Vox Ludi le blog d'Illuminati

Nouvelle campagne - Les Perdus et les Damnés (suite)

  • Illuminati
    Illuminati

    le 06/10/2021 à 23:00 Citer ce message

    Ils repartirent du Lady Blackmore juste après. Chacun décidant de vaquer à ses propres occupations pour le reste de la journée. Pourtant, certains se dirent qu’ils n’allaient pas avoir de temps à perdre car les hérétiques avaient repris la main sur les derniers évènements. En ressortant, Derreck retourna sur ses pas et alla voir Justine, alors qu’elle et Jézabel avaient remis les scellés en place et s’apprêtaient à quitter le ponton.
    -Madame, j’avais une question à vous poser. Ce bateau est-il sous surveillance ? Ça pourrait faire une bonne planque, non ?
    Elle se tourna vers lui.
    -Le Lady Blackmore est actuellement saisi par l'Arbites, mais c’est un très bon point. Je vous conseille d’aborder ce sujet avec Tsali Liverance.
    Elle lui fit un petit signe et s’en alla.
    Il remonta le ponton en direction des quais. Il tomba sur Ezek qui l’attendait là, assis sur une caisse. Les autres étaient déjà partis.
    -Vous allez dans le Commercia ? Lui demanda Ezek.
    -Ouais.
    -Je vous accompagne.
    Ils longèrent les quais vers l’ouest en direction du quartier des entrepôts qu’ils connaissaient, afin de bifurquer vers le Commercia. Là, ils empruntèrent la rue Palatine jusqu’à l’angle de la rue du Calvaire en plein quartier marchand. La fin d’après-midi s’annonçait pluvieuse en ce mois de sagittar, annonçant la fin d’année et l'arrivée prochaine de la Sanguinala.
    -Vous cherchez quoi ? Lui demanda Ezek.
    -Je vais passer voir notre pote l’armurier. J’ai des questions à lui poser.
    -D’accord, je vais peut-être vous laisser. Je voulais faire quelques boutiques. Vous savez pas s’ils vendent des animaux dans le coin ?
    Derreck le regarda avec un air étonné.
    -Des animaux ? Comme ce canide que tu avais récupéré à Lynnbarra ?
    -Oui. J’ai dû le laisser sur le Thanatos et depuis… Bref… J’ai peut-être envie de m’en trouver un autre.
    -Aucune idée. Je crois pas avoir vu ça dans le coin.
    -Pas grave, je vais quand même me renseigner. Je vais peut-être appeler Lorne, je crois qu’il devait trainer dans le quartier lui aussi.
    Derreck lui fit un petit signe et le laissa à ses recherches. Il remonta la rue, consultant quelques annonces placardées à propos d’entrepôts et de containers à louer sur les docks. Il s’intéressa aussi aux tarifs des utilitaires. La ville commençait à voir de plus en plus de Tauros et de Goliath, ces derniers jours. Il nota quelques prix puis poursuivit jusqu’à Guns Workshop. Là, il entra dans la boutique de l’armurier et lui posa quelques questions. Il en ressortit avec un nom et une adresse. La boutique était à cent mètres de là, dans la même rue. Il la trouva sans peine et y entra. C’était bien un apothicaire. Il s’appelait Pasqual Drustus ou quelque chose comme ça. Il portait une paire de lunettes et avait les cheveux blonds grisonnant. Il attendit que les deux femmes devant lui, une fermière et une servante, soient servies. Elles papotèrent un instant, échangeant sur des banalités. Avant qu’elles ne ressortent il osa leur poser une question.
    -Vous ne connaitriez pas quelqu’un qui loue une chambre dans le quartier ?
    Elles posèrent sur lui un regard peiné. Le flux de migrants apporté par le retour du commerce créait une pénurie de logements en ce moment. Ces deux-là n’avaient pas l’air bien fortunées et lui répondirent qu’elles étaient désolées, avant de partir à la hâte, effrayées par l’éclat de ses yeux de hors monde.
    -Vous désirez ? Lui demanda alors l’apothicaire, depuis l’arrière de son comptoir. L’endroit sentait les herbes aromatiques, l’encens et le désinfectant.
    Derreck vérifia qu’il n’y avait plus personne. Il lui montra ses blessures.
    -C’est Attilas, l’armurier qui m’envoie. J’ai besoin de soins, mais discrètement. J'ai eu un accident et je me suis blessé en bossant sur les docks.
    L’apothicaire vint l’ausculter en faisant une petite moue. Les gars des docks se blessaient souvent mais ils allaient au sanitarium des sœurs, pas chez lui. Et puis, il savait reconnaitre une décharge de chevrotine quand il en reconnaissait une et il savait reconnaitre un docker d’un hors monde qui avait mis les pieds où il n’aurait pas dû. Fallait peut-être pas le prendre pour un grox de six mois.
    Il eut alors un petit sourire sarcastique, tout en commençant à y voir un peu plus clair.
    -Suivez-moi derrière, on va nettoyer tout ça. Il y a encore des éclats à retirer, vous risquez l’infection.
    Tandis qu’il s’occupait de traiter ses blessures et de retirer les plombs un à un, à l’aide d’une pince, Derreck lui lança, presque machinalement.
    -On m'a parlé d'un endroit que les gens du coin appellent la Basilique. Ça vous parle ?
    Il lui lança un regard blasé.
    -Alors vous… vous avez encore plus envie de vous faire casser la gueule, on dirait ? J’ai une conscience professionnelle, mon cher monsieur le docker. Je veux bien vous recoudre tout ça et vous filer quelques remèdes. Mais si c’est pour vous renvoyer à la mort juste après, ce serait comme tuer ma clientèle, vous voyez ? Donc oubliez ça si vous tenez à ce que je vous remette sur pied…
    -C'est une sorte de bar clandestin ou une sorte d'arène illégale, c’est ça ?
    -Voila… Parlons d’autre chose, si vous le voulez bien. Je vais vous recoudre tout ça.

    De leur côté, Lek et Felton avaient décidé de retourner aux Trois Chérubins, en remontant en direction du Scorbut et du quartier est. Chemin faisant ils échangèrent quelques banalités à propos de leurs armes, de la vie, des femmes. Arrivés sur place, ils s’installèrent au comptoir. Des clients étaient déjà là, bien occupés à boire quelques verres, à jouer aux cartes ou à batifoler avec les filles. Ils commandèrent une pinte de Golden Throne. Felton se leva, fit signe à Lek de garder un œil ouvert puis décida d’aller saluer Emelia qu’il connaissait et qu’il reconnut à l’autre bout du comptoir. Elle était en train de tenir un registre lorsqu’elle le vit et lui fit un petit sourire, remettant une mèche de ses cheveux blonds en place.
    -Salut, ma belle, comment tu vas ?
    -On fait aller. Les affaires reprennent enfin.
    -Dis, tu saurais me renseigner sur des habs assez grands mais pas trop chers ? Rien de clinquant et surtout dans des endroits discrets, qui n'éveillent pas les soupçons.
    -Felt, je suis un peu débordée en ce moment, tu tombes un peu mal, là.
    -T’aurais pas un nom à me donner ?
    Elle referma son registre et l’attrapa par le bras, le tirant vers un recoin de la salle, s’assurant que personne ne l’entende ni ne fasse attention à eux.
    -T’as du culot de ramener ta tête ici. Je sais pas dans quelle merde tu t’es foutu, mais il paraît que Constantin s’est fait descendre en pleine rue hier soir. Y a eu un paquet de témoins. T’aurais rien à voir avec tout ça ? Tu es le dernier qui devais le rencontrer, justement… Moi, je veux pas d’emmerdes avec les gars du Syndicat, tu vois ?
    Felton prit naturellement un air profondément peiné.
    -Ouais j'ai entendu ça, il se serait fait avoir par le Magistratum qui n'aurait pas fait dans la dentelle. Mais je n’y suis pour rien, tu peux me croire. Ça s'est passé après que je l'ai vu.
    Emelia fronça les sourcils et le dévisagea longuement mais vu qu’il n’avait pas l’air de lui mentir.
    -D’accord, je te crois.
    -Et pour mon histoire de logement ?
    -D’accord, je vais me renseigner. Là, on n’a rien, c’est la dèche en ce moment avec tous ces gens qui arrivent encore d’Eshunna et de Dieu sait où. Mais laisse-moi un jour ou deux, je pourrais peut-être te trouver quelque chose.
    Il lui fit un petit clin d’œil et s’en retourna au comptoir. Là, il finit son verre, posa deux pièces sur le comptoir et fit signe à Lek qu’ils pouvaient y aller.
    -Attends-moi dehors, je connais une fille ici aussi. Je vais lui poser la question.
    Lek attendit que Felton soit sorti pour faire signe à Mira. Elle venait de raccompagner un de ses clients lorsqu’elle le vit. Elle vint assoir son joli petit minois à la peau ambré, à côté de lui, un grand sourire sur ses lèvres peintes qui se mariaient avec les merveilleuses boucles de ses longs cheveux noirs et de sa ravissante robe pourpre. Mira n’était pas native d’Archaea, c’était une de ses filles des rues, une métisse née d’une mère pute et d’un père matelot originaire sans doute d’Hattusa ou de Badab, à voir la couleur de sa peau hâlée. Elle n’avait absolument aucun avenir en dehors de tels établissements. Lek l’aimait bien, il la trouvait vraiment jolie et elle était gentille avec lui en plus. Enfin, Mira avait l’air d’être gentille avec tous ses clients, il n’en savait trop rien, en fait. Ainsi maquillée, on aurait presque pu dire qu’elle avait l’âge de travailler dans ce genre d’établissement. Mais qui s’en souciait en fait ? Elle lui posa un bras sur ses épaules.
    -Tu m’offres à boire, mon petit chou ?
    Il fit signe à la serveuse et elle commanda ce cocktail qu’elle aimait bien, un Pacificus, un grand verre de joiliq, avec une touche de citrus, de menthe fraiche et des glaçons.
    -Je cherche un hab. Quelque chose de discret, ou même un endroit où crécher deux trois nuits pour moi et quelques potes.
    Elle releva un sourcil en le dévisageant. La serveuse lui déposa son verre devant elle. Elle le sirota avec délice.
    -Quelques potes ?
    -On est six.
    Elle eut un petit rire cristallin. Ce rire qu’il aimait tant chez elle.
    -Hé bin, tu t’embêtes pas, toi ! Vous devez faire des de ces fêtes !
    -Tu aurais quelque chose, dis ?
    -Trône, tu sais que ça se fait rare, les habs en ce moment. Mais tu as de la chance, mon beau gosse… J’ai un de mes cl… Enfin, je connais quelqu’un qui a peut-être quelque chose, il me doit un service.
    -Tu aurais l’adresse ?
    -Je te note ça.
    -Tu sais… l’écriture et moi…
    -Ok. Retiens bien. C’est Zacharie, il tient un bar plutôt sympa, La Dernière Chance, au 59 Boulevard du Trône dans le quartier est. Tu dis que tu viens de ma part. Il a viré les derniers occupants pas plus tôt que ce matin. Mais perd pas de temps, ce soir il l’aura déjà reloué.
    Il termina sa bière, paya les boissons et lui glissa quatre billets de dix de son décolleté, au passage avec un petit clin d’œil. Elle lui rendit son plus joli sourire.
    -T’es un seigneur, Lek. Tu veux pas venir dans ma chambre ? Pour te remercier. Lui dit-elle.
    -Pas aujourd’hui, ma belle, je dois y aller. Mais la prochaine fois, promis.
    Il lui posa un baiser sur le front.
    -Prends soin de toi, Mira.
    Il ressortit, tout en remettant ses gants en cuir et réajustant son long manteau. Il alla retrouver Felton qui l’attendait juste dehors.
    -C’est qui la charmante demoiselle ?
    Lek lâcha un sourire carnassier.
    -Pas touche, mon grand. Elle est à moi. En revanche, j’ai une adresse.
    -Ah ? Bien joué.

    En repartant des docks, Lorne et Rico avaient pris en direction du centre-ville puis s’étaient séparés, décidant de se retrouver un peu plus tard. Lorne voulait tout d’abord repasser à l’échoppe du ferrailleur, à deux rues d’ici, là où Constantin était mort la veille. Il laissa Rico remonter le quartier en direction du temple puis se dirigea vers la petite rue en question. L’endroit était encore bouclé par le Magistratum, comme il l’espérait. Il resta à observer, parmi quelques badauds lorsqu’il vit les deux enquêteurs de la veille, Parks et Merica. Il se rapprocha jusqu’aux limites du cordon de sécurité où des agents en armure noire lui firent comprendre de ne pas aller plus loin. Les deux enquêteurs étaient peut-être à moins de vingt mètres de là. Il leur fit un petit signe. Amos Parks le vit et s’approcha, le reconnaissant. Il indiqua aux agents de le laisser passer.
    -Il est avec moi, leur dit-il.
    Il l’entraina alors un peu à l’écart dans la cour de la boutique.
    -Vous voulez quoi ?
    -On a continué la piste de Constantin et on sait qu’il est mêlé à un trafic de drogues mais qu'il y a une organisation plus grosse derrière.
    -Oui on sait aussi que le Syndicat et Haxt sont derrière tout ça. On espérait justement obtenir des informations par le biais de Constantin mais il parait que vos copains l’ont malheureusement refroidi avant.
    -On a bien essayé de l'arrêter mais il n’en a fait qu'à sa tête... Si jamais on trouve d'autres informations, est-ce que ça vous intéresse ?
    -Oui, ça pourrait nous intéresser.
    -On a une piste que nous n'avons pas encore pu investiguer à propos du Syndicat sur Sandbarra. Une collaboration future de nos équipes pourrait s’envisager. Ça vous dit ?
    Shanis Merica vint les rejoindre, elle salua Lorne d’un signe de tête.
    -Sandbarra n’est pas sur notre juridiction mais on pourrait être preneurs pour des informations. Lui dit-elle. Là on n’a plus de témoins. Constantin et ses hommes sont tous morts, mais on sait qu’il préparait quelque chose. Il devait organiser un rendez-vous, mais on ignore quoi et où.
    -Vous êtes au courant pour le ferry qui a explosé ? Leur répondit Lorne.
    -On est au courant, vous pensez bien, avec le nombre de victimes.
    -Si vous entendez quelque chose, à ce sujet, on serait intéressé, ajouta Amos Parks.
    -On peut rester en contact du coup, lui dit l’enquêtrice.
    -Oui, carrément. De notre côté, on cherche aussi ce qu'ils préparaient.
    Parks lui donna un numéro d’identifiant vox.
    -C'est un vox automatique. Si nous sommes disponibles, nous répondrons, sinon il suffira de nous laisser un message.
    -Procédons comme ça. Bonne chance de votre côté et que l'Empereur vous garde, lui dit l’enquêtrice.
    -Que l’Empereur vous garde aussi. Il les salua et s’en retourna dans la ruelle.

    Rico avait remonté le quartier vers le nord en direction du Temple. Sur le chemin il s’était renseigner à propos de vendeurs de véhicules mais en dehors des adepta ou des grandes Maisons, il était plutôt compliqué de parvenir à s’en procurer. Il n’insista pas et retourna au templum de l’Angelus, où il retrouva le vieux père Ollanius qui préparait l’office. Ils échangèrent quelques paroles puis il se dirigea vers sa propre cellule où il avait entreposé ses affaires personnelles. Il se changea et revêtit ses robes de prêtre et ses pendentifs, laissant le reste de son équipement sur place. Il referma sa cellule puis se dirigea sur la Via Pius en direction du parvis de la cathédrale, toute proche. Il prit un instant pour l’admirer parmi la foule, avant d’entrer à l’intérieur et de murmurer une prière. Il remonta la nef en direction du chœur où il s’adressa à un groupe de prêcheurs, se présentant en tant que père Gallileus.
    -Je suis en quête de financement pour un projet et souhaiterait rencontrer le diacre ou sans doute le doyen.
    L’un d’eux se retourna vers lui, étonné. Rico leur exposa son idée. Ils l’écoutèrent et trouvèrent cela intéressant, d’autant plus - lui dirent-ils - que le cardinal en personne leur avait parler de mettre en place ce genre de projet. Pour l’heure, l’idée était encore en gestation, aussi lui proposèrent-t-il de rencontrer l’évêque, autorité qui pourrait avoir une oreille attentive.
    Vingt minutes plus tard, l'évêque Lionis de Yorke reçut donc Rico dans son bureau situé dans le palais ecclésiarcal situé derrière la cathédrale. Rico se retrouva en face d’un homme de haut rang, à la personnalité dure, peu avenante mais très fervente. Lionis l'écouta cependant avec intérêt. Il lui demanda de lui fournir quelques références aussi, afin de tester Rico, ajoutant qu'il ne le connaissait pas et voulait donc en savoir un peu plus sur lui, sur son parcours écclésiarchique mais aussi sur ses connaissances scholastiques relatives à la foi. Rico fut quelque peu mis à mal, mais parvint à broder une histoire des plus convaincantes, parvenant à duper l’évêque sur quelques thèmes bien choisis, lui faisant entendre ce qu’il avait bien envie d’entendre. Rico était avant tout un habile conteur et un roublard efficace, qui savait intéresser son auditoire, mais c’était surtout un ancien gagner de ruche qui avait su se hisser des bas-fonds jusqu’au sein de la noblesse décadente d’Eshunna comme peu de personnes. Son expérience en tant que prêtre n’était qu’un épisode, une étape de plus qui l’aidait à gravir les échelons à un moment de sa vie. Certes il avait la foi en l’Empereur, comme tout le monde, mais sa véritable passion restait avant tout la musique. Et pour elle, il pouvait bien s’habiller en prêtre quand cela allait s’avérer nécessaire.
    Lionis était aussi un vieux malin mais il savait reconnaitre le talent quand il le rencontrait. Il resta un peu sur sa réserve mais au moins il lui donna le bénéfice du doute.
    -Votre idée de radio évangélique m’intéresse, père Gallileus. En revanche pour la source de financement, que proposez-vous ?
    -Monseigneur, il n’y aurait que peu de besoins financiers car je dispose moins-même des compétences artistiques et techniques. De plus, elle pourrait également mobiliser des fidèles pour des kermesses ou lors des jours fériés, avec des dons pour accéder aux offices en direct. Ainsi, rapidement les officiants les plus prestigieux attireraient les foules, elle aiderait justement à bâtir cet engouement autour de certaines personnalités, toujours pour la plus grande gloire de l'Empereur, bien entendu.
    -Loué soit Notre Saint Empereur, l'idée pourrait m'intéresser. Vous comptez vous occuper à plein temps de ces offices ? Car cela va nécessiter du personnel qualifié mais avec un travail à plein temps. Je compte diffuser tout au long de la journée, notamment pour les cinq appels à la prière quotidien que j’envisage de mettre en place.
    -Monseigneur, vous m’en voyez ravi. Je ne pensais pas envisager si vite un tel rythme…
    -C’est impératif. Le cardinal le souhaite, il s’agit donc là de la volonté de Notre Empereur de Terra.
    -Il faudra évidemment de l'aide si on lance ce projet a une telle cadence. Je pourrai m’occuper d'une partie du contenu, de la direction technique et éditoriale, mais il faudrait alors penser à du matériel, des technomécanos et des prêcheurs afin de m’assister. Bien entendu, je pourrai réaliser des enregistrements de certains offices qui pourraient également être rediffusés. Une touche féminine dans l'équipe serait la bienvenue, telle qu’une sœur dialogus par exemple afin de représenter la ferveur envers la Sainte vivante, bien entendu. Enfin, si la radio a du succès, nous pourrions imaginer quelques diffusions dans la capitale via des servo-cranes.
    L’évêque resta pensif.
    -C’est exactement ce que j’avais aussi en tête. Voilà pourquoi ce projet est ambitieux et va demander des moyens et une logistique à mettre en place. Des locaux à trouver aussi, mais aussi investir dans du matériel et du personnel à former. L'idée est donc entendue père Gallileus, je vais vous prendre à l'essai. Vous avez une idée de nom pour cette radio ?
    -Je pensais à Radio Antiphonia.
    -C’est parfait. Ce sera Vox Antiphonia. Vous avez dix jours pour me présenter un projet abouti. Pour cela je vais vous adjoindre le soutien du diacre Gamaliel avec qui il vous restera à élaborer la partie logistique et financière, tout comme le recrutement.
    L’évêque le raccompagna alors hors de son bureau et le conduisit vers un petit scriptorium. Là il vint s’entretenir avec un jeune prêtre tonsuré, tel un novice.
    -Je vous présente le diacre Gamaliel avec qui vous allez travailler. Je dois vous laisser à présent car j’ai fort à faire. On se revoit dans dix jours.
    Rico s’inclina, le laissant partir avant de se tourner vers le diacre, heureux de se trouver enfin avec quelqu’un d’autre qu’un vieil ecclésiaste décati. Ils échangèrent alors quelques idées, enthousiasmés par leurs idées.
    -Retrouvons-nous demain matin à la cathédrale. Ainsi nous allons pouvoir commencer à travailler sur ce formidable projet. Nous aborderons la question du financement et étudierons le recrutement. Mais d’abord, afin de lever des financements, il nous faudra trouver des mécènes. L'archevêché apportera le personnel mais le budget de départ en lui-même, puis le budget de fonctionnement, devront être supportés par des dons. Cela va nécessiter des sommes conséquentes au départ, selon moi, il nous faudra trouver des sponsors plutôt rentables.
    -Vous avez des idées de sponsors, mon frère ?
    -Oui, je pense évidemment aux maisons nobles et aux adepta. Ce qui n’empêche pas de réaliser des quêtes auprès de la population mais pour cela, nous aurons le concours des paroisses.
    -Vous auriez des connaissances auprès des nobles maisons ou de l’Administratum ?
    -Malheureusement non, mon frère. Pas à mon niveau. Mais la foi nous y aidera, croyez-moi.
    -On se retrouve demain matin, d’ici là, je vais travailler l’idée et chercher comment intéresser l’Administratum et la noblesse.
    Il le salua chaleureusement et s’en retourna, plutôt satisfait. Il allait devoir se hâter et changer rapidement de vêtements afin de retrouver Lorne pour enquêter sur la pègre au Jardin d'Eden.

    Lek et Felton venaient de trouver la Dernière Chance. Le bar se situait au rez-de-chaussée d’un petit bâtiment dans la rue du Librarium, une rue plutôt chic. Felton laissa Lek passer devant en entrant. Ils observèrent les lieux, n’identifiant aucune menace, ils se dirigèrent vers le comptoir. L’ambiance était feutrée. Un sonographe jouait Honey, I miss you, une ancienne romance du Militarum, interprétée par feu, la grande Gallia Gilith. Felton s’assit un peu plus loin, à observer la salle. Tous deux commandèrent un verre.
    -Salut, je viens de la part de Mira, annonça Lek. Il parait que vous louez un hab ?
    Le patron du bar, Zacharie, l’observa. Lek présentait plutôt bien avec son style un peu classe et son regard ténébreux.
    -Mira, hein ? J’ai peut-être quelque chose. Premier mois payable d’avance. Tu as de quoi payer un loyer j’imagine ?
    -Sans aucun souci.
    Felton vint les rejoindre. Il tapota l’épaule de Lek.
    -Ça dépend du loyer, dit-il à voix basse, tout en sirotant son verre.
    Zacharie le regarda, à son tour.
    -Vous êtes ensemble, j’imagine… Le prix, c’est indiqué là. Il leur montra une annonce accrochée au comptoir.
    Lek jeta un regard vers Felton. Ils semblèrent tomber d’accord et hochèrent la tête. Felton désigna le plafond, à l’aide de son index.
    -L’appart se situe au-dessus, j’imagine ?
    -Il est au deuxième étage.
    -Possibilité de le visiter ?
    Zacharie appela une serveuse et lui demanda de le remplacer au bar. Il fit signe à Lek et Felton de les suivre jusqu’au deuxième étage. Ils visitèrent l’appartement mais tombèrent assez vite d’accord.
    Ils demandèrent au patron de leur laisser quelques minutes avant de donner leur décision.
    -On en discute avec les autres, avant, non ? Lui demanda Lek.
    -Ouais. Attends, je vais essayer de les appeler. Je crois que Lorne et Rico sont dans les parages. Il activa son microvox, cherchant à entrer en contact avec eux. Au bout de quelques minutes, n’ayant que des parasites en retour, il abandonna.
    -Alors, vous le prenez ? Leur demanda Zacharie.
    Felton fit un signe de tête à l’attention de Lek. Ce dernier se tourna face au tenancier.
    -C’est d’accord, on le prend.
    Zacharie sortit un document de sa veste, ainsi qu’un stylus.
    -Vous avez la somme avec vous ?
    Lek lui montra l’argent.
    -Voilà le contrat. Je vous laisse le lire et le signer. Ensuite je vous remets les clés.
    Lek et Felton se lancèrent un regard gêné. Lire un contrat était au-delà de leurs compétences.
    Felton saisit le stylus qu’il lui tendait puis signa le document comme il le put, au nom d'Harland Jaxx.
    Lek lui donna l’argent en l’échange des clés. Il empocha la somme, les remercia et redescendit vers le bar.
    -Bien, on n’a plus qu’à retrouver les autres, lâcha Lek.

    Le Jardin d’Eden ouvrait tard dans la journée, aussi Lorne et Rico s’étaient-ils retrouvés un peu plus tôt dans le quartier.
    -Du coup, tu as retrouvé les enquêteurs du Magistratum, c’est ça ?
    -Oui. La petite Shanis m’a même refilé son identifiant vox. Comme ça on pourra rester en contact avec eux.
    -Bien joué, lui répondit Rico, avec sincérité.
    -Et toi, tu es repassé au templum ?
    -C’est ça. Je suis passé chez l’armurier aussi pour des munitions et quelques babioles. Mais oui, je suis sur quelques projets en lien avec le Ministorum en ce moment.
    -Ha, parfait…
    Ils venaient d’arriver devant le Jardin d’Eden.
    -Bien, allons tâter le terrain et voir si on trouve des criminels potentiels sur place. On pourra toujours tenter de les identifier et les suivre, lâcha Lorne.
    -Pour les suivre, on verra, lui répondit Rico. Il n’y a que nous deux et je ne suis pas le mieux placé pour t’aider.
    Ils entrèrent dans le cabaret, jetant des coups d’œil vers les clients déjà attablés, occupés à boire et à écouter la musique jouée par un groupe classique dans le fond de la salle. Gloria Everdynn, la chanteuse, absolument solaire, interprétait My sweet little martyrdom de la mythique Arla Nephtali.

