus qui parvint à l’assommer à coup de crosse. Le monstre de métal s’embrasa et explosa d’un coup, projetant tout le monde au sol dans des gerbes de débris et de flammes.

    Kenway et Jocasta se relevèrent des débris, de la poussière et des flammes alentours. Ils s’en sortaient sans trop d’égratignures. Uriah, Säde et Praxx étaient blessés mais sans trop de gravité. La Brute et Altaïr avaient été plus sévèrement touchés et ne bougeaient plus.
    Au centre de l’explosion se tenait un démon, reconnaissable à son cuir rouge sang et à ses longues cornes. Il affichait une rage bestiale. Cherchant une cible, il se rua vers le plus proche d’entre eux, Kenway.
    Une lame noire comme la nuit jaillit dans sa main et il s’apprêta à frapper au moment où un tir le frappa et un trou d’une dizaine de centimètre de diamètre se creusa dans son torse. Il tituba dans sa lancée, reculant d’un bon mètre. Un sang rouge écarlate jaillit à gros bouillons, presque de manière démesurée. L’arme à antimatière lui désintégra tout ce qu’avait pu contenir sa cage thoracique, laissant un vide à la place. Le coup qui aurait dû être mortel causa un hurlement au démon. Il se retourna au moment où la femme aeldari propulsa sa seconde arme. Elle courrait et sauta les huit derniers mètres de la falaise, d’un seule bond, tout en propulsant une sorte de longue lance à double lames dentelées, tel un harpon et tranchante comme un rasoir. D’une pirouette, elle atterrit en souplesse sur le bord, de leur côté, au moment où la lance embrocha le démon en plein abdomen, le reculant d’un bon mètre. Il se vida de nouveau de plusieurs litres de sang et de ses viscères putrides avant de s’embraser en couinant comme un grox qu’on égorge. Là aussi, le choc warp les fit tous reculer à leur tour. L’aeldari laissa passer quelques secondes puis vint ramasser son empaleur, tout en rengainant son pistolet. Elle salua Praxx d’un petit signe de tête.
    C’était une créature étrange pour ceux qui n’avaient jamais croisé de drukhari de leur vie. Car c’en était une. Grande et élancé, elle portait ces tenues de combat légère de ces gladiatrices adeptes du corps à corps, en cuir xenos.
    Praxx leur présenta Naazarith et lui désigna Uriah en retour.
    -Nous en parlerons plus tard, mais ne restons pas là, leur dit-elle dans un parfait bas Gothique avec un accent étrange, comme un écho sorti tout droit d’une crypte. Ils vont en envoyer beaucoup d’autres, ils savent que nous sommes là.
    Uriah distribua quelques ordres rapides, le temps que les blessés soient évacués vers la navette, comme le corps du malheureux pilote. Ils prirent le temps de ramasser trois pistolets xenos au sol et Kenway alla aux commandes de l’appareil qui avait pas mal souffert de l’attaque mais pouvait encore tout juste voler. En quelques instants, ils étaient à bord et la navette décolla tandis qu’une myriade d’engins motorisés était déjà en approche.

    Les deux jours suivants passés à bord furent des plus perturbants et à bien des égards. On pouvait dire que l’arrivée d’une drukhari ne laissa personne indifférent et déchaina même certains débats des plus houleux. Cela souleva bien des interrogations et Uriah eut la soudaine nécessité de vérifier si Cole Kane, le frère de Merelda était bien toujours à bord...
    Ces deux évènements, l’arrivée d’une sulfureuse drukhari et la présence effacée du mystérieux et ténébreux Cole, vinrent se télescoper soudain, sans même que les deux n’aient eu besoin de se croiser une seule fois ni même sans que cela ait eu le moindre rapport. Pourtant leur présence sur ces quelques jours qui suivirent, déclencha une série d’évènements qui allait devoir semer un profond malaise à bord du Morning Star…
    Tout d’abord, Naazarith fut celle par qui les problèmes commencèrent. Elle ne se montra aucunement hostile avec eux, juste curieuse et ostensiblement amusée de déceler leur malaise en sa présence. Certes, tous les Aeldari restent une race hautaine, décadente et à la limite du supportable pour le moindre humain, mais force était de constater qu’ils avaient besoin d’elle.
    Pour la majorité d’entre eux, c’était la première fois qu’ils voyaient un tel spécimen de si près. Elle était grande - un bon mètre quatre-vingts, athlétique, sculpturale même. Ils l’avaient vu bondir, tel un félide, puis sauter au-dessus d’un ravin en un éclair. Le tout, sans effort apparent.
    Déjà, elle ne se déplaçait pas tout à fait comme une humaine. Mais plutôt comme le ferait une panthère. Sollicitant chaque muscle et économisant l’art du déplacement. Elle observait, restait attentive à son environnement et donnait cette impression de savoir en permanence où se trouvait chaque individu. Elle entendait et voyait mieux qu’eux tous. Notamment dans l’obscurité la plus totale. Ses réflexes étaient foudroyants aussi. Ses gestes pouvant être aussi gracieux que ceux d’une artiste, que fulgurant comme l’était l’attaque d’un scorpion, même pour des gestes simples.
    Elle parlait couramment le bas Gothique même si elle possédait un accent impossible à reproduire. Une sorte d’écho dans sa voix suave et grave en même temps. Même si sa voix était féminine, elle ne ressemblait à aucune voix féminine. C’était assez perturbant de l’écouter et même la regarder était juste troublant. Elle paraissait jeune et pourtant ceux qui connaissaient un peu les drukhari savaient que certains d’entre eux pouvaient être âgés en siècles ou en millénaires. Ces yeux trahissaient des connaissances plus anciennes qu’aucun humain ne pourrait jamais connaître. Ce charme aussi exotique que vénéneux ne laissa personne indifférent alors qu’elle les observait avec une certaine attention et un petit sourire aux lèvres, comme un félide regarderait une souris.

    Altaïr, une fois remis de ses blessures face aux entités démoniaques, ne cachait pas son intérêt croissant pour cette xenos aussi intrigante que toxique. Il en avait déjà affronté par le passé, mais toujours à distance, mais là, il se trouvait un peu comme ces savants fascinés par leur découverte. Très vite, il fut la mouche qui se piégea toute seule dans la toile, conscient de jouer là, un jeu dangereux. En tant que Grand Intendant à bord, il se chargea lui-même, devant l’inconfort de ses équipes, de l’installer dans une aile isolée du navire, lui réservant une vaste cabine qu’elle aurait tout le loisir d’aménager à son goût. Ce qui était son intention. Il passa du temps avec elle, lui amenant des affaires, du mobilier et des livres et il devint évident que son intérêt malsain pour elle dépassait très clairement l’étude scientifique. Au fil des jours, il devenait parfois difficile pour lui, de cacher les traces qu’elle laissait sur lui, comme les marques de son nouveau territoire.

    Jocasta n’en avait jamais vu de près pour sa part, mais avec son habitude de voir les horreurs du warp, la xenos ne lui parut pas si dangereuse, du moins en apparence. Jusqu’au moment où cette dernière croisa Jocasta dans une coursive. Elle lui dit alors avec un léger sourire rêveur qu’elle était une « délicate abomination tout bonnement délicieuse à regarder et qu’elle adorerait un jour la disséquer dans son sommeil ». Finalement cela horrifia la jeune navigator qui préféra ne même plus vraiment lui parler.
    Uriah, de son côté avait été tout bonnement impressionné par les prouesses martiale de la drukhari et à la fois, intrigué bien que méfiant. Il n’ignorait pas la dangerosité d’une telle créature mais restait fasciné d’en voir une en vrai, de si près, surtout sur son propre vaisseau. De plus, cette situation n’était pas pour lui déplaire en réalité. Les xenos incarnaient un sombre interdit dans l’Imperium et il se plaisait à évoluer justement sur cette frontière, surtout qu’il appréciait de jouer en dehors des limites de l’Imperium.
    La Brute, lui, en avait déjà combattu sur Kritias il y avait une bonne dizaine d’années et avait bien failli en mourir à l’époque. D’ailleurs, Altaïr, Djoko et Isa étaient là aussi. Il avait d’ailleurs passé plusieurs mois dans le coma et selon les medics de l’époque, il ne devait pas survivre. Mais c’était mal connaitre ce bon vieux Lysander qui n’en finissait pas de revenir d’entre les morts.
    Il restait des plus attentifs à ce genre de créatures qu’étaient les fourbes drukhari. Non pas qu’ils l’impressionnaient mais il gardait de fâcheux souvenirs de ces combattants qui l’avaient mis au tapis avec beaucoup trop de facilité. Et forcément cela laissa une trace en lui. Pour l’heure, il préféra considérer la xenos comme une alliée de circonstance avec laquelle ils allaient devoir négocier. Il resta malgré tout attentif et se préparait, à la moindre incartade à lui coller un bolt en pleine tête, ce qu’elle identifia rapidement comme une menace non voilée. Il se heurta d’ailleurs vivement à l’avis d’Uriah et d’Altaïr, un soir dans le strategium, indiquant clairement qu’il poserait son veto si elle devait rester au sein de l'équipage.
    -Je lui ai justement proposé de rester et elle a accepté, lâcha Altaïr tout en se servant un verre d’amasec.
    -Tu as quoi ? Fulmina la Brute.
    -Nous dit pas que tu as recruté cette xenos à bord ! S’étonna Uriah, à son tour.
    -Elle va travailler avec nous et je trouve que c’est un formidable sujet d’étude pour…
    -Nan, mais juste sur cette mission, pas au-delà !
    -Naazarith dispose de certains avantages qui…
    -Elle reste uniquement le temps pour nous de régler la situation avec ces histoires de portails entre Bremedia et Onidès, tonna la Brute. Ensuite, elle dégage ! Ce genre de mercenaire, on traite avec eux dans un bar, ou dans les bas-fonds mais pas sur le pont d'un vaisseau libre marchand, surtout comme le nôtre. Donc après cette mission, elle partira et ce sera non négociable.
    Il savait qu’Helleth, la missionnaire ne pouvait lui donner tort. En revanche, Altaïr n’était pas de son avis et Uriah restait convaincu que Praxx était tout aussi convaincu qu’elle détenait la solution.
    -Pour l'instant on n’a pas le choix, elle doit pouvoir nous aider, du moins pour reconquérir Onidès, répondit Uriah. Et surtout, elle pourrait bien détenir des informations qui ne nous sautent pas aux yeux. Après, la Brute a raison, il va falloir que j'ai une discussion avec Praxx. Il avait parlé d'une Aeldari, non d’une Drukhari.

    Dans la nuit, Uriah se réveilla soudain, en nage et préoccupé. Ludivine dormait paisiblement à ses côtés et il chercha à ne pas la réveiller. Hier soir, il l’avait faite venir à bord afin qu’ils discutent ensemble des derniers détails diplomatiques à tenir quand elle est ses officiers se rendraient demain sur Bremedia.
    Elle était venue pour lui parler aussi de Nessa, puisqu’elle devait justement les accompagner, mais aussi des différentes informations relevées sur Bremedia. Six forteresses avaient ainsi pu être identifiées, correspondant très certainement aux six maisons, pourtant une septième avait été repéré, elle aussi. Le château situé sur l’île centrale de Highfire. Ce fut à ce moment qu’ils en oublièrent leur conversation. L’Ile de Highfire venait d’éveiller tout autre chose en eux que l’envie de sujets politiques. D’ailleurs, il n’y eu même pas de conversation tout court.
    Malgré ces moments des plus plaisants avec Ludivine, il lui arrivait encore la nuit de faire des cauchemars qui finissaient en bain de sang, mais c’était moins fréquent ces temps-ci. Pourtant, la même obsession revenait et le sang finissait par couler sans qu’il ne sache vraiment par qui, ce qui accentuait sa paranoïa croissante ces derniers temps.
    Il se glissa hors des draps et sortit de la chambre tout en vérifiant ses bandages qui couvraient ses récentes blessures. Les cicatrices commençaient à tirer mais c’était bon signe. Il vérifia que son pistolet à plasma était bien à portée de main, posé à côté de ce nouveau pistolet à impulsion t’au. Myst, son singe mimétique, lui sauta alors sur l’épaule en dévoilant ses petites canines. Uriah referma la porte derrière lui et alla dans le salon, piocher dans une grappe de chanalain tout en gratouillant la tête de son petit familier.
    -Oui, tu as faim, toi aussi, sale petit chapardeur.
    Il observa le petit singe qui sauta sur la table, ayant pris l’apparence de la drukhari, tentant de reproduire sa démarche. C’était toujours extrêmement perturbant de le voir prendre la forme d’un membre de l’équipage comme la Brute ou Jocasta, ça l’était encore plus de le voir se changer en xenos. Cela surprenait la première fois, même si Uriah finissait tout doucement par s’y habituer.
    -Non, ce n’est pas elle qui me préoccupe le plus en ce moment, même si je me serai bien passé de sa présence si tu veux savoir.
    Il lui lança un grain de chanalain que le petit singe attrapa habilement au vol avant de croquer dedans, puis il activa l’unité vox de sa cabine et sélectionna le numéro de Praxx, son nouveau maitre espion.
    -Désolé de vous réveiller, Maitre Praxx. Une histoire me turlupine. J’aimerai que vous vous assuriez que les Kane sont toujours à bord. Je n’arrive pas à en dormir la nuit, c’est pour dire.
    -Qui ça ? Marmonna le félinide qui, lui donnait l’impression d’être réellement tiré d’un sommeil profond.
    -Merelda et Cole Kane. Le frère et la sœur du gouverneur Kane de Tartuga II, ceux que nous avons en tant que… Qu’invités… vous voyez ?
    -Ah oui… Très bien. C’est que… Merelda est sur le Daughter of Tempest, cela ne sera pas simple de…
    -Je me charge de vous faire accorder un sauf-conduit, ce ne sera pas un problème.
    Uriah baissa alors le ton de sa voix.
    -Mais je préfère que la capitaine Frae Spinaiser n’en sache rien pour l’instant.
    -En vérité, capitaine… Je pense que c’est ma présence qui risque de poser problème. L’équipage du Daughter of Tempest est moins conciliant envers les mutants que celui du Morning Star.
    Uriah se remémora alors que Praxx, comme nombre d’abhumains, pouvaient parfois effrayer l’équipage. Et ça, c’était dans le meilleur des cas. Le pire étant ceux qui espéraient l’attraper dans une coursive déserte pour lui faire la peau.
    -Par le warp, en effet… Je chargerai Säde de s’en occuper dans ce cas. Concentrez-vous déjà sur Cole, je veux savoir s’il est toujours là et ce qu’il fait.
    -Votre premier officier a déjà des hommes à lui qui se chargent de sa sécurité, c’est bien cela ?
    -Oui, mais comme notre sénéchal, le colonel Lysander sort à peine du bloc medicae et ne peut tout gérer en ce moment. Je compte donc sur votre discrétion et surtout sur votre regard neuf sur cette affaire. Des détails ont dû nous échapper et je n’ai aucune confiance en ces Kane.
    -Entendu. Je vous fais un rapport à la première heure.

    Dans la matinée, la confusion était parvenue à son comble.
    La Brute venait de recevoir un rapport de ses boscos, lui indiquant qu’un cadavre venait d’être retrouvé dans la cabine de Cole Kane et que lui-même avait disparu. Jocasta, dans la même heure, confirma être allé dans cette même cabine et n’avoir trouvé aucun corps. Après s’être renseigné auprès du bloc medicae, là aussi aucun corps ne semblait non plus s’y trouver. Altaïr venait tout juste d’être informé, il chercha à contacter Säde pour finalement apprendre qu’elle était déjà à bord du Daughter of Tempest, sans qu’il n’en ait été prévenu, apparemment à la demande d’Uriah dans la nuit.
    La Brute les réunit alors dans le strategium à la première heure et ordonna à des boscos d’aller chercher le capitaine et de trouver ce satané félinide.
    -C’est quoi cette histoire de cadavre dans un placard ? S’impatienta la Brute. Comment Praxx a eu cette information ?
    -Il semblerait que le capitaine lui a demandé d’aller voir Cole Kane, commença Jocasta.
    -Pour quelle foutue raison ?
    -Voir s’il était toujours là ? Je ne sais pas…
    -J’ai fait poster deux gardes devant sa cabine, jour et nuit, pourquoi et comment serait-il ailleurs que dans sa cabine ?
    Jocasta leva les mains devant elle.
    -Demandez au capitaine, je n’en sais rien, moi.
    -Et donc ce cadavre serait celui d’un garde si j’ai bien compris ? Reprit Altaïr.
    -D’après les rapports, je n’ai aucun garde manquant à l’appel. Même si j’attends encore quelques confirmations. Et ce corps il est où, justement ?
    -Il n’y a pas de corps, reprit Jocasta. J’ai demandé à Abigael de vérifier auprès de la baie medicae et de la morgue, il n’y a rien.
    -Trône, mais qui c’est Abigael ?
    -Abigael Dolorosa, l’archiviste et maitre bibliothécaire qui est à mon service… Vous vous rappelez ?
    La Brute effectua un geste de la main, comme pour éluder la question.
    -C’est une histoire de fous, je n’y comprends plus rien ! Praxx a trouvé un corps, il est passé où ?
    -Aucune idée, mais en arrivant dans la cabine après lui, je n’ai rien trouvé.
    -Et les gardes, ils ont vu quoi ?
    -Rien. Juste Praxx puis moi. Mais aucun corps qui n’a disparu.
    La Brute se passa la main sur le front en soufflant.
    -Säde n’a même pas été envoyé sur cette affaire ? C’est le travail du Maitre des murmures, après tout.
    -Apparemment le capitaine s’en serait chargé. Il l’a envoyé surveiller Merelda sur le Daughter, compléta Altaïr.
    -Suis cette affaire de près, la Science, si tu veux mon avis. Et Praxx ? Où est passé ce satané mutant de malheur, on doit l’interroger !
    La porte s’ouvrit et Uriah entra en trombe à ce moment dans le strategium, terminant d’aboutonner sa chemise.
    -C’est moi qui ai demandé à Praxx de rechercher Cole. Il n’est plus dans sa cabine, du coup Praxx est à bord en train de fouiller partout pour le retrouver. J'ai aussi envoyé Säde enquêter sur Merelda avec l'accord de Ludivine tôt ce matin et là, j’apprends que Cole a disparu depuis plus de vingt-quatre heures. Mais bordel de Trône, il ne nous manquerait pas une navette, non ?
    -Non, les navettes sont toutes là, confirma la Brute. Sauf celles qui font les allers-retours entre le Morning Star et le Daughter of Tempest. Mais aucune ne manque, j’ai fait vérifier.
    -Et Merelda est bien à bord du Daughter of Tempest, c’est sûr ? Demanda Altaïr.
    -Oui, Säde et Ludivine me l’ont confirmé à l’instant. Säde va se charger de la surveiller justement. Donc si je résume, reprit Uriah. Praxx a fouillé la cabine de Cole, il a trouvé un cadavre et ensuite le cadavre a disparu tout comme Cole. Donc, vous me mettez tout le monde en alerte, on a un intru à bord qui risque de nous fausser compagnie.
    -J’ai déjà déclenché l’alerte auprès des boscos. Ils sont sur le coup, ajouta la Brute. J’attends juste qu’ils me remontent leurs rapports. Les hangars à navettes sont déjà sous surveillance.
    -Suis ça de très près. On a un invité surprise et je déteste ça.
    Il fit un signe à Jocasta, lui demandant de bien vouloir disposer. Ce qu’elle fit en effectuant un petit signe de tête.
    Il attrapa la Brute et l’entraina un peu à part dans le strategium. Juste devant la grande baie qui donnait sur l’orbe ocre qu’était Bremedia, plus loin en contrebas.
    -Tu as une sale tête. Tu te remets de ce dernier accrochage à Tartaros ? Que disent les medics ?
    -Les blessures ne sont pas si graves mais j’ai encore quelques troubles oculaires, par moment.
    -Des hallucinations, tu veux dire ? Tu as vérifié si tu n’avais rien ? Les entités warp sont de véritables saloperies et…
    -Oui, je vois Helleth en ce moment. Elle m’aide à tenir le coup. Ça ira.
    -D’accord… J’irais lui parler. En attendant, ne lâche pas les boscos, je veux qu’ils me trouvent Kane, compris ?
    La Brute hocha la tête, le salua et quitta la pièce lui aussi.
    Uriah vint alors trouver Altaïr, déjà occupé à se servir un amasec de si bonne heure. C’est lui qui avait été le plus blessé lors de l’accrochage de Tartaros, pris dans l’onde de choc de l’explosion. Lui aussi affichait une sale mine et sa lèvre coupée et ses pupilles dilatées n’étaient pas dans cet état hier soir. Uriah suspectait que son sénéchal ait quelque peu tenté de jouer à un jeu malsain avec cette drukhari. Il en savait Altaïr parfaitement capable. Il aborda habilement un tout autre sujet pour détourner l’attention.
    -On a des nouvelles de Djoko, en ce moment ? Cela fait un moment que je ne l’ai croisé sur la passerelle.
    -La Brute lui a donné quelques jours avec Bonnett. Ils viennent juste d’avoir leur fille, tu sais et…
    -Malheur, c’est vrai ! Avec tous ces évènements nous n’avons même pas pu célébrer cela. Je n’ai même pas eu le temps de passer voir Alisabeth et la petite pour la féliciter. Djoko, comment il va ?
    -Tu connais Djoko… ça le chamboule un peu. Comme cette histoire de mariage entre toi et…
    -Oui, bin c’est clairement pas le moment, là. Regarde déjà pour trouver un moment pour Bonnett, il faudrait qu’on marque le coup…
    -Je m’en occupe, mais c’était un peu chargé ces derniers jours entre les medics et devoir installer cette xenos à bord…
    -A d’autres… Tiens, justement, as-tu obtenu des informations de la part de ton invitée ou bien t'es-tu juste distrait un peu trop avec elle, vieux brigand ? Dit-il en lui désignant sa lèvre fendue.
    Altaïr prit son habituel air faussement outré de coupable innocent.
    -Je me suis coupé en me rasant, c’est tout.
    -En te rasant ? Tu portes une barbe, je te signales.
    -Désolé capitaine, mais je ne vois absolument pas de quoi vous parlez…. Mais non… Elle n’a pas d'information supplémentaire.
    Il prit une gorgée d’amasec et grimaça à cause de sa lèvre meurtrie. Uriah leva les yeux au plafond.
    -Crois-tu qu’elle serait capable de retrouver la trace de ce Cole ? J’ai cru comprendre que les drukhari savent traquer des proies, elle pourrait donc s’avérer utile, tu ne crois pas ?
    -Eh bien, si tu tiens vraiment à passer la voir…
    -Pose-moi ce verre, et allons-y.

    Lorsqu’ils entrèrent dans sa cabine, elle est installée nonchalamment sur un canapé, occupée à lire un livre d’histoire qu’Altaïr lui avait apporté. Une bouteille de vin hors de prix, vide se trouvait posée à côté sur un élégant petit guéridon et de l’encens brulait dans un servo-crâne élégamment vandalisé et reconverti en cendrier. Il flottait dans la pièce et sa lentille optique lui avait été arraché, le rendant aveugle. Un mélange musqué, cuivré et sucré flottait dans l’air. Comme du sucre fondu mêlé à du sang et de l’obscura. Une odeur typique de femelle drukhari.
    -Je vous en prie, entrez… Dit-elle, sans détacher ses yeux du livre dont elle feuilletait les pages de ses doigts aux ongles peints en noir et effilés tels des rasoirs.
    Uriah vint s’assoir sur un des sofas en face d’elle, observant le mobilier et la touche de décoration qui venait d’y être apporté. Le tout était assez élégant quoique morbide. Des fioles de couleurs inquiétantes étaient alignées sur des étagères au côté de bocaux contenant des fœtus impossible à identifier et autres horreurs. Des lames et des crânes complétaient une décoration sombre et macabre et il n’eut aucune peine à y reconnaitre certains effets très personnels de son sénéchal, à côté de fouets, des menottes et autres instruments qu’il préférait ne même pas tenter d’identifier. Uriah reporta son regard vers la xenos, cherchant à éluder le fait qu’elle était bien trop peu vêtue à son goût. Ce genre de créature était troublante mais ne l’attirait absolument pas, à l’inverse de son dépravé de sénéchal.
    -Naazarith, j'aurais besoin de savoir si vous pourriez solutionner un problème, pour moi ?
    D’un geste désinvolte, elle balança le bouquin dans la pièce. Sur la console, à côté de la bouteille de vin, elle saisit, d’un air désabusé, un petit plateau en argent et aspira une longue trainée de poudre qui y était répandue. Elle releva son regard vers lui tandis que ses yeux se mirent à prendre une teinte d’un vert translucide légèrement luminescent.
    -On s’ennuie à mourir sur votre horrible vaisseau… Votre nourriture est infecte et ce livre était pathétique de toute façon, comme tous les autres. Son auteur, ce Saul Wormius, supposé être un de vos grands historiens aurait dû être exécuté…
    Elle fixa son regard de serpent sur lui.
    -Résoudre quel problème, mon cher capitaine ? Quelqu’un à écorcher vif ?
    -Non… Je, j'ai une personne qui s'est… Comment dire ?... Egarée sur mon vaisseau. Pourriez-vous m'aidez à lui remettre la mains dessus ?
    -Vraiment ? Traquer et chasser une proie… J’aime bien l’idée. Dites m’en plus. C’est quoi cette personne ?
    -Un certain Cole Kane. Le fils d’un noble que l'on a récupéré sur une autre planète et qui pourrait avoir pris la place d'un de mes gardes avec son uniforme.
    -Vous comptiez en faire quoi de ce rejeton ?
    -C’est une longue histoire… Disons que son père nous a demandé de le prendre avec nous comme… Emissaire de sa famille.
    -Un émissaire d’une famille noble, donc ? Un humain ?
    -Oui. Enfin, nous le supposons.
    Elle lança un regard amusé à Uriah et eut un petit rire sardonique.
    -Que signifie ce regard ? Vous en savez plus que nous sur ce sujet ?
    -Sur nombre de sujets, oui. C’est même une certitude.
    -Revenons juste à notre sujet.
    -Je m’amusais juste du fait que vous ne saviez pas si c’est un humain ou non. Pourtant… Votre race est si... Primaire et prévisible.
    -Je préfère me méfier des apparences, voyez-vous.
    -Savoir se méfier de ses pairs est toujours prudent. Vous le retenez donc captif… Pour quelle raison ?
    -Pour des raisons de sécurité.
    -Pourquoi ?
    -On pense qu’il est dangereux, ajouta Altaïr. De simples soupçons.
    -Vraiment ?
    -Nous sommes certains qu’il est dangereux, compléta Uriah.
    Elle se leva d’un bond et se trouva devant lui en une fraction de seconde. Lui susurrant à l’oreille.
    -Vous avez capturé la bête et elle s’est échappée de sa cage… A moins que vous ne soyez la proie désormais ? Personne ne s’égare sur un vaisseau. Il se cache de votre regard… capitaine.
    Uriah resta un instant troublé par la fragrance du parfum qui se dégageait d’elle. Un mélange piquant et acidulé de pétales de lacrymata et celui doux-amer de rose de Zamarkand, deux poisons extrêmement mortels une fois combinés. Elle se redressa tout en restant campée devant lui avec un air amusé.
    -Vous auriez un Ur-ghul avec vous ? C’est tellement pratique pour traquer sa proie.
    Uriah lui lança un regard étonné.
    -Non, je… Nous ne possédons pas de… Gurghul…
    Elle entreprit de fouiller parmi ses fioles alignées sur ses étagères.
    -Et ce noble que vous recherchez, que chercherait-il à faire à bord, selon vous ?
    -Il aurait laissé, dans sa cabine, un garde complètement desséché. Qui aurait fini lui-même par disparaître.
    -Vraiment ? Cette histoire n’est pas très claire, mais au moins, elle va me distraire… Montrez-moi donc sa cabine.

    Le trajet parmi les coursives ne manqua pas de passer inaperçu. Chaque membre d’équipage croisé, resta totalement interloqué de voir leur seigneur capitaine et le sénéchal en compagnie d’une xenos. La nouvelle se répandit telle une trainée de poudre. Pourtant, Uriah avait bien d’autres félides à fouetter en cette heure matinale. Ils se présentèrent devant les deux boscos postés devant la porte de la cabine en question. Eux aussi avaient du mal à en croire leurs yeux mais Uriah claqua des doigts, les forçant à rester concentrés.
    -Cole Kane est-il à l'intérieur ?
    -Non la cabine est vide, Seigneur.
    -Très bien, qui est venu depuis le passage du Félinide ?
    -La… navigator primaris, Seigneur.
    -D'accord, ouvrez la porte.
    Les gardes les laissèrent entrer puis restèrent dans le couloir.
    Ils entreprirent de fouiller toute la cabine, placard compris mais ne trouvèrent rien de plus.
    Uriah se tourna vers Naazarith.
    -Une impression, un indice ?
    Elle haussa les épaules.
    -Personne n’a été tué dans cette chambre. On peut le sentir tout de suite.
    -Bien d’accord… Autre chose ?
    -Votre invité a trouvé une astuce très habile afin de vous fausser compagnie.
    -Laquelle ? Ce cadavre qui a disparu ?
    -Voyons… C’était lui le cadavre, il s’est joué de vous et son tour à fonctionné. Vous aviez vérifié si c’est un, comment vous dites ? Un psyker ?
    -Oui et ce n’est pas le cas, à moins qu’il soit suffisamment puissant pour dissimuler sa présence à mon astropathe et ma navigator.
    Elle eut une petite moue dubitative à ce sujet.
    -Vous savez, parfois on attire des créatures bien plus puissantes que soit, dit-elle tout en lançant un regard plein de sous-entendus vers Altaïr.
    -Et donc vous sauriez le traquer et le retrouver ? Lui demanda Uriah sans avoir perçu l’échange entre les deux.
    -Très certainement. Mais je veux quelque chose en échange.
    -Que souhaiteriez-vous ? Si cela me semble acceptable, je pourrais certainement vous l'accorder.
    -Je veux assister à des combats entre gladiateurs. Vos hommes et femmes d’équipage. Régulièrement. Il n’est pas absolument nécessaire qu’ils s’entretuent, je ne compte pas dépeupler votre vaisseau. Juste qu’ils se combattent. J’ai très envie d’évaluer leurs capacités.
    Uriah lança un regard interrogateur vers Altaïr, lui demandant son avis. Ce dernier haussa les épaules.
    -Des combats sont organisés fréquemment à bord. Cela ne devrait donc pas poser de souci.
    -C’est d’accord, répondit Uriah, mais seulement si vous me le retrouvez avant.
    Elle se pencha vers lui et lui glissa à l’oreille :
    -Et si votre golem qui vous sert de garde du corps a l’intention de m’assassiner. Sachez que moi, je pourrais prendre ce défi très au sérieux.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 18/12/2024 à 23:59 Citer ce message