    Ils se posèrent à une table et commandèrent un amasec. C’était la première fois qu’ils mettaient les pieds à l’intérieur du Jardin d’Eden. Rico y était bien passé, un mois plus tôt, mais de façon assez furtive. En revanche, Lorne connaissait plutôt bien ce genre d'établissement et là, quelque chose lui disait que la pègre n'avait pas l'air d'être dans les parages.
    -Je ne vois rien de bien gênant, dans cette boite, lâcha-t-il, au bout d’un moment, tout en sirotant son amasec.
    -Ils sont prudents, voilà tout. Je pense que ça se passe derrière la boite. Il faudrait surveiller la porte de derrière, mais discrètement. Tu saurais faire ça ?
    -Vas-y. Je vais surveiller.
    Rico se leva et se dirigea vers l’arrière de l’établissement, cherchant à passer pour un client potentiel. Là, il trouva un petit groupe de jeunes. Il approcha d’eux et échangea quelques banalités.
    -Je cherche de quoi planer, vous auriez quelque chose à proposer ?
    Lorne resta en observation dans la salle lorsque son microvox se mit à vibrer. Il reconnut la voix d’Ezek.
    -Lorne, vous seriez dispo, là ?
    -Pas vraiment, je suis sur une piste.
    -J’aurai une demande un peu particulière, vous ne seriez pas dans le Commercia ?
    -Tu as besoin de quoi ?
    -Un coup de main pour trouver une boutique… Une animalerie…
    -Je suis un peu occupé là, mais si tu veux, on verra ça quand on se retrouvera.
    Il coupa la connexion, reportant, soucieux, son attention vers Rico. Ce dernier venait d’être approché par un jeune dealer qui était clairement en train de lui proposer quelque chose. Il prit son verre et approcha de manière discrète, écoutant la conversation. Il activa son microvox pour rester discrètement en contact. Il entendit le dealer parler avec Rico.
    -Si tu as de quoi payer, il y a peut-être moyen de te proposer quelque chose. Pour cinq cents creuds, j’ai de l’acide hédonique ou du survolte pour planer. Mais si t’as un peu plus de monnaie, j’ai aussi de l’essence rose. Avec ça, tu verras plus le monde pareil, crois-moi, mec…
    Lorne parla doucement dans son microvox, afin que Rico puisse l’entendre.
    -Ce ne sont que des drogues psychotropes qui permettent de se désinhiber. Mais ce ne sont pas des drogues illégales.
    Rico joua son blasé du coup, remerciant le type au passage, ce qui lui valut quelques insultes. Il ne releva pas et retrouva Lorne.
    -On fait quoi ? Lui dit ce dernier.
    -Le Syndicat a dû changer d’établissement, voilà tout. Allons retrouver les autres.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 04/03/2022 à 19:49 Citer ce message

    Capitale d’Archaea
    Quartier des docks
    Tempus estimare 870.020M42 – 00h03

    Suivant les indications d’Ezek, Lexxi et Derreck se dirigèrent discrètement vers le bâtiment où se trouvait, selon lui, un potentiel tireur. Personne au sein de la cellule ne comptait prendre le moindre risque car si tel était le cas, pénétrer dans l’entrepôt où se trouvaient Bosinski et ses hommes pouvait s’avérer être un piège. Depuis la rue et de nuit, ils ne voyaient presque rien, pourtant en approchant, Derreck et Lexxi virent qu’il s’agissait là d’une demeure d’habitation de trois étages. Une fenêtre, au dernier étage justement donnait directement sur l’entrée de l’entrepôt, situé à une cinquantaine de mètres de là.
    Parvenus à proximité de la bâtisse, ils repérèrent plusieurs entrées possibles, mais le calme relatif ne leur inspirait rien qui vaille, surtout si l’astropathe y avait décelé une menace.
    -Comment on fait pour en avoir le cœur net ? Passer par l’entrée ne me parait pas la bonne idée, surtout s’ils nous attendent. On pourrait passer par le toit. Tu as un grappin ? Lui demanda Lexxi en chuchotant.
    -Je suis d’accord, mais je vais passer en premier, lui répondit Derreck tout en sortant le grappin et le filin qu’il gardait dans son sac. Il lui fit signe de se reculer un peu alors qu’il commençait à se concentrer.
    Lexxi l’observa avec surprise et un peu de crainte, toujours aussi peu habituée au fait que Derreck était un psyker. Quelques étincelles aethériques commencèrent à parcourir ses doigts pourtant il lui était difficile de se concentrer pleinement, le regard de Lexxi le déstabilisa quelque peu.
    -Eh bien ? Lui dit-elle.
    Il ferma les yeux avec force et récita un mantra psykana alors qu’il sentit enfin les énergies du warp s’incarner en lui. Les effets du pouvoir ne dureraient pas bien longtemps, aussi se dirigea-t-il à la hâte vers la façade et entreprit-il de l’escalader à main nue, avec l’aisance d’un félide qui défierait les lois de la gravité. Parvenu avec souplesse et en quelques secondes sur le toit, situé à une douzaine de mètres du sol, Derreck préféra ne pas regarder en bas. Méthodiquement, il attacha solidement le grappin à un conduit de cheminée en briques et laissa la corde se dérouler jusqu’en bas, dans la rue. Lexxi s’en saisit et grâce à son incroyable physique, se hissa sans peine à la force des bras. Elle vint le rejoindre et se positionna elle aussi sur le faitage. Le toit était pentu aussi, allaient-ils devoir être très prudents. Sur la façade est, donnant vers l’entrepôt, se trouvait une fenêtre et un balcon, juste l’étage en dessous. Lexxi entreprit de descendre doucement du faitage dans cette direction, pourtant elle glissa sur les tuiles dont certaines se mirent à dévaler le toit, l’entrainant elle aussi. Derreck chercha à la rattraper mais la manqua de peu. Elle parvint cependant à se retenir juste entre deux pentes du toit et donc juste au-dessus de la fenêtre. Elle resta figée, là, presque au bord du vide, écoutant en serrant les dents, les tuiles qui continuaient de dévaler la pente pour aller s’écraser dans la rue, douze mètres plus bas avec des bruits de poterie brisée. Un chien aboya, à quelques maisons de là.
    -Et merde, lâcha Lexxi, qui se tenait en équilibre précaire au bord du vide. Derreck chercha à la rejoindre mais perçut du bruit, juste sous le toit où ils se tenaient tous les deux. L’instant d’après, des impacts de gros calibre étaient en train de pulvériser les tuiles tout autour d’eux. Des éclats et fragments giclèrent et sifflèrent en tous sens. Quel que fut le tireur situé juste en-dessous, il venait de les repérer et tentait de leur tirer dessus à travers le toit et à l’aide d’une arme puissante mais à silencieux.
    Lexxi, voyant que les balles sifflaient autour d’elle et allaient fatalement la toucher ou la faire chuter du toit, décida de sauter sur le balcon situé en contrebas. Derreck la suivit, en se laissant glisser et passant miraculeusement entre les projectiles. Se laissant tomber sur le balcon à son tour, il trouva Lexxi qui venait de faire basculer le fusil d’assaut qu’elle portait en bandoulière et le pointa vers la fenêtre située à moins de deux mètres de leur position. Il s’agissait du fusil Armageddon que Lorne avait acheté une semaine plus tôt. L’arme disposait d’un viseur mais aussi d’un silencieux. Derrière la fenêtre et à l’intérieur de ce qui devait être une chambre, se trouvait toujours le tireur, armé d’un long fusil de précision. Elle visa et lâcha une rafale dans la même seconde, qui le toucha et l’envoya voler dans la pièce où il s’affala contre une commode, renversant tout son contenu.
    Depuis leur microvox, ils perçurent les voix de Felton et Lek qui, depuis la rue d’en face, avaient perçu ce qui était en train de se passer et leur indiquaient qu’ils venaient les rejoindre. Rico et Ezek, restèrent cependant à surveiller l’entrepôt, au cas où Bosinski venait à bouger.
    Lexxi allait passer du balcon vers la fenêtre au moment où Derreck l’interrompit. Il venait de percevoir du bruit dans la bâtisse.
    -Il y a encore du monde, lui dit-il.
    Elle hésita. A l’intérieur de la pièce, elle vit le tireur qu’elle avait touché qui était en train de se relever. Les blessures qu’elle lui avait infligées n’avaient visiblement pas suffi. Il appela quelqu’un et la porte située juste derrière lui s’ouvrit. Depuis le couloir juste derrière, ils virent une silhouette. Derreck tenta un de ses pouvoirs de biomancie sur l’homme déjà blessé mais ce dernier y résista. Lexxi allait ouvrir le feu sur le nouveau venu mais ce dernier pointa un canon de poing équipé d’un silencieux et tira, il la manqua de peu. Lexxi pivota de côté et se remit à couvert. Elle dégaina une grenade à fragmentation, s’apprêtant à la lancer. Derreck interrompit son geste en posant sa main sur son bras.
    -Tu n’y penses pas ? ça va ameuter tout le quartier, Bosinski et ses hommes risquent bien de l’entendre.
    Elle hésita un instant, pointa de nouveau son arme en direction du tireur mais une balle lui frôla le crâne et la projeta en arrière. Elle se redressa en lâchant son arme et plaqua sa main sur son cuir chevelu, sentant un sang chaud et épais se mettre à couler abondamment. Elle se mit à jurer et furieuse, lança sa grenade dans la pièce, au moment où les deux hommes allaient en ressortir. L’engin explosif détona, faisant voler les vitres en éclats et trembler les murs dans un nuage de poussière, de fumées et de flammes. Le bruit se répercuta dans tout le quartier. Le temps que la fumée se dissipe en partie, Lexxi et Derreck avaient cherché à sauter du balcon vers la fenêtre mais Lexxi était actuellement suspendu dans le vide tandis que Derreck cherchait à l’aider. Cela laissa le temps à Felton et Lek d’entrer dans la maison, de gravir les étages et de se retrouver au troisième, là où la grenade avait explosé. Au sol se trouvaient deux corps. Celui du tireur d’élite et de son complice qui était déjà en train de se relever, cherchant à ramasser un de ses deux canons de poing. Lek ne lui en laissa pas le temps et lui logea deux balles dans la tête, à bout portant, mettant ainsi fin à une éventuelle riposte mais aussi à d’éventuelles réponses. Son sang gicla sur le mur adjacent puis il retomba au sol, touché mortellement.
    Felton n’eut même pas le temps de réagir.
    -Mais… ? On aurait pu… Commença-t-il à s’insurger.
    -Oui, bin, on aurait pu se prendre une balle surtout.
    Il lui désigna les deux hommes, tandis que Derreck aidait Lexxi à se hisser par la fenêtre. Lek s’assura que les deux types au sol était bien morts avant de poursuivre.
    -Le tireur d’élite, c’est celui qui se fait appeler le Fossoyeur, c’est lui qui a dû abattre votre gars, le chartiste.
    -Reginas Ulth, compléta Felton.
    -Ouais, Lexxi a assuré, ce type était recherché depuis des années, à ce qu’on dit et l’autre là, c’est Mordek Malachaï, un de ses hommes, un pistolero. Parait que c’était un ancien de l’Arbites.
    -Oui, bin lui je l’ai déjà croisé aux Trois Chérubins, compléta Felton. C’est lui qui m’avait indiqué qu’ils avaient les filles.
    Derreck et Lexxi venaient de les rejoindre, alors que Felton et Lek étaient accroupis et affairés à faire les poches des deux cadavres. Ils récupérèrent l’arme du Fossoyeur qui était une longue et redoutable arquebuse transuranique issue, sans aucun doute, d’un arsenal du Mechanicus. L’arme en question était bel et bien capable de percer un blindage, comme ils l’avaient constaté à la mort de Reginas Ulth. Ils ramassèrent les pistolets, dont un, d’origine xenos, des munitions, un livre, un passe et trois ou quatre mille crédits en liquide.
    -Ne trainons pas, leur indiqua Derreck qui venait de recevoir un message d’Ezek, indiquant qu’il venait d’entendre les sirènes du Magistratum.
    -Quoi, déjà ? S’étonna Lexxi. Mais ça ne fait que quelques minutes à peine.
    -Oui, bin lancer une grenade dans un bâtiment et en pleine nuit, c’était peut-être pas la meilleure idée, non plus, lui lâcha Felton, visiblement agacé.
    -L’idée c’était de les arrêter au plus vite, lui rétorqua Lexxi. On ne pouvait pas prendre le risque qu’ils informent Bosinski.
    -Bin là, s’il est pas au courant qu’on arrive…
    -Un bruit d’explosion dans le quartier, ça pourrait être tout autre chose, non ? Lâcha Lek.
    -Et les sirènes du Magistratum, il va pas les entendre, d’après toi ?
    -On ferait bien de décamper d’ici rapidement, ajouta Derreck, tout en leur signifiant de ramasser leurs affaires.
    Tous tombèrent d’accord et se dirigèrent vers les escaliers pour quitter le bâtiment, d’autant plus que Rico était en train de leur demander de ne pas trainer.

    Quelques minutes plus tard, ils venaient de les rejoindre et se mirent à couvert, non loin de l’entrepôt. Déjà, plus loin, ils perçurent bien les sirènes d’un ou deux véhicules légers du Magistratum qui pénétraient dans le quartier.
    -On va devoir agir vite si on veut sauver les filles et avoir Bosinski, leur annonça Rico.
    -On le tue, non ? S’étonna Lek. Lexxi semblait d’accord avec lui, d’autant plus qu’elle ne connaissait pas les filles en question.
    -Pas si vite, ajouta Felton. Bosinski est le bras droit de Haxt, ça serait une formidable occasion de mettre la main dessus, non ? On devrait y réfléchir avant.
    -C’est tout vu, compléta Rico. On sauve les filles et lui, on essaie de l’attraper comme tu dis. Vivant ce serait préférable, mais si on n’a pas le choix, on l’élimine.
    -Tu as un plan pour ça ? lui demanda Felton.
    -Peut-être bien. Passer par devant va nous heurter à une résistance des gardes. Il y a une lourde porte à passer et l’effet de surprise sera aussitôt éventé. Les côtés sont protégés par une enceinte, ce sera compliqué aussi. En revanche, l’arrière de l’entrepôt donne sur le quai et un bateau de chargement y est juste accosté. En longeant l’enceinte jusqu’au quai, il y a peut-être moins de deux mètres à sauter pour atterrir sur le bateau. De là, on devrait pouvoir accéder au quai qui donne sur une cour intérieure, là où la limousine de Bosinski est garée. Si ce qu’on a observé avec Ezek est juste, un seul garde surveille cet accès. On devra l’éliminer rapidement. Une fois fait, depuis la cour, un escalier en bois mène à l’étage de l’entrepôt où se trouve une porte. En passant par-là, on devrait éviter le gros des gardes et avoir une vue sur l’ensemble de l’entrepôt, mais je pense en plus que c’est là que sont les filles.
    Pendant ce temps, Derreck était occupé à soigner la blessure de Lexxi. Rico distribua les rôles pour mener à bien leur opération. Lek aurait bien été le discret de l’équipe mais ses blessures à sa jambe faisaient qu’il se déplaçait lentement et en boitant. Ils lui confièrent l’arquebuse transuranique et assisté de Derreck, allaient rester en couverture, en se positionnant dans un des entrepôts d’en face où, depuis une fenêtre, ils pourraient les couvrir. Même s’il n’était pas familier d’une telle arme, sa puissance de feu était un élément de dissuasion non négligeable.

    Suivant le plan de Rico, Lexxi et Felton passèrent devant, suivis de Rico et Ezek. Ils sautèrent sur le bateau puis rejoignirent le quai. Lexxi se faufila discrètement entre des caisses et des futs et aperçut le garde en question. L’homme portait une arme lourde sur un harnais, sans aucun doute d’origine xenos, elle aussi. Il ne l’avait pas vu, aussi s’approcha-t-elle furtivement et pointant son fusil d’assaut à silencieux, elle l’abattit d’une rafale. Il dévala les escaliers et resta au sol, inanimé. Alors que les autres la rejoignirent, Rico s’empressa de tirer le corps afin de le dissimuler sous une bâche dans la cour après avoir prélevé sur lui un trousseau de clés. Ils gravirent les escaliers en bois qui menaient à l’étage. Lexxi était devant et se trouva devant la porte. Elle n’était pas verrouillée et elle l’ouvrit discrètement, jetant un rapide coup d’œil à l’intérieur. Elle reconnut aussitôt Bosinski à une dizaine de mètres de là, occupé à donner quelques ordres rapides à des hommes qu’elle ne voyait pas. Elle vit pourtant une des captives sans pour autant l’identifier. Elle referma doucement la porte et en informa le reste de l’équipe. C’est là qu’Ezek eut une idée.
    Il s’approcha à son tour, là où se trouvait Lexxi et obtint une ligne de vue dégagée sur Bosinski, il focalisa alors son contrôle mental sur Bosinski qui ne s’y attendait absolument pas. Il parvint alors à prendre le contrôle de sa cible tandis que son propre corps, resté assis dans les escaliers, sombra dans une sorte de transe. Prendre le contrôle d’un corps et de l’esprit d’une autre personne était toujours une expérience déstabilisante, surtout les premiers instants, qui donnaient une sorte de tournis ou cette désagréable impression d’être sorti brutalement de son sommeil, alors en plein rêve et prenant un certain temps avant de réaliser où on se trouvait et à quel moment. Des gens qu’il eut du mal à identifier parlaient et il ne comprit pas tout de suite. Il tenta de leur donner un ordre mais seuls quelques sons inintelligibles jaillirent de sa bouche. Il vit leur regard soudain étonné, le dévisageant avec attention. Il commençait enfin à mieux percevoir son environnement alors qu’il se concentrait. L’entrepôt était vaste et en partie empli de caisses en tout genre. Il vit deux gardes armés à son niveau. Un homme et une femme, tous deux armés d’épées et de pistolets. Il y avait aussi les trois jeunes femmes retenues captives, les mains attachées. L’une d’elle était suspendue, accrochée à une poulie et elle criait. Il sut que trois autres gardes se situaient au rez-de-chaussée, mais il ne les voyait pas de là où il était. Il tenta de reformuler son ordre, cherchant à mieux articuler.
    -Détachez cette fille, je dois les emmener toutes les trois ailleurs, dit-il à l’attention des gardes.
    Ces derniers lui retournèrent un regard étonné.
    -Vous êtes sûr, chef ? Ce… Ce n’étaient pourtant pas les ordres, répondit la femme à l’épée.
    -J’en suis certain. Changement de plan. Détachez-la et suivez-moi avec elles.
    Les secondes filèrent aussi dû-t-il les faire se hâter, sous peine de voir les effets de son pouvoir s’estomper. Ezek força Bosinski à ressortir du bâtiment, par la porte en haut des escaliers, mais au même moment, les gardes restés au rez-de-chaussée sortirent à leur tour. L’un deux, sortit dans la cour, là où était garée la voiture et où se trouvaient Rico, Felton et Lexxi. Les deux autres venaient de sortir côté rue, occupés à parler dans leurs microvox, aussitôt aperçus dans le viseur de Lek qui s’était positionné en couverture avec Derreck. Ils notèrent cependant que le magistratum venait d’arriver et se trouvaient à présent à une ou deux rues de là, ce qui mit tout le monde en alerte.
    Soudain et brutalement, Ezek perdit pied avec la réalité en même temps qu’avec sa connexion warp, son esprit soudain refoulé de celui de Bosinski, pourtant dans l’incapacité de réintégré son propre corps. Toujours inconscient, il ressentit pendant quelques instants, cette horrible sensation de noyade, tout en étant dans l’incapacité de faire le moindre geste ou d’émettre le moindre son pour prévenir ses équipiers.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 11/03/2022 à 17:56 Citer ce message

    Dans la cour, un des hommes de main venait de faire irruption depuis l’entrepôt. Il tomba presque nez-à-nez face à Lexxi qui, prise par surprise, pivota et lâcha une rafale de son fusil d’assaut par reflèxes, mais malgré la courte portée, le manqua et mitrailla le montant en bois, juste au-dessus de la porte. L’homme retourna aussitôt à l’intérieur, refermant la porte derrière lui. Lexxi bondit de sa cachette et fila droit vers la porte, bien décidée à ne pas le laisser filer. Au même moment, Bosinski, qui venait de reprendre ses esprits, n’étant plus sous les effets du contrôle mental d’Ezek. Il réalisa que leur entrepôt était attaqué et secoua la tête afin de retrouver ses sens. Il reconnut certains des hommes dans la cour et se maudit de ne pas avoir réglé le problème lui-même. Il n’allait malheureusement pas en avoir le temps, le Magistratum était déjà dans le quartier, il pouvait voir, de là où il était en haut des escaliers, les lumières bleutées de leurs véhicules en approche, qui éclairaient les façades dans la nuit. Ils allaient devoir décamper au plus vite et activer les charges de démolition pour couvrir leur fuite. Il referma la porte derrière lui et distribua rapidement ses consignes à ses hommes restant.

    Derreck venait lui aussi, d’informer toute l’équipe de l’arrivée du Magistratum. Dans les prochaines minutes, le quartier allait être bouclé et il serait impossible de sortir de l’entrepôt sans un coup de force. Rico profita des tirs pour se mettre à couvert derrière la limousine garée là. Accroupi, il ouvrit la porte côté conducteur et s’installa au volant, bien décidé à se servir du véhicule comme porte de sortie.
    Felton qui était à ses côtés, vit que le premier garde, celui qui avait été abattu par Lexxi en entrant dans la cour et malgré ses blessures, venait de se redresser péniblement et pointait un pistolet dans leur direction, avec la ferme intention de lui tirer dans le dos. Felton pivota en pointant son pistolet mitrailleur vers lui et tirer une courte rafale qui le toucha et le renvoya au sol mordre la poussière.
    Dans le bâtiment d’à côté, là où Lek et Derreck venaient de se dissimuler, ils virent deux autres hommes de main sortir par la grande double porte, côté rue, les armes à la main. Il s’agissait d’une femme et d’un type avec une arme lourde. Lek qui avait récupéré l’arquebuse transuranique ajusta son tir et visa. Il reconnut la fille qui avait son bras en écharpe et qui portait un pistolet xenos à la main. Il s’agissait bien du tireur qui avait faillit abattre Tsali en pleine rue et qu’il avait touché avec son canon de poing. Il visa et tira. Mais peu familier avec les réglages d’une telle arme, il manqua sa cible et l’impact éclata sur la façade, à côté d’eux, laissant un cratère fumant d’une quinzaine de centimètres d’où quelques flammes vertes s’échappaient. Le tir alerta évidemment les deux flingueurs qui décidèrent de se rediriger à couvert, vers l’entrepôt. Derreck qui venait de se concentrer lança un de ses pouvoirs de biomancie sur celui qui portait l’arme lourde. Il venait de le reconnaitre avec son crâne rasé, c’était celui qui avait assassiné Yacton l’armurier devant ses propres ses yeux, quelques jours plus tôt et qui avait bien failli le tuer lui et Elisha. D’ailleurs il ne s’était toujours pas encore entièrement remis de ses blessures. L’homme, frappé de plein fouet par le sort, s’étouffa et lâchant son arme lourde au sol, porta ses mains à sa gorge avant de s’écrouler sur le trottoir, perdant connaissance.

    Lexxi ouvrit la porte de l’entrepôt et y lança aussitôt une grenade fumigène. Elle laissa quelques instants afin que la fumée envahisse les quelques mètres situés devant elle, et fusil d’assaut pointé devant elle, se glissa à l’intérieur tout en profitant de cette couverture. Elle progressa ainsi discrètement, cherchant à prendre tout ennemi à revers.
    Tandis que Rico cherchait à démarrer la limousine, Felton, voyant qu’Ezek, assit en haut des escaliers ne bougeait plus, décida de monter le rejoindre pour le sortir de là. Mais parvenu à se hauteur, Ezek venait tout juste de reprendre ses esprits. Le souffle court et les yeux exorbités, il avait vécu cette affreuse sensation de s’être retrouvé séparé de son corps, dans l’incapacité de pouvoir le rejoindre. Même si cela n’avait duré qu’une bonne dizaine de secondes en réalité, il eut l’impression que cela avait été une éternité d’errance dans des limbes glacées aux ténèbres infinies. Il reprit son souffle et fit signe à Felton que ça allait. Felton hocha la tête et le laissa reprendre ses esprits. Il gravit les dernières marches et se dirigea vers la porte à l’étage, par laquelle Bosinski s’était replié avec ses hommes et les trois prisonnières. Il s’accroupit, ouvrit la porte discrètement et jeta un rapide coup d’œil avant d’entrer, son pistolet mitrailleur à la main. Il n’y avait plus personne, pourtant au bout du couloir il percevait du bruit mais n’avait pas de visuel suffisamment dégagé pour déceler quoi que ce soit.
    Rico était parvenu à démarrer la limousine et faisait marche arrière, au moment où le garde blessé et toujours vivant, tira avec son pistolet mitrailleur sur la voiture. Les impacts répercutaient la tôle et les vitres avec des tintements métalliques et des étincelles. Ezek, en haut des escaliers allaient rejoindre Felton mais se retourna, voyant Rico en mauvaises posture. Il focalisa son pouvoir sur le tireur qui fut aussitôt entouré par une bulle tourbillonnante qui créa un vide spectral d’où l’air fut totalement aspiré et aussitôt remplacée par un froid absolu. En l’espace de quelques instants, l’homme gela entièrement, son sang et ses fluides corporel soudain transformés par de la glace, le tuant en quelques secondes. Les effets furent cependant spectaculaires. Tout autour d’Ezek et sur une trentaine de mètres, des décharges électriques crépitèrent et le firent s’élever à quelques mètres au-dessus du sol, alors nimbé d’une énergie aethérique crépitante qui illumina toute cette zone dans la nuit. Il en profita pour se réceptionner sur le toit de l’entrepôt puis alors que les effets se dissipaient, se laissa redescendre souplement vers les escaliers afin de rejoindre Felton. Mais surtout, la dernière fois qu’il avait ressentit Fuzz, c’était justement à cet étage.

    Dans le bâtiment d’en face, cette fois-ci, Lek ne laisserait pas la fille s’en tirer. Elle était en train d’aider le type au crâne rasé à revenir à l’intérieur de l’entrepôt, le trainant depuis le trottoir. Il visa et fit feu. Il encaissa le recul de l’arme de gros calibre tandis que le projectile au transuranuim siffla avec un bruit sourd et entra en fusion avant son point d’impact. Il percuta la fille et lui pulvérisa l’épaule dans une explosion qui lui arracha le bras et une partie du torse d’une manière horrible. Son corps, désarticulé tel un pantin, fut projeté à deux mètres de là où il retomba au sol comme un sac, s’embrasant alors dans une gerbe de flammes.
    Lek décolla son œil de la lunette de visée et lança un sourire carnassier à Derreck situé juste à ses côtés et occupé à se concentrer psychiquement.
    -Je sens que je vais bien aimer cette arme, moi !
    -Oui bin, t’habitue pas trop vite, tu sais même pas combien il reste de munitions dans ce machin. On ferait bien de décrocher, lui indiqua-t-il tout en pointant une patrouille du Magistratum en approche. Le tir spectaculaire sur la fille juste devant l’entrepôt, mais aussi les tirs à l’intérieur n’avaient pas manqué d’attirer leur attention.
    Pour faire bonne mesure, Lek visa le type au sol, celui que Derreck avait assommé puis tira, lui explosant le torse dans une gerbe de sang et de flammes. Laissant, là aussi son cadavre s’embraser dans un cratère laissé au sol. Les agents du Magistratum qui approchaient et ne se trouvaient qu’à une trentaine de mètres de là, reculèrent et se mirent aussitôt à couvert en appelant des renforts. Derreck fit signe à Lek de dégager de là au plus vite. Dans les prochaines minutes, les forces de l’ordre allaient les encercler. Rico était en train de les voxer de les rejoindre à la voiture, ce qu’ils firent. Ils ramassèrent leur équipement et redescendirent du bâtiment où ils étaient.
    De son côté, Felton avait progressé à l’étage de l’entrepôt et venait de localiser l’endroit par lequel Bosinski et ses hommes étaient certainement partis. Une des fenêtres avait été démonté et en se penchant il entendit le bruit d’un bateau à moteur qui s’éloignait avec plusieurs personnes à son bord. Il reconnut Bosinski à l’arrière qui lui fit un petit salut, comme une sorte de au-revoir. Felton pesta et réalisa qu’Ezek venait de le rejoindre à l’étage. Il était affairé à tenter d’ouvrir une porte mais en vain.
    -On doit décrocher, tu fais quoi là ? Lui demanda Felton.
    Ezek lui désigna un bureau au bout du couloir.
    -Fuzz est à l’intérieur, je crois, j’ai besoin de le récupérer, vous pourriez m’aider ?
    Felton se précipita et fractura la porte rapidement mais réalisa à la dernière seconde qu’il venait d’activer un système explosif. Il attrapa Ezek par la taille et sauta vers le couloir au moment où le bureau explosa dans une puissante déflagration. Il fut projeté à quelques mètres de là, mais Ezek, propulsé par le souffle, fut projeté par-dessus la balustrade et chuta quelques mètres plus bas au rez-de-chaussée de l’entrepôt dans une pile de caisses et dans un grand fracas.

    Rico venait, au même moment d’enclencher la marche arrière et enfonça la grille afin de sortir la limousine dans la rue. Les forces de l’ordre était là, à moins de cinquante mètres, il voxa toute l’équipe, leur demanda de le rejoindre en urgence et ce, malgré les tirs. Lek et Derreck venaient d’arriver et allaient monter dans la voiture. Lek, voyant les agents des forces de l’ordre un peu plus loin, lâcha un tir dans leur direction et se prit aussitôt une riposte qui mitrailla la voiture. Lek se prit une des balles qui le toucha sur le côté, le projetant en arrière. Déjà passablement blessé, Derreck l’aida à monter à bord. Lexxi, de son côté était parvenue à récupérer les armes de ceux abattus par Lek devant l’entrepôt. Elle fila en courant, sous les balles et se précipita vers la limousine. Rico voyait que la situation allait leur échapper, il voxa Felton et Ezek.
    -Trône, c’était quoi cette explosion ? Vous allez bien ?
    -Un peu secoués, mais ça va, lui répondit Felton qui était en train de tirer Ezek de là, vivant mais toujours inconscient et blessé. Au-dessus d’eux, l’étage était en train de prendre feu et en plus de la fumée qui envahissait les lieux, des débris enflammés menaçaient de leur tomber dessus. Il devait surtout mettre Ezek à l’abri au plus vite.
    -On ne peut plus rester là, on doit décrocher maintenant, vous êtes où ? Voxa Rico.
    -Dans l’entrepôt, Bosinski est en train de partir en bateau avec les otages, on…
    -On n’a plus le temps, sortez de là au plus vite, le Magistratum est en train de se diriger vers l’entrepôt, ils sont nombreux, armés et disposent d’auspex, tirez-vous vite !
    -On va se cacher dans un coin, on vous rejoint plus tard.
    -Négatif ! Surtout pas ! Sortez et allez récupérer la Hive Runner garée plus loin dans le quartier, on se retrouve à la planque, leur dit-il tout en démarrant en trombe.
    Felton calcula les différentes options qui lui restaient. La double porte de devant était une mauvaise idée puisqu’ils allaient arriver par là. L’autre porte sur la droite de l’entrepôt donnait sur la cour par laquelle ils étaient entrés tout à l’heure, mais sortir par-là était hasardeux, ne sachant pas sur quoi ils pouvaient tomber. Il devait faire vite. Il vit les escaliers en bois qui menaient vers un sous-sol, peut-être y aurait-il une autre issue ? Il attrapa Ezek et le traina avec lui, mais une fois parvenus au sous-sol, il réalisa que ce n’était qu’une cave sans issue et qu’ils allaient se retrouver pris au piège. Déjà les agents du Magistratum étaient au-dessus d’eux, il pouvait les entendre. Il eut juste le temps de se cacher et de dissimuler Ezek mais son subterfuge fut de courte durée. Les agents descendirent dans la cave, fusils à pompe et canons de poings pointés devant eux. L’un d’eux avait un auspex et ils furent rapidement découverts et sortis de leur cachette, sommés de mettre les mains en l’air puis menottés. Leurs armes et équipement leur furent enlevés puis une fois poussés à l’extérieur, ils furent conduits sans ménagement dans un fourgon afin d’être conduits au poste le plus proche.