    Ludivine et ses principaux officiers avaient passé ces derniers jours à planifier studieusement leur approche sur Bremedia. Il n’était pas question de refaire les mêmes erreurs que sur Tartuga II. La stratégie mise en place était de s’assurer que les troupes de Krieger sur Onidès ne repèrent pas leur petit manège. Cela signifiait mettre le plus de distance entre leur navire et le satellite naturel de Bremedia. Ensuite, une navette Aquila les transportant devait être en mesure de rejoindre la surface. Des six royaumes, ils avaient tablé sur une forteresse centrale, celle située sur l’Ile de Highfire dans la Mer des Sept Vents, entre les côtes des royaumes de Tourlaine et de Zlhane. Si leur intuition était la bonne, et selon Ludivine et Sœur Alexia, elle l’était, cette île devait abriter une sorte de pouvoir centrale. En effet, six royaumes ne pouvaient coexister depuis tant de millénaires sans qu’un monarque ne soit le garant, même d’un semblant de cohésion.
    La libre-marchande, assistée de ses officiers élaborèrent ainsi leur mission diplomatique. Elle se rendrait donc, le lendemain, à la forteresse de Highfire en qualité de princesse de la Maison Frae Spinaiser, représentante des deux maisons libres-marchandes. Pour cette mission protocolaire, elle serait accompagnée de Vesuvio, son premier officier et conseiller militaire, de Syulf son sénéchal et maitre commercia, d’Alexia d’Alsimar, sa diplomate et émissaire de l’Ecclésiarchie, mais aussi de Volt Solutex, son premier technaugure. Les mondes chevaliers possédaient toujours un lien fort avec l’Adeptus Mechanicus, ainsi la présence du magos s’était imposée telle une nécessité. Afin de compléter son équipe diplomatique, elle emmènerait aussi Marcus Shaan, son discret et vieil astropathe ainsi que Nessa pour des besoins de traductions sur place mais aussi Säde Lindholm, le maitre des murmures d’Uriah. Ce dernier avait insisté sur ce point, il tenait qu’elle soit présente et ainsi soit la représentante officielle de la Maison Goldberg en cas de tractation. Uriah avait beau avoir confiance en Ludivine, il préférait malgré tout couvrir ses arrières et son maitre des murmures était là pour ça, de toute façon.
    La veille du départ, au soir, Ludivine était sur sa passerelle, occupée à discuter avec ses officiers des derniers préparatifs.
    Syulf et Alexia tenaient à ne pas arriver les mains vides. Ils avaient plaisanté sur le fait d’apporter de la verroterie aux natifs, mais c’était avant tout une façon de parler. Nulle visite protocolaire ne saurait venir traiter d’accords sans respecter le protocole ou l’étiquette, ni sans apporter des cadeaux dignes de ce nom. Ils firent sortir de leur armurerie quelques armes qui sauraient impressionner comme une épée énergétique, un bolter ou ce genre d’arme préstigieuse.
    Vesuvio tenait à ce qu’ils emmènent aussi avec eux, une puissance de feu conséquente, juste au cas où cette histoire d’étiquette et de cadeaux tournerait court. L’archimilitant n’était pas là pour les ronds de jambe et en général, la diplomatie était selon lui, comme la paix. C’était une période de pause, plus ou moins courte et inutile entre les inévitables rafales de bolter.
    -C’est sage, en effet, mais j’espère que nous n’aurons surtout pas à en arriver là, lui dit la jeune libre-marchande.
    -Ne vous inquiétez pas, Madame, nous aurons la puissance de feu de notre côté. S’ils font les malins, il nous reste les ogives thermonucléaires.
    -Je ne m’inquiète nullement, Général Vesuvio. Je serais fort attristée de voir de tels efforts pour rallier ce monde inestimable, partir ainsi à néant. Les séides d’Absalom Krieger s’échinent déjà à saboter nos propres projets, alors inutile pour nous aussi de devoir tirer les premiers. Ce monde rejoindra l’Imperium, j’y mettrai un point d’honneur.
    -Bien entendu, Seigneur-Capitaine.
    -Loué soit le Trône de Terra, souffla sœur Alexia.
    -En revanche, la prudence reste de mise et notre arsenal restera à bord de la navette, sous bonne garde. Je vous laisse gérer ces détails, général, je vous fais confiance sur ce point.
    -Oui, Madame.
    Elle reporta son attention vers la sœur Famulus qui regardait le monde autour duquel ils gravitaient lentement, par la baie polarisée, s’étant retirée dans un coin sombre de la passerelle. Elle approcha d’elle, en silence.
    Alexia priait en silence, égrainant les perles de son chapelet ecclesiasticus, d’une main.
    -Cette idée de présents est une délicate attention, Alexia, j’apprécie.
    La sœur se tourna vers elle et lui sourit, passant sa main gantée sur la joue de Ludivine.
    -Ma douce enfant, vous ne pouvez pas savoir à quel point je suis fière de vous. Vous voilà devenue la digne héritière de votre défunt père et de sa noble lignée.
    Ludivine eut soudain les yeux qui se mirent à briller. Une ombre passa sur son si joli visage.
    -Il serait fier de vous, Ludivine, reprit la famulus.
    -J’espère… Dit-elle d’une petite voix étranglée. Père me manque tant.
    -Il nous manque tous, mon enfant, mais il est auprès de l’Empereur désormais. Un privilège que peu d’entre nous aurons un jour la joie de connaitre. Quelle plus belle récompense que de vous savoir à sa place, perpétuant ainsi le nom de sa maison.
    -Ma mère aurait dû reprendre la Lettre, au moins le temps que je…
    -Le temps que quoi ? Dame Elanore, votre mère n’était pas le choix premier de votre père, vous le savez. Il a su écouter mes conseils avisés avec la plus grande sagesse. De plus, de ses quatre enfants, vous êtes l’aînée et c’est à vous qu’incombe cette lourde tâche, voilà pourquoi je vous y prépare depuis votre plus tendre enfance. Voilà pourquoi vous êtes exceptionnelle en tous points et pourquoi votre devoir est de servir la volonté de l’Empereur-Dieu. Vous comprenez, ma douce enfant ?
    Ludivine laissa couler une larme qu’elle essuya et hocha doucement la tête.
    -Oui.
    -Parfait. A présent nous allons devoir régler ensemble cette affaire de monde chevalier. Je peux compter sur vous ?
    -Bien sûr !
    -Je serais à vos côtés, n’ayez crainte. Ils vous mangeront dans la main. Je vous organiserai alors un mariage digne d’une légende, ma chère enfant. L’effet ne risque pas de passer inaperçu. Et je compte bien capitaliser dessus. Six maisons dont les lignées remontent à l’antique Terra viendront alors s’agenouiller devant vous. Il faudra alors mesurer toute la magnitude d’un tel acte.
    -Et devant Uriah.
    Alexia eut un très léger tic nerveux au niveau de son œil droit, presque imperceptible.
    -Oui… Oui, bien évidemment…
    Alexia reporta alors son attention vers une silhouette qui approchait mais restait à quelque distance, comme par délicatesse.
    -Oh, notre petite protégée… Je pense qu’elle souhaite s’entretenir avec vous.
    Ludivine allait lui demander d’approcher mais Alexia fut plus rapide et d’un doigt, signifia à Merelda de ne surtout pas bouger. Puis à voix basse, elle s’adressa à Ludivine.
    -Nous reparlerons d’Uriah et de vous, à un autre moment, justement.
    -A quel sujet ?
    Alexia reprit un regard soudain plus dur et émit un léger soupir.
    -Je sais fort bien que vous avez bravé un interdit avec lui. A plusieurs reprises et ce, malgré mes mises en gardes.
    Ludivine toisa son regard en retour.
    -Je pense avoir passé l’âge de ce genre de mise en garde, ne croyez-vous pas ?
    -Je prie juste que vous ne tombiez pas enceinte avant ce mariage, ma fille.
    -Avant ? Après ? Et alors ? J’aime Uriah, cela ne changerait rien.
    -Justement si, vous tomberez enceinte. Mais quand et de qui, c’est encore à moi de le décider. Ne l’oubliez pas, ma chère enfant.
    Elle effectua un nouveau geste, indiquant à Merelda de bien vouloir approcher, tandis qu’elle, préféra se retirer.
    Ludivine se retourna et vit Merelda qui hésitait à approcher. Elle lui fit signe de venir, ce qu’elle fit, jetant un regard intimidé vers Alexia qui s’éloignait.
    Merelda la salua élégamment. Les deux jeunes femmes étaient de stature équivalente, pourtant elles étaient le jour et la nuit, aussi bien physiquement que dans ce qu’elles dégageaient. Merelda aurait pu être un double négatif de Ludivine et pourtant, toutes deux avaient noué une sorte de connexion, de complicité depuis qu’Uriah avait jugé bon d’exiler la fille Kane sur le Daughter of Tempest.
    -Capitaine… Je ne voulais aucunement vous importuner, vous sembliez aborder un sujet des plus… importants.
    -C’était important, mais nous en avions terminé de toute façon. De quoi vouliez-vous parler, Merelda ?
    -Je tenais à vous remercier pour votre accueil et pour… Comment dire, me faire participer à certaines discussions à bord aussi. C’est fort aimable de votre part.
    -Votre père est gouverneur et voulait que vous appreniez la vie à bord d’un navire. Je partage son avis et trouve cela fort louable de sa part.
    -Il est vrai que, mon frère et moi avons été élevé bien loin de cet Imperium et de sa vie riche en aventures. En dehors de la chasse, je ne connais que peu de chose, en réalité.
    Elle eut un petit rire gêné.
    Ludivine était en train de se dire qu’elle n’avait jamais eu une amie de son âge. Ses dames de compagnie étaient de vieilles servantes, aussi aimables que des servo-crânes et même Alexia avait l’âge d’être largement sa tante. C’était sa confidente et diplomate mais les sœurs du Famulus étaient avant tout des conspiratrices, certes pour le bien de la Maison mais elle n’était pas cette jeune fille de son âge avec qui elle pourrait avoir une réelle complicité. Il était bien trop tôt pour l’envisager mais elle avait bien l’intention de devenir amie de cette demoiselle intelligente, énigmatique, un peu effacée et pourtant si pleine de charisme, au point qu’elle aurait fait plus que tourner la tête d’un jeune officier du Morning Star. Ludivine adorait, de plus, ce genre de romance qui la sortait de son quotidien parfois si pesant.
    -Eh bien j’espère que vous êtes ici à votre aise.
    -Ce vaisseau est très agréable. J’ai encore un peu de mal à me faire à l’espace et à la nourriture mais, votre sollicitude me touche.
    -Bien… Demain, je dois descendre en visite protocolaire sur Bremedia, comme vous le savez. Cela vous dirait de m’accompagner ?
    -C’est très gentil à vous, capitaine, mais cela me gênerait beaucoup en réalité. Il s’agit d’un sujet politique de premier plan, si j’ai bien tout saisi. Ma présence, serait fort déplacée en réalité. Je m’en veux de devoir décliner, mais je crois que je devrais rester à bord. Je me ferais un plaisir de descendre plus tard, pour votre mariage si vous consentez à m’y inviter, bien entendu ?
    -Vous plaisantez ? Evidemment que vous y serez invitée. Cette affaire est déjà entendue. En attendant, en mon absence, je pourrais peut-être voir avec le capitaine Goldberg afin que vous puissiez voir votre frère. J’imagine qu’il doit vous manquer ?
    Merelda eut un peut sourire gêné en retour et Ludivine devina alors sa signification.
    -Oh, vous voudriez peut-être voir ce garçon, plutôt ? Ce jeune lieutenant, c’est ça ?
    Merelda eut soudain un large sourire alors que ses yeux se mirent à briller tandis qu’elle hochait la tête.
    -Je verrai ce que je peux faire. Mais à mon retour, faites-moi plaisir, prenons un thé toutes les deux, je pense que nous aurons mille choses à nous raconter.
    Un officier de ses fusiliers vint se tenir juste à côté et la salua. Ludivine se tourna vers lui alors que Merelda en profita pour prendre congés. Ludivine et elle, se firent juste un petit signe de tête. Elle reporta son attention vers l’officier.
    -Oui, lieutenant ?
    -Une femme d’équipage vous demande à la porte de la passerelle, Seigneur-capitaine. Dois-je la renvoyer ?
    -Qui ça ? Demanda-t-elle tout en voyant une jeune femme qui attendait, encadrée par deux gardes.
    -Je n’ai pas tout compris, capitaine. Une servante envoyée par le Morning Star, visiblement. Il parait que vous êtes au courant ?
    -Ah oui. Le capitaine Goldberg m’en a parlé ce matin. Une histoire confuse, mais ça ira…
    -Dois-je la faire entrer ?
    -Non, lieutenant, merci. Je vais aller lui parler directement.
    Il salua et Ludivine sortit de la passerelle, venant trouver la jeune femme. La trentaine, blonde, un air plutôt froid ou bien mal à l’aise dans sa tenue qui détonnait quelque peu. Si Uriah ne lui en avait pas parlé, elle ne l’aurait sans doute pas reconnu tout de suite.
    -C’est vous que le capitaine Goldberg envoie ?
    -En effet, Madame.
    -Le déguisement était superflue, mais qu’importe. Vous vouliez savoir où est Merelda Kane, c’est bien cela ?
    -Mon Seigneur-Capitaine tenait à ce que je m’en assure, en effet.
    Ludivine lui désigna la jeune fille, tout de noir vêtu qui se tenait un peu plus loin, devant la baie vitrée, à observer les étoiles.
    -Eh bien, comme vous le voyez, elle est ici, sous ma surveillance. Autre chose ?
    -Il aimerait que ses appartements soient fouillés et que vous m’affectiez à son service, sans qu’elle ne sache qui je suis en réalité.
    -Eh bien, puisque ce sont vos ordres, je vais vous y conduire, suivez-moi. Puis-je savoir ce que vous recherchez ?
    -Le capitaine ne m’a donné aucun détail.
    Elle lui indiqua de la suivre dans une série de coursives. Elle fit signe aux deux gardes de les accompagner. Ce qu’ils firent. Elle reporta son attention vers elle.
    -Je lui en toucherai un mot. Je ne suis pas convaincue que vous puissiez être ainsi affectée à son service, vous faites partie des officiers du Morning Star, votre visage est certainement connu.
    -Je passe vite inaperçue, croyez-moi.
    -Nous verrons cela.
    Elles arrivèrent à la cabine et Ludivine utilisa son code personnel pour déverrouiller la porte. Elle indiqua à Säde de bien vouloir entrer. Ce qu’elle fit.
    -Je vous laisse. Prenez le temps qu’il faudra. Quand vous aurez terminé, demandez aux gardes de vous raccompagnez jusqu’à la passerelle, nous aurons à parler.

    Le lendemain matin, leur navette descendait tout droit dans l’atmosphère de Bremedia et survola la Mer des Sept Vents en direction de l’île de Highfire. A son bord, se trouvait Ludivine et sept de ses conseillers dont Säde. Le soir-même, Uriah avait demandé qu’elle accompagne Ludivine sur place, estimant que cette mission était devenue prioritaire étant donné que l’enquête sur Merelda n’avait finalement rien donné.
    Ils lancèrent alors un appel vox, les identifiant et demandant une autorisation de solliciter une audience auprès de l’actuel régent.
    Au bout de quelques minutes, une réponse leur parvint en haut Gothique.
    -Libera navis oneraria, permissa est tibi terra in platea magna ante Templum. Te emissarium principis principis excipiet.
    -Qu’ont-ils répondu ? S’étonna la Brute. C’est quoi leur charabia ?
    -C’est une forme de haut Gothique, confirma Alexia, soudain soulagée de reconnaitre une langue quasi officielle.
    -Ils disent qu’on peut atterrir devant le grand temple et qu’un émissaire va nous recevoir, compléta Nessa.
    -Parfait, ajouta Ludivine. Pilote ? Posez-nous comme indiqué.
    Ils approchèrent de l’île dont l’architecture monumentale en pierre blanche et crème était tout bonnement majestueuse avec un château dont les tours dépassaient les quatre cents mètres de hauteur. Les bâtiments était d’un classicisme antique que l’on ne voyait plus depuis des millénaires dans cette partie de l’Imperium. Le contraste était saisissant. Une ville s’étendait sous eux, digne d’un monde de légendes.
    Elle reporta son attention vers ses conseillers dans l’habitacle.
    -Inutile d’y aller avec toute notre artillerie. On y va en petit comité. On a des retours auspex ?
    -J’en ai, répondit Vesuvio. Mais je capte trop d’interférences entre une population concentrée et une technologie bien présente mais impossible à cibler.

    La navette finit par se poser à l’endroit indiquée. Depuis la navette il était difficile d’y voir quoi que ce soit, aussi Ludivine ordonna au pilote d’ouvrir la rampe arrière et demanda à ses officiers de la suivre. Tous, pour l’occasion avaient revêtu des tenues d’apparat flambant neuves. Même Nessa et Säde en portaient. Une fois la poussière causée par l’atterrissage avait-elle été dissipée, qu’ils aperçurent le comité d’accueil. Des dizaines d’hommes d’armes avaient ceinturé la place. Non de manière menaçante mais ils en bloquaient toutes les issues à des dizaines de mètres de là. Leurs uniformes étaient gris, comme leur casque en fer et comme armes ils portaient d’antiques fusils à répétition ainsi que des lances à décharge, pour la plupart. Quelques armes lourdes étaient aussi positionnées à des points stratégiques. Enfin, ils ne les virent qu’en dernier car ils durent contourner leur navette pour les voir enfin. Deux machines de dix mètres de haut leur faisait face, à l’autre bout de la place. Deux impressionnants Chevaliers Questoris qui pointaient leurs immenses canons, droit vers eux.
    Depuis une des machines, un porte-vox se mit à cracher un message dans la même langue. La voix porta au-delà de toute l’immense place.
    -Cognosco te ipsum et annuntiate voluntatem tuam !
    -Ils demandent de vous annoncer et de préciser vos intentions, capitaine, leur traduisit Nessa.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 07/01/2025 à 16:53 Citer ce message

    Ludivine lui répondit dans un parfait haut Gothique, selon le protocole nobiliaire, déclinant ses titres, fonctions et intentions. L’émissaire vint alors à sa rencontre, encadré de gardes en armures, la salua et lui demanda, à elle et ses officiers de bien vouloir le suivre. Ce dernier se présenta comme le sénéchal Ismael, intendant du palais.
    -Nous avons aussi apporté quelques présents pour votre régent, dit-elle tout en désignant des gardes de sa suite, chargés de coffres.
    -C’est fort aimable. Il en sera ravi, je puis vous l’assurer.
    Ismael les fit conduire dans une aile du palais, immense, qui leur fut dédiée. Il s’agissait d’un ensemble de salons et de jardins d’agréments intérieurs dans lesquels il les laissa s’installer. Une coterie de laquais vint leur proposer des plateaux chargés de boissons, de fruits et de quelques douceurs. Tandis que Vesuvio s’assurait que les lieux ne représentaient nul danger, Ludivine réunit Syulf et sœur Alexia sur un petit pont qui surplombait un jardin. En contrebas se trouvaient dans des cages, des oiseaux exotiques aux couleurs chatoyantes ainsi que des petits mammifères qui eux, sautaient dans les branches des arbres d’agrément.
    -Quelles sont ces petites créatures à fourrure ? S’étonna Ludivine. Je les trouve tout bonnement adorables.
    -Je crois qu’on appelle cela des écureuils, répondit Alexia.
    -Ce sont des ptérocureuils, pour être exact, moins connus sous leur nom scientifique de skiouros vampyr que leur donnent les magos biologis, ajouta Syulf. Mais ne vous fiez pas à leur fourrure soyeuse et à leur petite frimousse, ni au fait qu’ils peuvent presque voler. En temps normal ce sont des rongeurs parfaitement dociles et très facile à domestiquer. Raison pour lesquelles on en trouve souvent comme petit animal de compagnie. Cependant… Ils ont la particularité de se transformer parfois en dangereux carnivores si leur nourriture venait à manquer. Une sorte d’évolution… Certaines petites filles de bonnes familles en auraient déjà fait les frais, dévorées vivantes par leurs petits animaux de compagnie.
    Ludivine lui lança un regard emplie de dégoût. Parfois son sénéchal avait sa façon bien à lui d’aborder certains sujet, de manière un peu trop scientifique et sans la moindre retenue.
    -Mais c’est horrible !
    -C’est la nature, ma chère capitaine. Raison pour laquelle j’avais fortement déconseillé à madame votre mère de vous en acheter un quand vous étiez petite.

    Au bout de quelques dizaines de minutes, Ismael revint les trouver.
    -J’ai fait réunir le conseil restreint. Si vous voulez bien vous donner la peine de me suivre ?

    Ils furent conduits dans ce qui devait s’apparenter à une salle du conseil, au milieu de laquelle trônait une table ronde entourée de fauteuils à haut dossier. Ismael leur présenta les quatre autres personnages qui se trouvaient là. L’Oratrice Alfgarda Ordil, une femme entre deux âges, au visage sévère, arborant des augmentiques. Il la présenta comme étant la voix officielle du Haut-Monarque, le régent Hildonus Zhlane qui n’était pas présent. Les trois hommes l’accompagnant formaient le reste du conseil restreint, à savoir, l’Egide Sigebert Tourlaine, un colosse à la crinière noire, revêtu d’une armure impressionnante. L’Egide était le seigneur protecteur personnel du Haut Monarque. En face de lui, se tenait le Maitre de justice Alwin Orloaf, un homme d’âge mûr, austère et sec, avec un regard pénétrant à vous glacer le sang. Enfin, le dernier membre qu’il présenta était le Haut Technaugure Clodwig. A l’instar de tous les magos, ce dernier portait des robes rouges et toute une panoplie d’augmentiques et implants qui faisait de lui, plus une machine qu’un humain.
    Ismael invita Ludivine et ses officiers à prendre place à la grande table.
    -Vous devez avoir des questions à nous poser, j’imagine ? Leur dit-elle.
    -En effet, commença l’oratrice. Nous n’avions plus de nouvelles de l’Imperium depuis près d’un siècle et ne disposant plus d’astropathe, il nous était impossible de contacter les autres sous-secteurs. C’est donc une joie pour nous de pouvoir enfin renouer avec la civilisation. J’imagine que vous avez des nouvelles à nous apporter ?
    -En réalité, c’est le cas. Il y a cependant une affaire qui va réclamer la plus grande urgence.
    -Laquelle ? Lui demanda le Maitre de Justice.
    -Avez-vous le moindre contact avec Onidès, votre satellite ?
    -Pas depuis des décennies, reprit l’oratrice. La population a été décimé et son atmosphère est hostile depuis cette époque.
    -Savez-vous comment cela s’est-il produit ?
    -Des pirates et des armes virales, apparemment. De ce qu’en ont dit les témoins mourants de l’époque.
    -Nous venons de faire escale sur Onidès et il se trouve qu’une… Certaine population y habite toujours. Les armes virales ont tué le plus grand nombre mais pas tout le monde. Nous en avons été témoins, il s’agit désormais d’un repère de pirates et d’hérétiques.
    -Sont-ils nombreux ? Lui demanda l’Egide.
    -Assez pour chercher à vous déclarer la guerre.
    Les conseillers se permirent un petit rire.
    -Qu’ils essaient, cela pourrait nous amuser.
    -Nous avons mené une enquête et prenons cette menace très au sérieux, répondit Ludivine.
    -Ils assemblent en ce moment-même une armée de machines démoni… Ajouta Syulf, aussitôt coupée par Alexia qui lui fit les gros yeux.
    -Ils assemblent, en effet des machines de guerre heretek, afin de lancer une offensive sur Bremedia, reprit-elle.
    -Et comment comptent-ils s’y prendre pour les amener jusqu’ici ? Ils disposent de vaisseaux ?
    -Ils comptent utiliser un portail aelda…
    Alexia lui marcha sur le pied, afin de le faire taire. Syulf était un habile scientifique, mais il était parfois parfaitement ignorant des questions politiques ou de la foi. Parler de démons et de xenos, ouvertement sur un monde féodal pétri de superstitions pouvait faire totalement paniquer leurs interlocuteurs, ce qui aurait été des plus contreproductif.
    -Ils comptent activer un portail… De téléportation… Se reprit Syulf.
    -Pour nous attaquer, ici sur Bremedia ? Demanda l’Egide.
    -Ce sont en effet leurs plans. Voilà pourquoi nous sommes en train d’élaborer une stratégie pour les contrer avant qu’ils ne lancent leur attaque, mais espérons obtenir le soutien de vos maisons.
    -Pour lancer une attaque, ici sur Onidès ?
    -Absolument. Voilà pourquoi nous aimerions solliciter l’aide de vos six maisons.
    L’oratrice leva la main afin de couper toute discussion.
    -Le problème est qu’une partie des six maisons se fait actuellement la guerre. Les réunir autour d’une table ne sera pas chose aisée. Il va nous falloir convoquer surtout le Haut Monarque afin de lui faire part de ces accusations. Disposez-vous de preuves sur tout ce que vous avancez ? Ce sont là de terribles nouvelles.
    Alexia ouvrit son sac et en sorti son servo-crâne qu’elle activa. Il se mit à flotter au-dessus de la table en bourdonnant.
    -Comme nous l’avons dit, nous avons mené une enquête minutieuse sur Onidès et avons collecté une série de captures pix qui nous montrent le type de menace qui vous vise.
    Elle prononça une litanie d’activation et ordonna à son servo-crâne de diffuser une séquence pix préalablement enregistrée. Le petit drone projeta un cône de lumière verte dans lequel apparut une série d’images. On pouvait y voir des bandes de pillards, comme ceux affrontés par Uriah et ses hommes, mais aussi des véhicules marcheurs hybrides de toutes tailles, dont certains pouvaient aisément rivaliser avec les Chevaliers.
    La séquence ne dura que trois minutes, mais cela suffit amplement.
    -Nous allons devoir en informer le Haut Monarque de toute urgence, leur dit l’oratrice. J’imagine donc que c’est le secteur Karthago qui vous envoie ?
    Ludivine interrogea ses officiers du regard. Si ses souvenirs étaient exacts, ce sous-secteur avait été impliqué dans le conflit de la Guerre de Badab, même si les raisons officielles restaient encore obscures. Quoi qu’il se soit passé à l’époque de Lufgt Huron et des Astral Claws, protecteurs de la région, lui et les richissimes dirigeants karthagiens entrèrent en conflit pour une histoire de dîme. Pourtant, cela dégénéra en une guerre totale qui embrasa les six sous-secteurs de la Zone du Maelstrom pendant dix ans. La plupart des mondes, pourtant prospères de cette riche région ne s’en remettaient toujours pas, même un siècle après, tellement les pertes et les destructions furent immenses.
    Elle l’ignorait mais l’Inquisition ordonna un Edit d’oblitération dans les années qui suivirent, afin que personne ne sache que les Astral Claws disparus étaient devenus les Red Corsairs. Mais surtout cet édit effaça l’histoire de la gouverneure du secteur d’alors, Tanit Koenig ainsi que toute sa noble maison, qui furent exécutés pour « Ambition indécente et gestion calamiteuse, indignes de serviteurs de l’Empereur ». Même les quatorze milliards d’habitants de Sidon Ultra, le monde dîme, riche capitale du système Sagan, siège de Karthago et de la maison Koenig, furent condamnés pour leur implication avec le régime, à six générations de servitude. Comme pour Galen VI, le monde de la Brute, un tiers de cette peine restait encore à purger. Aujourd’hui, Karthago restait l’ombre de ce secteur prospère qu’il fut jadis. Et même si, depuis quelques années, l’Administratum y avait rétabli son siège pour l’ensemble de la région, plaçant la puissante maison de Muizon à sa tête, cette zone restait encore fragile. En 914, à la toute fin de la guerre de Badab, elle dû subir encore les assauts d’une invasion ork, connue sous le nom de Croisade de Karthago qui ne prit fin que tout récemment, grâce aux Black Templars et aux Star Phantoms, notamment.
    Ce fut Alexia qui prit la parole, effectuant un geste discret vers la libre-marchande. La Famulus connaissait certains secrets, ce qui n’était pas le cas de ses compagnons. De plus, elle comprenait les risques d’implications politiques mieux que quiconque.
    -Ce n’est pas le secteur Karthago qui nous envoie, oratrice. Nous venons du…
    -Du sous-secteur Endymion, ajouta Ludivine peut-être un peu vite, car tentant de rentrer dans le jeu de la famulus.
    Les membres du conseils tiquèrent à cette remarque.
    -Endymion ? Pourquoi les Mantis Warriors vous envoient-ils, vous, si ce n’est pas indiscret ?
    Alexia ne le montra pas mais nota qu’il n’était pas très avisé de mentionner Endymion. A l’époque de la guerre, cette région était sous contrôle des Mantis Warriors, vassaux des Astral Claws et c’est par eux que le conflit débuta en 904, justement dans l’Amas d’Endymion.
    Deux siècles plus tôt, Huron avait été nommé par Terra à la tête des trois autres Chapitres Astartes afin de protéger la Zone du Maelstrom et ses cinq sous-secteurs initiaux : Badab, Endymion, Khymara, Magog et les Etoiles livides. Khartago était un secteur voisin, à part, administré comme une satrapie pour le compte de maisons marchandes extrêmement puissantes et fortunées, enrichies par les mondes miniers voisins, dont les ressources transitant par Badab, Cygnax et Sagan étaient vitales jusqu’à Mars.
    Avec le temps, manquant de renforts et de ressources pour protéger les frontières, Huron, lassé par ses requêtes vers Terra restées sans réponse, décida de prendre la situation en main. Il fit renforcer les frontières commerciales par ce qu’il appela l’Anneau de Fer, un ensemble de stations d’écoute, de forts de défenses orbitaux, de navires de patrouille et de champs de mines impénétrables. C’est dès cette époque que les karthagiens le surnommèrent le Tyran de Badab, car Huron s’était autoproclamé défenseur et Seigneur de Badab et par extension, des cinq autres sous-secteurs vassaux.
    Devant les renforts qui n’arrivaient pas et fasse à l’avidité croissantes des dirigeants karthagiens qui siphonnaient inlassablement les ressources minières en dîme pour l’Administratum, Huron appliqua un blocus sur leurs navires, réemployant la dîme afin de financer les défenses de la région.
    Quelques mois auparavant, il avait déjà atomisé une flotte marchande envoyée par Koenig, afin qu’il restitue la dîme à Karthago. Pour toute réponse, Huron avait rétorqué que par décret de Terra, un Maitre de Chapitre de l’Astartes ne paie pas la dîme et que tout navire pénétrant ses frontières de manière hostile en subiraient les foudres.
    Il avait alors prévenu Karthago que toute prochaine intrusion dans son espace serait prise comme un casus belli. Tanit Koenig le prit au mot, espérant alors soumettre l’impudent Maitre de Chapitre Lufgt Huron sous son autorité. Elle avait missionné Stibor Lazaerek, le Maitre de Chapitre des Fire Hawks en personne, alors sous serment avec Karthago, d’envoyer plusieurs de ses navires aux frontières des étendues contrôlés par les vassaux des Astral Claws afin de les intimider. C’était mal connaitre la stratégie de Huron, qui avait verrouillé ses frontières de longues dates car les routes marchandes de la région subissaient toujours des attaques xenos venant du Maelstrom. Les navires Fire Hawks furent détruits ou forcés de fuir et le croiseur Red Harbinger fut capturé, ce qui déclencha les foudres de Lazaerek qui lança l’escalade du conflit. Tandis qu’il envoyait le reste de sa flotte à l’assaut, épaulée par le reste des navires marchands de Karthago, Huron profita de cette opportunité et lança à son tour un assaut sur le système Sagan resté sans défense, faisant tomber Sidon Ultra en une journée.
    Dix années et une dizaine de chapitres Astrates furent nécessaires pour mettre fin à cette guerre, comptant les pertes par millions.
    -Nous venons du sous-secteur Endymion mais n’avons pas pris part au conflit, il est terminé de longue date, ajouta habilement la famulus.
    -Oh… Voilà donc qui est une affaire réglée. Nous avions été informés que Badab était entrée en sédition et nous nous étions toujours demandé pourquoi la gouverneure Koenig n’avait pas fait appel à nos Maisons pour soutenir ce conflit.
    -Badab a été vaincu, en vérité.
    -Voilà qui est une excellente nouvelle. J’imagine donc que ce barbare de Huron aura été démis de ses fonctions et traduit en justice ? Rétorqua l’oratrice.
    -Il a été déclaré Excommunicate Traitoris.
    -Au moins, la justice n’aura pas trainée, dit-elle, tout en appuyant son regard vers Alwin Orloaf, le Maitre de justice.
    -Mais le coût aura été terrible. La maison Koenig n’existe plus aujourd’hui. Elle aura été un des terribles dommages collatéraux de ce conflit.
    Alexia avait préféré enjoliver la vérité. De toute manière, personne ne connaissait la vérité, en dehors des ordos et de quelques individus.
    -Trône, mais… Nous étions placés sous serment avec sa maison… Je comprends alors pourquoi plus personne n’a jamais cherché à nous contacté depuis… Mais qui dirige aujourd’hui Sidon Ultra et le secteur Karthago ?
    En diplomate avertie, Alexia se permit de sourire intérieurement. Il ne restait plus à Ludivine à se placer habilement et à jouer peut-être un coup de maitre avec la plus puissante maison de tout la Zone du Maelstrom.
    -Il s’agit de la nouvelle gouverneure de secteur, Lylen de Muizon dont la lignée remonte, elle aussi jusqu’à Terra.
    -Fort bien… Nous en aviserons aussi le monarque, il est probable qu’il souhaite s’entretenir avec elle.
    L’oratrice se leva, signifiant que la réunion était terminée.
    -Ce soir, vous serez nos hôtes. Demain, le Haut Monarque voudra vous rencontrer et nous convoqueront les barons des six maisons.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 11/01/2025 à 23:31 Citer ce message

    Des suites leur furent proposées pour la nuit, dans une des ailes située dans les hauteurs du palais. De leurs chambres, ils avaient une vue imprenable sur la mer des Sept Vents et l’ile d’Orliuns, un des fiefs de la maison Zhlane. Depuis ce point de vue, cela pouvait même donner le tournis, du moins pour ceux qui restaient peu habitués à voir l’horizon comme Suylf qui préféra fermer ses rideaux. Comme tous les ruchards de son espèce, la mer, le ciel et de vastes panoramas lui donnaient toujours le vertige.
    Le lendemain matin, après un petit-déjeuner, Ismael leur proposa une visite des jardins botaniques du palais pendant laquelle ils purent s’entretenir à propos du monarque et des barons à venir. Ludivine huma le parfum d’une lacrymata d’un blanc éclatant et au parfum aussi doux et enivrant que ses épines étaient mortelles. Elle chercha à en savoir plus sur les antagonismes entre les différentes baronnies mais le sénéchal resta quelque peu évasif.
    -Ce que je puis vous dire, ma chère, c’est que le conseil restreint est composé entre autres, de quatre membres issus des six maisons. Vous comprendrez alors aisément que deux maisons sont, de fait, toujours écartées du pouvoir.
    -Si j’ai bien retenu, le Haut Monarque est issu de la maison Zhlane, l’oratrice vint de la maison Ordil, l’Egide est de la maison Tourlaine et le Maitre de justice est de la maison… Orloaf… Ce qui signifie que les Sahida et les Florentine ne siègent pas au conseil ?
    -Tout à fait exact, chère enfant. Vous imaginez bien que cela pourra créer quelques tensions.
    -J’imagine que les luttes de pouvoirs sont courantes… Comment le Haut Monarque est-il nommé ?
    -Il est nommé à vie par ses pairs, les barons des six maisons. A sa mort, un vote a lieu et un des autres barons est désigné.
    -La succession n’est donc pas héréditaire ? Ce qui signifie que les quatre maisons ne sont pas toujours les mêmes ?
    -En effet. De plus, certaines maisons s’alliant contre d’autres, des jeux de pouvoir se mettent en place pour favoriser ou écarter telle ou telle maison. Et ces alliances changent parfois avec le temps.
    -Et quelles sont les maisons alliées ou ennemies ?
    -Ça, je vous laisserai en juger par vous-même… Je préfère ne pas altérer votre propre opinion.
    -Soit… Donc si le conseil compte quatre membres issus des baronnies, d’où sont issus les autres ?
    -Tous ne sont pas issus de la noblesse. Moi-même, par exemple ne provient pas d’une des six maisons mais de la plèbe, comme plus de quatre-vingt-dix pourcents de la population de Bremedia. J’étais à l’origine, l’intendant du baron Zhlane. Lorsqu’il a été nommé Haut Monarque, il a souhaité me garder à son service. Il aurait pu ne pas le faire, mais il en avait le droit. Il a aussi conservé certains membres du conseil et en a nommé d’autres. En faisant cela, en nommant un nouveau chevalier à la table du conseil, ce chevalier quitte alors sa maison pour devenir un sans-fief. Cela signifie, qu’à la mort du Haut Monarque, son propre successeur aura le choix de maintenir ce chevalier à son poste de conseiller ou d’en changer. S’il le change, le chevalier sans-fief ne pourra plus faire partie de sa maison et deviendra un loup solitaire, à moins de provoquer un duel…
    -Un duel contre qui ?
    -Contre le baron de son ancienne maison. Le duel est alors à mort. S’il gagne, il prend alors sa place et devient le prochain baron.
    -Cela doit alors terriblement complexifier les luttes de pouvoir…
    -C’est le propre des traditions sur un monde régit par des codes chevaleresques ancestraux et par la guerre qui coule dans leur sang. Mais nous en reparlerons si vous le souhaitez, je dois vous laisser et m’occuper de l’arrivée de nos barons justement. Je viendrai vous chercher pour le déjeuner avec le Haut Monarque.
    Ludivine le laissa vaquer à ses occupations et resta songeuse. De retour à leurs suites, elle y retrouva le lieutenant Säde Lindholm. Elle, ainsi que Nessa, Solutex leur magos et leur astropathe Marcus Shaan étaient restés à les attendre. Säde paraissait troublée. En temps normal déjà, elle paraissait introvertie et mal à l’aise, mais là, encore plus.
    -Quelque chose ne va pas, lieutenant ?
    La maitre des murmures fit un léger geste de la main.
    -Rien, quelques cauchemars nocturnes qui m’ont empêché de dormir, Je me suis vu tomber dans le vide en passant par une fenêtre, cette nuit … Mais rien d’inhabituel, je fais souvent des cauchemars, lui dit-elle avec un léger sourire. Juste que… Enfin, non rien.
    -Juste que quoi, Lindholm ?
    Ludivine croisa les bras et attendit.
    -Je m’étonnais que Merelda Cole ne soit pas descendue avec vous, capitaine. J’ai cru comprendre qu’elle voulait voir Bremedia… Et comme je devais la surveiller, je me demandais…
    -Nous en avons déjà parlé, lieutenant…. Le capitaine Goldberg a jugé plus utile de vous attacher à mon service pour cette visite protocolaire. De plus, Merelda Cole a trouvé opportun de ne pas se mêler de nos affaires diplomatiques, c’est une sage décision, je pense.
    -Mais qui la surveille ? Répondit Säde, encore un peu troublée et les pupilles un peu dilatées.
    -Vous êtes sûre que ça va ? Nous avions déjà évoqué ce point… Elle est restée à bord, en compagnie de mon intendante, Mademoiselle Sintabor. De plus, j’ai demandé à maitre Avicen, votre homologue sur mon navire, de garder un œil sur elle. Pour l’heure, elle se familiarise avec les métiers à bord.
    -D’accord…
    -Bon, restez là et prenez un peu de repos. Nous allons avoir ce déjeuner avec le monarque. On en reparle dans l’après-midi.