    Rico était parvenu à semer les forces de l’ordre, malgré leur véhicule voyant. En moins de dix minutes, ils retournèrent à la planque qu’ils occupaient vers Fort Glory et en profitèrent pour laisser Derreck se charger de Lek, plutôt mal en point.
    -On fait quoi ? Lui demanda Lexxi qui était occupée à décharger les armes qu’ils avaient récupéré et à se changer. Rico les observa.
    -Une chance déjà qu’on a pu récupérer tout ça. La plupart sont des armes xenos de contrebande.
    -Oui mais pour les autres ? Felton et Ezek.
    -Ils devraient nous rejoindre, je leur ai demandé de récupérer la voiture, d’autant plus qu’une partie de notre matériel est à l’intérieur.
    Au bout d’une heure, ils n’eurent aucune nouvelle d’Ezek ni de Felton. Ils ne répondaient toujours pas à leur microvox.
    -C’est pas bon signe, lâcha Rico au reste de ses équipiers. Je vais retourner là-bas, tâcher de voir ce qui leur ai arrivé. Et au passage, je vais nous débarrasser de la limousine.
    Lexxi vérifia son pistolet laser avant de le remettre dans son holster.
    -Je vais t’accompagner.

    Une demi-heure plus tard, ils étaient de retour dans le quartier en pleine agitation malgré la nuit déjà bien avancée. Le Magistratum avait bouclé tout un pâté de maisons et même l’Arbites était sur les lieux, avec des enquêteurs et le Verispex ainsi qu’une équipe de démineurs.
    Une partie de l’entrepôt avait été dévoré par les flammes et les garde-feu étaient encore en pleine activité, affairés avec leurs lances incendie et leurs véhicules rouges et blancs, équipés de canons à mousse, à circonscrire les derniers départs de feu. Au-delà des rangées de badauds, ils aperçurent les fourgons sanitaires des hospitalières. D’ailleurs certains corps étaient emmenés depuis les décombres sur des civières et dans des sacs mortuaires. Rico tenta de nouveau de les voxer, mais sans succès.
    -Ça, c’est pas bon signe. Lâcha-t-il.
    -Essayons déjà de trouver la voiture, peut-être qu’on en saura plus.

    Ils contournèrent le cordon de sécurité et finirent par trouver la Hive Runner, là où ils l’avaient laissé. Il n’y avait personne à l’intérieur et dans le coffre se trouvaient toujours leurs sacs de matériel.
    -Bon, c’est déjà ça mais toujours pas de trace des deux autres. On fait quoi ?
    Rico observait les badauds rassemblés là. Avec un peu de chance, quelqu’un avait été témoin de quelque chose.
    -Reste là et surveille ce qui se passe, lui répondit-il. Je vais aller poser quelques questions.

    Vingt minutes plus tard, Rico la retrouva à la voiture. Il lui fit signe de monter tandis qu’il s’installa au volant et démarra.
    -Eh bien ?
    -Des gens ont vus deux types se faire arrêter et emmener par le Magistratum tout à l’heure. Les signalements semblent correspondre.
    -Merde… et comment on fait pour les sortir de là ?
    -On a un contact, Tsali. Je vais l’appeler. Elle devrait nous débloquer la situation. Enfin, j’espère. Faut aussi que je te présente à elle.
    -Pourquoi cela ?
    -Parce que tu vas devoir intégrer cette équipe à présent.
    Lexxi resta songeuse un instant avant de poursuivre.
    -Et tu as eu d’autres infos ?
    -Ils ont retrouvé trois corps dans l’entrepôt et un dans la maison, un peu plus loin.
    Lexxi fronça les sourcils.
    -Dans la maison ? Mais on a tué deux types.
    -Bin, faut croire que non. L’un d’eux s’en est sorti parce qu’ils ne l’ont pas retrouvé.

    Baie des Promesses
    A quelques nautiques au large de la capitale.
    Tempus estimare 870.020M42 – 03h14

    Wosley Bosinski s’alluma un cigalho et s’appuya au bastingage de la vedette rapide qui les emmenait loin des côtes. Il rangea son étui et son briquet dans sa poche et en sortit l’étrange petite créature mécanique prise à ce psyker. L’objet était très ancien et de bien belle facture, bien que paraissant inerte ou peut-être l’esprit qui l’animait était-il éteint ?
    Il observait les eaux noires où se reflétaient quelques lueurs maladives des étoiles lointaines, à moins que ce ne fut celles de quelques croiseurs chartistes en orbite. Cela le ramena soudain à cette réalité implacable qu’était la duplicité. Monsieur Haxt avait raison finalement. La confiance était une qualité rare, au point d’en devenir presque improbable. Ce Jéricho Black – ou quel que soit son nom et toute sa clique avaient cru bon de pouvoir les doubler aussi facilement mais c’était grandement les sous-estimer, car le Syndicat en avait vu bien d’autres avant eux. Des gouverneurs, des adepta et des maisons puissantes s’étaient tous alignés. Même cette guerre et ces hérétiques n’avaient pas eu raison de leur organisation.
    Pourtant il devait bien admettre que ce MacLatchy avait bien failli être convaincant pendant un moment et sans ces informations obtenues auprès de l’Arbites, il du bien reconnaitre qu’il se serait laisser convaincre par ses arguments. Mais les masques étaient tombés et même si cela avait dû lui couter quelques hommes, les intérêts de l’organisation étaient saufs. Cela allait évidemment devoir remettre certains plans à plus tard ou peut-être même devoir les déplacer sur leurs autres domaines, hors d’Archaea, devenue pour l’heure un peu trop surveillée. Il allait devoir aviser et en rendre compte à Monsieur Haxt.
    En attendant, il avait fait prévenir les chartistes et ceux qu’ils devaient rencontrer que leur rencontre devait juste être reportée. Rien ne pressait en réalité, mais un ménage s’imposait. Cela lui rappela soudain les trois filles, bâillonnées, les mains attachées derrière le dos et agenouillées sur le pont, quelques mètres derrière lui. Elles pleuraient en silence et cela était le moins pire de ce qui les attendait désormais.
    Il se retourna, ressentant les ondes désagréables que dégageait Barka qui vint se tenir à ses côtés. Ainsi avec son masque respirateur sifflant et ses optiques photochromatiques lumineux, il était encore plus inquiétant mais après tout, c’était là, l’effet escompté. Barka scrutait les eaux sombres, aussi insondables que lui. Le Fossoyeur savait s’entourer de gens plutôt spéciaux. Des tueurs froids, de véritables salopards sans la moindre pitié. Barka était un bien étrange phénomène, qui aimait jouer avec ses prisonniers, à ce que l’on disait sur lui. Bosinski ne l’aimait pas, mais ce n’était qu’un détail. C’était assurément le type d’homme dont il avait le plus besoin. Il se tourna vers lui, tout en tirant sur son cigalho. Guillam le psyker restait à l’autre bout du bateau, avec les deux autres, prenant justement le plus de distance possible avec cet oiseau de mauvais augure.
    -Savez-vous ce que l’on appelle des poissons-monde, Monsieur Barka ?
    Ce dernier tourna son masque vers lui. Faisant un simple non de la tête.
    -Ces régions sont réputées pour leur pêche depuis des bateaux-usines. Ces poissons sont les plus gros prédateurs de ces océans. Ils ne servent pas seulement à fournir de la nourriture bon marché pour l’exportation mais tout, absolument tout sur eux est recyclé. Leurs organes, leurs écailles et même leurs os. Leur nom est tout bonnement exagéré, bien entendu. Cependant, les plus gros d’entre eux sont parfaitement capable d’avaler un navire comme le nôtre, car à l’instar des grox sur terre, les poissons-monde mange de tout.
    Barka avait soudain l’air beaucoup moins rassuré et cela l’amusa.
    -Mais rassurez-vous, ajouta Bosinki, après quelques instants tout en tirant sur son cigalho. Ce qu’ils préfèrent, ce sont les créatures vivantes. Car comme vous, ils aiment le sang.
    Il tourna sa tête, au masque insondable vers Bosinski, son souffle soudain devenu rauque comme celui d’une bête excitée. Ses mains tremblèrent alors que les auto-injecteurs de son masque libérèrent aussitôt une décharge d’endedrine pour se calmer et l’aider à rester concentré. Il se mit soudain à pleuvoir.
    Barka lui désigna alors le familier qu’il tenait toujours dans sa main. Il le lui prit et le jeta au loin dans la mer.
    Bosinski écarquilla les yeux devant une telle impudence.
    -Hey, mais qu’est-ce qui vous prend ?
    -Je devais vous en débarrasser, lui dit-il de sa voix sifflante et encore saccadée. Je ne serais pas toujours à vos côtés. Ce familier est connecté psychiquement à son porteur. S’il le retrouve…
    -…Il me retrouve… finit par admettre Bosinski qui se contenta de hocher la tête.
    -Pourquoi me raconter cette histoire de poisson-monde et de… sang, Bosinski ?
    -Parce que les trois demoiselles qui nous accompagnent connaissent parfaitement cette histoire. Mais vous, non. Amenez-les-moi.

    Malgré leurs protestations et leurs pleurs, les filles furent amenées toutes les trois devant Bosinski. Elles étaient en larmes et tétanisées par la peur. C’était là, tout l’effet recherché. La pluie fouettait leur visage et plaquait leurs vêtements trempés sur leurs corps. Il vint se tenir devant elle, demandant à Barka de les maintenir debout.
    -Vous connaissiez nos règles et pourtant, vous trois nous avez mises en danger et cela a entraîné des conséquences pour certains d’entre nous. Cela à un coût et un prix à payer aussi. Vous le saviez, n’est-ce pas ?
    Il laissa passer quelques secondes, sourd à leurs jérémiades et prières futiles.
    -Vous savez pourtant que j’ai toujours été bon avec vous. J’étais comme un père, je vous ai toutes sorti des égouts putrides dans lesquelles vous pataugiez depuis votre enfance. J’attendais juste en retour, un minimum de gratitude. Vous savez à quel point je suis magnanime et à quel point j’ai de l’affection pour vous trois, mais à quel point Monsieur Haxt peut se montrer… Disons déçu par votre comportement et qu’il tenait personnellement à vous le faire savoir. J’ai donc une bonne et une mauvaise nouvelle pour vous, mesdemoiselles. Je vais commencer par la bonne… Je vais vous laissez vivre.
    Il jeta son mégot par-dessus bord puis dégaina un pistolet et tira sur l’une d’elle, lui perforant la rotule. Elle s’écroula au sol en hurlant alors que son sang se mit à couler. Les deux autres crièrent de plus belle. Il fit un petit signe à Barka qui se saisit de la fille blessée, la traina sur le pont par les cheveux et la bascula par-dessus bord, la laissant tomber dans les eaux insondables en hurlant.
    Bosinski vint se tenir devant les deux autres filles au sol qui l’imploraient en pleurant, ne comprenant pas son geste. Il s’accroupit devant elles, faisant une petite moue navrée.
    -Maintenant que j’ai toute votre attention, j’ai envie de croire que vous serez un peu plus obéissantes. Ah oui, la mauvaise nouvelle, c’est que Monsieur Haxt ne souhaite vous voir que vous deux.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 19/03/2022 à 13:17 Citer ce message

    Quais de Port Saint,
    Capitale Hub City.
    Tempus estimare 952.020M42 – 15H55

    Felton descendit du ferry qui les ramenait de Folly Island et aida Tsali à en faire de même en lui donnant la main. Elle sauta sur le quai d’un pas souple, tout en tenant les pans de sa ravissante robe rouge et noire. Elle rajusta son chapeau assorti où était fichées de longues plumes de stymphales, d’un bleu-vert métallique iridescent qui se mariaient à merveille avec la couleur de ses yeux. Elle déploya son ombrelle photochromatique, malgré le faible soleil – mais par pure coquetterie - et prit le bras de Felton. Elle ne put s’empêcher d’admirer au passage quelle fière allure il avait dans son uniforme bleu nuit, aux galons dorés – certes ancien – mais qui se mariait parfaitement avec le sabre à la garde richement ouvragé et le pistolet bolter finement ciselé qu’il portait aux côtés. Tsali se prit à penser que cela lui donnait terriblement des airs de corsaire chartiste. Après tout, leurs efforts avaient fini par payer. Epiant les gens qui se trouvaient sur les quais, ils se dirigèrent d’un pas désinvolte vers les autofiacres qui attendaient un peu plus loin, à l’écart du marché aux poissons. Les nautifactoria de Port Saint avaient remorqué leur lot de poissons-mondes destinés aux usines à viande qui jouxtaient les entrepôts où piaillaient des nuées d’oiseaux marins attirés par la puanteur des lieux. L’activité était fébrile et Felton n’était pas à l’abri d’une mauvaise surprise, surtout depuis le dernier échec avec Bosinski un mois auparavant. Seul le Trône savait où ce véritable salopard et sa clique de psychopathes se cachaient, mais il ne perdait rien pour attendre.
    -Tu es sûr de vouloir repartir ce soir à Lynnbarra ? Lui dit-elle.
    Il resta songeur, l’espace d’un instant, avant de trouver une réponse à cette épineuse question.
    -Ça fait un mois déjà et je pense que Rico a besoin qu’on fasse un point.
    -Il a des pistes, tu crois ? Je veux dire sur… Le Syndicat.
    Felton se mit à sourire.
    -Espérons. Mais la dernière fois que je l’ai vu, y a une dizaine de jours, c’était pour nous parler de je ne sait quelle idée de monter un commerce de vin ou quelque chose comme ça.
    Tsali se mit à rire en lui tapotant le bras.
    -Arrête, tu me fais marcher, là ?
    -Non, non, c’est très sérieux. C’est toi aussi qui lui a mis ce genre d’idée farfelue dans la tête, à vouloir créer une affaire qui nous rapporte des bénéfices pour nous financer. Je dis pas que l’idée est mauvaise, mais Rico n’y connait rien à mon avis.
    -Malheur… Mais c’est moi qui m’occupe de ça justement, pas lui. Pourquoi crois-tu que je t’aie emmené pendant presque dix jours avec moi sur Folly Island ? pour admirer sa plage ? J’ai des affaires qui tournent, là-bas.
    Il lui lança un regard amusé.
    -Je croyais que tu m’y avais emmené pour tout autre chose, en fait…
    Elle s’arrêta et lui lança un regard peiné.
    -Tu sais que je ne veux pas que…
    Il lui passa la main sur sa joue.
    Les dix jours qu’ils avaient passé tous les deux dans le domaine de Bug Island, au manoir de feu Lazarus Orthesian – légué par son père biologique - avaient été suréalistes pour Felton. Il sourit, rien qu’en y repensant. Elle avait commencé à lui apprendre à lire et à écrire – une réelle torture selon lui - mais elle avait passé aussi des heures interminables dans les salons, le jardin ou devant la cheminée du domaine, jusqu’à tard dans la nuit, à lui inculquer les règles élémentaires de l’étiquette, de la bienséance, du maintien, de l’éloquence et de l’art de la flatterie ou de la menace à peine voilée entre gens raffinés. Elle avait dû user de patience, de crises de nerfs et de toute les armes de ses pratiques universitaires complexes afin de gommer son accent de racaille, son effronterie de canaille et son effroyable habitude à jurer, ce qui aurait été des plus inconvenant au sein de certains cercles.
    Elle lui avait appris ce qu’il devait savoir sur les principales Maisons nobles locales et avait dû l’aider à se construire une nouvelle fausse identité. Afin de pratiquer en condition réelle, elle avait embauché un majordome, une cuisinière et des domestiques, placés dans le secret pour le familiariser avec le petit personnel. Felton apprenait vite, c’était une chance, même s’il allait lui rester de nombreux progrès à accomplir pour se faire passer pleinement pour le fils d’une noble Maison et pas une des moindres. La Maison Holdemert, connue dans tout le sous-secteur comme étant les plus gros banquiers d’Eshunna en lien direct avec les puissantes Maisons Zenthrix et Macritch, pour ne citer qu’elles. Tsali avait bien failli épouser un des fils Zenthrix alors qu’elle étudiait à l’académie sur Eshunna quelques années auparavant. Heddon, son fiancé, avait péri comme plusieurs millions d’habitants, le jour maudit où le warp frappa le monde-ruche. Felton avait été navré pour elle. Sincèrement. Lui aussi avait perdu des proches ce jour-là, mais heureusement personne d’aussi intime.
    Felton et Tsali avaient franchis un pas aussi dans leur relation. Après ces deux premiers mois compliqués, marqués par le sang et les larmes, ces dix jours passés avaient été salvateurs et ils en avaient eu plus que besoin.
    -Après tout… Rico pourra attendre encore un jour de plus, lui dit-il. Il y a certains cours que j’aimerai revoir avec toi ce soir, lui dit-il avec un petit sourire espiègle. Et puis je ne compte surement pas aller dans ce village de bouseux alcoolo, avec de telles fringues.
    Elle lui pinça le bras, le regard courroucé.
    -Ça va, ma petite Tsalina, on est juste entre nous là, pas à la cour de ta cousine, Madame la gouverneure.
    -Oui, eh bien si un jour tu espères faire illusion pour la rencontrer, Monsieur le ruchard, il va falloir surveiller ton langage, mon très cher ami.
    Elle lui fit une petite grimace avant de poursuivre.
    -Et, c’est Tsali. Je t’ai déjà dit que je détestais mon prénom.
    Ils venaient d’arriver aux autofiacres. Felton donna l’adresse au chauffeur alors qu’ils montaient à bord de l’engin archaïque au moteur crachotant.
    -Tu as bien dis « la rencontrer » ? Tu es sérieuse ? Ça serait juste exceptionnel, imagine si je...
    -Ne t’enflamme pas non plus. A peine portes-tu le costume que tu voudrais déjà la fonction. Tu ne pourrais même pas imaginer quel enfer du warp il s’agit dès lors que tu sollicites une audience auprès du gouvernement.
    -Mais c’est ta cousine ?
    -Et quand bien même. Sa sœur Epiphany et moi avons été très proches à une époque avant qu’elle… Enfin bref, pourtant cela ne signifie rien. Ezekiel est aussi mon cousin et il m’a fallu user de bien des stratagèmes pour entrer au sein de son ministère.
    -A ce propos… C’est vrai que je ne t’ai pas demandé, mais comme ça se passe avec ton cousin et… Les Veilleurs ?
    -Ezekiel est un bien étrange personnage. Il est brillant et d’une méfiance maladive. Certes, je ne l’en blâme pas, mais il aime toujours s’entourer de bien curieux personnages de sa cour, ainsi que de toute une coterie de factotum et autres minions. C’est un homosexuel notoire et on le dit passionné et enflammé, défiant en duel le premier impudent qui ose lui manquer de respect. Quant aux Veilleurs, je n’ai pour l’instant pu accéder qu’aux plus bas échelons de l’organisation. Son premier cercle est absolument hermétique et il me faudra sans doute du temps, même avec de la persuasion pour en faire partie.
    -Tu sais s’ils cachent certains secrets ? De ceux qui pourraient nous être utiles, je veux dire.
    -Ils en cachent. Reste à savoir lesquels. Mais les projets de leur ordre, l’éventuelle menace qu’ils représentent ou leurs ramifications me sont encore très opaques. Je continue de gagner la confiance de mon cousin avec la plus grande prudence car je sais qu’il aurait la capacité de tuer de sang-froid quiconque viendrait à en savoir trop. Même moi.
    -Merde, mais ça craint, non ?
    Elle lui posa un baiser sur les lèvres afin de l’empêcher de jurer encore plus, même s’il était loin d’avoir tort. Elle se blottit tout contre lui.
    -Société secrète, mon cher…

    Village de Lynnbarra,
    Au même moment.

    Rico avait passé le plus clair du mois en cours au village de Lynnbarra, en compagnie de Lek. Les deux psykers eux, avaient fait quelques aller-retours entre la planque dite « d’Hécate » et le village. Lexxi avait rejoint la cellule de façon officielle et passait le plus clair de son temps avec Derreck sur les sujets militaires. La raison de leur retraite à l’écart tenait en deux points. D’une, la plupart des acolytes de la cellule avait eu des blessures assez sévères à soigner et de deux, depuis le dernier incident avec Bosinski – qui c’était soldé par un fiasco selon certains – il avait été jugé préférable de se mettre au vert, comme aimait à le dire Lexxi. Même Ezek et ses incroyables talents de devin n’avait plus été en mesure de localiser Bosinski, à croire que ce maudit criminel était accompagné par un intouchable, ce qu’Ezek commençait à croire dur comme fer. Comble de malheur, il savait désormais son cyber-familier perdu, ce qui le peina profondément. Cette ordure de Bosinski lui avait fait mal, là où cela le touchait le plus. Et il n'était pas le seul à avoir été touché de la sorte. Les trois filles parmi leurs contracts, Mira, Abigaïl et Emelia avaient disparu et seul l’Empereur savait où elles étaient à présent et même si elles étaient toujours de ce monde.

    Dans les jours qui suivirent cet incident, Tsali décida de réunir la cellule de Rico afin de leur présenter une autre cellule, nouvellement constituée, la cellule Tenebrae. Un des visages était déjà bien connu de certains, il s’agissait d’Elisha, la fille de Barbosa Ulth. Elle avait été recrutée elle aussi par les Ordos pour ses connaissances en contrebande impliquant le commerce froid. Avec elle se trouvaient quatre autres personnes. Une prétorienne du nom de Poppy Sandwall, un peu sèche et directe mais sa présence pouvait être intéressante pour le lien avec l’Arbites justement, un contact toujours utile. Le suivant était un pilote de navettes qui se faisait appeler Iceman et qui avait des connexions avec l’astroport et donc les produits qui transitaient depuis ou vers l’orbite. Enfin le dernier était une sorte de brute épaisse du nom de Vlad Borgo, sorte d’échappé d’un monde pénitencier ce qu’il était d’ailleurs très certainement. On disait de lui qu’il était un tueur implacable, ce qui n’avait pas besoin de se vérifier, rien qu’en le regardant. Ils purent ainsi tous échanger brièvement et Tsali, avant de leur donner congé, leur indiqua que la cellule Tenebrae pourrait parfois prendre le relai sur certaines opérations même s’ils seraient peu amenés à se recroiser ou de façon très ponctuelle.

    De son côté, Rico avait pu acquérir la ferme Harkken, celle de feu Séléna et Magnus, récemment décédés tragiquement à Lynnbarra. Leur ferme avait été aussitôt évitée comme la peste par les habitants qui, s’ils avaient écouté Gordo, le prêtre, auraient purgé la demeure dans les flammes purificatrices du Credo salvateur. Mais grâce aux connaissances juridiques et administratives de Tsali, la cellule de Rico était parvenue à acquérir la maison pour une somme parfaitement raisonnable en se cotisant tous. L’acte de propriété en poche, Rico parvint à sauver la ferme in extremis et entreprit d’y établir une nouvelle planque pour toute l’équipe. Le plus clair de son temps, il le passa à refaire quelques travaux dans la cave, à purifier totalement la maison et à faire quelques allers-retours entre Lynnbarra et la capitale où son projet de radio écclésiarchique était bel et bien en train de voir le jour avec l’évêché. Cela ne l’empêcha pas de trouver encore du temps-libre pour enquêter sur Gideon, l’intrigant marchand du village, d’organiser l’anniversaire de Ghilda Jonessi et de la conseiller sur son futur mariage. Rico se savait recherché en ville, par le Syndicat mais aussi par les frères Milagria – prouvant bien que son passé remontait à la surface.
    Pourtant il détestait rester inactif, préférant passer du temps à Lynnbarra et commençait ainsi à s’y investir de plus en plus. Avec l’approche de Sanguinala, la grande fête de fin d’année et son lot de cortèges religieux et de festivités tant attendus par la population d’Archaea, il consacra de nombreuses heures à travailler à un projet d’investissement sur une distillerie de raenka. Il s’agissait de cet alcool de ploin, un célèbre millésime vieilli en fut d’amasec, duquel il espérait générer de substantiels bénéfices afin d’alimenter une caisse noire pour la cellule. L 'approche de la fête les inquiétait, cependant. Savoir que des flagellants allaient déambuler dans les rues lors des cortèges afin de verser leur propre sang, n’était pas pour les rassurer. Quel genre de fanatique pouvait s’y glisser afin de commettre seul l’Empereur savait quel carnage ?
    De son côté, Lek, s’était remis tout doucement de ses blessures et ne boitait presque plus. Il avait quand même trouvé le temps de repasser un peu en ville afin de tenter de renouer avec quelques contacts parmi ses anciens camarades du Syndicat de l’ombre. Mais comme il pouvait s’en douter, depuis que Bosinski avait placé un contrat sur sa tête, plus personne ne souhaitait être vu avec lui et il avait même appris de sources sûres – et non sans une certaine fierté – que sa tête était désormais mise à prix pour dix mille crédits pas le Syndicat qui avait mis des chasseurs de prime sur le coup. Profitant de ses discrètes pérégrinations en ville, il alla fureter du côté des entrepôts et remonta la rue vers la plaque de Kadoshi, là où les hommes du Fossoyeur avaient élu domicile dernièrement. Ils n’y étaient plus mais à la place, il repéra les trois faces de croque-morts dont Felton et Rico avaient parlé, les frères Milagria. Il resta à surveiller la planque un moment et compris que ces types ne plaisantaient pas et avaient établi un système de surveillance sophistiqué autour du bâtiment. Voyant qu’il n’obtiendrait rien de plus sous peine de se faire repérer, il décida de rebrousser chemin. En ville, il avait fait la connaissance d’une gamine des rues, la petite Naomie, dit la Souris. Elle lui servait d’indic en ce moment. S’il parvenait à lui mettre la main dessus, de temps en temps et moyennant quelques billets, il savait qu’elle aurait ses yeux et ses oreilles qui pourraient trainer. Mais pour commencer, il allait devoir informer Rico de la situation, au plus vite. Enfin, Lek n’avait pas chaumé pendant son temps libre à Lynnbarra et s’était consacré avec assiduité à l’étude des armes exotiques qu’ils avaient récupéré et notamment celles d’origines xenos. S’il ne maitrisait pas encore bien leur fonctionnement, il était parvenu à en comprendre les bases, au moins fonctionnelles.
    Derreck pour sa part, avait opté pour recevoir une formation de templier Psykana pendant ce mois passé, ce qui était une formation longue et extrêmement complète. Il fut envoyé par les Ordos sur une station de l’Astra Telepathica qui orbitait discrètement autour de l’agrimonde. Là il y reçut une formation secrète et martiale qui allait faire de lui un formidable psyker de combat. La dernière semaine, il revint à la surface à l’issue de la première phase de sa formation, épuisé mais plutôt satisfait, vêtu d’une nouvelle tenue bleu nuit et d’un casque métallique ouvragé, symbole des templiers psykana.
    Il retrouva une partie de l’équipe à la plaque d’Hécate. En réalité il n’y trouva que Lexxi avec qui il passa les deux jours suivants à élaborer un plan. La jeune catachan, en son absence avait été recruté dans l’équipe de Rico et son passé de militaire avait intéressé Tsali qui savait que Jézabel montait une toute nouvelle équipe de spécialistes dont faisait justement partie Elisha. Leur fonction allait être l’étude des archéotechs et xenotechs au sein d’un Reliquaire, une de ses bases ultra-secrètes établies par les Ordos. Là, des armes impies, anciennes ou xenos y seraient étudiées, analysées et stockées selon des protocoles de sécurité, à l’abri de toute menace. Lexxi avait donc commencé à y recevoir sa formation sur l’étude et l’emploi de telles armes, ce qui avait l’air de l’enchanter au plus haut point, pouvant manipuler des armes de destruction massive aux effets inconnus mais dévastateurs qui ne pouvaient que la ravir. Enfin, Lexxi commençait progressivement à se sociabiliser au contact de ses nouveaux compagnon d’armes où elle avait trouvé sa place.
    Avec l’aide de Derreck, ils avaient donc collecté plusieurs armes qu’ils venaient d’entreposer, en attendant, à la planque. Il y avait, entre autres, l’arquebuse transuranique, un canon sismique mais aussi des armes à impulsion tau, des armes drukhari et aeldari, toutes récupérées sur des hommes du Syndicat de l’ombre. Lexxi était occupée à les empaqueter soigneusement afin de les convoyer le lendemain au Reliquaire.
    Cela faisait aussi plusieurs jours qu’elle avait dans l’idée de découvrir ce qui avait bien pu arriver à son ancienne unité et à son camarade, le sergent Silon Tauros et cela la préoccupait. Elle en parlait souvent avec Derreck, qui connaissait quelques militaires parmi les FDP locaux et s’était ainsi proposé de l’y emmener dès le lendemain.
    Alors qu’il était là à l’aider, elle perçut son malaise, ayant bien vu à quel petit jeu il jouait avec ses allusions quand ils n’étaient que tous les deux. Mais ce qui exaspérait Lexxi, c’était justement le fait que Derreck ne soit pas plus entreprenant. Il avait envie d’une chose mais s’enfuyait dès que cela devenait possible, ce qu’elle ne comprenait pas. Sur son monde natal, un monde mortel, les catachans n’avaient pas de temps à perdre avec des discours ou des hésitations. Leur vie n’était faite que de danger permanent et baisser leur garde était un piège souvent mortel. Ce qu’ils voulaient, ils l’obtenaient sans tourner autour du pot. On les disait directs, parfois un peu brutaux, c’était le cas en effet. Mais au moins ils étaient très clairs dans leurs prises de décisions. Une bonne bagarre, un concours d’amasec ou s’envoyer en l’air, tout cela devait se décider très vite, sans qu’il y ait besoin d’y réfléchir pendant des heures. L’autre était d’accord ou non, cela se faisait ou pas, mais au moins personne ne perdait son temps à se poser des questions.
    Un soir où ils étaient seuls à la planque, elle décida de s’en occuper « à la catachan ». Alors que Derreck, pour la énième fois, faisait mine de partir sans vouloir partir, elle lui barra toute retraire, planquant sa main contre le mur pour l’empêcher d’avancer.
    -Et tu comptais aller où, comme ça ?
    -Je… He bien…
    -Tu ? J’aimerai bien savoir ce que tu cherches exactement, mon petit Derreck ? Tu veux juste t’amuser ou tu cherches autre chose ? Tu vois… parce que moi, je n’ai vraiment pas le temps de me prendre la tête avec ça.
    Elle retira son débardeur et lui lança au visage.
    -Je vais prendre une douche avant d’aller me coucher. Donc à toi de voir. Mais décide-toi vite.