    Pour le déjeuner, ils furent conviés dans une vaste salle à manger du palais où les y attendaient, l’Oratrice, l’Egide, le Maitre de justice et bien entendu le Haut Monarque. C’était un homme barbu d’un certain âge, fatigué par les années mais disposant encore d’une solide stature. Il leur fit signe d’avancer. Ludivine et Alexia s’inclinèrent une fois parvenue à quelques mètres. Elles avaient informé Syulf et Vesuvio du protocole, devant s’adresser au monarque en l’appelant Votre Altesse ou Haut Monarque. En réalité, il disposait d’un statut équivalent à celui d’un gouverneur planétaire d’un monde majeur, tel qu’Isin ou Eshunna, donc nettement supérieur à celui de Ludivine.
    Ils prirent part au déjeuner composé de plateaux de crustacés, de rôtis de grox, de poulardes farcies et de légumes et sauces en tout genre.
    -Allons, capitaine, vous et vos gens, prenez place. Qu’on leur serve du vin, dit-il à l’intention des serviteurs.
    -C’est fort aimable de nous recevoir, Votre Altesse.
    Il balaya la remarque d’un revers de la main, tout en portant son verre à sa bouche.
    -C’est tout naturel. Pour une fois que nous avons de la visite, nous avons au moins quelques sujets intéressant à aborder et pouvons sortir l’argenterie.
    Les membres du conseil se permirent un petit rire.
    Elle lui présenta ses conseillers, Syulf, Alexia et Vesuvio.
    Le monarque reposa son verre et essuya sa bouche avec sa serviette.
    -Vous êtes bien jeune pour être capitaine d’un navire. Vous devez avoir d’autres qualités, dites-moi ?
    -Sans aucun doute, Votre Altesse.
    -Bien… Le temps est compté, aussi je tiens à ce que vous soyez brève et précise. Mon conseil m’a informé de ce soulèvement sur Onidès et de leur projet d’attaque. Il semblerait que vous ayez un plan. J’aimerai en connaitre les grandes lignes.
    -Ce plan est actuellement en cours d’élaboration depuis nos vaisseaux en orbite.
    -Vos vaisseaux ?
    -Le mien et celui de mon fiancé, le capitaine Goldberg.
    -Votre… Fiancé ? Le second libre-marchand ?
    -Tout à fait.
    -Et pourquoi n’est-il pas ici, à cette table ? Qu’a-t-il de plus urgent à faire que d’être à vos côtés, devant moi ?
    -Le temps nous est compté, comme vous l’avez évoqué… Il est impératif de préparer une contre-offensive, Votre Altesse. Cependant, le capitaine Goldberg compte nous rejoindre une fois le plan élaboré, afin de vous le soumettre.
    Le monarque émit un petit son désapprobateur et Ludivine faillit s’étrangler avec son rôti.
    -Servez-lui donc un autre verre à cette petite, vous ne voyez pas qu’elle s’étouffe ? Lâcha le monarque à l’attention de ses laquais qui s’activèrent telles des abeilles autour de leur reine.
    Le monarque désapprouvait clairement l’absence d’Uriah qui pouvait être prise comme du mépris de sa part, ou au mieux, comme une faute. Ludivine préféra contourner le sujet en reprenant son souffle.
    -Nous allons, cependant, avoir besoin du concours de vos barons et de leurs Chevaliers pour mettre ces plans en œuvre.
    -Je suis au courant, je les ai fait appeler. Ils seront là dans la soirée. Vous aurez alors tout le loisir de leur faire part de vos projets, dès demain matin. L’autre point dont j’ai eu connaissance serait la mise en place d’accords commerciaux avec Bremedia ainsi que son rattachement à l’Imperium. Est-ce bien cela ? Je pense qu’il est bien trop prématuré pour envisager quelque accords marchands, vous ne trouvez pas ?
    Syulf prit alors la parole.
    -Du carburant ou des munitions pourraient alimenter Bremedia régulièrement, Votre Altesse. Voire, des espèces exotiques. Nous avons cru entendre que vos pilotes s’entrainent avec leurs montures à chasser de grands reptiles ?
    -Nous vivons en parfaite autonomie depuis quinze millénaires, sénéchal. Nous sommes autosuffisants en énergie et fabriquons nos propres munitions. Quand aux sauriens que nous chassons, nous régulons leur nombre en vue de chasses. D’autres espèces, je ne saurais dire. Il ne faudrait pas qu’elles déstabilisent ce fragile écosystème.
    -J’imagine dans ce cas qu’il vous serait toujours agréable d’importer des produits de luxe, tels que des vins, des bijoux, du parfum, des soieries ou des denrées exotiques.
    Le monarque eut un petit rire sarcastique tout en désossant à la main, une cuisse de poularde.
    -Une guerre se profile à nos portes et vous me proposez du parfum ? Vous êtes sérieux ? D’une, la population de Bremedia est composée de serfs qui vivent de durs labeurs et dont la vie est dédiée à produire. Ils n’ont nul besoin de parfums et de soieries. De deux, mes barons disposent déjà de tout ce dont nous avons besoin. Nous sommes des gens de la terre et des guerriers, élevés dans la sueur et le métal, pour le champ de bataille, attachés à nos valeurs et nos traditions. Nous ne sommes pas de cette élite dont le seul fait d’armes est de se peindre le visage, de sniffer de l’obscura et de se pavaner dans des bals costumés en vue de commérages. Cependant… Oui, pour votre dernier point. Un rattachement va devoir s’imposer et vous pourriez y jouer un rôle. J’ai cru comprendre qu’une nouvelle élite avait vu le jour à Karthago mais aussi dans les autres sous-secteurs voisins. Parfait. Je veux un monde majeur, un monde capitale. Je vous laisserai me proposer vos meilleurs options et nous en reparlerons d’ici les prochains jours.
    Il se leva, aussi tout le monde se leva aussitôt.
    -Je dois vous laisser. On me signale que les premiers barons arrivent déjà. Je vais les convoquer en privée de ce pas avant que ces imbéciles ne s’égorgent. Demain matin, rendez-vous disponibles dès l’aube. Nous irons chasser le carnosaure. Vous verrez alors à l’œuvre nos armigères, nos Chevaliers les plus agiles, pilotés par nos jeunes écuyers, cela vous donnera un aperçu de leurs capacités en combat.

    Ludivine et ses officiers le saluèrent puis retournèrent à l’aile du château de Hautfeu, là où se trouvaient leurs suites dans les étages. Ils échangèrent encore quelques minutes avant de décider d’aller se coucher. Demain, la journée allait commencer tôt et serait certainement riche en rebondissements. Les barons seraient là, avec leur délégation composée de leur élite. Leurs meilleurs pilotes de Chevaliers, fiers, intrépides, insolents et arrogants. Tout cet aréopage de pilotes de combat, dont certains étaient en guerre ouverte, risquait fort bien d’être explosif. Pour cela, elle allait devoir compter sur tous les talents de son équipe. La première manche avec le monarque avait été serrée. C’était un homme direct et bourru, habitué à diriger plus comme un général d’armée qu’un diplomate. Le contrarier se payait dans la seconde et il n’était pas envisageable de s’opposer à son jugement ni à commettre de multiples erreurs.

    Juste avant l’aube, un grand tumulte la réveilla en sursaut. Alexia était déjà là, dans sa chambre, vêtue d’une simple robe de nuit. Elle peinait à dissimuler son pistolet bolter derrière elle.
    -Habillez-vous, madame, il vient de se passer quelque chose… De grave.
    Ludivine s’assit dans son lit, cherchant à reprendre ses esprits. Jamais Alexia ne la réveillerait pour une raison futile.
    -Quelqu’un est mort ?
    -Votre astropathe, Marcus Shaan… Des gardes viennent de trouver son corps vingt mètres plus bas sur les falaises. Il a chuté de sa fenêtre de chambre et a basculé dans le vide. Il est mort sur le coup.
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  • Illuminati
    Illuminati

    le 15/01/2025 à 22:44 Citer ce message

    -Qui vous a informé ? Lui demanda Ludivine, tout en se levant et enfilant sa robe, aidée par Alexia.
    -Un garde courrait dans le couloir, je suis sortie de ma chambre, intriguée par le bruit. Et c’est là, tout essoufflé, qu’il me l’a appris.
    Quelqu’un toqua alors à la porte. C’était Vesuvio. Ludivine venait de terminer d’enfiler sa robe, elle lui dit d’entrer, ce qu’il fit.
    -Il se passe quoi ? J’ai entendu des gardes parler d’un mort ?
    -Oui, entrez général, lui dit Alexia. Marcus Shaan, notre astropathe serait tombé de sa fenêtre et se serait tué, apparemment.
    -C’est une blague ?
    -Malheureusement non et nous n’avions clairement pas besoin de ce genre de problème, surtout aujourd’hui… Répondit Ludivine qui cherchait à enfiler ses bottines à la hâte. Allez vite réveiller les autres, nous allons devoir tirer cette affaire au clair.
    Il ressortit et referma la porte.
    -Vous aussi, vous écartez l’idée d’un accident ? Lui demanda la famulus.
    -C’est sans doute prématuré de l’affirmer, mais nous priver si tôt de notre astropathe est sans doute très opportun pour quelqu’un qui aurait des secrets à nous dissimuler.
    -C’est aussi ce que je pense. Vous pensez au monarque ?
    -Pas nécessairement lui. Plutôt son entourage ou ses barons. Il va nous falloir interroger l’intendant Ismael.
    -Et aussi profiter de la présence du lieutenant Lindholm pour investiguer. S’il y a des indices dans la chambre de Shaan, elle saura les trouver. Allez vous habiller, cette journée démarre sous de biens mauvais augures.
    -L’Empereur protège, capitaine.
    -Puissiez-vous avoir raison.

    Cinq minutes plus tard, toute l’équipe était réunie dans le hall de l’aile où se trouvaient leurs chambres. Ismael était là avec deux de ses gardes. Le hall central donnait sur les différentes suites, douze au total, que contenait l’étage. Il donnait aussi sur quatre volées d’escaliers donnant vers les étages inférieurs. Selon Ismael et ses gardes, tous les escaliers étaient gardés de nuit et personne n’était passé par là. Le corps, quant à lui, se trouvait en contrebas du bâtiment, sur des rochers qui jouxtaient la côte, donnant sur la mer à une trentaine ou quarantaine de mètres de là. Le corps était apparemment tombé du balcon de sa suite, située vingt mètres au-dessus. La mort avait été instantanée selon les premiers éléments et vu l’état des multiples fractures.
    Ludivine préféra tout de même en juger par elle-même. Elle demanda qu’on leur montre la chambre de l’astropathe. La suite en question se trouvait au bout de l’aile ouest, à l’angle nord, donc bien au-dessus de l’endroit où le corps avait été retrouvé. Ils se dirigèrent dans la suite, Säde et Ludivine en tête, au moment où Syulf leur intima de ne plus bouger.
    -Evitons de laisser des traces, nous entrons sur une possible scène de crime.
    Ludivine se retourna.
    -Et comment allons-nous procéder ?
    -Je suggère que seul, un d’entre nous, deux tout au plus, y entrent mais avec la plus grande précaution. Si des traces de pas ou autres indices sont au sol, nous risquerions de les piétiner.
    -Il a raison, confirma Säde. J’ai quelques expériences en la matière, je peux m’en occuper.
    -Je vais l’aider, ajouta Vesuvio. La chasse ça me connait. S’il y a des empreintes ou du sang, je saurai en tirer des conclusions.
    -Parfait, tous les deux, vous me passez la suite au peigne fin. Alexia, Syulf et moi, allons interroger les gardes et l’intendant. Ensuite, nous irons voir le corps.

    La fouille de la suite prit plusieurs dizaines de minutes. Le premier constat selon Säde était qu’il n’y avait nulle trace de lutte, nul désordre ni nulle trace de nourriture non plus. Les effets personnels de l’astropathe étaient là, encore rangés dans un sac. Sa robe d’astropathe et son bâton, posés sur un des canapés. Quant au lit, il était défait et indiquait que quelqu’un avait bien dormi dedans. Il en était de même dans le sanitorium où des affaires de toilettes étaient posées au côté d’un lavabo. Elle retourna dans la chambre, avec cette certitude d’être passée à côté de quelque chose. Elle se rejoua la scène dans sa tête. L’astropathe s’était déshabillé et s’était couché puis, à un moment dans la nuit, s’était levé, avait été sur le balcon et avait basculé dans le vite. Jusque-là, tout collait, pourtant il manquait la raison qui l’avait poussé dans le vide. Un suicide ? Personne n’y croyait. D’accord, les psykers étaient des êtres étranges et tourmentés, en proie à de nombreuses malédictions mais les astropathes possédaient une certaine force mentale qui les prémunissaient de sombrer dans la plupart des cas et Shaan n’avait jamais présenté de signes inquétants. Après tout, ils étaient une ressource importante pour un Imperium qui ne pouvait se permettre de les perdre aussi facilement. Preuve en était. Elle se remémora qu’ils avaient l’habitude de porter sur eux des amulettes et autres chapelets en guise de protection. Elle effectua un signe vers Vesuvio.
    -Aidez-moi à déplacer les meubles.
    -On cherche quoi ?
    -Un pendentif, un bracelet, n’importe quoi qui aurait été oublié ou perdu.
    Ils ne trouvèrent rien sous le lit ni sous un des canapés mais sous le deuxième canapé, Säde trouva une carte du tarot. Elle la ramassa. La lame en question représentait l’astropathe justement.
    -Tiens, tiens…
    Elle se tourna vers Vesuvio de nouveau.
    -Pas de trace du reste du jeu ? Dans son sac ?
    Vesuvio vida les affaires mais ne trouva rien.
    -Alors notre meurtrier l’a pris… Intéressant… Suivez-moi.
    Ils passèrent alors sur la petite terrasse par laquelle on pouvait accéder grâce à une porte-fenêtre qui était encore entrebâillée. Il s’y trouvait une table, des chaises et des plantes d’agrément, mais rien de plus. Säde ne nota aucune trace d’effraction. Le balcon était entouré d’une rambarde et là aussi, nulle trace ne permettait de déceler une possible lutte. Elle alla pour se pencher vers le vide mais hésita aussitôt. Son rêve de la veille venait soudain de lui revenir en mémoire où elle se vit tomber dans le vide. La coïncidence était un peu trop évidente à son goût. A ses côtés, Vesuvio se pencha, sans faire attention au malaise de sa collègue. Le vent soufflait fort mais pas au point de défénestrer quelqu’un.
    -On distingue le corps, en bas mais le jour n’est pas encore tout à fait levé. On ne voit pas grand-chose.
    Säde activa son microvox, tout en reprenant son souffle.
    -Sœur Alexia ? Vous pouvez nous assister de votre servo-crâne ? Nous avons besoin de ses services.
    -Je vous rejoins.
    Säde coupa la connexion et nota un détail sur la rambarde en bois. Quelque chose avait raclé ou griffé le bois et c’était récent vue la couleur du bois. Cela ne devait pas avoir plus de deux ou trois jours, sans doute moins. Elle le montra à Vesuvio.
    -Vous pensez qu’il aurait pu faire ça, en tombant ?
    Il observa à son tour.
    Si c’est le cas, on retrouvera surement quelque chose sous ses ongles.
    La famulus vint les rejoindre juste après, accompagnée de son petit drone.
    -Il dispose bien d’un enregistreur pix ? Lui demanda Säde.
    -Absolument, lieutenant. Vous voulez qu’il filme quoi ?
    -Le corps en bas. Je veux une vue du dessus ainsi que des images de la scène.
    Elle sortit sa tablette de données d’une de ses poches, l’activa et demanda la permission à la sœur de bien vouloir l’autoriser à entamer la procédure de liaison des esprits de la machine.
    -Ne préférez-vous pas que le magos s’en charge ? Demanda la famulus.
    -A vrai dire, non. Je connais les saintes procédures de liaison des esprits.
    Elle préleva un des câbles de connexion du servo-crâne, le brancha à sa tablette, lança la litanie d’activation et laissa la sœur entamer à son tour, la prière de sécurité, permettant aux deux esprits mécaniques de communiquer entre eux en binarique. Une fois chose faite, elle déconnecta le câble et une fenêtre s’activa sur sa tablette depuis laquelle, elle pouvait voir ce que le servo-crâne filmait. Le petit drone descendit jusqu’au niveau du sol, en contrebas, filmant le corps qui se trouvait là, les membres démantibulés et pliés dans des angles improbables.
    -Descendons, nous allons devoir vérifier cela de plus prêt. En tout cas, il est bien tombé du balcon.
    -Tombé ou poussé ?
    -Trop tôt pour le dire. J’écarterai le suicide pour l’instant. L’accident reste la thèse la plus flagrante, ce qui pourrait donc masquer un possible meurtre.
    -Un assassinat déguisé en accident donc ?
    -Possible.
    -Qui en voudrait à notre astropathe ?
    -Toute personne qui n’a aucune raison de voir un psyker trainer dans leurs pattes. Que dit l’intendant à ce sujet.
    La seigneur capitaine continue de l’interroger mais pour l’instant, nous n’avons rien de valable. Selon lui, ils n’emploient pas de psykers. Ces derniers sont chassés et tués une fois découverts.
    -Mais des psykers existent donc bien sur Bremedia ?
    -De manière clandestine dans ce cas. Ils risquent la mort, si découverts.
    -L’un d’eux aurait pu s’en prendre à notre astropathe, selon vous ?
    -N’importe qui aurait pu s’en prendre à lui. Mais le coupable a des raisons de ne pas être découvert.
    -Ou de nous empêcher de communiquer, ajouta Vesuvio.
    -Je penche plutôt pour la thèse de la sœur. Un sorcier ou une entité xenos ou en lien avec le warp me parait plus probable. Et l’astropathe risquant de le ressentir et le démasquer, avait donc tout intérêt à se faire éliminer en faisant passer cela pour un accident.
    -Nous pourrions demander au vaisseau de nous envoyer un autre astropathe pour enquêter ? Dit-il.
    -Tant que nous ignorons les raisons de sa mort, ce serait imprudent. Un second psyker ne serait pas plus à l’abri que le premier.
    Elle sortit la carte de sa poche.
    -Nous avons trouvé cela sous le canapé. Il manque le reste du jeu de tarot.
    -Intéressant, rétorqua la famulus… J’ai toujours été convaincue que ces psykers étaient source de bien des maux.
    Ils retournèrent dans le hall afin de s’entretenir avec l’intendant et le reste de l’équipe. Pendant ce temps, Ludivine demanda à Vesuvio deux choses : allez s’assurer que leur pilote et leurs gardes étaient bien présents et en vie et enfin, depuis la navette, transmettre un message à la passerelle de leur frégate, leur signalant l’incident.
    Une fois parti, elle attrapa Säde par la manche, profitant que les autres étaient tous en train de discuter.
    -Votre histoire de rêve de l’autre nuit… Vous qui passez par la fenêtre… Vous réalisez que cela ne va pas pouvoir être passé sous silence !
    -Je ne sais que dire, Madame…
    -Dites-moi déjà que ce n’est pas vous !
    Säde, généralement inexpressive, fut soudain marquée par la stupéfaction.
    -Vous en doutez ?
    -De vous, pas nécessairement. Mais rien ne me garantit que quelque chose vous a touché et vous manipule.
    Elle l’invita à entrer dans un petit salon et y convia Alexia, Syulf et Vesuvio. Elle leur exposa les faits, mettant Säde soudain très mal à l’aise.
    -Comprenez bien tous, que ce n’est pas la première fois que l’on me signale des cas de visions et hallucinations, surtout parmi les membres d’équipage du Morning Star. On sait de plus, que le warp peut être à l’œuvre et manipule aisément certains esprits.
    A ces mots, Alexia effleura la crosse de son pistolet bolter tout en égrainant les perles de son chapelet Ecclésiasticus de l’autre main. Ludivine leur parla alors de la vision de Säde ce qui mit cette dernière encore plus mal à l’aise.
    -Ce ne peut être une coïncidence. Enonça Alexia. Vous voyez souvent la mort des gens à l’avance ? Lui demanda-t-elle.
    -Non, bien sûr que non…
    Säde se cacha bien de leur dévoiler qu’elle ne dormait presque pas les nuits et cela, depuis toujours, du moins pas sans drogues, sous peine de cauchemars. Seul Altaïr le savait sur le Morning Star, car il partageait le même trouble, mais personne à bord du Daughter of Tempest ne le savait.
    Cela s’était accru ces dernières semaines, depuis au moins leur passage warp pour rejoindre le système Tartuga. Depuis, les nuits, quand elle était seule dans sa cabine, elle se retrouvait avec des morts qui venaient lui parler dans son lit. Des gens qu’elle avait connu ou juste tué. Non pas qu’ils cherchaient à lui faire du mal, mais ils étaient là et lui parlaient de tout, de rien, l’empêchant juste de dormir. Au départ ce n’était que la nuit, mais depuis l’incident d’Onidès avec la machine démon, cela lui arrivait aussi en journée. Elle avait des absences par moment. Ne sachant plus ce qu’elle faisait là, ni depuis combien de temps. Pourtant, jamais cela n’avait eu de conséquences sur son travail et cela commença à lui mettre le doute.
    -Vous ne voyez pas d’inconvénient à ce que l’on fouille votre chambre ? Lui demanda Ludivine.
    -Aucun… Qu’aurais-je à y cacher ?
    -Un jeu de tarot ? Rétorqua la sœur.
    -Allez-y, je n’ai rien à cacher.
    -J’en suis persuadée, mais quelqu’un essaie certainement de vous manipuler. Magos ? Allez fouiller sa chambre, en attendant, nous allons tous descendre – vous aussi lieutenant – pour voir ce qui aurait bien pu pousser notre astropathe par la fenêtre.
    Tous lui emboitèrent le pas tandis que le magos Solutex resta là à émettre une plainte en binaire.