    Le lendemain matin, Derreck, encore un peu sonné par sa dernière expérience, emmena Lexxi à la caserne du quartier de la Citadelle. En parlant avec un sous-officier qu’il connaissait, ils purent apprendre que le sergent Tauros avait bien été retrouvé en vie mais grièvement blessé et avait été conduit à l’hospice des sœurs hospitalières, au quartier du Temple. Ils décidèrent de s’y rendre le lendemain et purent s’entretenir avec lui sur son lit d’hôpital. Silon Tauros avait été sérieusement touché mais finissait de se remettre, il était particulièrement ravi et agréablement touché de savoir Lexxi toujours en vie, alors qu’elle avait été déclarée morte elle aussi, ce qui était réciproque. Il leur raconta ce qui était arrivé ce jour-là, puisqu’elle aussi avait perdu connaissance en étant percuté par un adversaire et avait chuté d’une falaise vers le fleuve en contrebas. Il raconta notamment le début de son récit pour Derreck.
    -Avec Lexxi et notre unité, on a été envoyé à quelques kilomètres au sud de Crual Wood dans une région boisée et sauvage où, selon des informations fournies par le Mechanicus, il devait se trouver un ancien bunker enterré pouvant contenir d’importants stocks d’armes ou de munitions dans des tunnels datant de la dernière guerre. L’état-major a donc décidé de nous y envoyer, pour accompagner le technoprêtre Arkos - c’était son nom – sur place. C’était pas une mission compliquée. Une simple reconnaissance avec escorte de personnel. Mais en approchant de l’objectif, l’unité est tombée dans une putain d’embuscade. Les tireurs, on les voyait pas mais on s’est fait accrocher sévère. J’ai été laissé pour mort parmi mes hommes abattus. En restant caché parmi les autres corps, j’ai pu observer certains détails – bien que perdant connaissance parfois, je n’ai pas pu tout saisir. J’ai vu notamment des hommes armés, de types troupes de choc, équipés d’armes et tenues furtives de technologie supérieure aux nôtres et pas du tout locales. Ce qui m’a le plus choqué c’est que ces hommes étaient tous des clones avec une peau très pâle comme des albinos. Ils avaient des implants aussi, remplaçant leurs yeux et oreilles pour la plupart. Avec eux se trouvait ce que j’ai pris d’abord pour un magos mais à bien réfléchir, je pense l’avoir vu faire usage de sorcellerie ou quelque chose comme ça, car ce n'était pas une aptitude normale venant d’un technoprêtre. Ce qui ressemblaient à des mécadendrites était en réalité quelque chose de fantomatique, comme des tentacules un peu translucides. Il s’en est servi pour faire parler Arkos, le technoprêtre qui nous accompagnait et savoir ce qu’il savait sur lui, sur leurs projets et sur son propre « ordre secret ». J’ai malheureusement perdu certaines phrases à ce moment-là mais crois avoir compris qu’Arkos avait l’air de se douter de ce que le magos – qu’il a appelé Kybernetès – faisait ici. J’ai ensuite compris les mots heretek et hydre avant de perdre connaissance. Quand j’ai repris conscience, peut-être quelques heures plus tard, le bunker avait été intégralement détruit par des charges à fusion et il ne restait plus personne en dehors de moi et des corps de mes hommes. J’ai mis trois jours pour rejoindre un village et de là, je me suis fait rapatrier. J’ai fait un rapport au capitaine, sur ce qui s’est passé. Une unité a été dépêchée sur place et les corps de nos gars, retrouvés. Selon les enquêtes qui ont suivies, des armes aeldari ont été retrouvés à proximité des corps et l’attaque a donc été imputé à cette race sournoise, même si je n’en crois pas un traitre mot. Les ruines ont bien été localisées mais en cendre et faute de la moindre preuve, l’affaire a été classée.

    Derreck et Lexxi se dévisagèrent, soudain conscients de tenir là, quelque chose d’énorme même s’ils n’en connaissaient pas les implications exactes. Le fait d’avoir éliminé une escouade de FDP et d’associer un heretek à de la sorcellerie n’avait pas besoin de plus de sous-titres. L’hérésie était flagrante, la dissimulation et le subterfuge bien en place. Le fait que Tauros ait survécu, tout comme Lexxi, les mettait peut-être en danger. Ils n’eurent pas besoin d’échanger pour se comprendre avec Derreck.
    -On va avoir besoin d’informer Tsali de toute urgence et faire sortir ton camarade de là, lâcha Derreck à Lexxi.
    -Et en parler à Rico et à l’équipe, mais tu as raison, on va faire au plus urgent.

    Alors que le soir-même, Rico, Lek, Derreck et Lexxi s’étaient réunis à la ferme Harkken pour faire un point sur ces derniers sujets, attendant que Felton et Ezek les rejoignent, Derreck se raidi soudain, alors contacté télépathiquement par Ezek. Au bout de quelques instants, il reprit son souffle, les autres l’interrogèrent du regard.
    -C’était Ezek… Il est coincé dans un hôtel en ville et m’a dit être poursuivi…
    -Comment ça poursuivi ? S’étonna Rico. Le Syndicat de l’ombre ?
    -Non, par des astropathes…
    -C’est quoi cette histoire ? S’étonna Lexxi.
    -Apparemment il s’est rendu au siège de l’Astra Telepathica en ville, un peu plus tôt et il serait tombé sur son ancien maitre, Aemos Lazerus, celui du Daughter of Pandora où il travaillait et… Je ne sais pas ce que Ezek lui a dit ou raconté, mais il veut absolument avoir la preuve de son affectation auprès de Rico, sous peine d’être considéré comme déserteur, car était considéré comme porté disparu depuis deux mois par l’Astra Telepathica. Mais à présent qu’il a été identifié, il est suivi et se sait surveillé. Ezek demande qu’on règle ça rapidement.
    Rico passa une main sur son visage.
    -Avec l’Astra Telepathica ? On avait vraiment besoin de ce problème…
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 26/03/2022 à 00:27 Citer ce message

    Quartier du Temple,
    Planque de Tsali, rue des Abbesses.
    Tempus estimare 953.020M42 – 22H57

    Felton sortit finalement la tête de sous les draps, visiblement agacé par la vibration qui n’avait pas l’air de s’arrêter. Il alluma le lumiglobe en forme de crâne grimaçant. Si seulement il savait, où diable était ce satané microvox pour l’envoyer au warp.
    -Putain, Rico, toujours au bon moment !
    Tsali pointa son nez de sous les draps elle aussi et ne put s’empêcher de pouffer de rire.
    -C’est ton vox ou c’est le mien ?
    -C’est les deux, je crois… Merde, ils ont déclencher un bombardement orbital, ou quoi ?
    Elle chercha à mettre la main sur le moindre sous-vêtement mais réalisa qu’ils étaient peut-être encore dans la pièce d’à-côté. Elle laissa retomber sa tête sur l’oreiller, en soufflant. La soirée avait pourtant bien commencé… De sa main cybernétique, elle attrapa son paquet de Sanctus sur la table de nuit et s’alluma un de ces fins cigalhos épicés, faute de mieux. Elle passa la main dans ses cheveux.

    Felton finit par mettre la main sur son microvox, en cherchant parmi ses vêtements épars sur le tapis. Il l’activa enfin et entendit aussitôt la voix de Rico passablement affolé, alors qu’il enfilait son pantalon de costume à la hâte.
    Tsali s’était redressée et s’assit en tailleur dans le lit, couvrant vaguement sa poitrine nue avec le drap. Elle l’interrogea du regard, en fronçant les sourcils, tout en tirant sur son cigalho.
    -Ezek est à l’astroport, il a des gens aux trousses, apparemment, lui dit-il tout en coupant le micro.
    -Comment ça ? C’est des hommes du Syndicat ?
    -Je ne sais pas. Il a parlé d’astropathes.
    -Quoi ? Pourquoi des astropathes le chercheraient ?
    -Attends, je comprends rien à ce que me dit Rico…. Ezek serait tombé sur son ancien chef, le maitre astropathe du Daughter of Pandora et… Merde… Et il a été lui parlé en plus…
    Tsali écarta le drap et sortit du lit d’un bon, cherchant à attraper quelques affaires au passage.
    -Je croyais qu’ils se détestaient tous les deux. Dans quelle galère il est allé encore se fourrer lui ? Mais ils ne l’ont quand même pas laissé aller tout seul à l’astroport ? Qui était avec lui ?
    -J’en sais foutre rien…. Il va falloir que j’y aille, ma belle, Rico veut qu’on le trouve au plus vite.
    -Il a raison. On peut pas le laisser tomber entre les mains de je ne sais qui.
    Il raccrocha le microvox et attrapa Tsali au passage par la taille et la serra tout contre lui, savourant la chaleur et le parfum de sa peau douce. Il lui déposa un long baiser sur les lèvres, avec cette très nette impression qu’une fois sorti de chez elle, la nuit allait être absolument des plus merdiques.

    Une heure plus tard, Rico et les autres avaient récupéré Felton en ville. Lek était resté à Lynnbarra à la suite d’une mauvaise surprise avec quelques verres de Remous qui avaient eu raison de l’endurance du pistolero. Ils le laissèrent donc se reposer à la ferme Harkken.
    La Hive Runner avait filé sur la voie rapide des liaisons intercités parmi le balai incessant des longs porte-containers qui pouvaient compter chacun jusqu’à dix voire douze remorques. A chaque fois que l’un d’eux croisait la Hive Runner, Derreck peinait à maintenir sa trajectoire tellement le souffle faisait dévier le véhicule. Ils traversèrent ainsi les immenses plaines céréalières des Terres septentrionales, désormais sous contrôle du Sacro-saint Mechanicus. Deçà, delà, des agrifacroria chenillées et massives comme des blocs hab, avalaient des hectares de cultures transgéniques, tout en refertilisant chimiquement les sols et semant dans la foulée pour préparer la récolte suivante qui devait germer dans les prochaines semaines. Le port de masques filtrant était d’ailleurs fortement recommandé dans la région, pourtant le Mechanicus n’en fournissait pas aux ouvriers agricoles dont la mortalité était assez précoce. Le clergé de Mars s’en accommodait cependant. Les mourants étaient ainsi aisément recyclés en servitors améliorés et parfaitement capable de supporter les doses chimiques mortelles pour produire toujours plus. Mourir sans avoir accompli son devoir envers le Trône aurait été péché mortel de toute façon, mais grâce à la sagesse des Magos biologis, le citoyen était ainsi assuré de servir, même bien après sa mort.

    Aux alentours de minuit, ils étaient dans les faubourgs du grand astroport d’Overpass, situé à une trentaine de kilomètres au nord de la capitale. C’est là que se trouvaient les tours-silos de stockage, hautes de plusieurs centaines de mètres et capable d’engranger des millions de mètres-cube de céréales qui étaient avalés en retour vers les navires chartistes qui s’y amarraient, entre cinq cents et mille mètres d’altitude. Voire ainsi ces lourds transports de plusieurs kilomètres de long défiait toujours l’entendement pour les non hors-mondes. L’air était lourd de gaz des navettes atmosphériques, de vapeurs chimiques et d’effluves de prométhéum. Enfin, les navires amarrés plus hauts perturbaient à ce point le climat qu’il pleuvait presque chaque jour sur Overpass, nimbé dans une couche nuageuse perpétuelle. Après la dernière guerre, l’astroport avait été rebâti en bien plus grand et s’étalait désormais sur des dizaines de kilomètres-carrés, incluant les tours-silos, des hangars à navettes, ses zones de fret, de stockage, ses bâtiments des différents adepta, guildes marchandes et l’équivalent d’une petite ville pour y loger quelques milliers de personnes qui travaillaient là et qui transitaient par l’astroport.
    -J’en avais oublié à quel point l’astroport me rappelait Eshunna, sourit Rico.
    -Ça te change de Lynnbarra, c’est sûr, lâcha Felton sur un petit ton sarcastique.
    Ezek leur avait donné le nom d’un hôtel que Lexxi finit par trouver au bout de quelques minutes. Derreck arrêta le véhicule alors qu’un agent du magistratum, en armure carapace noir mat, vint lui faire signe de baisser sa vitre. Ce qu’il fit. Ils comprirent tout de suite ce qui devait se passer. A cent mètres de là, se trouvait l’hôtel et le magistratum avait bouclé le quartier à l’aide de fourgons blindés et de cordons de sécurité surveillés par des agents armurés en en arme.
    -Vous devez faire demi-tour, la zone est bouclée, leur répondit l’agent.
    Felton, profitant de sa tenue d’officier se pencha vers la fenêtre et l’interpela.
    -Je dois rejoindre mon hôtel, là-bas, comment puis-je faire ?
    -Vous ne pouvez pas… Monsieur. La zone est dangereuse et une opération est en cours. Nous ne pouvons garantir votre sécurité en cas de coups de feu. Monsieur.
    Felton fit signe à Derreck de reculer. Il remercia le magistratus et rebroussèrent chemin.
    -Merde, il a fait quoi Ezek ?
    -Gare-toi dans la rue juste à côté, on va y aller à pied, répondit Rico.
    Ils descendirent du véhicule et allèrent se mêler à la foule de curieux qui observaient, au-delà des barrières de sécurité. Toutes leurs tentatives d’appels vox pour joindre Ezek se soldèrent par des échecs, pourtant, Derreck parvint à ressentir l’emploi du warp, non loin de là. C’était assez récent, une heure tout au plus. Il en fit part à ses compagnons.
    -C’était lui, tu crois ? Lui demanda Rico.
    -Possible, mais je suis trop loin pour en être sûr.
    -Tu pourrais le ressentir ? Savoir où il est ?
    -S’il manifeste un de ses pouvoirs, oui, c’est possible. Mais pas là.
    -Bon, on va se séparer dans ce cas. Felton et Lexxi, tâchez de vous approcher discrètement de l’hôtel pour en savoir plus. Derreck et moi, on va rester à distance, en couverture.
    Felton préféra retourner à la voiture et alla se changer, échangeant ses habits de noble pour sa tenue urbaine et son pare-balles, plus pratiques. Il alla rejoindre Lexxi et tous deux se rapprochèrent du bâtiment en question où ils restèrent un petit moment à observer ce qui s’y passait. De manière assez évidente, Felton comprit que le magistratum était déjà sur le point de remballer leur matériel. Il identifia des agents de la scientifique ainsi que des enquêteurs qui finissaient de prendre des dépositions.
    -On dirait qu’ils ont terminé, lâcha Felton.
    -Ils l’ont choppé, tu crois ? Demanda Lexxi.
    -Je ne pense pas… Regarde les types là-bas.
    Il lui pointa un groupe d’individus menaçants vêtus de robes rouges et portant des masques de cuir et tout un arsenal redoutable, mêlant lance-flammes et tronçonneuses.
    -Merde, c’est qui eux ? On dirait des prêtres ? Demanda Lexxi.
    -Des rédemptionistes. Des fanatiques de l’Empereur.
    -Et ils sont là pour Ezek, tu crois ?
    -Je suis prêt à le parier, ma grande. Bougeons, j’ai pas trop envie de me frotter à ces fous du lance-flammes mais j’ai bien envie d’écouter ce qu’ils disent.
    Ils s’approchèrent, profitant des ombres et se cachèrent sur leur chemin. Felton prêta l’oreille et ce qu’il perçut brièvement conforta son impression.
    -Ils le cherchent toujours, dit-il à voix basse à Lexxi. Faut croire que notre Ezek est toujours dans la nature.
    -Si on allait voir à l’hôtel, on trouvera surement un indice.
    -Bonne idée, mais passons par-derrière, le devant est surveillé.
    Ils contournèrent le bâtiment, prenant bien soin à ne pas se faire repérer ni par les magistratus ni par les rédemptionistes. Ils finirent par faire le tour et se retrouvèrent dans la ruelle de derrière. Là, Felton se dirigea vers une porte et sortit sa multiclé, cherchant à forcer la serrure qui semblait lui résister. Les secondes s’écoulèrent telles des minutes, au point que Lexxi vint tenter de l’aider, relâchant son attention. Une voix les interpela alors que la lueur d’un luminateur vint les éclairer.
    -Hey, là-bas, montrez-vous !
    Felton réagit au quart de tour. Il remballa sa multiclé et décampa en courant, à l’opposé du rayon de lumière, attrapant Lexxi au passage afin qu’elle le suive. Ils se mirent à courir à toute vitesse mais, à peine eurent-ils fait vingt mètres que quelque chose sauta dans le dos de Felton et le plaqua violemment au sol. Il comprit juste à ce moment-là qu’il s’agissait d’un cyber-mastiff qui pesait de tout son poids et le maintenait à terre. Il entendit l’agent approcher, continuant d’encourager son animal. Lexxi avait pris la fuite et tourna au coin du mur pour finalement se retrouver nez-à-nez avec le canon d’un Mastoff 812 à pompe. Elle se fixa et ne bougea plus. Le magistratus la plaqua face au mur et la désarma, lui intimant de se mettre à genoux, les mains sur la tête.

    Sur un ordre de son maitre, le cyber-mastiff se dégagea de sa prise. L’homme avait une matraque à décharge à la main et ordonna à Felton de se retourner. Ce qu’il fit.
    Il venait pourtant de dégainer son pistolet bolter et tira deux fois à bout portant. Le garde eut son plastron carapace éventré, de même que sa cage thoracique qui explosa de l’intérieur. Il fut projeté à deux mètres de là, le sang giclant à gros bouillon de son torse dévasté alors que ses jambes étaient prises de convulsion. Le canide attaqua aussitôt et verrouilla sa mâchoire cybernétique sur le torse de Felton, cherchant à l’atteindre à la gorge. Il se démena pendant plusieurs secondes, sentant son sang couler alors que le molosse arrachait son blouson et son armure pare-balles à l’aide de ses crocs augmentiques. Avec du mal, il parvint à dégainer son épée de son autre main et le frappa avec mais sans trop de succès. Finalement il fourra le canon de son arme dans la gueule de la bête et tira, pulvérisant la tête du canide dans une gerbe de fluides, d’os et de fragments métalliques. Le cyber-mastiff décapité s’écroula sur lui sans un bruit. Il se dégagea en grimaçant à cause de son torse labouré et comprit que Lexxi était en difficulté, luttant en plein corps à corps, et cherchant à arracher le fusil des mains de son adversaire. Il chargea et le frappa à l’aide de son épée, en plein dans les jambes. Le magistratus tomba en poussant un cri. Felton, réalisant que des renforts allaient arriver, il fit signe à Lexxi.
    -Achève-le et suis-moi, vite !
    Lexxi hésita un instant, peinant à comprendre. Autant elle n’avait pas de souci pour mettre l’homme hors combat mais le tuer de sang-froid… C’était un agent de l’Imperium après tout, comme eux.
    -Tues-le et tirons-nous, vite ! insista Felton, qui déjà était en train de courir.
    Elle resta là, à ne pas savoir comment gérer la situation. Elle s’apprêta à ramasser son pistolet laser et son poignard au sol mais le garde, juste blessé à la jambe, se releva et se jeta sur elle tout en dégainant son canon de poing. Elle chuta au sol avec lui et tout en roulant tous les deux, chercha à le désarmer. Le coup partit mais manqua sa cible. Il chercha cependant à plaquer le canon droit sous le menton de Lexxi pour lui exploser le crâne alors que d’une main elle tentait de retenir son geste. De sa main libre, elle tenta d’atteindre son pistolet laser mais finit après quelques secondes à atteindre le manche de son poignard posé dans l’herbe. Elle s’en saisit et le planta sous l’aisselle gauche de son adversaire, là où l’armure était la plus faible. La lame de trente centimètres lui sectionna un des poumons. L’homme se mit à recracher un flot de sang rouge vif en convulsant. D’un geste elle se dégagea, le laissant à son triste sort. Elle ramassa ses armes et fila pour rattraper Felton.

    A cent mètres de là, Derreck venait de les récupérer tous les deux à bord de la Hive Runner avant de démarrer en trombe.
    -Mais il s’est passé quoi ? S’affola Rico, voyant leurs tenues déchirées et maculées de sang.
    -Ça a merdé à ce point ? Lâcha Derreck, tout en gardant un œil à sa conduite.
    -J’ai failli me faire bouffer par un cyber-molosse et on a été obligé de flinguer deux magistratus.
    -L’important c’est que vous soyez en vie.
    -Je sais pas si tu réalises dans quelles emmerdes on est en train de se foutre, là ?
    -Je voulais pas vous exposer à la base.
    -Bin, fallait peut-être que t’ailles dire ça aux magistratus où aux fêlés du lance-flammes, t’es prêtre oui ou non ? Toi ils t’auraient surement laissé passer en plus.
    -J’ai pas pris ma tenue…
    -Ha bin oui, évidemment…
    -Bon on va tâcher de ne pas se faire repérer déjà. On va laisser passer l’orage et tenter de retourner à l’hôtel pour…
    Son microvox vibra. Il l’activa et reconnut la voix de Tsali.
    -Rico, vous êtes où là ? Vous avez retrouvé Ezek ?
    -Nan, aucune nouvelle. Lexxi et Felton ont eu un accrochage avec le magistratum en essayant d’en apprendre plus. On va se rendre au relai de l’Astra Telepathica, c’est eux qui semblent le traquer, tout comme des rédemptionistes. Et vois si tu peux nous préparer des papiers officiels, il faudrait qu’on s’en serve pour les présenter à l’Astra Telepathica comme alibi pour Ezek.
    -Quoi ? Mais pourquoi s’être accroché avec le magistratum ? Quel rapport ? Pourquoi l’Astra Telepathica traquerait Ezek ? Il est issu de cet Adeptus justement. Derreck ne peut pas voir avec eux, il y a fait un stage de trois semaines justement ?
    -Visiblement c'est étrange, l’ancien maitre astropathe du Daughter of Pandora recherche Ezek...
    -Lui, comme trois mille autres membres de l’équipage et passagers. Nous n’étions pas que six à en descendre, Rico. Le magistratum, ils ont eu vos identités ? Ils ont des indices sur vous ? Il y a des témoins ?
    -Il y a deux agents au tapis, apparemment et peut-être quelques douilles mais rien de plus.
    -Rien de plus ? Mais tu plaisantes ! C’est bien les deux agents au tapis qui m’inquiètent le plus. Si ça vous lie à cette affaire et s’ils décèdent, vous pourrez tirer un trait sur le soutien du magistratum et de l’arbites par la suite… Je vais appeler Jézabel. Ça va chier je pense. Mais par le Trône… vous avez laissé votre astropathe se balader seul à trente kilomètres de Lynnbarra ? Vous êtes totalement inconscients ma parole !Quant au document, non… Pour l’instant je ne fais rien, il manque trop d’éléments. Le risque est qu’Ezek tombe en de mauvaises mains. Il va donc falloir en apprendre plus. Je vais contacter la cellule Tenebrae pour que vous puissiez vous coordonner avec certains d’entre eux s’ils sont dans les parages. Tachez de me le retrouver, je vous rappelle d’ici deux heures.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 03/04/2022 à 18:16 Citer ce message

    Quartier de Fort Glory
    Rue des Saints Martyrs, à deux pas du Bastion de l’Adeptus Arbites
    Tempus estimare 953.020M42 – 00H45


    Comme convenu, Tsali avait fait en sorte que la cellule Obscurus puisse contacter au moins un des acolytes de la seconde cellule pour leur venir en aide. Pour cela, ils avaient dû rebrousser chemin en voiture, depuis l’astroport d’Overpass et revenir vers Hub City. Là, Derreck était parvenu à contact une seule des acolytes de Tenebrae, la praetor Poppy Sandwall. Elle était actuellement de permanence au bastion et ils venaient de lui donner rendez-vous. Derreck gara la Hive Runner dans un coin sombre de la rue des Saints Martyrs et coupa le moteur.
    -Tu la connais ? Lui demanda Rico, assis à ses côtés.
    -A peine. J’ai eu l’occasion d’échanger quelques mots la dernière fois avec elle quand Tsali nous les avait présentés. Elle est plutôt… Charmante.
    Rico le dévisagea, tout en relevant un sourcil avec amusement.
    -Charmante ? Une arbitrator ?
    -Oui, enfin… elle est directe et a un caractère plutôt bien trempé, mais elle ne m’a pas tiré dessus, ce qui est plutôt bon signe, je trouve.
    -Les psykers… Vous êtes fascinants, parfois, répondit-il, non sans amusement.
    -Bon, on peut justement se recentrer sur notre affaire ? Je vous rappelle qu’Ezek est toujours le warp-sait-où et qu’on a dû flinguer deux types du Magistratum pour rien. Lâcha Felton, plutôt agacé par la tournure que prenaient les évènements.
    -Oui, eh bien rien ne vous obligeait non plus à leur tirer dessus, répondit Rico.
    -Alors là, venant de toi qui a déjà abattu la moitié de la ville, ça me fait bien marrer cette remarque, surtout que tu n’as rien fait non plus pour nous en empêcher.
    -C’est bon, lâcha Lexxi. On est déjà assez dans la merde comme ça, pas la peine d’en rajouter, tous les deux. Regardez, la voilà votre arbitrator.

    Une jeune femme en armure carapace légère portée sous un long manteau vint les retrouver, un cigalho au coin des lèvres. Elle se pencha à la fenêtre de Rico et les salua d’un hochement de tête. Ses cheveux bruns ramenés à l’arrière, elle avait un air mélancolique et plutôt blasé. Bien que sur le qui-vive, elle n’en montrait rien. Felton le trouva bien jeune pour être praetor. Poppy Sandwall faisait jeune, il est vrai, même si elle comptait bientôt dix ans d’Arbites en réalité.
    -Z’avez une sale mine. Racontez-moi… Je veux tout savoir. L’heure, le lieu et les détails.
    Rico demanda à Lek et Lexxi de céder leur place et d’aller jeter un coup d’œil dans la rue. Il fit signe à la praetor de monter puis lui raconta une partie de leur problème. Il se garda bien de parler du fait que Felton et Lexxi aient dû abattre deux agents des forces de l’ordre. Elle l’apprendrait tôt ou tard, mais il ne savait clairement pas encore comment aborder le sujet car cela allait forcément créer des tensions tôt ou tard.

    -Donc, si je résume bien, vous avez perdu votre astropathe à Overpass et vous comptez sur moi pour le retrouver ? Leur dit-elle au bout de quelques minutes, tout en s’allumant son deuxième cigalho.
    -C’est un peu ça, répondit Derreck.
    -Vous n’êtes pas des enquêteurs, c’est pour ça ?
    -Perdu, n’est pas le terme que j’aurais employé, ajouta Rico, soudain mal à l’aise. On ne l’a pas perdu, il était seul en fait et il avait des gens aux trousses.
    -Et vous êtes sûr que ce sont des astropathes qui le suivaient ?
    -Non… c’était ce qu’il nous a dit, mais on n’en sait rien.
    -Vous êtes bien sûrs d’avoir été regarder là où il était quand il vous a appelé ?
    -On a essayé mais on a eu quelques ennuis avec le Magistratum sur place, on a dû…
    Felton lui mit un discret coup de coude, idée qu’il n’aggrave pas plus leur cas.
    -Quel genre d’ennuis ? Retorqua aussitôt Poppy tout en soufflant la fumée de son cigalho par la fenêtre. Elle attarda son regard sur la veste déchirée de Felton, dont même le plastron pare-balles était arraché et en lambeaux.
    -Un de leurs cyber-molosses s’en est pris à moi. On a dû partir avant d’attirer l’attention.
    -Pourquoi auriez-vous dû attirer l’attention, selon vous ? Vous êtes recherché ?
    -C’est que… Contrairement à toi, certains d’entre nous, avons un passé de… criminels. Nous tenions à opérer sous un certain anonymat.
    -Je vois. J’apprécie cette honnêteté de votre part, Felton mais je ne vous ai pas autorisé à me tutoyer pour autant.
    -Et il y avait des Rédemptionistes sur place, ajouta Derreck, afin de changer rapidement de sujet. On ne voulait surtout pas qu’ils s’en prennent à Ezek ou à… moi.
    Poppy fronça les sourcils et se mit à réfléchir. Une larme coula de son œil et elle l’essuya instinctivement. Elle tourna son regard vers Rico qu’elle dévisagea.
    -Ricardo Gallileus. Si j’en crois votre dossier, vous êtes censé être prêtre ou quelque chose comme ça, non ?
    -Je le suis, en effet.
    -Eh bien, cela ne voit absolument pas. Vous vous en rendez bien compte, au moins ?
    Il prit un certain aplomb en même temps que son sourire qu’il aimait employer en temps normal.
    -Je suis sous couverture. Je suis censé me faire passer pour un noble dilettante qui…
    -C’est très intéressant, mais dans le cas qui nous intéresse c’est parfaitement inutile. Votre identité d’écclésiaste aurait sans doute pu vous débloquer la situation auprès des rédemptionistes et même du Magistratum. Auquel cas, vous n’auriez même pas eu besoin de moi.
    -J’ai bien une tenue de prêtre quelque part mais je ne l’ai pas emmené avec moi.
    Poppy leva les yeux au plafond avant de jeter son mégot par la fenêtre, d’une simple pichenette.
    -D’accord, allons à Overpass. Je vais aller poser quelques questions.

    Un peu plus d’une demi-heure plus tard, ils étaient de retour dans le quartier de l’astroport. Il était déjà plus de deux heures du matin lorsqu’ils approchèrent de l’Arrêt du pèlerin, l’hôtel où Ezek était censé s’être rendu en fin de soirée. Le barrage du magistratum avait été levé mais deux agents en tenue était toujours en faction dans l’entrée de l’hôtel. Ils portaient leur armure noire et l’un d’eux portait un fusil à pompe Mastoff tandis que son collègue portait un fusil mitrailleur court à chargeur circulaire. Un veilleur de nuit était là aussi, derrière son comptoir. C’était le même que Felton avait déjà aperçu quelques heures plus tôt, alors qu’avec Lexxi ils avaient contourné le bâtiment.

    Poppy décida d’y aller, accompagnée de Rico, Felton et Derreck. Felton avait préféré se changer. D’une part parce que ses vêtements étaient déchirés et tâchés de sang et d’autre part parce qu’il aurait pu être reconnu par le magistratum. Il opta donc pour la prudence et remit sa tenue de noble, plus flamboyante mais en parfait état. Ce qui amusa quelque peu, la praetor.
    Parvenue dans le hall de l’Arrêt du Pèlerin, elle sortit sa plaque devant les deux agents qui la saluèrent.
    -J’ai besoin d’accéder à la chambre. Rapidement. Que l’un de vous nous y accompagne et que l’autre reste ici à surveiller le hall.
    -Bien, madame.
    Ils suivirent un des deux agents jusqu’à l’étage et la chambre en question. Elle lui indiqua alors qu’il pouvait disposer. Une fois redescendu, elle fit sauter les scellés et entra. Comme elle pouvait s’y attendre, la chambre avait déjà été fouillée de fond en combles et ils eurent beau chercher, ils ne trouvèrent absolument rien. Même Derreck qui usa de ses sens psychiques à la demande de Poppy, ne trouva pas la moindre signature.
    -Votre astropathe, à quelle heure, il vous avait contacté, déjà ?
    -C’était il y a plus de quatre heures maintenant, répondit Rico.
    -Evidemment. On pouvait s’en douter, leur dit Poppy. Le magistratum a juste fait son boulot. Si votre homme était là et s’il a laissé des indices, c’est eux qui les ont à présent.
    -Et on fait quoi ? On va les voir et on leur demande gentiment ? Lâcha Felton.
    Poppy le dévisagea avec un petit sourire sans le moindre humour. Elle s’alluma un nouveau cigalho.
    - Au risque de déchirer votre beau costume ? On voit déjà ce que ça a donné.
    D’un signe de la main, elle leur fit signe de la suivre.
    -Le veilleur de nuit qui est en bas. Il a peut-être vu ou entendu quelque chose.

    Elle redescendit et demanda au veilleur de la suivre dans le bureau adjacent où elle lui posa quelques questions afin de vérifier ce qu’il avait bien vu et les nota sur un petit carnet. Elle demanda à Derreck de vérifier discrètement que le type ne leur racontait pas des craques. Ezek était venu vers 22h30 et avait loué une chambre sous sa fausse identité, celle d’Edhim Myrmidon, un adepte. Le veilleur était un type filiforme et imberbe, dont le cou et la partie gauche du visage étaient marqués par une ancienne brûlure. Son nom était Morton Waldo et il avait bien noté qu’Ezek était aveugle et semblait plutôt nerveux et même très pressé. Mais sur le moment, il ne s’était pas posé plus de question, du moins c’est ce qu’il prétendit. Il assura n’avoir absolument rien vu et jura que personne d’autre, après Ezek, n’était entré dans l’hôtel mais Poppy restait circonspecte. Il s’était passé quelque chose et soit quelqu’un savait, soit quelqu’un mentait. Elle hocha la tête et demanda à Waldo si des pensionnaires occupaient des chambres au premier. Il consulta son registre, soudain mal à l’aise. Il se racla la gorge.
    -J’ai cinq clients, mais à cette heure ils doivent dormir et je ne voudrais pas…
    -Vous ne voudriez surtout pas entraver une enquête de l’Adeptus Arbites, croyez-moi, citoyen.
    Ils remontèrent à l’étage et elle entreprit de les réveiller et de les interroger un par un. Elle laissa Rico et les autres surveiller les couloirs, des fois que l’un des clients ait la mauvaise idée de leur fausser compagnie. Cela dura une bonne demi-heure à l’issue de laquelle elle vint retrouver les autres acolytes. Elle les prit à part dans un des couloirs, s’assurant que personne ne les écoute. Elle avait renvoyé tous les clients dans leurs chambres.
    -L’un d’eux a peut-être bien vu quelque chose.
    -Il a vu Ezek ? S’étonna Rico.
    Poppy baissa le ton, prenant garde à rester discrète.
    -En temps normal, j’aurai pensé qu’il avait abusé de l’amasec, mais avec votre… psyker dans la nature, ce qu’il m’a dit me laisse perplexe.
    -Qu’a-t-il vu ? Lui demanda Derreck.
    -Il a vu des éclairs et du brouillard dans le couloir.
    -Quoi ? S’étonna Rico. Ezek aurait pu faire ça ?
    Derreck hocha la tête par la négative.
    -Les éclairs sans doute, mais le brouillard… J’ai un doute.
    -Et il n’a rien vu d’autre ? Lui demanda Felton.
    -Il a dit avoir vu passer une silhouette. Comme une sorte de fantôme dans le brouillard. Et que cette silhouette est entrée dans la chambre de votre astropathe. Le type a pris peur et s’est enfermé dans sa chambre mais plus tard quand il en est ressorti pour vérifier, tout avait disparu et le chambre en question était vide.
    -Trône… De quoi s’agit-il ? Demanda Rico à l’attention de Derreck. Une sorte de magie ? De la sorcellerie ?
    -C’est possible…
    -Cela pourrait tout aussi bien être une tenue furtive et un fumigène, ajouta Felton. Ce n’est pas nécessairement de la sorcellerie.
    -Je vais retourner voir le veilleur, en bas. Je veux en avoir le cœur net.

    Elle redescendit et alla le retrouver pour s’entretenir avec lui. Rico et Felton restèrent un peu en retrait à observer tandis que Derreck l’accompagna. L’homme avait l’air de dire vrai, pourtant Derreck décela quelque chose qui l’alerta. Il attendit que la praetor en ait terminé et qu’ils soient de nouveau dehors en direction de la voiture pour parler.
    -Waldo. Quelqu’un a usé d’un pouvoir mental sur lui. Il dit vrai mais sa mémoire a très certainement été altérée.
    -Quoi ? Comment ça ? Lâcha Poppy, tout en se retournant vers lui.
    -S’il a vu quelque chose, il ne s’en rappellera pas.
    -Qui a pu lui faire ça ? Un astropathe ?
    -Non. Ce n’est pas une signature psychique de l’Astra Telepathica. Ça j’en suis sûr.
    -Quoi alors ?
    -Autre chose. Mais j’ignore quoi.
    -Merde… Et on a toujours aucune nouvelle d’Ezek, lâcha Felton.
    -Il reste une piste. On va aller au bureau du Magistratum. Ils ont peut-être des indices. En voiture.

    Sur place, Poppy s’entretint avec un castigateur grâce auquel elle put accéder au dossier, et aux quelques indices découverts sur place. Mais à sa grande surprise, ce qu’elle découvrit n’était pas ce à quoi elle s’était attendue. Rico et son équipe s’étaient payés sa tête et elle n’aimait vraiment pas ça.
    Elle attendit qu’ils aient terminé, demandant au castigateur de lui faire parvenir dès le lendemain matin, les rapports balistiques ainsi que ceux du légiste.
    Une fois dehors, elle attrapa Rico Et Felton.
    -Vous croyiez sincèrement que c’était malin de votre part de me le cacher plus longtemps et que je n’allais pas le découvrir pour la mort des deux agents ?
    Rico prit une mine déconfite et allait dire quelque chose mais Felton le coupa aussitôt avant qu’il ne fasse tout rater.
    -C’est à cause du cyber-molosse. C’est là que ça a dérapé. J’ai dû l’abattre, c’est vrai. Je l’avoue.
    -Et les deux agents avec lui, par la même occasion, hein ?
    -Non !
    Felton prit un air totalement navré.
    -Bien sûr que non… Il y avait ces types de la pègre, là… ceux du Syndicat de je-ne-sais-plus-quoi…
    -Le Syndicat de l’ombre ?
    Il pointa Poppy du doigt.
    -Voilà, c’est ça ! Ils étaient là et c’est eux qui ont ouverts le feu sur les agents.
    -C’est quoi cette histoire ?
    -Oui, c’est vrai, appuya Rico.
    -Vous vous foutez de moi ou quoi ? Pourquoi vous ne m’avez pas parlé de ça, dans ce cas ?
    -Eh bien… On n’a pas réfléchi que… Ajouta Felton.
    Une larme coula au coin de l’œil de Poppy, alors qu’elle sortit nerveusement un nouveau cigalho de son paquet et se l’alluma.
    -Vous n’avez pas réfléchit… Putain… ça c’est clair. Allons dormir, on verra ça demain.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 09/04/2022 à 11:40 Citer ce message

    Quartier de Fort Glory
    Rue des Saints Martyrs, à deux pas du Bastion de l’Adeptus Arbites
    Tempus estimare 955.020M42 – 08H33

    Après une courte nuit passée à la planque d’Hécate, à quelques rues de là, ils décidèrent de retrouver la praetor Sandwall, en face du bastion de l’Arbites. La veille, Lexxi et Lek étaient retournés rapidement à Lynnbarra pour y chercher le comm-vox qu’ils laissèrent dans le coffre de la Hive Runner.
    Poppy Sandwall finit par les rejoindre, vêtue de son armure et de son imper. Un cigalho entre les lèvres et une paire de lunettes photochromatiques sur le nez. Elle se dirigea vers leur véhicule et sans plus attendre, ouvrit la portière et monta à l’arrière, après avoir jeté son mégot d’une simple pichenette vers le trottoir encombré de détritus.
    -Rico n’est pas avec vous ?
    -Il avait une course à faire, lui répondit Derreck. Quelque chose à gérer au quartier du Temple.
    -Peu importe, en route vers Overpass. On a une enquête sur les bras.

    Durant le chemin, sur la voie rapide, entre les files de porte-containers, Felton l’interrogea.
    -Hier vous avez fait mention de rapport balistique et d’autopsie pour les deux types tués. Vous ne deviez pas recevoir les conclusions du Magistratum ?
    -Si.
    Il attendit quelques secondes une autre réponse qui ne vint pas.
    -Et ?
    Elle tourna son regard vers lui, s’attardant sur la garde de son épée et sur la crosse de son pistolet bolter. Elle chercha à comprendre à quel petit jeu dangereux il cherchait à jouer.
    -Vous connaissez déjà ce que contient ce rapport, je n’en doute pas, lui dit-elle.
    -Allons, je vous en prie, éclairez-moi.
    -En temps voulu. Soyez-en assuré.
    -Vous savez où me trouver dans ce cas.

    Le reste du trajet se déroula sans encombre. Ils avaient décidé de se rendre au relai de l’Astra Telepathica comme cela avait été prévu la veille. Il s’agissait d’un haut et austère bâtiment sombre, juché de coupoles et de dômes et dont le périmètre, hérissé de batteries automatiques était lourdement gardé. Derreck se gara dans la rue d’en face. Le temps était couvert et un orage menaçait, au loin. Le vent s’était levé et faisait voler les papiers et autres menus déchets sur le trottoir. Sur les murs défraichis, des affiches vantait les mérites du recrutement dans l’Astra Militarum ou mettaient en garde contre les mutants et autres damnations.
    Poppy descendit du véhicule et ils l’accompagnèrent. Elle vint s’entretenir avec les deux plantons en faction, à l’entrée du relai astropathique. Ils portaient les couleurs des Forces locales, reconnaissable à leur treillis gris-bleu, à leurs insignes de régiment d’Archaea et à leurs fusils d’assaut flambant neuf. Elle sortit son badge, et leur expliqua la raison de leur visite. Ils firent appeler leur supérieur, lui demandant de patienter.
    Au bout de quelques minutes, un officier sortit du bâtiment et vint les trouver, escorté de deux autres gardes. Il était plutôt bien bâti et avait une mâchoire carrée et des yeux clairs. Il fit un petit signe de tête en voyant l’officier de l’Arbites. Bien que de grade équivalent, l’Arbites prévalait largement sur les FDP.
    -Praetor ? Je n’ai pas bien saisi la raison de votre visite.
    -Un de vos astropathes a disparu et j’aurai besoin de quelques renseignements, lieutenant.
    -Grand Dieu… Disparu ? C’est que…
    Il se racla un peu la gorge avant de poursuivre.
    -Je suis le lieutenant Fanning, en charge de la sécurité du relai. Si un de nos astropathes a disparu, je devrais en être le premier informé, praetor.
    -Raison pour laquelle je vais devoir consulter vos registres.
    -Ces gens vous accompagnent ? Dit-il en désignant le reste de l’équipe.
    -Ce sont mes… Spécialistes. En effet ils m’accompagnent.
    -Vous pouvez entrer mais ils devront rester là. Protocole de sécurité. Mais rassurez-vous, cela ne nous prendra pas longtemps.

    Trente minutes plus tard, Poppy ressortait du relai et vint retrouver le reste de l’équipe qui l’attendait à côté de la voiture, à discuter. Elle s’alluma un cigalho.
    -Eh bien ? Lui demanda Derreck.
    -J’ai un nom. Aemos Lazerus, ça vous parle ?
    -Oui, c’était le maitre astropathe d’Ezek sur le Daughter of Pandora, le vaisseau sur lequel il travaillait.
    -Il nous en avait déjà parlé, ajouta Felton. C’était un connard. Et donc ils se sont bien parlé, c’est ça ?
    -Votre gars est venu ici hier soir et il est probable qu’ils se soient parlé en effet. Les gardes à l’entrée l’ont pris pour un des astropathes qui travaille ici mais il ne serait resté que cinq minutes et serait reparti à la hâte. Ils n’ont rien noté d’anormal. Et en dehors de leurs routines militaires, je n’ai rien noté d’étrange. Ce lieutenant Fanning n’est pas un marrant, mais m’a l’air droit dans ses bottes.
    -Ils ont parlé de quoi ?
    -Personne ne le sait. Espionner des télépathes ne fait pas partie de leur mission. Et je doute fort qu’ils en aient les capacités, de toute façon.
    -Et ce Lazerus vous lui avez parlé ?
    -Il n’est pas de service aujourd’hui et les gardes ne savent pas forcément ce qu’il fait. Ce n’est pas dans leurs attributions.

    Soudain Derreck fut comme prit de vertiges et s’adossa au capot du véhicule, portant sa main à sa tête. Lexxi l’aida à s’assoir dans la voiture. Il releva son regard vers eux, les yeux écarquillés.
    -Ezek… Il vient de me contacter.
    Tous, furent frappés de stupeur.
    -Trône ! Il est où ? Lâcha Lek.
    -Il m’a dit qu’il est toujours dans sa chambre d’hôtel et qu’il nous y attend.
    -Non mais il se fout de nous, là ! Exulta Felton.
    Poppy écrasa nerveusement son mégot sous sa botte.
    -En voiture, c’est à cinq minutes d’ici.

    Felton faisait les cent pas dans la chambre. Comme ses compagnons, il ne comprenait pas un traitre mot aux élucubrations d’Ezek. L’astropathe était assis, là, sur son lit. Il était visiblement en forme physiquement mais il était clair que sa santé mentale avait été ébranlée.
    -Attends… On n’y comprend rien, à ton histoire, là ! Ce que tu nous dis n’a ni queue ni tête !
    Ses autres compagnons étaient dépités. Entre incompréhension et sidération. Lexxi et Derreck étaient en train de fouiller la pièce de fond en comble mais sans succès. Lek cherchait à y voir clair dans les explications d’Ezek. Felton avait déjà capitulé. Poppy les avait laissés entre eux et avait préféré retourner au rez-de-chaussée, s’entretenir avec les deux magistratus restés en faction à l’entrée. Elle cherchait à comprendre comment diable, ce psyker avait fait pour réapparaitre dans sa chambre sans que personne ne s’en rende compte. Ce tour de passe-passe ne l’amusait absolument pas.
    Ezek était en train de leur montrer ses cartes du tarot, fébrilement, les éparpillant toutes sur le lit selon un schéma totalement illisible.
    -Mais je vous le dis… Il y avait ce brouillard et ce masque. Le masque… La belle demeure, là où se trouve la femme aux cheveux gris, celle qui a le cube. Elle possède un secret, elle a un projet. Une ambition. Une trahison… Elle est dangereuse ! La Sanguinala… Vous comprenez ? Oui…. C’est ça que je vois…. Il y a cette pièce avec les livres et le tapis vert. Les sept livres dans la bibliothèque, ce sont eux qui ouvrent le passage vers les profondeurs. Le masque me l’a montré. Il y a cette tour… Elle est ronde et le chiffre dix-sept, oui. Le Masque, il a besoin du cube, c’est important. Nous devons lui remettre… La Sanguinala…
    -Oui, bin on va rien remettre à personne pour l’instant, lâcha Lek.
    Ezek avait un regard extatique.
    -Il ne faut surtout pas entrer dans les chambres, vous comprenez ? Toujours suivre les couloirs jusqu’au numéro dix-sept parce que le cube n’y sera pas longtemps….
    Ses yeux se révulsèrent, puis, il s’effondra sur son lit, perdant connaissance.
    -Et merde… Lâcha Felton.
    Derreck allongea Ezek sur le lit, aidé par Lexxi. Il vérifia l’état de l’astropathe.
    -Il est en état de choc. Il a besoin de repos et surement d’un medic. Tu es parvenu à joindre Tsali ?
    -Ça fait une heure que j’essaie de la joindre. Elle ne répond toujours pas. Vu l’heure, elle doit être retenue au ministère.
    -On sait où est Rico ? Leur demanda Lek.
    -Je l’ai prévenu avec le comm-vox. Il va nous rejoindre, répondit Derreck.

    -Il a parlé d’une belle demeure et d’une femme aux cheveux gris, ça vous parle ? Les questionna Lexxi.
    -C’est bien possible. On devait aller fouiller un manoir, vous vous rappelez ? Le manoir d’Andarion. C’est certainement de cela qu’il a parlé. Répondit Felton.
    -Et cette femme, ce pourrait bien être celle qui était recherchée par les ordos ? S’étonna Derreck.
    -Tsali m’en avait parlé. Elle s’appelle Jocindyr d’Andarion. Mais aux dernières nouvelles, elle serait dans un autre système. Bien loin d’ici.
    -Ce n’est peut-être pas le cas, si on en croit Ezek.
    -Oui, mais comment savoir ce qu’il a vu ?
    -Il a parlé de la Sanguinala, non ? Tu veux prendre le moindre risque, toi ? Lâcha Lexxi.
    Felton sortit son paquet de lho et s’alluma nerveusement une barrette.
    -D’accord. On fait quoi avec la praetor, du coup ?
    -Tu crois qu’on a vraiment besoin d’elle ? Lui répondit Lexxi.
    -Je dois bien reconnaitre que oui. Même si ça me coute de l’admettre. Mais vu la situation…
    Derreck lui désigna le comm-vox posé sur une commode.
    -Rappelle Tsali. On doit la prévenir.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 15/04/2022 à 21:36 Citer ce message

    Quartier du Temple
    Librarium de la Pénitence, siège de l’ordre Pronatus
    Bureau secret de l’Inquisition
    Tempus estimare 955.020M42 – 11H30

    A la suite du dernier incident impliquant Ezek dans un hôtel d’Overpass, Rico et son équipe avaient été convoqué par l’agent Jézabel Callidia à son bureau. Ezek, de son côté, avait été emmené et placé en observation – sous anesthésie totale – vers un lieu tenu secret.
    Jézabel avait tenu à parler à Rico en privé mais aussi à Felton et Lexxi, au sujet de la mort des deux agents du Magistratum. L’Inquisition ne souhaitait pas que la situation dérape – soucieuse de leur présence discrète sur Archaea - mais elle devait aussi faire toute la lumière sur l’état d’esprit de ses acolytes.
    Elle les convoqua dans son bureau, commençant par interroger Rico, tout en laissant défiler les derniers rapports qui s’affichaient sur sa tablette de données. La pièce était faiblement éclairée, les laissant dans une semi-pénombre. De l’encens brûlait dans un coin. Son servo-crâne flottait dans un angle de la pièce, scrutant les trois compères de son œil augmentique d’un rouge accusateur. Elle tapota nerveusement son stylus sur l’écran rétroéclairé de sa tablette.

    -Votre astropathe, par le Trône ! J’aimerai comprendre les raisons pour lesquelles Ezek Thaddaeus était seul et sans protection au moment de son enlèvement. Le fait qu’il ait ainsi pu tomber entre des mains ennemies peut avoir de graves conséquences.
    -Il avait comme projet de se faire un contact à l'astroport ou quelque chose de ce genre, mais visiblement n’a pas eu la patience d'attendre que moi ou Lek finissions nos affaires en cours. Il est alors parti seul, contrairement à ce qui était convenu, Madame, répondit Rico.
    -Il était de votre devoir, Monsieur Gallileus, sinon de le retenir, au moins de le faire escorter. Vous n’avez pas pensé un seul instant qu’il aurait pu se mettre en danger en étant seul ? Vous connaissez pourtant la règle. Cette erreur commence déjà à couter très cher. Je reconnais qu’il a manqué clairement de prudence, c’est une faute de sa part. En revanche, vous n’auriez jamais dû accepter qu’il parte seul et si loin. C’est donc une négligence qu’il ne faudra pas reproduire. De plus, Ezek Thaddaeus est certainement le moins aguerri de votre cellule et c'est encore un piètre agent de terrain. Pour l’instant il va rester en observation. Nous allons devoir faire certains tests sur lui et nous aviserons sur son cas par la suite. Il est donc des priorités qu’il va falloir redéfinir. Je voudrais déjà savoir pourquoi avez-vous dû vraiment abattre ces deux agents du magistratum ?
    -Il s’agissait initialement d’une simple mission de reconnaissance des lieux autour de l'hôtel... Hélas Felton et Lexxi se sont fait surprendre. Felton qui s'est fait attaquer par un cyber-molosse a dû réagir rapidement, mais… dans le feu de l’action, tout est allé très vite. Ils ont d’abord cherché à sauver leur peau, même si le résultat est… une erreur, j’en conviens.
    -Erreur est un faible mot. Cela a coûté la vie à deux agents impériaux à un moment où nous avons besoin d’eux plus que tout. Leur nombre est toujours très insuffisant sur Archaea. Je vais vous demander de bien y réfléchir.
    -Je pensais à des fonds que nous pourrions lever et verser comme pension à leur famille…
    Jézabel hocha la tête.
    -Faites cela. Ce sera déjà un acte expiatoire de bonne volonté.

    Elle reporta alors son regard vers Felton qui était debout, face à son bureau, comme Rico et Lexxi.
    -Quel est votre analyse de la situation ?
    -On n’a pas eu le choix, Madame. C’était ça ou on finissait arrêtés, voir pire, vu ce que le molosse m’a fait. Il y avait surtout urgence à retrouver Ezek. C’était ce qu’on avait en tête, avant tout. C’est toujours facile de dire qu’il y avait d’autres moyens de faire a posteriori. Mon premier instinct, quand on s’est fait arrêter, a été de fuir au plus vite. Je ne voulais pas faire usage de mon arme. Je n’ai vraiment tiré que lorsque nous avons été attaqués et qu’il n’y avait plus d’autres solutions.
    -Je n’ai jamais dit que c’était facile, Mac Latchy. Il est parfois des décisions bien pires que de devoir prendre la vie de deux agents impériaux. Croyez-moi. Je cherche juste à comprendre vos choix et l’impact que cela aura sur vos futures décisions.

    Elle reporta son regard vers Lexxi.
    -Anderson. Vous êtes encore nouvelle dans cette cellule et êtes pourtant un ancien soldat. J’aimerai votre point de vue de militaire. De sous-officier, justement. Pourquoi cela a-t-il dérapé selon vous ?
    -L'urgence de la situation et le manque de préparation en amont, M’dame. Ça et les mauvais choix tactiques. On a donc fait avec les moyens du bord. Mais vouloir infiltrer un bâtiment totalement couvert par les forces de l'ordre n'était clairement pas la bonne idée.
    -Votre analyse est absolument juste. J’apprécie votre franchise, Anderson.

    Elle se tourna de nouveau vers Rico.
    -L’urgence fait partie intégrante de notre mission et vous aurez à le constater encore plus à l’avenir. Ce sera votre quotidien d’agir et de prendre des décisions dans l’urgence. Sans recul, parfois d’instinct. Un manque de préparation mettra toujours une mission en péril. Donc anticipez-le et faites en sorte que chacun ait son rôle à jouer. Le rôle du chef est avant tout de connaitre son équipe et de donner des consignes claires. En revanche, le manque de préparation et les mauvais choix tactiques peuvent être évités. Votre place au sein des ordos est toujours dans la balance, Ricardo Gallileus. J’ai cependant bien noté l’urgence qui était de récupérer Ezek. Ce point est toutefois positif et j’en tiens compte.
    A ce sujet, que savez-vous de ces élucubrations à propos du cube, de ce Masque et de cette demeure dont il a parlé ?
    -C’est encore flou mais cela m’a tout l'air d'être une référence aux agissements de Jocindyr d'Andarion, et cela pourrait parler de son manoir. Il y aurait quelque chose qui serait toujours là-bas. Pour le Masque en question, cela reste un mystère. On sait déjà qu’il a manipulé les souvenirs du réceptionniste de l’hôtel. Sans doute a-t-il pu faire de même avec Ezek ?
    -S’il s’agit bien de ce que nous pensons, le manoir d’Andarion doit cacher quelque chose. Votre équipe va donc suivre cette piste. Dès aujourd’hui.
    Elle fit alors signe à Rico et Lexxi de sortir.
    J’ai besoin de parler à Felton, quelques instants. Seuls.