    Le jour était en train de se lever sur la mer des Sept Vents qui portait bien son nom. Un vent du large soufflait par bourrasque et il fallait bien prendre garde en marchant sur les rochers qui donnait vers les vagues afin de ne pas tomber. Des plantons étaient là pour garder le corps. Du moins pour empêcher que les oiseaux marins voraces ne viennent se charger de la dépouille. Son corps était nu et sa robe de chambre était un peu plus loin, coincée entre des rochers. Sans doute était-il tombé avec et s’était-elle laissé emporter par le vent. Ce fut Vesuvio qui se chargea d’ausculter l’astropathe. C’était lui qui possédait la meilleure analyse des cadavres et des causes des décès, du fait de sa longue expérience de militaire. Il savait différencier un coup de lame tronçonneuse d’un bolt et dans ce cas, son regard pouvait s’avérer précieux. Il s’accroupit et observa le corps, n’hésitant pas à soulever certaines parties afin de regarder dessous. Syulf l’assistait, prenant des notes sur sa tablette, au fur et à mesure. Ils devaient porter de la voix pour se faire entendre, à cause du bruit du vent et des vagues qui se fracassaient sur les rochers, vingt mètres plus loin. Syulf inspecta les ongles du défunt, à la suite de la remarque de Säde. Il finit par y trouver effectivement des échardes de bois et les préleva.
    -Nous pourrons toujours vérifier avec la rambarde, mais cela semble bien correspondre, leur dit Säde.
    -Il a bien une trentaine de fractures et sans doute plusieurs organes internes éclatés, déclara Vesuvio. La chute l’aurait assurément tué s’il n’était pas mort avant.
    -Il est mort avant ? L’interrogea Syulf.
    -A en juger par le manque de sang et d’éclaboussures sur les rochers, ainsi que la densité des membres, je dirais qu’il lui manque deux bons litres dans le corps. Et comme cela n’a pas été fait après sa mort, je dirais que quelqu’un ou quelque chose l’a siphonné avant.
    -Qu’est-ce qui aurait pu lui faire ça ? S’étonna Ludivine.
    -Ne me dites pas que ce seraient ces horribles écureuils aperçus hier ? Lâcha la famulus avec une grimace de dégout.
    -Et moi qui les trouvais trop mignons, ajouta Ludivine.
    -Les ptérocureuils ? S’étonna Syulf. Je ne pense pas. Ils ont bien la capacité de sucer le sang de leur victime ou de manger leur chair mais ils sont bien trop petits. Même une fois transformés en bête sanguinaire. Pour vider deux litres de sang, ils auraient dû s’y mettre à cinq sur lui, au minimum, or je ne vois pas de traces de morsure d’animal.
    Vesuvio souleva la tête de la victime et nota deux trous à la base du cou, au côté droit.
    -Et ça ?
    Syulf inspecta la trace et releva quelques mesures.
    -Cela ressemble plus à la morsure d’un grand carnivore. Un loup peut-être ou une créature buveuse de sang de taille équivalente.
    -Comme quoi ? L’interrogea Ludivine. Trône, mais quel genre de créature boit du sang ?
    -Croyez-moi, ma chère, lui répondit Alexia, vous n’avez certainement pas envie de le savoir.
    -Des sorciers ou des mutants pourraient faire cela. Précisa Syulf sans faire attention à la remarque. Des cas de nécrophilie ont été très largement documentés.
    La sœur le foudroya du regard tandis que Ludivine se retenait de ne pas vomir.
    -Ou… Ce pourrait aussi bien être un strix, continua Syulf.
    -Un quoi ? S’étonna Ludivine.
    -D’anciennes légendes parlent d’entités warp ou xenos, buveuses de sang et changeuses de formes. L’histoire leur a donné bien des noms…. Stryge, upir, vampire. Ce ne sont que de vagues légendes mais avec le warp, nous avons appris à réviser nos certitudes.
    -Trône, nous avions bien besoin de cela, ici et maintenant, maugréa Ludivine tout en voyant justement l’intendant qui approchait en prenant garde à ne pas se tordre les pieds dans les rochers. Il s’approcha mais prit garde à ne pas trop regarder le cadavre sous peine de se sentir mal.
    -Je crains bien qu’il nous faille retirer le corps de votre malheureux compagnon d’ici peu. La marée est montante et d’ici une trentaine de minutes, les vagues seront là et l’emporteront. Nous sommes en pleine marée d’équinoxe, de surcroit.
    -Qu’est-ce donc ? S’étonna Ludivine.
    -Les grandes marées. Une fois par an, notre lune se rapproche de Bremedia et à un autre moment de l’année, elle s’en éloigne. Mais tous les douze cycles, il y a les grandes marées d’équinoxe qui accentuent encore plus ce phénomène, annonciatrices d’évènements hors du commun, selon certaines superstitions encore vivaces. Mais je ne cherche nullement à vous assommer avec des questions d’astromancie. Je tenais tout simplement à vous mettre en garde sur la marée montante et aussi vous informer du…
    Ludivine indiqua à Syulf et Vesuvio de remballer leurs affaires, voyant deux gardes du palais portant une civière afin d’emmener le corps vers le palais.
    -Et aussi nous informer du ? Reprit Ludivine.
    -Ah oui… J’allais oublié le plus important… Hier soir, le Haut Monarque avait prévu de vous convier à une chasse ce matin… Et, aux vues de cet évènement tragique, il a jugé bon de la reporter à plus tard.
    -C’est fort aimable de sa part. Je le remercierai à l’occasion.
    -Eh bien justement, l’occasion se présente… Le Haut Monarque a tenu à organiser un petit déjeuner ce matin afin de vous présenter à ses barons. Il tient à ce que je vous informe que votre présence y est grandement souhaité.
    -Ce matin donc ? Vers quelle heure ?
    -Dans trente minutes, exactement.
    -Trône, je…. Très bien. Le temps pour moi de me rendre présentable et je vous rejoins. Ah, au fait, Disposez-vous d’une unité verispex ?
    -Désolé, mais j’ignore de quoi il s’agit, lui répondit l’intendant.
    -De médecins légistes de l’Arbites, ajouta Syulf.
    -Ah… Nous disposons de médecins au palais, oui, mais nul besoin ici, de l’Adeptus Arbites. Nos dirigeants savent gérer la population.
    -Et la présence d’une morgue ?
    -L’infirmerie dispose de ce genre de chose, en effet. Nous allons y déposer le corps là-bas.
    -C’est d’accord, mais mon équipe assistera votre légiste.
    -Fort bien capitaine. Si vous n’y voyez pas d’inconvénients, je vais faire enlever le corps.
    -Faite.
    Elle les laissa prélever le corps et s’éloigner avec, avant de se tourner vers Alexia et les autres.
    -Hâtons-nous d’aller nous changer, et par tous les saints, que l’un de vous aille contacter le Morning Star de toute urgence, informez le capitaine Goldberg qu’il descende nous rejoindre dans la journée avec un plan déjà bien ficelé pour l’offensive sur Onidès.
    -Aura-t-il les moyens de s’en charger, selon vous ? S’étonna la sœur, quelque peu dubitative.
    -J’ai pleinement confiance en mon futur époux, Alexia. Si je suis la plus diplomate des deux, lui, il est assurément le plus porté sur l’action.
    -Alors une chance que ce soit nous qui allions rencontrer ces barons bellicistes en premier. Seul le Trône sait en quel bain de sang cela aurait tourné dès la première heure si votre futur époux avait pris le petit déjeuner avec eux.
    Ludivine lui lança un regard désapprobateur. Elle marqua une pause avant de répondre avec un petit sourire.
    -Je ne peux vous donner entièrement tort.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 22/01/2025 à 23:48 Citer ce message

    Strategium du Morning Star, au même moment.

    Jocasta, après avoir effectué une séance de tarot, s’était empressée de rejoindre les autres officiers dans le strategium, en courant. Elle leur montra les cinq lames qu’elle venait de tirer et les disposa sur la table.
    -Et que sommes-nous censés y voir, Mademoiselle Jenassis ? Lui demanda Uriah qui terminait sa tasse de café. La cartomancie reste une science assez cryptique, vous savez ?
    -Il est question de ces portails sur Bremedia, vous vous rappelez ?
    -On s’en rappelle parfaitement. Vous avez donc leur localisation précise ?
    -Ce n’est jamais aussi simple, ni aussi précis, vous savez…
    -Vous avez au moins un indice ? Quelque chose ?
    -Au moins deux, je pense. Passons la carte située au centre du schéma… Elle me représente et sa position est plutôt positive. Mais passons à la seconde, situé au-dessus. Le 4 de la suite de Mandatio, la carte de l’Adepte. La lame est ascendante, elle apporte donc une solution à la question. En revanche, la troisième lame, située au-dessous… Représente le 8 de la suite de Discordia, l’Heretek. Elle est en position descendante et en rapport avec la lame centrale, elle l’informe que cette menace est déjà présente et pourrait clairement menacer la carte d’Adeptio… Celle de l’Adepte. La quatrième lame, située à gauche est le 19 d’Arcanes majeurs. La lame de la Guerre. Elle montre un guerrier géant de métal, brandissant deux haches, trônant sur des ruines xenos écrasées, devant un temple à degrés. Sa bannière indique « Unending Warmonger ». La dernière, enfin, placée à droite de la carte centrale est le 9 de la suite de Discordia. Le Kraken, qui indique un danger encore non identifié. Elle prend l’apparence d’un scorpion. Descendante, elle signifie que le danger est déjà présent.

    Uriah semblait encore moins avancé avec toute ces élucubrations. En revanche, Altaïr les observait avec le plus grande attention, prenant soin d’observer les détails, qui comme toujours avec le tarot, étaient des paraboles.
    -Dis-moi Jocasta, ta carte à droite, là, c'est bien un scorpion ?
    -En effet…
    -Parce que si l’on regarde le plan de Bremedia, dans la région sud-ouest, il y a l'oriflamme de la famille Sahida qui représente justement un scorpion non loin d’une sorte de pyramide... et qu'est-ce que l'on a juste en dessous, au nord ? L'oriflamme de la maison Orloaf qui représente deux haches entrecroisées, comme porte ce géant sur ta carte. Et là aussi, nous avons une sorte de pyramide non loin de là… Ma belle, bravissimo ! Je crois que tu as tapé dans le mille, encore une fois.
    -Et toi, la Science qui démontre encore une fois tes talents en discernant la signification de ce tarot, lâcha la Brute, impressionné.
    Le sénéchal eut un sourire faussement modeste
    -Simple question de logique…
    C’est alors qu’il revient sur la carte de l’Adepte, qu’il avait à peine survolé jusque-là. Il la prend soudain et la fixe.
    -Non, pas elle… Ce n'est pas possible !
    Il se tourne vers Jocasta.
    -Tu me joues un tour, Jo ? Ou bien c'est toi Djoko, qui lui a soufflé l'idée ? Pourquoi Ephèse est représentée sur cette carte ? C’est une blague ?
    -Oh là, du calme, la Science ! J’aime beaucoup les blagues mais là tu fais fausse route, répondit Djoko depuis le fauteuil où il était tranquillement posé, occupé à boire un tana bien chaud.
    -Nan, mais regarde, c'est bien elle pourtant ! Qu'est-ce qu'elle foutrait ici ? Et surtout, comment est-elle arrivée là ? Insista Altaïr.
    Ni Jocasta ni Uriah ne comprennent un traitre mot à ses allusions. La Brute lança alors un regard vers Djoko.
    -Il nous fait quoi là ? Le mal du warp ?
    -Ephèse, bon sang la Brute, ne me dis pas que tu ne te souviens pas d'elle ?
    -Je me souviens très bien d'elle, et tu dis que tu la vois sur la carte là ?
    Altaïr lui montra la carte.
    -Elle a changé… Je la voyais plus…
    -Cela remonte à dix ans.
    -Il a raison, bordel, lâcha Djoko qui s’approcha de la carte.
    -C'est bien elle, finit par reconnaitre la Brute.
    -Par le warp, mais c'est qui cette Ephèse, enfin ? Demanda Uriah.
    -Une des ex d'Altaïr. Une archéotechnologue croisée sur Badab. Tu connais l'histoire des fausses reliques de Sebastian Thor que notre ami la Science avait cherché à refourgué et pour lesquelles il s'était fait chopper par l'Arbites ?
    -Oui... Tu penses bien… Qui n’en a pas entendu parler ? C'est donc cette adepte qu'il avait escroqué à l'époque ?
    -Tout juste. Et on l’avait donc recroisé sur Badab des années après. De mémoire, elle a des connaissances sur les aeldari, là où on l'avait croisé, c'était des ruines aeldari, d’ailleurs.
    -C’était le cas, confirma Altaïr.
    -Nan, mais on ne peut pas faire deux pas dans cet univers sans tomber sur une de ses ex ? Et moi qui croyais que le spécialiste dans ce domaine, c’était Djoko. Et en plus, tu n’es pas en odeur de sainteté auprès d'elle. Et pourquoi elle serait sur cette foutue planète, selon toi ? Je croyais que Bremedia était perdue pour l'Imperium. Entre les pirates et tes ex, on va finir par y croiser qui encore ? Le Primarque ?
    -Au moins, mes ex n’ont jamais porté préjudice à cette équipe ou à ce navire que je sache, clarifia Djoko. Et ce n’est pas moi qui fricote avec une drukhari à l’heure actuelle…
    -On en parle de la fois où tu as dragué cette marshal alors que tu étais recherché ?
    -Jusqu’à présent, mes histoires n’ont jamais interféré avec la sécurité du Morning Star.
    Et il fixa Uriah et Sylmann en le disant.
    -Enfin revenons à notre affaire, lâcha Uriah. Pourquoi cette Ephèse serait notre solution, elle possède des connaissances qui pourraient nous aider dans ce cas ici présent ?
    -Il faut croire que oui, souffla Altaïr.
    -Et du coup si je comprends bien, la Science et Jocasta, vous avez trouvé les portails. Ce qui ne nous arrange pas c'est qu’il y en a deux. On n’a pas plus de précisions sur celui qui pourrait nous intéresser ?
    -Un seul des deux pourrait suffire, répondit la Brute.
    -Et pourquoi pas demander à ceux qui connaissent plus le coin ? Comme Naazarith justement ? Proposa Altaïr.
    -Va la chercher, lui dit alors Uriah.

    Quelques dizaines de minutes plus tard, le sénéchal était de retour avec la drukhari.
    -Vous m’avez fait demander, capitaine ? Lui dit-elle.
    -Vous avez mis du temps.
    Djoko nota qu’Altaïr saignait un peu de la lèvre ou peut-être de sa langue. Naazarith avait elle aussi, un peu de sang sur elle.
    -Votre intendant a besoin de discipline. C’est justement ce que je lui inculque, lui dit-elle.
    Elle se dirigea vers la table et se servit un verre de vin, malgré l’heure très matinale.
    -Nous en reparlerons… Mais je souhaitais que vous nous éclairiez sur la présence de deux portails situés sur Bremedia. Sauriez-vous où ils se trouvent ? Notre sénéchal ici présent pense qu’ils se situeraient ici et ici, près de ces pyramides.
    Elle observa la carte tout en goûtant à son vin avant d’effectuer une petite grimace.
    -Il a raison. Ah tiens… je pensais qu’ils ne fonctionnaient plus depuis bien longtemps ces deux-là…
    Uriah resta sidéré par la remarque.
    -Quoi ?
    -C’est bon, je peux y aller ? Je suis assez occupée en réalité… J’ai encore besoin de lui, dit-elle en désignant Altaïr.
    -Alors non. On a des questions sur ces portails justement, vous savez où ils mènent ?
    -Allez donc savoir où ils pourraient mener ? Ici, ailleurs, partout…
    -Par quel moyen pourrions-nous les repérer précisément ? Et ne me dites pas qu’il vous faut venir sur place.
    -Je pourrais bien venir sur place, en effet…
    Elle effectua un geste théâtral en direction de Jocasta.
    -De mémoire, l’un d’eux est détruit de longue date. Mais vos petites sorcières peuvent peut-être les repérer, j’imagine.

    Uriah et ses officiers se mirent à discuter entre eux, à part.

    -Au fait… quelqu’un a écouté ce que j’ai dit ? Ajouta la drukhari qui gouta un verre d’amasec avant de le recracher aussitôt. Parce qu’on parle là de portails et c’est pas comme si Krieger n’avait pas déjà des informations à leur sujet.
    Uriah se tourna vers elle. Les autres restaient à bonne distance, voyant à quel point Naazarith aurait pu être un fauve lâchée dans la pièce.
    -Attendez comment ça il a déjà des informations dessus ?
    Elle tourna lentement autour de la table en laissant ses ongles tranchants racler dessus en crissant, visiblement agacée de devoir expliquer des détails aussi triviaux à un jeune mon-keigh.
    -S’il projette d’utiliser le portail sur cette lune, c’est qu’il sait exactement où il veut arriver… S'il compte arriver là où il veut, c’est qu’il en maîtrise déjà ses secrets. Ou croit les maîtriser…
    Uriah se prit alors la tête entre les mains ...
    -D’accord, bon on reprend depuis le début car là j'ai un peu de mal à suivre. Donc Krieger a trouvé un moyen de fabriquer ses machines hérétiques et en plus de ça, il a trouvé le temps de se renseigner sur cette technologie xenos et d'en percer les secrets alors que même vous, vous ne connaissez pas tout sur votre propre xenotech ?
    Elle s’arrêta net et riva son regard sur lui.
    -Je n’ai pas dit que je ne connaissais pas. Notre… technologie, comme vous l’appelez n’a pas été conçue pour être utilisée par d’autres races. Et il le sait. Il y travaille depuis vingt ans… Voilà pourquoi il avait besoin de cette tablette et de gens comme moi… Sans les deux, il va devoir user de moyens, bien plus… radicaux.
    -Vous venez pourtant de nous dire que vous ne savez pas où les portails pourraient mener.
    -J’ai dit : Allez donc savoir où ils pourraient mener. Ici, ailleurs, partout… Et c’est le cas. Ils ne mènent pas que vers cette lune.
    -Pour moi, être aussi vague en présence d'alliés, ne serait-ce que temporaire, est le signe que soit on ne sait pas mais que l'on tente de faire bonne figure, soit que l'on essaie de les doubler. Je n'arrive pas encore à savoir dans quel camp vous êtes. Mon sénéchal a l'air d'apprécier votre compagnie mais pour ma part je suis plus circonspect. Alors effectivement vous nous avez sauvé d'une bien mauvaise situation mais là, j'ai l'impression que vous essayez plutôt de gagner du temps. Vous êtes dans quel camp, Naazarith ?
    -Son camp à elle, déclara Djoko. On a autant besoin d’elle qu’elle de nous. Quoi qu’elle puisse en dire. Si elle reste, c’est certainement par intérêt, mais elle me corrigera si l’envie lui prend de le faire. Mon petit doigt me dit qu’elle s’amuse beaucoup et que tant qu’elle s’amusera, elle nous lâchera bien deux ou trois os à ronger si on peut lui foutre la paix derrière. Je me trompe ?
    Naazarith esquissa un léger sourire carnassier.
    -Mon propre camp serait une réponse appropriée, oui… il a raison.
    -Si vous pouviez éviter de trop nous esquinter notre sénéchal, on vous en sera très reconnaissant, ajouta Djoko.
    -Votre camp… c’est quoi votre camp après tout ? Vous roulez pour vous, vous aussi, non ? Donc on a un même intérêt, lui dit Uriah.
    -J’ai ouvertement trahi Krieger car il incarne ce que nous combattons. Je pense qu’il est plutôt courroucé, me concernant, vu les dégâts que je lui ai causés… Je pourrai déjà m’en contenter. Mais comme la partie n’est pas terminée et que j’aime jouer… Montrez-moi votre carte.
    Uriah lui posa la carte sur la table.
    -Là au nord, se trouve l’ancien portail. Il est endommagé et en partie détruit, raison pour laquelle Krieger vise celui situé au continent sud… Mais si je ferme celui du sud, celui du scorpion… et que je crée une dérivation. Ceux qui l’emprunteront vont se retrouver redirigés vers celui du nord, celui de la double hache. Celui endommagé… Et là, ils seront pris dans un nœud temporel… Propulsés dans le warp. Ce n’est pas propre et mes cousins détestent ça mais j’aime ce genre de plan. C’est un piège qui pourrait fonctionner. Il y a toujours un risque cependant.
    -Ah ! Ce serait un solution intéressante à notre problème effectivement. Et que vous faudrait-il pour vous aider à réaliser cette fermeture ?
    -Il faut que je sois sur place. Là où est le scorpion. Comme je lai dit, il y a un risque. Le risque est une implosion du portail nord au moment de leur translation et qu’une partie des troupes parviennent à passer.
    -Si ce plan fonctionne et considérant votre participation active je serai enclin à vous demander ce que vous souhaiteriez comme récompense, dans la mesure du raisonnable, évidemment.
    -Mes demandes sont tout, sauf raisonnables… capitaine Goldberg. Mais peut-être tenterais-je de faire un effort.
    -D’ailleurs pour cette histoire de change-forme, avez-vous progressé ?
    -Ah oui, au fait… C’est un strix.
    -Et c'est quoi un Strix ?
    -J’en étais sûr, marmonna Altaïr occupé à essuyer le sang sur sa bouche.
    -Une puissante entité qui contrôle les esprits faibles et qui se nourrit de leur essence vitale…Répondit Naazarith. Même nous autres drukhari, nous les trouvons dangereux. Ils sont un véritable défi à traquer. Un vrai plaisir…
    -J’imagine qu’une personne aussi extraordinaire que vous ne recule jamais devant un défi ? La nargua Djoko.
    -Si, détrompez-vous. Je ne relève que les défis qui m’amusent.
    Elle s‘arrêta justement devant la momie xenos exposée dans le strategium. Celle en forme de cocon insectoïde.
    -Intéressant. Vous les appelez bourdonneurs, dans votre langue, je crois. Leur véritable nom ne pourrait d’ailleurs se prononcer avec votre simple dialecte. Ces insectes avaient beau avoir l’air primitifs, ils connaissaient l’origine de notre univers ainsi que celui du warp. Ils se sont pourtant éteints à l’époque où vos ancêtres primates mangeaient encore des bananes dans les arbres, avant qu’on ne vous fasse un peu évoluer. J’ai toujours trouvé cela terriblement fascinant…

    Un officier junior vint se présenter à la porte du stratégium et salua.
    -Un message de la passerelle, seigneur-capitaine.
    La Brute alla récupérer la missive et congédia l’officier. Il parcourut la lettre puis la remit à Uriah qui la lut à son tour.
    Il releva le nez du message.
    -Ludivine a pu s’entretenir avec le Haut Monarque de Bremedia. Elle rencontre les barons dans la journée.
    -Bonne nouvelle, répondit Altaïr.
    -Notre présence est requise rapidement. Visiblement, leur monarque veut connaitre notre stratégie dans la journée.
    -Je vais lancerles préparatifs, annonça la Brute.
    -Attends… Leur astropathe est mort.
    -Mort ? Un accident ? Demanda Djoko.
    -Justement, elle n’en sait rien…
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 24/01/2025 à 21:25 Citer ce message

    Uriah se tourna vers Altaïr.
    -Tâche de contacter Säde. Elle est sur place, elle saura sans doute nous renseigner.
    Le sénéchal hocha la tête et se dirigea vers la console vox qui communiquait avec la passerelle. Déjà, la Brute venait d’enclencher la rune et d’obtenir la connexion. Il lui passa le combiné afin qu’il puisse s’entretenir avec l’officier vox de la passerelle, un des subalternes de Bonnet, justement. Il lui demanda de les mettre en liaison avec leur navette sur Bremedia. Cela prit quelques minutes pendant lesquelles Uriah en profita pour réunir les informations dont ils disposaient.
    -Bien… On doit donc se présenter à ce monarque avec un plan de bataille.
    Il se tourna vers la Brute.
    -Qu’a-t-on à leur proposer ?
    -Pour l’instant… Rien.
    -Je ne dirais pas ça, annonça Jocasta. On vient d’apprendre la présence de deux portails. En théorie, nous avons là, deux options. Soit une façon de lancer un assaut depuis Bremedia vers Onidès, avant que Krieger ne passe à l’offensive, soit nous suivons le plan de la drukhari et Krieger et ses troupes tombent dans son piège.
    -On parle là, d’un monde Chevalier, répondit la Brute. Je doute qu’ils acceptent l’emploi de technologie xenos pour remporter un conflit.
    - Ça s’est pourtant déjà vu, ajouta Altaïr.
    -Sans doute, mais je ne parierai pas sur le fait de les convaincre de passer par un portail aeldari.
    -On a cependant un problème de délai, leur dit Jocasta.
    Elle tourna son regard vers la drukhari étendue avec nonchalance et ennui sur un des sofas.
    -Naazarith nous a confirmé que Krieger travaille à une solution… Radicale. Il va donc finir par trouver le moyen d’activer son portail sur Onidès.
    -Elle a raison, Praxx l’avait évoqué, répondit Altaïr.
    -Très bien… On a une idée du temps qu’il va lui falloir pour y parvenir ? Questionna Uriah.
    -Quelques jours, je dirais, se hasarda Jocasta. Elle se tourna vers Antinoé, restée jusque-là silencieuse. Une idée du temps qu’il lui faudrait, selon vous ? Lui demanda la navigator. L’astropathe resta songeuse quelques instants avant de répondre.
    -Il va devoir employer un rituel puissant et très certainement profiter d’une date probable du calendrier lunaire. Ce ne sera pas avant une semaine… Dix jours, tout au plus.
    -Ce qui nous laisse un peu de temps, mais pas tant que ça. Tablons sur le fait qu’il lui faut maximum une semaine.
    -Côté troupes, nous disposons de quoi, en cas d’assaut au sol ? Demanda Djoko. Deux mille hommes ?
    -Environ mille cinq-cents fusiliers à bord, pour être précis, compléta la Brute. Mais ce sont des troupes de marine, pas un régiment de l’Astra Militarum. Ils sont taillés et équipés pour de l’abordage. On l’a vu sur nos derniers assauts. Et puis, je n’ai pas envie de les perdre dans un conflit au sol. Nous n’avons pas de possibilité d’obtenir des renforts dans la région.
    -Je croyais qu’après la Croisade, on nous avait laissé ces troupes qui venaient justement de l’Astra Militarum ?
    -Oui, la compagnie du lieutenant Haxton. Moins d’une centaine de vétérans. Ils ont quelques véhicules légers avec eux, parfait pour de la reconnaissance, de la guérilla ou de l’escarmouche mais ils sont bien trop peu nombreux pour être projetés sur tout type de conflit.
    -Merci du rappel, compléta Uriah. Ils pourront potentiellement avoir un rôle à jouer, en fonction de la tournure des évènements, mais pour l’heure, nous devons déjà prévoir et leur proposer un plan d’ensemble.
    -Nous avons Säde en ligne, le coupa Altaïr.
    -Capitaine, vous vouliez me parler ? Lui dit la jeune femme à travers le combiné vox. Uriah demanda à Altaïr d’activer le porte-vox.
    -Oui, lieutenant. Je voudrais un rapport de situation. C’est quoi cette histoire avec l’astropathe ?
    Säde Lindholm lui fit alors part des dernières informations, mais à ce stade, ni elle ni Ludivine ne possédaient encore la moindre piste, le corps n’ayant pas encore été inspecté. Elle leur parla de l’autopsie à venir ainsi que de la réunion avec le monarque et les barons.
    Uriah la remercia et lui demanda de le rappeler dès qu’ils auraient plus d’informations. Il coupa la connexion.
    -Bien, revenons à notre problème de portails. Donc si on suit le plan proposé par Naazarith, en bloquant le portail sud de Bremedia, nous aurions la possibilité de warper Krieger et son armée, sans nécessairement devoir tous les affronter. Ce serait très intéressant.
    -Dans l’hypothèse où ce plan fonctionne bien, ajouta la Brute. De toute manière il nous faudra poster des troupes au portail nord. Si des ennemis passent quand même, on les atomise. On aura des Chevaliers pour cela, nos deux vaisseaux et au besoin les troupes d’Haxton en soutien.
    -C’est entendu. Il nous restera à planifier l’attaque sur Onidès pour faire taire leur centre de commande des batteries orbitales. Elles sont protégées par un bouclier, ce sera peut-être une mission pour Haxton et ses hommes, justement.
    Il consulta l’heure avant de poursuivre.
    -Préparons-nous à descendre, nous avons un monarque à rencontrer.

    Ludivine et ses officiers venaient d’entrer dans le dinatorium où petit-déjeunaient le Haut-Monarque, l’oratrice, l’intendant et les six barons. Le monarque leur demanda d’approcher et de prendre place tandis que l’intendant fit les présentations. Pour ce type de réunion, l’intendant les avait informés que nulle arme n’était acceptée. Ils durent donc se soumettre à la règle. De toute manière, des gardes munis d’un auspex les contrôlèrent avant et tout objet jugé dangereux leur fut retiré.
    Le Haut-Monarque rappela les faits pour ses barons, notamment l’information sur une attaque prochaine initiée par Onidès. Tandis que les barons, à tour de rôle, y allaient de leurs questions insistantes, Ludivine et son équipe en profitèrent, tout en tentant d’y répondre, pour analyser les différentes personnalités qui se trouvaient face à eux. Ils notèrent assez rapidement que le vieux baron Octus Florentine lançait des regards noirs en direction du baron Corvin Zlhane tout comme envers le Haut-Monarque puisque ce dernier était aussi un Zlhane. Le fait qu’il ait été écarté du pouvoir devait clairement lui en coûter face à ses rivaux. La baronne Heldreda Sahida, elle, avait l’air de n’avoir que mépris pour tout ce que disait le baron Ratisbore Orloaf. En dehors de cela, elle restait plutôt attentive à tout ce qui se disait. Orloaf, lui, incarnait véritablement le général d’armée, massif, dans la force de l’âge, sûr de sa puissance de feu supérieure que rien n’allait ébranler. Il n’avait pas l’air de tenir ni Sahida, ni Ordil en grande estime. De leur côté, Eberhard Tourlaine et Fredegard Ordil étaient deux barons qui paraissaient en constante rivalité. Ils n’arrêtaient pas de s’invectiver et de se chamailler comme deux gamins, malgré leur grand âge, ce qui avait l’air de devenir un jeu chez ces deux rivaux. Zhlane, enfin, donnait cette impression de vouloir se tenir au-dessus de la mêlée, sans aucun doute à cause de sa proximité avec le monarque. Même l’attitude de l’oratrice fut observée. Ludivine décela chez elle une certaine enviez d’ambition pourtant refoulée par un manque de confiance. Ismael était un homme intelligent et elle doutait qu’il puisse se compromettre, cependant il était au courant de tout et devait clairement en savoir bien plus qu’il ne voulait le dire. Quant au monarque, c’était un homme direct, un peu bourru voire sarcastique, pourtant il n’avait pas l’air bien lucide des problèmes qui l’entouraient. Ces années d’isolationnisme avaient sans doute eu raison de sa vigilance.
    Les discussions durèrent ainsi quelques dizaines de minutes durant lesquelles, le Haut-Monarque n’hésitait pas à écorcher très légèrement, mais de manière toute délibérée, la libre-marchande. La reprenant lorsqu’elle n’avait pas de réponse à apporter ou encore s’impatientant quant à cette guerre à venir qui paraissait toujours aussi abstraite. Ses barons, heureusement trop occupés à se quereller, restaient encore dans l’interrogation. Orloaf, Tourlaine et Ordil étaient les plus curieux au niveau martial. Même si la baronne Sahida avait tout aussi l’air intéressée, elle cherchait à ne pas le montrer.
    A un moment de la discussion, le sujet de la projection des troupes de Krieger vers Bremedia fut abordé et notamment, sur le comment allait-il procéder. Il avait été question de portail – A ce moment, Ludivine ignorait encore la présence des deux portails ainsi que leur localisation.
    -Comment cela, un portail sur Bremedia ? S’étonna Tourlaine. C’est ridicule, nous serions au courant, non ? Dit-il en se tournant vers le reste de l’assemblée. Les autres barons se mirent à rire ou à vociférer.
    Pourtant, ce fut Säde qui releva un léger détail. Orloaf ne riait pas, pas plus qu’il ne paraissait étonné. Pire, il avait même l’air mal à l’aise. Elle comptait passer l’information à Ludivine mais cette dernière n’était pas à côté d’elle. Discrètement, elle sortit son stylus, griffonna quelques mots sur un coin de sa serviette puis fit mine de faire tomber sa fourchette par terre. Elle se glissa sous la table, profitant que le débat était houleux pour se diriger vers Ludivine. Là, elle lui passa la serviette et refit le chemin en sens inverse, reprenant sa place, couverte par Alexia qui comprit la situation. Un laquais lui remplaça aussitôt sa fourchette, sans avoir noté son manège. Ludivine qui avait la serviette sur ses genoux, lut le message rapidement. « Orloaf sait pour le portail ».
    Ce dernier était justement en train de subir les quolibets de ses confrères, pour avoir évoqué le fait qu’il était un meilleur chef de guerre qu’eux. Ce à quoi ils lui demandèrent à quelle guerre avait-il bien pu participer ces dernières décennies puisque Bremedia n’en avait plus connut depuis bien avant la naissance de leurs pères, voire de leurs grands-pères.
    Ludivine reprit aussitôt part à la conversation et en profita pour interroger Ordil afin de détourner l’attention. Ordil était un homme d’âge mûr. Grand et sec, il incarnait un certain aspect chevaleresque, fait de bravoure et de témérité. Elle ne doutait pas, en revanche, qu’Orloaf aurait une réaction.
    -Sans doute, ignorez-vous à quoi pourrait ressembler un tel portail ? Dit-elle.
    -En effet, capitaine Spinaiser, répondit Ordil. Eclairez donc cette noble assemblée de vos si grandes connaissances…
    D’un geste élégant, elle passa la main à Syulf.
    -Je vais laisser mon sénéchal vous répondre.
    Comme à son habitude, Syulf fit étalage de ses connaissances encyclopédiques, ce qui eut au moins le mérite de calmer les ardeurs guerrières de l’assemblée.
    Ludivine allait justement en profiter pour enfoncer le clou avec Orloaf, cherchant à le mettre en défaut. Elle capta son regard et pourtant, au dernier instant, préféra ne rien dire. Il savait des choses mais préférait clairement les taire en public. Elle jugea préférable de régler cela à part, à un meilleur moment. Parfois la patience et la subtilité étaient préférable à l’attaque frontale. Elle avait failli s’en mordre les doigts avec Kysnathian, des mois auparavant justement. Elle ne comptait pas commettre la même erreur.