    Ils saluèrent tous deux et sortirent de la pièce. Une fois la porte refermée, Jézabel observa Felton avant de parler.
    -Vous avez de la chance que Tsali dispose d’appuis auprès du Magistratum, Mc Latchy. Malgré votre passé et vos manières de racaille qui continuent de vous coller à la peau, vous avez du potentiel. Il serait dommage de le gâcher en jouant la tête brûlée. Sachez que les analyses du sang qui a été retrouvé par le Verispex et qui pourraient vous mettre en cause, mèneront l’enquête vers une tout autre piste. Quelqu’un du Syndicat. Allez savoir ?
    Felton hocha la tête.
    -Tant mieux, si cela permet à la praetor d’arrêter de me regarder de travers.
    -Ne soyez pas si prompt à la blâmer, elle fait juste son devoir. Ce sont vos actions et elles seules qui vous mènent à cette situation, pas les siennes. Elle comprendra d’elle-même et je suis certaine qu’elle saura rester professionnelle, malgré cela. J’en attends autant de vous cependant. Sandwall est un bon élément elle aussi et j’espère justement qu’elle saura, tout comme vous, assister Rico.
    -Sauf votre respect, je ne suis pas là pour le materner. Ça a déjà été assez compliqué de rattraper la mort de Constantin et Stryker. Rico est le primus de cette équipe par votre décision. Si vous pensez qu’il ne fait pas le job, à vous d’en choisir un autre. Faites juste en sorte que ce ne soit pas moi.
    -Ce n’était pas le sens de mes propos. Que Rico reste chef de votre cellule ou non n’y change rien. Pour l’instant il conserve ce poste. Tachez juste de travailler en bonne intelligence avec Sandwall.
    -Sandwall et moi ne faisons pas parti du même monde et on s’est jugé mutuellement avant de nous connaître. Vous faites un pari risqué en nous demandant de travailler ensemble.
    Jézabel lui lança un regard dur avant de répondre.
    -Tsali et vous ne faites encore moins partie du même monde. Et donc ? Est-ce un pari moins risqué auquel vous jouez ? Surveillez vos paroles, Mac Latchy. A moins de constituer à l’avenir votre propre cellule composée de racailles, et au risque de vous décevoir, vous serez souvent amené à faire équipe avec des agents très différents de vous. Maintenant si pour atteindre les objectifs fixés, vous ne pouvez mettre vos états d’âme de ruchard de côté, vos missions deviendront très compliquées. Sachez-le. Sandwall est un agent intelligent qui aurait été en droit - légalement et selon ses prérogatives de vous abattre sur le champ. Ce qu’elle n’a pas fait. Tâchez de voir cela comme une preuve d’ouverture d’esprit de sa part. C’est plutôt rare au sein de l’Arbites, croyez-moi. Je ne vous demande pas de vous apprécier, cela m’est totalement égal. Mais pour l’amour du Trône, faites en sorte que cette cellule accomplisse sa mission. Peut m’importe comment et peut m’importe qui devra être abattu ou non, mais je veux des résultats !
    Felton leva les yeux au plafond, sur la remarque de Jézabel quant à l’ouverture d’esprit de Sandwall. - -Elle ne m’a pas abattu car elle n’avait pas reçu d’ordre pour ça et parce qu’on fait tous les deux partis d’une cellule inquisitoriale.
    -En vérité, Sandwall ne fait pas encore partie de l’Inquisition. Elle est toujours un agent de l’Arbites. Et une mortiurge comme elle, qui dirige une escouade exécutrice n’a que faire des ordres lorsqu’elle décide ou non d’abattre quelqu’un.
    -Alors, j’essaierai de faire en sorte que mes réflexes vis à vis de l’Arbites n’interfèrent pas avec la mission. Mais si elle continue à me prendre de haut et à me regarder et me traiter comme un rebus d’une sous-ruche je me ferai un plaisir de lui expliquer son erreur.
    -Faites comme bon vous semble avec elle, Du moment que la mission réussisse.
    -C’est toujours mon objectif, Madame.
    Elle ouvrit un des tiroirs et en sortit une boite en carton gris, aux marquages du Mechanicus. Elle la posa sur son bureau.
    -Parfait. C’est ce que je voulais juste savoir. Tenez, c’est une boite de Stalker. Des bolts silencieux que j’ai pu dénicher. Ça pourra toujours vous servir. Appelez Rico, j’ai à lui parler. Je vous laisse rejoindre votre équipe.

    Rico entra de nouveau dans le bureau, après que Felton fut sorti. Il referma la porte derrière lui.
    -J’ai ordonné au Justicar Cain, le transfert – du moins provisoire – de l’agent Sandwall dans votre cellule. Elle va travailler avec vous et nous verrons par la suite si elle intègrera ou non les ordos. La praetor Sandwall va rejoindre votre équipe, le temps qu’Ezek Thaddaeus subisse quelques examens. Je tenais juste à vous informer qu’il risque d’y avoir des tensions entre elle et Mac Latchy. Ce qui m’importe est avant tout cette mission et non les états d’âme de vos équipiers, Gallileus. Tachez de leur rappeler à tous qu’ils ne sont pas encore des agents inquisitoriaux. Mais que certains ont toujours une corde accrochée à leur cou.
    -Je comprends. Felton doit apprendre à réagir autrement que comme un ganger. Je crois que Tsali s’y emploie d’ailleurs. Sandwall est efficace, elle sera un très bon apport dans la cellule. Et pour revenir à ce cube, il constitue clairement une priorité, même si je me méfie de notre source d’informations... Ce Masque…
    -Et vous faite bien. Selon Ezek Thaddaeus, il pourrait s’agir là, d’un de ces eldars mystérieux. Gardez-vous bien du xenos, Gallileus. Comme le rappelle le Credo, le xenos n’est que mensonge.
    Elle posa une autre boîte de munitions sur son bureau.
    -Il s’agit de balles sanctifiées pour canon de poing. Juste au cas où. Si vous n’avez pas de question, à votre retour nous parlerons des Milagria. Mais pour l’heure, mettez la main sur ce cube. C’est ce que j’attends de vous.
    Autre chose. Je vais informer personnellement Sandwall de cette situation. Mais je compte sur vous, Gallileus pour que les erreurs du passé ne se reproduisent pas. Faites-la entrer, vous pouvez disposer.

    Jézabel lui exposa son point de vue.
    -Je vous laisserai juste y réfléchir et avant de demander votre transfert au Justicar Cain, je vais vous demander de donner un coup de main à la cellule. Quant à votre… rivalité qui risque de s’instaurer avec Felton, sachez que ce point ne m’intéresse pas dans la mesure où vous serez en capacité à mettre vos conflits personnels de côté pour le bien de la mission. Si vous en êtes incapable, vous réaliserez rapidement ce que cela vous coûtera sur le terrain. Felton est un bon élément, il a de la ressource et surtout des idées à long terme ce qui n’est pas le cas de certains autres éléments. En revanche c’est parfois une tête brûlée. Il faut juste le savoir. Et enfin Rico. Il est primus par interim et par défaut, faute de faire ses preuves ou faute de mieux. Rico est intelligent et créatif mais il est jeune et parfois trop éparpillé. La place de chef de cette cellule est donc toujours à confirmer. Soit, vous et l’équipe êtes en capacité à tirer cette cellule et Rico vers le haut, soit vous vous sentirez peut-être les épaules de faire mieux et d’endosser ce rôle. Attention. Ce n’est pas le rôle le plus simple. Des questions ?
    -Une remarque et une question ma sœur. Je ne partage pas globalement votre optimisme quant aux éléments présents dans cette cellule. Mais je ne demande qu'à voir ce que vous voyez en eux. Et servir l'Empereur au sein de l'Inquisition serait un honneur. J'accepte donc de me mettre à votre service, avec ce que cela implique. Ma question maintenant. Que comptez-vous faire au sujet de l'assassinat des deux agents du Magistratum en service l'autre soir, par votre cellule ? Cela démontre-t-il aussi d'une vision à long terme de votre agent ? Il a laissé des preuves un peu partout et ça n'est qu'une question d’heures avant que le Magistratum fasse le lien avec lui. Sans parler de l'aspect moral, même si je comprends que l'élimination d’innocents soit parfois de mise dans certaines situations, en était-ce une ? Et surtout, se couper de tels soutiens parce qu'un agent est une tête brûlée ? C'est fort dommageable. Sans parler des psykers qui disparaissent.
    -Vos lumières sont appréciées, Praetor. Vous apprendrez pourtant que l’Inquisition n’a pas toujours le même a priori que peut avoir l’Arbites. Votre point de vue m’intéressera cependant.
    -Au-delà des à priori, ce sont les actes que nous jugeons. Je ne manquerai pas de vous remettre mes rapports, c'est effectivement l'une des nombreuses taches qu'on apprend a exécuter quand on travaille pour l'Arbites.
    Jézabel se calla dans son fauteuil, avant de lui répondre.
    -Pour être parfaitement claire avec vous. Sachez juste que Felton Mac Latchy ne sera pas inculpé. Ses crimes sont connus et juste suspendus. Il est très probable que nous ayons besoin de lui pour infiltrer le Syndicat dans un premier temps et si le Trône le permet, ce sera une première étape. En fonction de sa collaboration et de ses futurs services, cette décision pourra être révisée ou non. Mais pour l’heure, cette affaire malheureuse du Magistratum devra être oubliée.
    -Votre clarté est appréciée, Madame.
    -Parfait. Vous pouvez disposer.

    Région des Domaines d’Aberratia
    Ville de Newburg
    Tempus estimare 957.020M42 – 20H36
    38ème jour sur Archaea.

    Plus tôt dans la journée et après leur visite au bureau inquisitorial, Rico avait profité qu’ils s’étaient trouvés dans le quartier pour se rendre au templum de l’Angelus. Là, il s’y était rendu avec sa tenue complète d’écclésiaste et avait profité de la quiétude d’une des chapelles pour effectuer quelques bénédictions et sanctifications sur lui et l’équipe – à l’exception de Felton qui restait plutôt distant avec le Credo. En milieu de journée, ils trouvèrent un restaurant pour y manger un morceau, refirent le plein de prométhéum pour la Hive Runner et prirent la route dans l’après-midi.

    Après plusieurs heures, en remontant vers les bois de Twisted Wood puis la ville fluviale de Rivergrad et enfin les terres agricoles de Red Field, ils parvinrent en vue de Newburg, la capitale des Domaines d’Aberratia, les terres de l’ouest réputés pour leurs céréales, leur élevage, la vigne et la culture maraichère.
    Ils furent surpris, en cette fin de journée, d’approcher d’une ville étendue qui n’avait rien d’un simple bourg mais qui tenait plus d’une véritable capitale régionale, n’ayant rien à envier ou presque, à Hub City. Newburg comptait une enceinte fortifiée, une citadelle, une cathédrale et de nombreux bâtiments appartenant aux adepta et aux guildes marchandes.
    -Voilà donc la baronnie de la famille d’Andarion, s’exclama Rico. Je m’attendais à quelque chose de plus… petit. Mais c’est une vraie ville en réalité.
    Il se tourna vers Felton.
    -Tu as des informations sur Newburg ?
    -Non. Pourquoi en aurais-je ?
    -Je ne sais pas… Maintenant que tu es « noble », je me disais que tu devais connaitre tout le gratin local.
    -Très drôle.
    -Je connais un peu la ville, lâcha Poppy. J’y suis passé le mois dernier.
    -Parfait, lâcha Rico. Tu vas nous servir de guide dans ce cas-là. Tu sais où se trouve sa maison ?
    -C’est un palais en réalité. Il est dans la citadelle, un peu avant la cathédrale.
    -Et où est la cathédrale ? Lui demanda Derreck qui était au volant.
    Elle pointa du doigt l’horizon vers l’ouest, lui indiquant une forme oblongue qui se démarquait au-dessus de la ville.
    -C’est facile, vous allez en direction de ce zeppelin. La cathédrale est juste devant. Il y a une entrée à l’est de la ville, vous n’aurez qu’à suivre cette route et remonter au nord vers le port.
    -Un zeppelin ? Trône, mais qu’est ce que ça fait là ?
    -Je crois qu’il appartient à une guilde marchande. Ils en ont plusieurs en réalité. Cela sert à transporter des biens et des personnes.
    -Il y a un port dans la ville ? S’étonna Rico.
    -Un port fluvial, c’est à deux pas de l’entrée de la citadelle. On devrait pouvoir se garer là. En revanche, son entrée sera surement gardée par les forces de défense locales. Je vous conseille donc de ne pas sortir tout de suite l’artillerie lourde.

    Une fois garés comme indiqué par Poppy, à proximité d’un petit port commercial, ils se séparèrent en deux groupes afin d’aller en reconnaissance dans la citadelle pour repérer le palais d’Andarion. Les rues étaient encore animées et il y régnait un charme plus authentique, moins urbain que ne l’était la capitale. La ville avait quelque peu souffert durant la guerre de l’an dernier mais la grande majorité des maisons avait été reconstruite dans un style local coloré et assez baroque, même si on y retrouvait toujours des airs d’un gothique classique dans les bâtiments officiels. Si les vastes faubourgs autour de la ville étaient les quartiers populaires abritant les masses laborieuses, le centre-ville, lui était jalonné de belles échoppes, d’emporia et cafés raffinées, de jardins, théâtres, académies, schola et même d’un opéra et d’un grand stadium.
    Après dix minutes de marches à remonter vers le centre de la citadelle aux rues pavées et aux lumiglobes en bronze, ils trouvèrent le palais et furent frappés de voir qu’il devait s’agir d’une magnifique demeure confinée au cœur d’un petit parc arboré. L’enceinte ne leur permettait guère d’y voir grand-chose, aussi décidèrent-ils d’en faire le tour afin de trouver une potentielle entrée. Les deux groupes se séparèrent puis finirent par se rejoindre au bout de dix bonnes minutes.
    -On a bien trouvé une entrée, finit par dire Poppy.
    -Mais elle est cadenassée et de plus, la grille donne sur des bâtiments, juste en face. Il y a du passage, on risque de se faire repérer. Et de votre côté ?
    -On a pu voir un peu le palais. Mais j’ai l’impression qu’il est à l’abandon. Presqu’en ruines, même, lâcha Felton.
    -Tu es sûr ? Répondit Rico.
    -Y a des trous dans le toit. Des fenêtres cassées. Donc, ouais.
    -Y a personne, tu crois ?
    -J’ai pas dis ça.
    -On a peut-être trouvé un endroit par où passer, lâcha Lexxi. Du côté est de l’enceinte. Il y a pas mal de végétation. Je pense qu’on pourrait passer par-là sans trop de faire repérer.
    -D’accord, allons-y, lâcha Rico.
    -Quoi, tout de suite ? S’étonna Poppy. Il va faire nuit.
    -Justement, on devrait passer inaperçus.

    Ils suivirent les indications de Lexxi et escaladèrent le mur d’enceinte sans le moindre mal, en s’aidant d’un grappin et d’une corde. Une fois dans le jardin de la propriété, ils laissèrent Lek et Lexxi passer devant. Felton et Poppy suivaient quelques mètres derrière et enfin, Derreck et Rico fermaient la marche. Ils traversèrent le parc discrètement, à la faveur des ombres de la végétation jusqu’à une entrée du bâtiment, situé sur un des côtés. Le palais avait bel et bien été vandalisé ou attaqué. Il en portait encore les stigmates. Portes et fenêtres brisées et toiture abimée. En approchant, Lek et Lexxi comprirent que l’intérieur avait dû subir le même sort. Laissant le reste de l’équipe dans le jardin, ils passèrent tous deux la porte, enjambant des piles de gravas, durent déplacer quelques poutres effondrées en travers du chemin et firent leur possible pour éviter tout bruit mais ne purent éviter quelques gravas de s’ébouler. Ils se fixèrent et écoutèrent. Dans les étages, ils perçurent des craquements et grincement de lames de parquet. Ils sortirent leurs armes et attendirent. Lek activa son microvox avec précaution.
    -On a du monde dans les étages. On fait quoi ?
    -Entrez et tâchez de savoir de quoi il s’agit. Mais pas d’imprudence, lui répondit Rico.
    -Surement des gosses en train de jouer, lâcha Poppy avec un sourire. C’est un grand classique des bâtiments abandonnés.
    -On va louer l’Empereur que vous ayez raison, praetor.

    Lek et Lexxi progressèrent dans la demeure mais ne trouvèrent qu’une succession de pièces vides, saccagées, au reste de mobilier épars et brisé. Ils devaient se trouver dans l’aile qui avait dû servir de dépendances au palais. Cette partie était clairement plus rustique et moins raffinée que le reste du bâtiment. C’est là que devait vivre les domestiques, non loin des cuisines et autres celliers. Ils continuèrent en direction de salles aux fonctions indéfinies pour déboucher dans un grand hall où ils gravirent discrètement les escaliers. Pendant ce temps, quelques mètres en arrière, Felton en profitait pour inspecter les pièces, se rappelant bien qu’Ezek, dans sa vision, avait parlé de ne pas entrer dans les chambres, pourtant il vit que rien n’avait l’air de se produire. Poppy le couvrait, canon de poing pointé devant elle, ils inspectèrent ainsi les pièces vides. Ils se dirigèrent à leur tour vers les escaliers, s’apprêtant à rejoindre leurs compagnons à l’étage.
    A l’extérieur, Rico et Derreck avait préféré contourner le bâtiment, profitant des ombres afin de se diriger vers l’entrée principale qui devait donner, en toute logique, droit vers le grand hall dont avait parlé Lek.
    Lui et Lexxi venaient justement de gravir les marches et se trouvaient à l’étage. Depuis le hall, en haut des escaliers, un couloir desservait plusieurs ailes et des portes devaient mener vers d’autres parties du palais. Lek avait sorti son arme et se dirigea sans un bruit vers l’une d’elle. Il l’ouvrit et déboucha dans un large vestibule dont la majorité du parquet central s’était effondré à l’étage inférieur. Il enjamba les vestiges, prenant garde à ne pas trébucher et finir dix mètres plus bas. L’attelle et les bandages qu’il portait encore à la jambe lui rappelaient qu’il n’était pas entièrement remis de sa dernière chute. Il se dirigea vers la prochaine porte. Lexxi était quelques mètres derrière, en couverture, pistolet laser pointé devant elle.
    Lek se dirigea vers l’encadrement d’une porte défoncée mais ne vit qu’à la dernière seconde la silhouette qui se jeta sur lui. Un homme vêtu de noir brandit une arme et lui flanqua la crosse en plein visage. La douleur vive, le fit reculer et il prit garde cependant à ne pas trébucher et basculer dans le trou béant du plancher. Il tira en retour, mais le sang qui coulait sur son visage lui fit manquer son coup. Lexxi venait de voir la scène et compris que l’agresseur de Lex était sur le point de lui foncer dessus à nouveau pour le faire basculer dans le vide. C’est alors qu’elle réalisa qu’il s’agissait d’un albinos, similaire à ce que Silon Tauros, son ancien collègue sergent avait vu dans la forêt de Crual Wood, un mois plus tôt. C’était un de ces types qui avait allumé toute leur unité. Elle le chargea tout en dégainant son poignard et se rua sur lui. Il l’évita pourtant de justesse et vif comme l’éclair manqua de lui ouvrir la gorge à l’aide de sa dague effilée tel un rasoir. Il lui entailla pourtant le cuir chevelu et lui entama l’oreille gauche. Un sang chaud et poisseux se mit aussitôt à couler en même temps qu’une douleur indicible qui la foudroya. Ce n’était pas simplement le mordant de la lame qui avait fait cela, mais ce fils de grox avait très certainement dû enduire sa lame d’une toxine car cela lui rappela la douleur des piqures de certaines fourmis de Catachan. Une morsure pouvait vous envoyer chez le medic, mais deux ou trois vous envoyait voir l’Empereur-Dieu en personne. Elle tituba et raffermi pourtant sa prise en serrant les dents. Il allait en falloir un peu plus pour la terrasser. Lek et elle, l’attaquèrent de nouveau mais sans succès. Il bougeait vite et parait leurs attaques.

    C’est à ce moment que Poppy et Fetlon arrivèrent à l’étage. Poppy était en tête et vit la scène. Elle se rua en avant en hurlant : « Arbites ! Déposez vos armes, au nom de l’Empereur-Dieu ! ». Elle avait son Carnodon pointé droit devant et s’apprêta à faire feu. Lek et Lexxi étaient tous deux dans sa ligne de mire, juste devant leur assaillant. L’Empereur reconnaitra les siens, se dit-elle en ouvrant le feu.
    La balle de son canon de poing toucha Lexxi à la cuisse, lui arrachant un juron. Poppy se maudit d’avoir été aussi confiante car la blessure qu’elle venait de lui infliger était plutôt sévère. Lexxi tituba et parvint à se retenir au mur, laissant une trace rouge sur le mur défraichi.

    Felton allait rejoindre Poppy et les autres mais il perçut des tirs venant du bas des escaliers. Il se retourna et vit que Rico et Derreck étaient sur le point d’entrer dans le hall, pourtant un type était là, en embuscade et ouvrait le feu avec une fusil laser en rafale, criblant la porte où se trouvait Rico, l’instant d’avant. Felton pivota, pointa son pistolet bolter et tira à son tour, manquant le tireur de peu, mais au moins il le força à se mettre à couvert.
    Depuis l’extérieur, Rico cherchait un angle de tir tandis que Derreck à ses côtés focalisait un de ses pouvoirs. Ils étaient à peine entrés dans cette bâtisse en ruine, même pas certain qu’il s’agissait là de ce qu’Ezek leur avait décrit. Pourtant ils n’étaient pas seuls, ce qui signifiait que les hommes qui étaient là, cherchaient certainement la même chose qu’eux.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 22/04/2022 à 12:03 Citer ce message

    Région des Domaines d’Aberratia
    Ville de Newburg, Palais d’Andarion
    Tempus estimare 958.020M42 – 00H06
    39ème jour sur Archaea.

    A l’étage, Lek et Lexxi étaient engagés, tous deux, dans un âpre corps à corps avec un des tueurs. Leur assaillant bougeait vite et malgré leurs coups répétés, ils ne parvinrent pas à le toucher. A quelques mètres derrière eux, Poppy était aussi en plein corps à corps et avait dégainé sa matraque à décharge contre son adversaire. Elle évita sa lame et put lui asséner un coup qu’il encaissa plutôt bien. Au rez-de-chaussée, Derreck se prit un tir de laser dans les jambes et s’écroula, juste à l’entrée de la villa. Rico riposta avec son canon de poing et faucha le tireur, d’un tir bien ajusté, pourtant un second tireur venait de faire son apparition et ouvrit le feu. Du haut des escaliers juste au-dessus, Felton le repéra et décida de sauter du parapet, les quelques mètres afin d’atterrir juste devant lui. Ce faisant, il venait de dégainer son épée énergétique et décapita son adversaire juste avant que celui-ci n’ouvre le feu.
    Poppy finit par se débarrasser de son adversaire en l’assommant avec sa matraque à décharge. Elle tenta de le menotter mais vit un autre assassin qui venait de faire irruption et qui ouvrait le feu dans sa direction. Elle esquiva ses tirs et le chargea afin de le percuter. Ce dernier avait fait jaillir sa lame rétractable et toucha Poppy au bras. La douleur de la toxine qu’il lui injecta la foudroya de douleur.
    Derrière elle, Lek finit par toucher leur assaillant, lui plantant sa lame en plein torse, au point qu’il le percuta et le poussa par-dessus la rambarde d’une volée d’escaliers. L’homme bascula dans le vide et finit par se fracasser plusieurs mètres plus bas. Lexxi, toujours blessée, eut la présence d’esprit de ramasser le fusil d’assaut que leur tueur avait laissé tomber au sol. Elle ne reconnut pas le modèle mais son canon court à silencieux et son chargeur tambour lui parurent des arguments de choix. Elle bascula le sélecteur sur le mode semi-automatique, pointa l’arme sur l’assaillant de Poppy et s’apprêta à tirer. Pourtant, elle hésita. Tirer risquait bien de la toucher, comme cette dernière avait fait justement sur elle mais se dit qu’elle n’allait pas risquer la même erreur. Elle garda son adversaire dans sa ligne de mire. Poppy manqua son attaque et sa matraque lui échappa des mains. Le tueur en profita pour l’attaquer mais elle esquiva le coup et plongea en arrière pour aller récupérer sa matraque. Lexxi ouvrit le feu en rafale, mais le tueur, vif comme un serpent évita toutes les balles. Il plongea vers la pièce d’où il venait, sauta par-dessus une rampe d’escaliers et atterrit plusieurs mètres plus bas, disparaissant de sa ligne de mire alors qu’elle se mit à pester.
    A peine parvenu au rez-de-chaussée, ce dernier se précipita droit vers Felton qui n’était qu’à quelques mètres de là et ouvrit le feu. Un de ses tirs de laser le toucha à l’abdomen et malgré son pare-balles, il fut projeté au sol, sonné net et blessé. Derreck était parvenu, entre temps, à soigner en partie ses blessures à l’aide de ses pouvoirs psychiques. Il venait de rejoindre Rico et vit le tueur leur arriver dessus. Il lança un autre de ses pouvoirs et étrangla son adversaire qui tomba au sol, stoppé net dans sa course. Il se précipita, juste après vers Felton afin de le tirer de là.

    A l’étage, Lex, Poppy et Lexxi venaient d’entendre des bruits de personnes en train de courir, juste en dessous de leur position. Ils voxèrent le reste de l’équipe afin de les intercepter. Lex courut en direction de l’aile ouest de la villa. Un mur effondré pourrait sans doute lui permettre d’avoir un angle de vue sur les fuyards. Lexxi alla ramasser un fusil radiant, sur le tueur que Poppy avait assommé, juste après lui avoir collé une rafale de son fusil d’assaut en pleine tête, lui faisant littéralement exploser la boite crânienne dans une gerbe de fluides roses et de fragments augmentiques sanguinolents. Poppy tentait de se remettre de sa douleur au bras et décida de suivre les indications de Rico qui déjà, venait de prendre les fuyards en chasse. Des gens cherchaient à s’enfuir et il allait falloir absolument les intercepter. Rico finit par voir l’un d’eux et ouvrit le feu. Son tir le toucha à la jambe. La blessure fut sans gravité mais, par chance, le tueur fut déséquilibré dans sa course et trébucha. D’une roulade il se réceptionna pourtant rapidement et riposta, forçant Rico à se mettre à couvert.
    Depuis l’étage, Lek venait de se positionner sur le bord d’un mur écroulé et avait dégainé ses deux canons de poing, restant sur le qui-vive, paré à ouvrir le feu. Malgré l’obscurité, il aperçut soudain une silhouette encapuchonnée et drapée dans de larges robes, émerger du bâtiment en courant. Il tira avec ses deux armes mais réalisa avec effroi que ses tirs, pourtant bien placés, touchèrent une sorte de champ d’énergie qui laissa sa cible indemne. Son adversaire pivota aussitôt et pointa un de ses bras métalliques qui s’ouvrit et laissa jaillir le canon d’une arme qui ouvrit le feu en rafale de traits d’énergie, criblant le mur juste là où se trouvait Lek. Ce dernier visa et riposta, logeant un tir parfaitement placé qui pulvérisa le bras et l’arme, le sectionnant net. L’adversaire tituba et poussa une sorte de bruit métallique. Il en laissa échapper une sorte de besace qui tomba au sol.
    A quelques mètres de là, Rico venait de placer un tir, lui aussi, qui percuta son adversaire de plein fouet, l’envoyant mordre la poussière. Il se précipita en direction du fuyard à la besace, suivit de près par Poppy. Alors qu’ils allaient le rejoindre, ce dernier s’en rendit compte, désormais prit sous le feu de Lek et bientôt rejoint par ces deux nouveaux adversaires, alors qu’il n’avait plus d’armes pour riposter. Ils le virent s’évanouir, devenir soudain flou puis disparaitre comme par enchantement.

    Poppy voxa toute l’équipe et leur demanda de faire vite, déjà au loin, elle perçut le son des sirènes des forces de l’ordre.
    -On a trois minutes avant qu’ils n’arrivent. Pas plus.
    Rico venait de récupérer la besace et y trouva trois livres.
    -Ezek avait parler de sept livres et d’une bibliothèque, non ?
    Poppy le pointa du doigt.
    -Tâchez de faire vite et de trouver cette pièce, je pars à l’entrée du domaine, je vais tout faire pour les retarder le plus possible.
    Rico hocha la tête et se précipita à l’intérieur du bâtiment. Il y retrouva Derreck et Felton, blessés mais debout. A l’étage, Lexxi et Lex étaient déjà en train de fouiller les lieux. Ils n’eurent cependant que quelques minutes pour ramasser quelques armes et munitions et quitter rapidement la demeure. Malgré ses efforts auprès du Magistratum, Poppy parvint à les retarder quelque peu mais déjà des agents des force de l’ordre étaient en train d’investir le parc de la villa. Elle leur précisa que ses hommes se trouvaient toujours à l’intérieur, ce qui n’eut pas plus d’effets sur le Magistratum. L’officier lui répondit que cela n’allait pas poser de problème, puisqu’ils étaient dans le même camp, dans la mesure où ils seraient en capacité à s’identifier aisément.
    Rico et ses compagnons pouvaient voir les luminateurs accrochés sous les canons de leurs armes. Certains disposaient de canides ou de cyber-molosses qui aboyaient. Il préféra jouer la prudence et ordonna à toute l’équipe de se replier. Lek leur trouva une voie de sortie et un chemin discret pour les éviter.
    Une fois tous à l’extérieur du parc, ils purent souffler un peu. Ils avaient pu ramasser un fusil d’assaut Mastoff M4 à chargeur tambour, deux fusils radiants et quelques chargeurs. Rico avait la besace et observa les trois livres qu’elle contenait. Il y avait une pièce de théâtre du célébrissime Jarvin Vallankot, un traité stratégie navale écrit par un obscur amiral ainsi que l’ouvrage d’un magos biologis traitant de la mortalité de l’homme. Il voxa Poppy.
    -On a dû décrocher. Vous en êtes où ?

    Quelques dizaines de minutes plus tard, elle parvint à les retrouver à la Hive Runner toujours garée près de la place du petit port commercial. Il était plus d’une heure du matin. Elle monta à l’arrière, Rico l’interrogea du regard.
    -Fortunus le libraire, c'est lui notre piste. Il faut le trouver au plus vite, leur dit-elle. Il y avait bien une bibliothèque, mais tout a été vendu. Enfin sauf les quelques livres que vous avez dans le sac.
    Rico se mit à réfléchir.
    -Hum, à ce que je connais, il n’y a que deux bibliothèques fournies sur la planète... sauf s'il y a des bibliothèques privées bien sûr.
    Poppy s’alluma un cigalho.
    -Je vous parle d’un libraire, Père Rico. Un marchand de livres et non du bibliothécaire d’un librarium.
    -Ah, très bien.
    Elle produisit un petit carnet de sa poche et lui lut ses dernières notes obtenues auprès des agents du Magistratum.
    -97 boulevard de Cadia. "Le Credo du lecteur", boutique tenue par un certain Tristan Fortunus. Il parait que c’est à moins d’un kilomètre d’ici. Il n'y a pas de temps à perdre.
    -Parfait, allons-y tout de suite dans ce cas, lâcha Rico.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 29/04/2022 à 18:53 Citer ce message

    La voiture fut laissée à quelques rues de là. Profitant de la nuit et des petites rues sombres et silencieuses, ils trouvèrent l’adresse qui donnait sur une vaste place, en face de la mairie. Des échoppes et emporia jouxtaient les rues alentour et ils n’eurent aucun mal à repérer la librairie de Tristan Fortunus.
    Rico décida de laisser Lek et Felton en couverture, un peu plus loin et préféra y aller en deux binômes. Lexxi et Poppy allaient effectuer un premier repérage, tandis que Derreck et lui tenteraient de faire le tour afin de trouver d’autres accès.
    Progressant sous les arcades des rues commerçantes, ils finirent par réaliser qu’un bureau du Magistratum se trouvait là, sur la place, juste en face de la mairie. D’ailleurs le petit bâtiment en forme de bastion comptait une tour qui dominait la place et Poppy y nota même, deux sentinelles en faction en haut de la tour. Mais à bien y regarder et malgré la distance et le pénombre, Lexxi ne se laissa pas abuser. Elle attrapa sa coéquipière alors que cette dernière était sur le point d’aller en direction du bastion, prête à solliciter l’aide des agents des forces de l’ordre. Pour l’instant, les deux jeunes femmes s’étaient montrées particulièrement discrètes.
    -Ne bouge surtout pas. Ce ne sont pas des types du Magistratum, chuchota-t-elle.
    -Quoi ?
    Lexxi se plaqua contre un mur sous les arcades, forçant Poppy à en faire de même. Elle lui désigna les deux silhouettes.
    -Ce sont ces fils de grox de clones. Les mêmes qu’au manoir. Comme ceux qui ont attaqué ma section en forêt.
    Poppy poussa un juron, activa son microvox et contacta Rico et le reste de l’équipe, situés à quelques dizaines de mètres de leur position.
    -Hostiles déjà sur place. On fait quoi ?
    Rico prit un temps d’arrêt pour accuser le coup. Quelques minutes plus tôt, il était encore persuadé que l’heretek et ses assassins n’auraient jamais une telle longueur d’avance sur eux.
    -Comment peuvent-ils déjà savoir ?
    -Qu’importe, le coupa Poppy. Ils ont surement eu des informations dont on ne dispose pas encore.
    -Vous pouvez gérer le problème depuis votre position ?
    -Négatif. On va devoir bouger, répondit Lexxi, à sa place.
    -D’accord. Avec Derreck, on va entrer dans la librairie, tâchez de nous couvrir dans ce cas.
    -Non ! Répondit Poppy. On ne sait même pas s’il y a du monde dans la boutique.
    -Il n’y sont surement pas encore, répondit-il.

    Poppy et Lexxi s’étaient déplacées et s’approchant de l’entrée de la librairie, elles purent constater que de la lumière filtrait à travers les carreaux cathédrale de l’unique fenêtre. Poppy perçut aussi des éclats de voix. Elle signala à Lexxi que plusieurs personnes se trouvaient bien à l’intérieur. Elles firent pivoter les armes qu’elles portaient en bandoulière. Le Mastoff M4 à silencieux pour Poppy et le bolter Castelain pour Lexxi. Rico et Derreck finirent par se mettre en position, le long de la façade de la boutique, eux aussi sous les arcades. Plus loin, Lek et Felton venaient de se positionner en couverture. Lek avait récupéré le fusil Armageddon. Tous se tenaient prêts et après avoir discutés de la meilleure stratégie à adopter, ils décidèrent de se coordonner sur une attaque simultanée. Tandis que Lek et Felton tenteraient d’éliminer les deux gardes postés en vigie, Poppy et les autres iraient investir la boutique.
    Visant avec son Armageddon à silencieux, Lek plaça un tir à la tête sur le premier garde et le faucha net. L’homme bascula en arrière, le crâne traversé. Felton ouvrit le feu avec son pistolet bolter, tirant un bolt Stalker silencieux et toucha le deuxième tueur mais ne fit que le blesser. Lexxi tira à son tour avec son bolter mais le manqua. Ce fut le moment que choisit Poppy pour mettre un grand coup de pied dans la porte de la boutique qu’elle fit sauter sans le moindre ménagement. Elle bascula le Mastoff devant elle, découvrit un des assassins dans sa ligne de mire et lui envoya une pleine rafale à bout portant. Il fut projeté dans la pièce et s’écroula contre une table couverte de livres qui s’effondra avec tout son contenu. Les douilles avaient à peine rebondi sur le sol que Derreck se faufila à l’intérieur, suivit de Rico. Poignard à la main, ils se jetèrent sur un second assassin et luttèrent en corps à corps avec leur coriace adversaire. Derreck fut rapidement désarmé et dû se désengager du combat.
    Déjà un troisième adversaire venait de faire son irruption depuis l’étage et dévalait les escaliers tout en ouvrant le feu en rafale. Poppy esquiva les balles habilement et lui logea une volée de projectiles en retour, l’envoyant s’écrouler lourdement au bas des marches. A l’extérieur, la situation venait de s’aggraver. Deux autres assassins avaient fait irruption depuis le bâtiment du Magistratum et faisaient feu à l’aide de fusil radiant. Felton fut touché et alla mordre la poussière. Lexxi et Lek venaient de se retrouver pris sous un feu nourri et extrêmement puissant, au point qu’ils peinaient à riposter, forcés à rester à couvert. Lexxi avait enrayé son bolter aussi elle décida d’envoyer deux grenades dans leur direction mais cela n’eut guère d’effets en dehors de quelques dégâts sur la place du marché en plus d’un vacarme assourdissant. L’une d’elle faillit bien ricocher et lui revenir dessus, mais par chance ne les toucha pas. Lek finit par abattre les deux derniers assassins grâce à ses tirs de précision.
    Dans la boutique, Rico acheva le dernier ennemi et tous purent enfin souffler. Ils n’allaient pourtant pas avoir de temps à perdre, car depuis les maisons alentours, du monde était en train de crier et de donner l’alerte à cause des explosions et des échanges de tirs.
    -On ne va pas pouvoir rester bien longtemps avant que des troupes n’interviennent, lâcha Poppy à Rico. Ce dernier était occupé à remettre sur pied le libraire qu’il avait trouvé au fond de sa boutique. Le malheureux avait été frappé au visage et quelqu’un lui avait tiré une balle dans la jambe. Il était en état de choc. Lexxi et Lek étaient partis ramasser les armes des tueurs pendant que Derreck utilisait ses dernières réserves d’énergie psychique pour soigner Felton.
    -Combien de temps ? Répondit Rico.
    -Aucune idée, répondit-elle… Les forces de l’ordre étaient stationnées dans le bâtiment, en face de la place mais ils doivent être morts ou hors d’état de nuire. De plus une partie de leurs collègues étaient mobilisés au manoir d’Andarion. On a peut-être cinq ou dix minutes, tout au plus.
    -Misons sur cinq. Tâchez de les retarder, si jamais ils interviennent. De toute manière, nous allons avoir besoin d’un medic pour Felton et le reste de l’équipe n’est plus vraiment en état de subir un nouvel affrontement.
    Elle hocha la tête et alla donner un coup de main au reste de l’équipe.
    Rico avait déniché une bouteille d’amasec et en servit un verre à Fortunus. Lexxi lui avait fait un bandage de fortune sur sa jambe et le libraire aurait même tourné de l’œil mais l’alcool fort le requinqua un peu.
    Rico, vêtu en prêtre, parut véritablement le réconforter.
    -Ces hommes. Que voulaient-ils ?
    Fortunus hocha la tête, visiblement dépité.
    -Des livres, bien entendu… Mais par tous les Saints de la création… Je ne comprends pas…
    -Le manoir d’Andarion, ça vous parle ?
    -Oui… Evidemment. Le gouvernement l’a saisi et tout son mobilier a été vendu. Les livres. J’ai pu en acquérir une grande majorité. Beaucoup ont été revendu en réalité.
    -Lesquels cherchaient-ils ?
    Le libraire désigna un des corps au sol. Depuis son manteau entr’ouvert, on pouvait deviner la couverture d’un vieux bouquin.
    -Le Livre de Cain, d’Alem Mahat. Un de ceux que je n’avais pas encore vendu. Il le voulait, lui et quelques autres.
    -Vous auriez leurs noms ?
    -Je tiens un registre, vous savez ? Un livre de compte. Je sais ainsi qui a acheté quel livre et quand.
    Il lui désigna un grand livre posé au sol et dont des pages avaient été déchirées. Rico alla les ramasser et parcourut les listes mais sans pour autant savoir de quels livres il pouvait bien s’agir.
    -Ces hommes savaient déjà de quels livres il s’agissait, lui dit Fortunus.
    Il lui désigna des lignes manuscrites sur les pages de son registre.
    -Argun Slyter - Le Stratagème d'un panier percé. Je l’ai vendu il y a quelques jours à Mithras Eléazar, l’intendant de la Mairie juste à côté. Il me l’a acheté avec plusieurs autres classiques et doivent à présent trôner dans la bibliothèque du Maire. Le second livre s’intitule Les Bienheureux tourments de Sainte Elana et m’a été acheté il y a plusieurs jours par une des sœurs du monastère de Banner Cove avec d’autres livres sur le Credo. Enfin le dernier n’est autre que le Xenobiologis de Sirius Hinx qui m’a été acheté la veille par un certain Caleb Gillam un archéotechnologue. Il devait loger à l’auberge juste en face de la place, à ce qu’il m’a dit.

    Rico se mit à réfléchir. Avec ces quatre ouvrages, plus les trois déjà en sa possession, cela faisait un total de sept livres. Pourtant, d’après le libraire, trois de ces livres étaient toujours dans la nature, dont deux peut-être à deux pas d’ici. Ce qui l’inquiétait le plus était le fait que l’heretek et ses hommes semblaient avoir aussi ces informations. Aussi Ezek dans sa vision, avait bien parlé d’une bibliothèque avec sept livres qui devaient permettre d’ouvrir un passage. Rico prenait cette histoire de livres au sérieux, sinon pourquoi un heretek et des tueurs lourdement modifiés se donneraient un tel mal à les chercher eux aussi ? Il reporta son attention vers Fortunus tout en lui servant un nouveau verre.
    -Vous sauriez ce qu’ils cherchent à faire avec ces livres ? Il est question d’une sorte de code ou quelque chose de ce genre, non ?
    Le libraire hocha les épaules.
    -J’ignore cette histoire de code mais je connaissais bien la bibliothèque d’Andarion et si l’on en croit la légende qui a toujours accompagné cette vieille demeure, il a toujours été dit que leur bibliothèque renfermait une sorte de passage secret ou quelque chose de ce genre et que la clé était dans les livres. Vous pensez bien que des gens ont tenté de la trouver. D’ailleurs le manoir a été saccagé de fond en comble, sans doute en partie à cause de cela. Certains parlent d’un accès menant à une crypte où se trouverait un trésor ou quelque mystère de ce genre à moins que ce ne soit quelques sombres sorcelleries enfouies… mais croyez-moi… Personne ne l’a jamais découvert et cela vaut-il peut-être mieux ainsi...
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 06/05/2022 à 22:10 Citer ce message

    Moins d’une heure plus tard, une partie des hommes de Rico avait été pris en charge par les sœurs hospitalières de l’Ordre du Chagrin silencieux. L’état de Felton étant préoccupant, il fut décidé de l’emmener aux urgences pour des soins complémentaires. Il fut donc évacué et Lek décida de l’accompagner.
    Alors que Lexxi s’occupait de sécuriser les armes ramassées sur les assassins, Derreck en profita pour aller parler avec le magistratum. Pendant ce temps, Rico et Poppy décidèrent de se mettre en recherche de deux des autres livres, puisque selon Fortunus le libraire, certains des ouvrages étaient actuellement entre les mains d’un archéotechnologue logeant à l’auberge en face de la place et un autre livre aurait été acheté par l’intendant de la mairie toute proche. Ils décidèrent de commencer par l’auberge. Vu tout le remue-ménage qui avait lieu sur la place à ce moment-même, une bonne partie du quartier était déjà à leurs fenêtres ou dans les rues à observer ce qui se passait autour des fourgons sanitaires et des véhicules des forces de l’ordre et ce, malgré les consignes strictes du magistratum.
    Rico et Poppy entrèrent dans l’auberge. Le tenancier était debout et les observa avec crainte. Poppy sortit son badge d’arbitrator et lui signifia qu’il n’avait rien à craindre.
    -Nous cherchons Caleb Gillam. C’est un de vos clients, d’après nos informations.
    Le tenancier alla derrière son comptoir et regarda dans son registre tout en chaussant ses lunettes. Poppy en profita pour observer autour d’elle et tendre l’oreille. L’intérieur de l’auberge avait l’air plutôt calme.
    L’homme releva le visage de son registre avec un petit air navré.
    -Gillam, oui… Mais vous le manquez de peu… il est parti un peu plus tôt dans la soirée. Il avait un train à prendre à ce qu’il m’a dit.
    -Quelle heure ?
    Il regarda de nouveau son registre.
    -Il a quitté l’hôtel à 18h.
    Rico jeta un regard à Poppy. Il était déjà plus de deux heures du matin.
    -Trône, le train est déjà parti depuis un moment, il va falloir poser des questions à la gare.
    -Oui, mais vu l’heure, cela devra surement attendre demain matin.
    -Il n’y a rien eu d'inhabituel avec ce client ? Demanda Poppy.
    -Non, rien, m’dame.
    Ils remercièrent le tenancier et ressortirent sur la place, décidant de se diriger vers la mairie, non loin de là. L’établissement était fermé là aussi à cette heure mais ils purent voir que le personnel qui logeait certainement sur place était éveillé à cause de tout le raffut. Ils restaient barricadés à l’intérieur. Seul un garde armé était en train de discuter à l’entrée avec un agent, une lanterne à la main. Ils s’approchèrent et Poppy montra de nouveau sa plaque.
    Le garde les observa, étonné.
    -C’est que c’est fermé à cette heure… faudra repasser demain si vous voulez voir le maire.
    -On voudrait voir l’intendant. Mithras Eléazar, commença Poppy.
    -Un groupe d'assassins vient de tenter de tuer le libraire pour trouver un livre qui a été vendu à votre intendant, compléta Rico. Menez-nous à lui, sa vie est peut-être actuellement en danger.
    Le garde les observa avec inquiétude. Il vérifia la crosse de son pistolet.
    -Vous dites qu’il pourrait y avoir un assassin dans la bibliothèque de la mairie ? Trône !
    -Et peut-être est-il déjà en train de torturer l'intendant comme ils ont molesté le libraire, ajouta Rico.
    Le garde sembla un peu paniqué, sur le coup. Il leur demanda de le suivre. L’agent du magistratum qui parlait avec lui à l’entrée, décida de les suivre aussi, par mesure de précaution.
    Ils trouvèrent l’intendant Mithras Eléazar, en chemise de nuit. Il s’agissait d’un gros bonhomme chauve à lunettes et un peu bafouillant. Il ne saisit rien de leurs explications sinon qu’il crut comprendre tout d’abord, qu’un assassin était venu dans sa bibliothèque pour le torturer.
    Poppy clarifia les choses et lui demanda de les conduire à cette bibliothèque. Chemin faisant, ils observèrent et surveillèrent l’intendant, toujours accompagnés du garde et du magistratus. Rico en profita pour clarifier la situation et expliqua à l’intendant qu’un groupe de criminels venait de tuer des magistratus et avait torturé le libraire car leur objectif était de trouver le "trésor d'Andarion"
    -Et la clé se trouverait apparemment dans un des livres, ajouta-t-il. Vous pourriez donc être en danger car certains criminels en fuite pourraient venir ici-même, à la recherche du livre que vous avez récemment acheté.
    -Grand Dieu, mon père, mais votre histoire est tout bonnement effrayante !
    Il marqua une pause devant sa bibliothèque, leur désignant les rangées de livres, avant de poursuivre.
    -Voilà qui est fort cocasse, car un technoprêtre est venu plus tôt dans la soirée pour me poser des questions à propos de mes livres, justement.
    Rico jeta un regard à Poppy avant de lui répondre.
    -Il n'est pas exclu qu'il soit complice de ces malfrats... Et que lui avez-vous dit ?
    -A vrai dire, je n’ai rien noté de bien inquiétant dans ses questions. Il a juste voulu avoir des informations sur cet ouvrage, cette pièce de théâtre…. Une ce celles écrites par Argun Slyter. J’avais acheté ce livre récemment, c’est vrai. Il voulait me le racheter pour une belle somme mais comme ce n’était ni le moment ni l’endroit. Il y avait une célébration en cours, il a juste dit qu’il avait besoin de savoir si j’avais toujours ce livre en ma possession. Comme c’était le cas, il a alors dit que cela lui suffisait et il est parti. J’avoue n’avoir rien compris sur le moment, mais à présent, votre histoire commence quelque peu à m’inquiéter.
    -Pouvons-nous vérifier si ce livre est toujours dans votre bibliothèque ?
    -Oui, faites…
    -Et si vous l'avez encore, ajouta Rico, nous ferions mieux de le confier à l'Arbites ici présent, le temps de l'enquête.
    Mithras Eléazar hocha la tête et leur fit signe de le suivre vers les rayonnages où se trouvait le livre en question.
    -Vous savez, ce bouquin a dû me coûter moins de six crédits… Son vol serait évidemment un larcin mais je trouve que c’est beaucoup de bruit pour rien toute cette histoire…
    Il finit par trouver le livre sur une des étagères. Là où il était. Il le prit et leur tendit.
    -Beaucoup de bruit pour rien ? Lui répondit Rico, tout en prenant l’ouvrage dans ses mains. Hélas, monsieur, allez dire cela au libraire et aux hommes du magistratum qui y ont laissé leur vie ce soir. Il semblerait que l'avidité du trésor d'Andarion déchaine visiblement bien des folies.
    Il en profita pour observer le livre avec attention. Aucune page ne manquait et il nota cependant des chiffres manuscrits qui avait été indiqué sur la page de garde. Il le referma et garda cela en mémoire.
    L’intentant eut alors un geste désinvolte.
    -Le trésor d’Andarion est une fable, mon Père, soyez-en assuré. Ce n’est pas la première fois que des illuminés le cherchent. Il tourna son regard vers les agents de la loi, ce qui incluait Poppy.
    -Que ces malandrins soient arrêtés puis exécutés pour l’exemple, voilà qui devrait les faire réfléchir.
    -Rassurez-vous, intendant. Nous allons faire en sorte de trouver le cerveau de toute cette affaire, que ce soit ce technoprêtre ou un baron du crime, ce livre nous permettra peut-être de découvrir sa piste, ajouta Rico.
    -Soit. Gardez-le, le temps de l’enquête, si cela peut vous permettre de faire cesser toute cette sordide affaire.
    -Nous allons en avoir besoin, en effet. Je vais faire mon possible en collaboration avec l'Arbites. Renforcez votre garde en attendant et si d'autres personnes tournent autour de cette affaire, avertissez aussitôt le Magistratum.
    L’intendant se contenta de hocher la tête puis les raccompagna alors qu’ils prenaient congés.
    Une fois dehors, Rico parla à Poppy des chiffres notés dans le livre.
    -Vous pensez qu’il pourrait s’agir de quoi ? Lui dit-elle.
    -Une sorte de code, j’imagine. Il faudrait que je vérifie cela avec les autres déjà ramassés.
    Il préleva les autres livres dans sa sacoche et vérifia. Il y nota aussi des séries de chiffres griffonnés soit sur la page de garde, soit à d’autres endroits du livre. Les notes étaient manuscrites et sans doute anciennes. Il s’agissait tous de livres anciens d’ailleurs, âgés de plusieurs siècles. Rico se dit qu’il tenait peut-être là, une partie de l’énigme, encore allait-il falloir qu’il trouve quelqu’un doué dans le domaine de la numérologie ou de la cryptologie, ce qui n’était pas le cas au sein de leur cellule.
    En sortant de la mairie avec Poppy, le castigateur du magistratum, avec qui il avait déjà parlé un peu plus tôt, juste après les événements avec le libraire, vint le voir. Il se remémora que l’officier en question, un quinquagénaire grisonnant, s’appelait Strohm. Il salua Rico et Poppy brièvement.
    -Un homme qui se prétend être un templier psykana travaillant pour vous vient d’être arrêté par mes hommes. Vous confirmez qu’il travaille bien avec vous, mon père ?
    Rico resta interloqué.
    -Oui, c’est fort possible, mais que… ?
    -Pour information il aurait proféré des menaces à un émissaire du Clergé de Mars qui travaille avec nos services. Le Mechanicus ne semble pas apprécier du tout ce genre d’intimidation et je les comprends. D’autant plus qu’il a été question d’armes xénos et de techno-hérésies. Ce sont de graves accusations.

    Rico se racla la gorge et se dit qu’il avait bien besoin de ça, en ce moment.
    -Ecoutez… Heu… Cet homme aurait dû rester sous la surveillance de mon équipe car heu… son… esprit est perturbé et il est un peu paranoïaque. Pouvez-vous me conduire auprès de lui puis m’indiquer où se trouve ce technoprêtre en question afin de lui présenter mes excuses ?
    -Votre homme a déjà été arrêté et emmené sous escorte au poste car il a blasphémé devant ce magos. Les accusations n’ont pas été prises à la légère, mon père.
    -Trône, mais de quel magos s’agit-il ?
    Strohm lui jeta un regard étonné.
    -Vous connaissez tous les magos qui travaillent ici ? Il doit s’agir du Magos Xerxes Opteka selon moi. C’est lui que nous avons appelé dès lors qu’on nous a signalé des corps étranges et cyber augmentés. A l’heure qu’il est, ils doivent être au poste ou encore sur le chemin.
    Rico se contenta de le remercia puis s’en retourna avec Poppy.
    -Vous comptez faire quoi ? Je peux sans doute intervenir ? Lui dit-elle.
    -Je veux réunir d’abord l’équipe.
    Il finit par trouver Lexxi, sur la place, alors qu’ils retournaient vers leur véhicule.
    -Tu sais où sont les deux autres ? Lek et Felton ?
    -Ils sont partis à l’hôpital avec les sœurs, pourq… ?
    -Tu n’étais pas avec Derreck ? Tu l’aurais vu parler avec un magos ?
    Elle hocha la tête.
    -Non, je m’occupais juste de récupérer les armes. Je les ai mises dans le coffre de la Hive Runner. Je suis d’ailleurs en train de tenir un inventaire pour…
    -Ecoute, je trouve cela très bien et te remercie mais on a un plus gros problème sur les bras, là.
    Rico lui raconta ce que le castigateur venait de lui apprendre.

    Tandis qu’il parlait à Lexxi, le castigateur Strohm vint de nouveau dans sa direction, cette fois-ci accompagné de son officier supérieur. Ce dernier se présenta. Ils virent tout de suite qu’il n’avait absolument pas l’air ravi.
    -Procurateur Victrix Wolfe, vous êtes le père Enrico, c’est bien cela ? Vos hommes ont foutu un sacré bordel et c’est peu dire. Je ne sais pas quelle autorité vous a envoyé ici mais j’attends des réponses à cette affaire de…. Je ne sais quels livres et de je ne sais quelle foutue hérésie. Je vous veux demain matin à la première heure dans mon bureau. Je veux vous y voir tous les deux, dit-il en désignant Poppy. Le Magos Opteka sera présent et attendra vos explications en plus de vos excuses. Quant à votre… psyker. Je ne sais par quel miracle il ne lui a pas encore collé une balle dans la tête. Votre homme est le dernier des demeurés, sachez-le. Non seulement il menace et insulte un Magos devant témoins mais je viens d’apprendre qu’en plus il a tenté d’agresser avec sa sorcellerie, deux de mes hommes lors de son transfert pour s’évader. Je ne garantis aucunement dans quel état il sera demain et si même il sera encore en vie. Templier psykana ou non, j’en ai strictement rien à faire. D’ici là, tenez vos chiens en laisse sinon nous ne serons pas aussi enclins à retenir nos coups.
    Rico resta choqué par la nature des propos proférés. Se demandant bien ce que Derreck avait pu faire pour déclencher un tel tollé.
    -J’en prends note, procurateur. Soyez-en assuré. Faite juste savoir à mon agent que je vais venir le voir et qu'il a plutôt intérêt à se tenir tranquille d'ici là. Cela devrait le calmer.
    -Je l’espère bien.
    Wolfe les salua et s’en retourna, suivit par le castigateur.

    Rico les regarda s’éloigner et se massa les tempes, soudain terriblement fatigué.
    -Allons prendre une chambre dans cette auberge pour le reste de cette nuit. J’espère que nous pourrons tirer cette affaire au clair demain matin. Je pense que Derreck a dû mal interpréter une situation ou se serait mal fait comprendre. Ce n’est pas son genre de provoquer sans raison.
    Poppy lui lança un regard sarcastique.
    -C’est un psyker, ne l’oubliez pas, Rico.
    -Oui, je sais bien… Ces pauvres diables portent en eux la malédiction du warp mais tout de même. C’est un agent assermenté de la Psykana.
    -N’avons-nous pas déjà eu cette conversation à notre première rencontre ? Sur le danger que représentent des psykers laissés ainsi sans la moindre surveillance.
    -Si, en effet.
    -En effet, oui. C’est au moins une des raisons pour laquelle Ezek Thaddeaus a dû quitter cette cellule, je vous le rappelle. Et aujourd’hui c’est votre deuxième psyker qui fait des siennes. Vous ne pourrez pas dire que je ne vous aurais pas mis en garde, Rico.