    Le Haut-Monarque vida son verre, jeta sa serviette sur la table et se leva. Les convives se levèrent à leur tour.
    -Bien, je dois me retirer mais ce soir, j’organise une réception au palais. J’y attends le capitaine Goldblum ou Goldman. Qu’importe. Qu’il nous livre un plan de bataille avant que ces fils de grox d’Onidès ne débarquent. Je compte sur vous.
    Il se retira, aussitôt suivit de l’oratrice, de l’intendant et du baron Zlhane. Tous les autres quittèrent aussi la pièce en petits groupes. Tourlaine et Orloaf, même si Ordil tentait bien de les rejoindre, ce qui agaça Orloaf. Sahida échangea quelques mots avec Florentine avant que partir eux aussi, chacun de leur côté.
    L’intendant revint alors et vint trouver Ludivine.
    -Ah, capitaine, j’ai failli oublier… Vous comptiez vous rendre à la morgue pour votre malheureux astropathe…
    -En effet, nous comptions justement y aller.
    -Je vais vous accompagner, si vous le souhaitez ?
    -Volontiers.
    Il les conduisit jusqu’au bâtiment où des gardes en armes en bloquaient les accès pour des mesures de sécurité. Voyant l’intendant, ils les laissèrent entrer.
    -Je vous laisse ici ? J’ai quelques affaire à régler.
    -Oui, merci, Ismael.
    Elle le laissa partir et fit signe à son équipe, notamment à Suylf et Alexia qui avaient de bonne notions medicae.
    -Bien allons-y. Nous devons savoir ce qui a réellement tué notre astropathe.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 30/01/2025 à 22:04 Citer ce message

    Ils descendirent au sous-sol du bâtiment dans lequel se trouvait la morgue, une large pièce qui servait de laboratoire et en même temps de salle permettant d’autopsier des défunts. Un médecin se trouvait là, c’était un homme âgé, aux cheveux blancs, portant de petites lunettes. Son bras gauche était une prothèse augmentique rudimentaire mais utile à ses fonctions, car bardée de petits scalpels et de seringues afin d’effectuer des prélèvements. Il était affairé à préparer des instruments chirurgicaux lorsqu’ils pénétrèrent dans la morgue. L’air y était glacé et ils perçurent tout de suite la soudaine chute de température ne serait-ce qu’à la vapeur que produisait leur respiration. Malgré l’odeur forte de détergent, il y planait toujours une odeur tenace et plus rance, de viande avariée.
    -Ah, vous devez être la capitaine libre marchande, c’est bien cela ? Dit-il.
    - Capitaine Frae Spinaiser. En effet, lui dit Ludivine en plissant les yeux et en se couvrant le nez de sa main gantée. Alexia n’avait pas l’air très à l’aise, elle non plus.
    -Je suis le docteur Borman, c’est moi qui vais réaliser l’autopsie de votre… Astropathe. Ceux qui ne sont pas à l’aise avec cela, peuvent toujours s’écarter un peu, même s’il ne risque pas de vous mordre, dit-il avec un petit rire… Ou peuvent sortir, au besoin.
    Personne ne sortit ni ne partagea son humour macabre mais lorsqu’il retira le drap du cadavre, Ludivine et Alexia préférèrent prendre un peu de recul. Vesuvio et Syulf allaient assister le légiste et s’approchèrent de la table où était étendu le corps. Vesuvio en tant qu’ancien militaire, avait eu plus que son lot de cadavres dans la vie. De plus, il avait quelques notions de premiers soins. Quant à Syulf, il avait quelques années de pratique de la médecine à son actif. Cela ne le dérangea donc pas plus que cela. Même Säde approcha, par curiosité. Elle ne s’y connaissait pas en médecine mais son passé plutôt trouble dans la pègre, tout comme sa curiosité, lui donnaient une certaine confiance.

    L’autopsie dura quasiment une bonne heure, durant laquelle ni Borman, ni Syulf ou Vesuvio ne notèrent plus d’éléments notables qu’ils n’avaient déjà constaté. Une trentaine d’os brisés, plusieurs organes éclatés, occasionnés par une chute qui aura été assurément fatale. L’impact sur les rochers aura malheureusement effacé toute autre possible blessure, à l’exception de cette étrange morsure dans la cou. Le légiste resta circonspect.
    -C’est d’origine animale, à n’en pas douter, mais je n’arrive pas à en identifier la nature, dit-il tout en feuilletant ses vieux bestiaires.
    -Cela pourrait être un autre type de créature, non ? Lui demanda Syulf.
    -Vous pensez à quoi ? Lui dit le légiste de derrière ses lunettes.
    -Une sorte de mutant… Une entité hybride, un strix, que sais-je ?
    Le légiste eut un petit rire.
    -Tout est évidemment possible… Mais croyez-moi, nous n’avons rien de tout cela par chez nous. La dernière fois que l’on a eu une recrudescence de mutants, cela doit bien remonter à vingt ou trente ans… Et Dieu soit loué, ils ont été purgés manu militari. Il n’est pas forcément nécessaire de chercher très loin, parfois. N’avez-vous pas envisagé la possibilité que cette créature provienne tout simplement de l’un de vos vaisseaux ? Un animal ?
    -Nous y pensons, répondit Ludivine, mais préférons ne pas écarter si vite, la piste locale. Vous disposez d’une faune sauvage ici aussi.
    A peine eut-elle finit sa phrase que le mort sur la table se redressa d’un coup et se jeta sur le médecin légiste qui était situé juste à ses côtés. Ce fit si soudain et si surréaliste que tout le monde sursauta ou resta figé par une telle scène. Dans la pièce, deux autres corps étaient eux aussi étendus sur des tables d’autopsie et se redressèrent à leur tour. Les cadavres se mirent à marcher en direction de Ludivine et de ses compagnons. Vesuvio se recula d’instinct et se trouva acculé contre un meuble, soudain, le souffle coupé par une telle situation. Ils n’avaient aucune arme avec eux. Le protocole de sécurité faisait qu’ils ne pouvaient se déplacer armés dans certaines ailes du palais.
    Alexia, Syulf et Ludivine se précipitèrent, eux, droit vers une console où se trouvaient toute une batterie d’instruments chirurgicaux et empoignèrent des scalpels et tout ce qu’ils trouvèrent de pointu ou tranchant. Säde, effrayée mais pragmatique, se précipita vers la porte. En entrant dans le bâtiment, ils avaient été accueillis par des gardes, elle allait devoir les ramener ici et vite. Borman n’avait pas pu voir l’attaque venir. Personne d’ailleurs ne l’avait vu venir. Un mort n’était pas censé se relever. Syulf et Alexia avaient, bien sûr, déjà lu des histoires qui en parlaient et même à bord des navires, il pouvait arriver que des morts marchent lors de problèmes de translations warp, mais c’était heureusement rare. Pour Borman, c’était tout bonnement impossible. Il se mit à hurler tandis que le cadavre de l’astropathe venait de lui mordre le bras, celui encore valide et ne comptait pas le lâcher. Syulf chercha à le repousser et lui planta un scalpel dans l’épaule et vit que cela ne lui causa aucune réaction. Il se rappela alors qu’il fallait les toucher à la tête pour les tuer. Il cria l’information à tous ses compagnons.
    Les deux autres morts se jetèrent sur Alexia et Ludivine. La jeune libre marchande prit son courage à deux mains et surtout un long scalpel qu’elle planta dans la tempe du premier qui se jetait sur elle. Le mort-vivant tituba puis s’affala aussitôt au sol, inanimé.
    -La tête ! Syulf a raison !
    Alexia appliqua la même sentence et planta le sien en plein front, le renvoyant en arrière. De son côté, le medic et Syulf ne parvenaient pas à se débarrasser du dernier et ce fut Vesuvio qui tira le cadavre par derrière par un bras, lui empoigna la tête et la lui fracassa à plusieurs reprises sur le coin de la table en métal. Le crâne finit par éclater et il se retrouva couvert d’une matière sanguinolente, au moment où le corps sans tête de l’astropathe glissa au sol. Le légiste tituba tandis que son bras pissait le sang et que Syulf se précipitait pour l’aider.
    A ce moment, la porte s’ouvrit et les deux gardes entrèrent suivis de Säde. Leur première vision fut de voir une scène de carnage. Trois corps au sol, un bain de sang, le légiste blessé et des étrangers avec des scalpels à la main. Ils pointèrent aussitôt leurs fusils automatiques vers eux. Ludivine et les autres posèrent leurs lames et elle prit la parole, cherchant à se disculper, mais les apparences jouaient cruellement contre eux.
    Ce fut Borman qui les tira de ce mauvais pas.
    -Messieurs, baissez-vos armes, je me porte garant de la capitaine et de ses officiers. Ils m’ont sauvé la vie contre cette attaque.
    Un des gardes prit la parole, ne comprenant pas bien la situation.
    -Mais qui vous a attaqué ?
    Le légiste effectua un geste vague vers le sol.
    -Eux…
    -Mais ils étaient morts en arrivant, je ne comprends pas…
    -Eh bien il faut croire qu’ils n’étaient pas tout à fait morts, caporal.
    -Vous me dites que des morts qui n’étaient pas tout à fait morts, vous ont attaqué ?
    -Cela parait surréaliste, mais c’est bien le cas.
    Le caporal se tourna vers son collègue.
    -Va chercher le lieutenant, cette histoire n’est pas claire.
    L’autre garde obtempéra et ressortit.
    -En attendant, personne ne sort d’ici avant que l’on ait une explication claire à tout ce merdier.

    Syulf avait beau chercher à arrêter le saignement de la plaie du médecin, il jeta un regard à Alexia. Elle avait compris la même chose. Il risquait une infection qui risquait bien de le transformer à son tour dans les prochaines heures, lui aussi en mort-vivant. Il allait falloir agir et vite. Elle lui demanda de la laisser faire. La foi en l’Empereur-Dieu produisait parfois des miracles. Elle se chargea de la blessure en y appliquant un bandage enduit d’eau bénite.
    -Vous disposez d’un protocole de confinement en cas d’exposition à une infection ? Lui demanda-t-elle.
    -En effet… Et tant que l’on ne connait pas la nature de ce risque, je pense que nous allons tous être confinés dans ce bâtiment en quarantaine.

    Alexia venait de terminer son cataplasme et récitait une prière. Le légiste doutait un peu d’une telle pratique et, par acquis de conscience, la laissa terminer puis alla chercher sur ses étagères quelques cocktails antiseptiques à mélanger et à s’administrer. Ludivine en profita pour assembler son équipe, un peu à part et loin des oreilles du garde.
    -Personne d’entre vous n’est blessé ?
    Tous firent non de la tête. Elle jeta un regard à Vesuvio.
    -Vous êtes couvert de sang, général. Allez donc vous débarbouiller, cela risque de faire mauvaise impression.
    Elle reporta son attention vers Syulf, lui disant à voix basse.
    -C’est quoi cette histoire de quarantaine ?
    -On pourrait rester coincé dans le bâtiment, tant qu’on n’est pas sûr qu’on n’est pas contaminés, nous aussi.
    -Coincés ici ? Combien de temps ?
    -Je ne sais pas… Il faut entre six et huit heures pour que l’infection incube et transforme le patient. D’abord une fièvre dans les quatre premières heures, puis dans les six à huit heures, cela s’aggrave et finit par plonger le malade dans le coma. Il finit par en mourir puis se relève après cela, mais le délai varie parfois de quelques heures.
    -Vous voulez dire que ce qui est arrivé à… Notre astropathe et à ces deux malheureux, pourrait nous arriver, aussi ?
    -Je ne pense pas…
    -Il faudrait avoir été mordu ou griffé par ces morts-vivants pour cela, ajouta Alexia. Apparemment ce n’est pas notre cas.
    -Le légiste a été mordu… Il va lui arriver quoi ?
    -Il pourrait se transformer comme eux. Mais j’ai espoir que mes soins puissent le guérir, répondit Alexia.
    -Mais ce n’est pas certain ?
    -La foi est une certitude, capitaine. Dons ses effets le sont tout autant. Croyez-moi.
    Ludivine hocha la tête, ne pouvant pas lui donner tort.
    -Cela soulève quand même un point, ajouta Säde. Qui leur a fait ça ?
    -Qui est donc le patient zéro ? Répondit Syulf.
    -Certainement pas un de ces trois-là, lui dit Alexia.
    Syulf en profita pour se pencher sur les deux autres corps, désormais étendus sur le sol carrelé. Il finit, là aussi par trouver la même trace de morsure. Un au bras, l’autre à l’épaule.
    Ludivine interpela de nouveau le légiste.
    -Docteur Borman, qui sont ces deux autres victimes ? Quand ont-elles été amené ici ?
    Il se dirigea vers son bureau et préleva un dossier qu’il parcourut.
    -Deux serfs qui travaillaient aux abords du château. Des jardiniers, je crois… Leurs corps ont été retrouvé cette nuit et amenés ici. Je n’avais pas encore commencé leur autopsie. Selon les gardes, ils étaient morts, ce qui me pose un réel problème désormais.
    -On sait dans quelles circonstances ils ont été retrouvés ?
    -Leurs corps flottaient dans un bassin du château. Il n’y a pas d’autres éléments. Je devais justement déterminer la cause de leur mort mais là…
    Ludivine vint le trouver, lui parlant à voix basse.
    -Il est question de quarantaine à ce que j’ai cru comprendre. Combien d’heures cela dure-t-il ?
    -D’heures ? Ah non, il s’agit de jours. Une semaine, pour le moins.
    -Une semaine ? Cela ne va pas être possible, nous sommes attendus par le monarque ce soir.
    -Et si vous étiez malades, vous aussi ?
    -Nous n’avons pas été mordus, c’est cela l’origine de chaque contamination. Les deux autres ont aussi été mordus, comme notre astropathe.
    -Et comme moi…
    -Nous devons absolument sortir d’ici.
    Elle fit signe à ses officiers de la suivre vers la sortie, laissant le légiste totalement abattu sur son fauteuil. Vesuvio venait de terminer de se laver le visage, les bras et le devant de sa veste. Le garde à la porte leur fit cependant signe de s’arrêter, pointant son arme.
    -Personne ne sortira.
    -Et vous comptez faire quoi, caporal, tous nous abattre ? Lui dit Ludivine. Nous venons de sauvez le vie de votre medic et je suis actuellement attendue par votre monarque, je doute fort qu’il apprécie qu’un soldat un peu trop zélé aura empêché une telle entrevue et contrarié son précieux agenda.
    Elle toisa le regard du caporal. Ce dernier hésita mais comprit qu’il n’allait clairement pas pouvoir argumenter face à de tels propos. Il s’écarta et les laissa sortir.
    -Dépêchons-nous de vite appeler la passerelle du Daughter mais aussi celle du Morning Star. La situation commence à se compliquer.
    Vita locus Mors ludus

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