    Le lendemain matin, ils se rendirent tous les trois en voiture au poste du magistratum. Rico se présenta et Poppy demanda à l’accompagner, ce qui ne posa aucun problème. Lexxi préféra les attendre à la voiture.
    Wolfe les reçut dans son bureau et chercha tout d’abord à clarifier les raisons de leur présence dans cette affaire. Le magos Xerxes Opteka était présent lui aussi. Il était debout, dans un coin du bureau, hiératique telle une statue. Seules les diodes rouges et vertes de ses implants optiques et vox clignotaient par intermittence, enregistrant toute la scène. Il tenait une redoutable hache omnissienne d’une main métallique et toute une batterie d’armes et implants étaient connectés à sa cyberchape.
    Le procurateur prenait des notes tout en écoutant les explications quelques peu confuses de Rico. Il releva les yeux vers lui et reposa son stylus, se callant alors dans son fauteuil.
    -J’ai du mal à saisir… Vous êtes chasseur de sorcières ou bien vous animez une… Radio ?
    -Eh bien les deux en réalité. Chasseur de sorcières est mon métier mais l’évêché m’a sollicité pour monter une radio à la capitale, et je…
    -Et donc c’est l’évêque qui vous envoie ici ?
    -Non pas vraiment… Disons que je travaille pour lui.
    -Vous travaillez pour lui mais il ne vous a pas vraiment envoyé… Vous pourriez me redonner son nom ?
    -Oui il s’agit de… du… De Leonis de Yorke.
    Le procurateur le nota.
    -Et qui vous envoie ici dans ce cas ?
    -Eh bien, en réalité je suis en train de suivre une enquête, en collaboration avec la Praetor Sandwall, ici présente. Nous suivons les traces d’un trafic de reliques xenos organisé par des criminels du Syndicat de l’ombre. Leur piste nous a conduit jusqu’ici. Il semblerait qu’ils soient sur une étrange piste du trésor d’Andarion. Voilà pourquoi nous les avons suivis jusqu’au manoir puis jusqu’à Fortunus, le libraire.
    Wolfe reporta son attention vers Poppy.
    -Vous corroborez les dires du père Rico, Praetor ? vous menez une enquête contre un réseau de trafiquants de xenotechs ?
    -Absolument. Voilà pourquoi notre enquête relève du secret, car nous touchons là à une hérésie.
    -Pouvez-vous nous en dire plus à propos de cette histoire de livres ? J’imagine que vous savez ce que ces assassins recherchent ?
    -Nous avançons sur le sujet. Je pense que nous allons avoir besoin d’une personne sachant déchiffrer des codes secrets.
    -Peut-être vous y connaissez-vous en cryptologie, magos ? Demanda Poppy.
    -C’est le cas, se contenta-t-il de répondre.
    -A ce sujet, hier, vous-même ou l’un de vos… Technoprêtres se serait-il entretenu avec l’intentant Eléazar à la mairie ?
    -Négatif, preator.
    -Bien, et cette enquête en cours, j’imagine que c’est le Justicar Cain qui vous l’a confié ? Lâcha Wolfe. Je peux donc l’appeler et il me le confirmera ?
    Poppy ne répondit pas.
    Wolfe continua de l’interroger du regard.
    -Je n’ai pas à répondre à cette question, procurateur, lui dit-elle enfin. Comme je vous l’ai dit, cela relève du secret.
    -A votre guise.
    Il reporta son regard vers Rico.
    -Vous avez parlé d’hommes de main qui vous accompagnent. Où sont-ils ?
    -L’un d’eux est entre vos mains. Une nous accompagne, elle est dehors. Quant aux deux autres, ils sont actuellement à l’hôpital avec les sœurs.
    -J’aurai besoin de leur identité, si vous n’y voyez pas d’objection.
    Rico hocha la tête et lui divulgua les fausses identités de ses hommes.
    Wolfe les nota puis releva ses yeux vers lui.
    -Inutile de vous dire que si certains de ces noms sont liés à des affaires en cours, nous l’apprendrons rapidement.
    Poppy se racla la gorge.
    -Je ne vois pas où vous voulez en venir, procurateur. Ces hommes sont-ils accusés de quoi que ce soit ? Auquel cas, j’aimerai en être informé.
    -Votre remarque est pertinente, praetor. Pour l’heure, ils ne sont accusés de rien. Mais vous soulevez un point éminemment crucial dans cette affaire : le partage d’informations. Car voyez-vous, vous arrivez ainsi dans ma ville. Etes sur la trace de dangereux criminels. S’ensuit une série de carnages en pleine rue, digne d’une guerre de gangs. Et là, je me retrouve avec une vingtaine de cadavres sur les bras en moins de deux heures, dont cinq de mes hommes. Il s’avère que les autres corps sont tous ceux de clones disposant d’augmentiques – tels que l’on pourrait trouver sur un monde-forge, or selon le magos, nous aurions plutôt affaire à des modifications prohibés. Vous reconnaitrez que pour une petite ville provinciale, cela fait beaucoup. Et à chaque fois, vous êtes en plein milieu de ces affaires et nous, le Magistratum, sommes là pour faire quoi ? Compter les corps ? J’ose espérer que nous travaillons tous dans le même camp, car à aucun moment, il ne vous serait venu à l’esprit de nous tenir informé de la situation ? Du danger que représente ces assassins ? Qui sont-ils et que veulent-ils ? Des risques pour la population ? Une simple demande de renfort ? Non. Vous disposez de… mercenaires qui agissent selon leurs propres règles. A jouer les francs-tireurs, sachez juste que cela risque bien de poser quelques problèmes s’ils tombent sur mes hommes. Voilà ce que je voulais vous dire.
    -Nous avons été pris de court, répondit Rico. Je l’avoue, nous avons dû agir dans l’urgence et comptions évidemment vous contacter mais…
    -Cela vous aurait évité bien des désagréments, croyez-moi. Mais à présent nous sommes informés. Cela nous ramène à votre enquête, père Rico. Vous avez mentionné un trafic d’armes xenos. Vous pouvez nous en dire plus ?
    -En effet. Lié au Syndicat de l’ombre.
    -Et votre enquête avance comme vous le souhaitez ?
    -Comment cela ?
    -Eh bien, je me demandais juste où étaient les armes xenos en question. Celles de votre enquête. Point qui intéresse grandement le magos ici présent et moi-même.
    -C’est une piste mais nous… Suspectons que les assassins que nous poursuivons y soient liés, tout comme leur chef qui pourrait être un heretek. Nous l’avons d’ailleurs blessé au manoir d’Andarion. Un de mes hommes affirme qu’il aurait perdu un de ses bras augmentiques lors de l’accrochage. Je pense que vous pouvez corroborer cette information.
    Le magos prit la parole pour la première fois. Son implant vox émit une série de sons binaires avant de produire une voix désincarnée et monocorde.
    -Cette information est classifiée, prêtre. Nous ne pouvons affirmer ou infirmer ces propos.
    Rico rebondit habilement à cette remarque, sans chercher à se laisser déstabiliser.
    -Nous sommes tout à fait disposé à vous apporter notre concours dans cette enquête, sachez-le.
    Le magos ne répondit pas.
    -Cela nous amène au sujet principal de cet entretien, père Rico, lui dit le procurateur. Etant donné que vous êtes disposé à collaborer avec nos services, il nous reste le sujet de votre psyker à aborder.
    Votre homme a proféré des menaces hier soir et devant témoins, au magos ici présent. Pour cela, mes hommes l’ont immédiatement interpelé, à sa demande. Mais sachez que lors de son transfert, votre psyker a tenté de s’évader et de faire usage de ses… pouvoirs sur mes agents. Il a, par chance, été rapidement maitrisé et est enfermé sous bonne garde. En temps normal, cette attitude vaut la peine de mort pour ce genre de comportement de la part d’un citoyen. Cependant… Aux vues de vos rôles respectifs, bien que quelques points restent à éclaircir, le magos et moi-même serions disposés à nous montrer magnanimes pour cette fois. Il va sans dire que le magos exige réparation pour l’outrage subi.
    Rico hocha la tête en déglutissant.
    -Il ne pourrait en être autrement. Bien entendu.
    -Un instant. Lâcha Poppy.
    Wolfe l’interrogea du regard.
    -De quoi est accusé exactement ce templier psykana ? Lâcha Poppy.
    -Il a menacé le magos.
    -Et peut-on nous en donner la preuve ?
    Le procurateur allait s’indigner mais le magos le coupa d’un geste.
    Je dispose d’un enregistrement de cet échange, praetor.

    Il activa son enregistreur vox et rediffusa la scène, qu’il imprima en même temps sur une bandelette de parchemin. Ils purent entendre la voix de Derreck alors en plein échange avec le castigateur, tandis qu’ils devaient être sur la place, non loin de la librairie, hier soir. Derreck était en train de parler d’armes xenos et d’un technoprêtre qu’ils étaient en train de traquer car impliqué dans cette affaire. Selon ce qu’il était en train de dire, le technoprêtre en question était lié aux armes xenos. C’est à ce moment qu’ils perçurent la voix métallique du magos.
    -Vous parlez là de techno-hérésie. Je ne crois pas que vous soyez autorisé à aborder un tel sujet, citoyen. Puis-je voir votre assermentation ?
    -Je suis templier psykana,
    répondit Derreck, de manière un peu abrupte. Je pense que cela devrait vous suffire, autant que votre équipement me suffit pour ne pas vous demander la vôtre.
    -Votre refus d’obtempérer m’autorise à employer la force, citoyen. Gardes, veuillez placer cet homme en état d’arrestation.

    Ils perçurent alors le ton sarcastique de Derreck.
    -Puis je connaître votre nom ? Non, parce lorsque l'on apprendra ce qui est en train d'arriver, vous allez certainement être rétrogradé, voire recyclé, mon pauvre vieux !
    Pour toute réponse, ils entendirent la magos formuler une phrase en techna linguis avant la fin de l’enregistrement.

    Rico et Poppy en restèrent sidérés, au point qu’ils relurent le message une seconde fois, ne sachant que dire.
    -Et vous me dites qu’il a ensuite attaqué vos hommes lors de son transfert ? Lâcha Rico.
    -Tenté de les attaquer, en effet.
    -Bien évidemment, je tiens à vous présenter toutes mes plus sincères excuses pour tout ceci. Sachez que cela ne se reproduira pas.
    -Je n’en doute pas.
    -Si je puis faire quelques chose…
    -Eh bien oui. Sachez que votre homme encoure la peine capitale, mais le magos tient à se montrer clément et aurait une demande à vous faire. Après tout, nous œuvrons tous pour le bien de l’Imperium.
    -Bien entendu. Je suis tout disposé à…
    -Les assassins qui sont à l’origine de l’attaque, commença le magos. Ils possédaient des armes et du matériel. Les agents du procurateur ont vu vos hommes de mains ramasser ces preuves à convictions pour les charger dans le coffre d’un véhicule. Restituez-nous toutes ces armes, munitions et ces équipements. Alors seulement, nous pourrons peut-être libérer votre homme.
    Rico hocha la tête.
    -Oui, sans aucun problème.
    -Je veux ces armes ici. Dans les dix minutes, ajouta le magos.
    Rico fit signe à Poppy.
    -Nous allons les chercher. Aucun problème. Ce genre de problème avec notre psyker ne se reproduira pas, je m’en porte garant, magos.
    -Je n’en doute pas, prêtre. A ce sujet… nous avons noté des pics d’activité aethérique anormaux en lien avec ces clones. Votre psyker ne semble pourtant pas l’avoir noté.
    -Nous lui en toucherons un mot, magos… Merci pour cette information.

    Une fois dehors, ils retrouvèrent Lexxi qui les attendait à la voiture et l’informèrent de la situation.
    -Quoi ? Leur donner les armes ? Vous n’y pensez quand même pas ? Mais il n’en est pas question !
    -Je te signale que c’est pour sauver les fesses de ton Derreck, lâcha Rico.
    -Ce n’est pas « mon Derreck » déjà. Ok, il m’a peut-être à la bonne mais c’est pas une raison pour qu’on leur donne l’intégralité du matériel.
    -Ils ne veulent pas tout notre stock, juste les armes ramassées hier soir.
    -On garde au moins quelque chose ? Une arme ou deux ou des balles tueuses ?
    -Non, on rend tout, répondit Poppy.
    Rico se passa la main sur son visage. Il jeta un coup d’œil dans le coffre et inspecta le matériel ramassé. Il y avait là plusieurs armes d’assaut, des armes de poing, une épée tronçonneuse et un stock de munitions.
    -Lexxi a raison, on va garder quelque chose, mais pas les armes. On a quoi de vraiment intéressant dans ce qu’on a trouvé ?
    Il préleva une tablette munie de senseurs complexes, ainsi qu’un brassard technologique de belle facture.
    -Une sorte de capteur-vox et un brassard réfracteur si je ne me trompe pas. Gardons ces deux objets, il y a peu de chance pour que le magos connaisse leur existence. Tout le reste, les armes et les munitions, on leur rend.

    Ils apportèrent finalement tout l’armement au magos qui parut satisfait. Le procurateur fit alors le nécessaire pour que Derreck soit libéré.
    -Un dernier point, procurateur, ajouta Poppy. Vous parliez, tout à l’heure, du fait que les hommes du père Rico pourraient avoir des problèmes s’ils croisaient de nouveau vos agents. Était-ce une menace ?
    -Ce n’était pas une menace. Mais comprenez bien que des mercenaires qui viendraient à se retrouver impliqués dans une fusillade, s’ils étaient inconnus de nos services, courraient alors le risque d’être pris pour de vulgaires criminels.
    -Je vais faire le nécessaire, lâcha Rico. Soyez-en assuré.

    Une fois sortis, ils attendirent quelques minutes que Derreck soit relâché et vienne les rejoindre. Ils montèrent à bord de la Hive Runner et firent le trajet vers l’auberge sans que personne ne décroche le moindre mot. Une fois enfin tous réunis dans la chambre, Rico referma la porte.
    -C’est quoi cette histoire avec le magos ? Mais tu réalises que tu aurais pu te faire tuer au moins ?
    -Mais si j’avais su que c’était un magos, je n’aurais jamais dit ça, évidemment. Je parlais au castigateur, qu’est-ce que j’en savais moi que l’autre tas de boulons était juste derrière moi à écouter notre conversation.
    -Et dis moi qu’ils ont mal compris, que tu n’as pas cherché à utiliser tes pouvoirs pour t’évader.
    -Eh bien si… évidemment que j’ai tenté de m’évader, mais ça n’a pas fonctionné.
    -Mais, gros malin… Tu aurais fait quoi, après ? Semer tout le magistratum ?
    -Bin, je comptais sauter du camion et vous retrouver. Je me serais caché… Le temps de…
    Poppy leva les yeux au plafond.
    -Et comment ça se serait passé selon vous ? Un fugitif ? Une agression sur agents de la loi ? Mais Trône, nous ne sommes pas assez dans les ennuis qu’il faille à ce point en rajouter une couche ?
    Rico se mit à souffler.
    -Bien, il nous reste la piste de l’archéotechnologue et du train ainsi que celle d’un couvent à Banner Cove sur la côte. Mais tout d’abord, il va falloir que l’on mette les choses au point.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 13/05/2022 à 15:46 Citer ce message

    Les trois jours qui suivirent furent consacrés à la recherche active de ces deux derniers livres. Tandis que Felton restait convalescent à Newburg, accompagné de Lek, le reste de l’équipe se répartit sur deux pistes récemment identifiées. Rico et Lexxi partirent en voiture en direction de la ville côtière de Banner Cove, située à une centaine de kilomètres au sud, là où se trouvait un couvent de l’ordre Vespila, perché sur une falaise. Une des sœurs de ce couvent avait acheté justement un des ouvrages recherchés. Rico se présenta sur place, en tant que père Ricardo Gallileus. Les sœurs furent aimables et bien qu’occupée, une sœur supérieure les reçue. Elle se nommait Castella et écouta attentivement son histoire de chasse aux sorcières, d’hérétiques, de trésor d’Andarion et de livres. Lexxi avait proposé à Rico de leur dévoiler le fait qu’ils travaillaient pour l’Inquisition, mais ce dernier préféra jouer la prudence et la discrétion. On ne dévoile jamais que l’on travaille pour les Ordos, sauf en dernier recours ou alors pour effrayer sa cible. Là, ce n’était pas justifié. Castella écouta Rico et fit convoquer une des sœurs, celle qui avait acheté le livre en question. Ils parlèrent ainsi une partie de la journée et avant qu’ils ne quittent le couvent, la sœur supérieure le lui remit, comprenant que cela pouvait permettre de résoudre une affaire impliquant des hérétiques.

    Poppy et Derreck, de leur côté débutèrent leur enquête à la gare de Newburg, où ils apprirent que leur piste, un archéotechnologue du nom de Caleb Gillam avait embarqué la veille pour la ville de Rivergrad, située à plus de cent kilomètres à l’est. Poppy contacta le magistratum afin qu’ils lancent un avis de recherche et l’informent dans les meilleurs délais.
    Tandis que Rico était parvenu, après quelques discussions avec les sœurs, à obtenir le livre recherché, lui et Lexxi décidèrent de rejoindre Poppy dans la journée, à Newburg. Entre temps, Poppy avait obtenu de nouvelles de Rivergrad. La police locale venait de lui confirmer que Caleb Gillam était toujours en ville…
    Décidant de laisser Lexxi en compagnie de Lek et Felton pour commencer à faire des copies pix des codes notés dans les six premiers ouvrages, Rico, Poppy et Derreck filèrent en voiture vers Rivergrad.
    Une fois sur place, Poppy, sous son autorité de praetor de l’Arbites, se coordonna avec les hommes du magistratum. En ce matin du deuxième jour, Calleb avait été identifié arpentant les ruelles animées du souk, en flânant comme si de rien n’était. Poppy avait ordonné aux forces de l’ordre de discrètement se positionner dans le quartier afin qu’il ne puisse s’échapper.
    Ils arrivèrent sur place en fin de matinée. Après s’être entretenue avec les forces de l’ordre pendant quelques minutes, Poppy fit signe à Rico et Derreck, leur indiquant de la suivre.
    -Il a été aperçu il y a quelques minutes sur une petite place, à la terrasse d’un café.
    -On fait comment ? Lui demanda Derreck.
    -On essaie déjà de le trouver et on ouvre l’œil. L’objectif reste le livre et on sait que d’autres le veulent aussi.
    Au bout de quelques minutes, ils le repérèrent. Le vieil archéotechnologue était tranquillement attablé à la terrasse d’un petit café. Il était vêtu de ses lourdes robes d’adeptes et ils le reconnurent sans peine à ses binocles grossissantes. Tout en sirotant un verre de thé, il semblait absorbé par la lecture d’un livre. Le livre.
    Poppy leur fit signe de se séparer pour couvrir toute la place car en cette heure, elle était bondée d’une foule de marchands et de clients en tout genre. La situation était donc délicate car le danger pouvait être n’importe où. Derreck tenta de percevoir la moindre activité psychique mais le monde alentours perturba ses sens et il eut du mal à percevoir quoi que ce soit. Rico n’avait pas un bon angle de vue et perdit la cible des yeux pendant quelques instants. C’est là que Poppy le repéra. A une vingtaine de mètres sur sa droite. Un homme grand et chauve, aux yeux augmentiques et vêtu d’un long manteau renforcé. Elle repéra tout de suite le Tronsvasse à silencieux que le clone gardait dissimulé d’une main, sous les plis de son vêtement. Il se dirigeait d’un pas assuré, droit vers sa cible. Un éclat furtif et elle vit le second assassin, positionné en face de la place, au deuxième étage d’un bâtiment. Un tireur d’élite. Elle bascula aussitôt sur la fréquence vox du magistratum situé tout autour de la place.
    -Tireur au deuxième étage du bâtiment est ! Interceptez-le !
    Elle venait de dégainer sa matraque à décharge et fonça droit vers l’homme au Tronsvasse, en écartant la foule et tout en criant à Derreck et Rico d’intervenir.
    En quelques enjambées, Poppy était sur lui, au moment où il venait de dégainer son pistolet et qu’il le pointait droit vers l’adepte, à quelques mètres de son visage. Elle activa sa matraque à décharge qui s’auréola d’une énergie d’un blanc-bleu crépitant et le frappa. Vif comme l’éclair, il encaissa le coup mais la matraqua toucha son bras augmentique tenant l’arme, empêchant le coup de partir. Le Tronsvasse vola dans les airs, crépitant d’éclairs vengeurs. Des gens crièrent.
    Derreck relâcha son pouvoir sur le tueur mais ce dernier résista à la poigne télékinétique. Pivotant de côté pour éviter les coups de la praetor, il fit jaillir une grenade de sa ceinture et la lança vers le café tout proche, avant de bousculer les gens et de partir en sens inverse en bondissant.

    Rico avait aperçu le tireur d’élite et avait jugé utile de se précipiter en direction de Caleb Gillam qui n’avait encore rien vu de ce qui l’attendait. Il bouscula les passants et les tables et cria vers l’adepte, lui intimant de se mettre à l’abri. L’homme releva le nez de son livre et ne comprit pas ce qui se passait. Un coup de feu claqua et explosa le verre de thé sur la table au moment où Rico empoigna l’adepte pour se jeter de côté avec lui, juste au moment où la grenade explosa, faisant voler mobilier et passants. La panique gagna toute la foule massée sur la place.
    Un deuxième coup claqua aussitôt. A côté de Rico, Gillam s’écroula, touché de plein fouet. Rico chercha à le mettre à couvert mais comprit que l’adepte était déjà en train de recracher du sang alors qu’une tâche sombre s’élargissait sur sa poitrine. Rico chercha à le mettre à couvert mais un autre tir le toucha au flanc et lui fit lâcher un juron, maudissant le fait que leur stratégie était un véritable échec. Gillam était en train de mourir dans ses bras, il avait les mains maculées de sang, se tenant le côté à cause de la douleur qui lui déchirait les côtes, il ramassa le livre et chercha à se mettre à couvert.

    Sur la place, Derreck parvint à neutraliser le tueur à l’aide de sa poigne télékinétique au moment où ce dernier allait sauter par-dessus un mur pour s’enfuir. Poppy en profita pour voxer les agents qui venaient de prendre en chasse le tireur d’élite.
    -Ordre de tirer pour tuer ! Cria-t-elle dans son vox. Ce dernier avait profité de sa position en hauteur pour faire un carnage. A présent que les forces de l’ordre étaient dans les étages, prêts à l’intercepter, il avait déjà filé, courant de toit en toit. Tandis qu’elle reporta son attention sur l’assassin maintenu par Derreck et deux agents du magistratum, s’apprêtant à lui passer les menottes. Elle les vit chanceler. Du sang coula de leur nez et elle sentit qu’il en était de même pour elle. Sa vue se brouilla alors que la tête de l’assassin fut parcourue d’éclairs violacés. Ses yeux se révulsèrent et sa bouche s’ouvrit en grand. Ils reculèrent alors qu’il s’écroulait, parcouru de spasmes, tandis que sa cervelle s’écoulait de ses oreilles en fumant.
    Ils reprirent leurs esprits. Elle reçut la confirmation vox que l’autre assassin venait d’être abattu, à trois rues de là. Au vu de l’urgence dans laquelle ils avaient dû intervenir, Poppy considéra qu’ils avaient fait au mieux.
    Rico lui, était furieux mais au moins ils avaient le dernier livre.
    Derreck vint la trouver.
    -Dites, preator… On pourrait peut-être récupérer les armes de ces types.
    Elle l’interrogea du regard, espérant avoir mal compris.
    -Les… Récupérer ?
    -Oui, au moins le fusil de tireur d’élite si possible, non ?
    Elle se campa devant lui et riva son regard dans le sien.
    -Dérober des pièces à convictions en pleine enquête tels de vulgaires voleurs ? Et devant les forces de l’ordre. Non, mais il faut croire que finir au poste pour vos dernières bêtises ne vous a pas suffi, vous ?
    -Quoi ? Mais…
    -Vous mettre le magistratum et le Mechanicus de Newburg à dos ne vous suffit-il pas ? J’attends beaucoup de mieux de la part d’un templier Psykana, croyez-moi.

    Le reste de la journée et le jour suivant, Poppy la passa à se coordonner avec le magistratum et les indices recueillis. Sur le tireur d’élite, les clés d’un véhicule avaient été retrouvé et les magistratus n’avaient pas mis bien longtemps pour localiser le camion en question. Après avoir fait intervenir une équipe d’artificiers et s’être assuré que l’engin ne présentait aucun danger, le magistratum appela Poppy pour lui indiquer qu’une tablette cartographe biométrique avait été retrouvée. Ils purent l’activer grâce aux empreintes d’un des assassins ce qui dévoila une carte de la ville ainsi qu’un itinéraire enregistré. Avec l’aide des agents, ils purent établir que l’itinéraire menait vers une zone industrielle située en périphérie de la ville de Rivergrad, le long du fleuve. Poppy ordonna que des équipes y soient immédiatement envoyées afin de boucler le quartier. Entre temps, Rico avait contacté Felton et Lek, leur demandant de les rejoindre au plus vite à Rivergrad. Le troisième jour, en fin de matinée, après un trajet d’une heure de train, ils se retrouvèrent tous en ville et Rico les briefa sur la situation. Selon Poppy, le magistratum était déjà en position, il était temps selon elle de se rendre sur place.

    La zone industrielle était composée d’un ensemble de petites manufactoria et de docks en activité. Sur place, des ouvriers, dockers, technomécanos et servitors industriels s’activaient à des tâches diverses. Fouiller l’ensemble des bâtiments qui s’étendaient sur quelques centaines de mètres leur pris un certain temps avant que le magistratum leur signale un complexe abandonné qui pourrait bien avoir été utilisé récemment. Sentant qu’ils tenaient peut-être une piste, ils décidèrent de se rendre sur place. C’était un ancien complexe de generatorium galvanique. Derrière la haute enceinte en lithobéton, surmontée de fils de fer barbelés à quatre ou cinq mètres de hauteur, ils pouvaient voir les anciens échangeurs thermiques et les hauts accumulateurs alchomites rouillés qui dépassaient. L’endroit était vaste mais clos par une lourde porte métallique aussi haute que l’enceinte.
    -Combien il y a d’entrées ? demanda Poppy à l’officier en charge des opérations.
    -C’est la seule, madame.
    -Vous pouvez l’ouvrir ?
    -Sans explosifs… J’ai bien peur que non.
    Elle le dévisagea.
    -Vous n’avez rien de plus… Discret, lieutenant ?
    -Non, madame.
    -Alors faite-la sauter. Que tous vos hommes se tiennent prêts à entrer, nous donnons l’assaut.
    Il donna ses ordres à ses différents chefs de groupes, pour coordonner les équipes d’intervention.
    Quinze minutes plus tard, tout était en place. Une détonation sourde ébranla les murs. Une fois la fumée dissipée, un premier groupe d’intervention, armé de boucliers et de fusils compacts pénétra dans l’enceinte par un trou béant dans la porte. Les premiers tirs retentirent.
    -Envoyez des renforts, lieutenant. Tous vos hommes, lâcha Poppy.
    L’officier acquiesça et donna ses ordres à une vingtaine de ses hommes.
    En quelques minutes ils eurent la confirmation que la zone était sécurisée. Cinq assassins avaient été abattu dans le complexe qui désormais était passé au peigne fin par les forces de l’ordre.
    Rico, Poppy et le reste de l’équipe pénétrèrent alors dans le complexe. Le lieutenant leur fit signe de le suivre.
    -Mes hommes ont trouvé quelque chose, je pense que ça devrait vous intéresser.
    Ils le suivirent.
    -Combien y avait-il d’hostiles ? Lui demanda Rico.
    -Nous en avons dénombré cinq, mon père. Mais il semblerait qu’ils se servaient de cet endroit comme d’une sorte de planque. Une bonne vingtaine d’hommes devait occuper les lieux.
    Derreck interrogea Rico du regard.
    -On en a abattu combien depuis le manoir d’Andarion ?
    Rico réfléchit un instant.
    -Une bonne quinzaine je dirais.
    -Avec ceux-là, nous pourrions avoir le compte, non ?
    Le lieutenant les mena vers une salle de contrôle dans laquelle se trouvaient des cogitateurs en fonction et ce qu’il restait d’un technoprêtre criblé de balles et auquel il manquait un de ses bras augmentiques. Il venait de succomber.
    -C’est notre homme ? Celui du manoir, lâcha Poppy.
    -Je crois bien.
    Elle reporta son attention vers les cogitateurs. Certains avaient la taille d’une armoire et des listes d’algorithmes défilaient sur leurs écrans.
    -Il avait commencé à casser le code, lâcha Rico, soudain émerveillé.
    Sur un des cogitateurs de déchiffrement, ils trouvèrent des notes, des ensembles de chiffres et un plan du manoir d’Andarion de l’époque où il était encore intact.
    Poppy lui désigna son sac.
    -Sortez les livres, nous allons peut-être pouvoir finir ce qu’il venait de commencer.

    Après quelques heures de travail, ils finirent par assembler un code numérique qu’ils entrèrent dans la machine. Celle-ci laissa défiler des lignes de données en crachant un flot de tonalités binaires. Au bout de plusieurs minutes, une séquence de lettres apparut donnant une sorte de bouillie illisible pour certains d’entre eux. Si Poppy crut y reconnaitre du haut Gothique, son rudiment de cette langue ne lui permit pas d’en comprendre le sens.
    -Ça pourrait aussi bien être du xenos pour moi, lâcha Lek.
    -Ne blasphémez pas ! Rétorqua Poppy.
    Elle se tourna vers Rico qui savait lire le haut Gothique. Il se concentra et commença à déchiffrer les phrases.
    -Nox vertimus et igne consumimur, puis l’autre phrase dit Si vis esse dignus gloria eius sequeris semitam ostendit tibi.
    -Ce qui signifie ?
    -Ce qui signifie pour la première phrase… Nous tournons en rond dans la nuit et nous sommes consumés par le feu.
    -Ça, pour tourner en rond, on tourne en rond, lâcha Derreck.
    Poppy leva les yeux au plafond.
    -On sait à quoi ça peut faire allusion, demanda Felton qui était resté silencieux jusque-là et qui se remettait doucement de ses blessures.
    -Je crois que ça pourrait être une référence à une citation…
    Rico chercha le livre de Sainte Elana et entreprit de le feuilleter rapidement. Au bout de quelques instants, il pointa son doigt sur une page.
    -Voilà, c’est ça ! Chapitre XII, Verset IV ! Sans la sainte lumière de Terra, nous tournons en rond dans la nuit et sommes consumés par le feu impie de nos péchés. C’est bien cette phrase !
    -Et cela nous apprend quoi ? Demanda Poppy qui prit le livre et parcourut le texte. Sur la page de droite, se trouvait une gravure à l’eau forte qui représentait Sainte Elana lors de son martyr. On la voyait tandis que des hérétiques tentaient de la brûler vive et elle, par la grâce de sa foi, restait indemne.
    -Cette gravure… Je l’ai déjà vu… Dit-elle.
    -Où ça ? Demanda Rico.
    -Au manoir d’Andarion. Un bas-relief sur une des cheminées.
    -D’accord et ça signifie quoi ? Demanda Felton.
    -Pour l’instant, qu’on est peut-être bien sur la bonne piste.
    -Et l’autre phrase ? Demanda Lek.
    Rico entreprit de la traduire à son tour.
    -Si tu es digne de sa gloire, tu suivras le chemin qu'il t'indique.
    Il releva le nez de l’écran et réfléchit.
    -C’est tiré d’un poème, non ?
    Derreck, Lek et les autres ne réagirent pas, à l’exception de Poppy qui chercha parmi les livres, celui de Jarvin Vallankot. Elle le parcourut, se remémorant alors du poème en question.
    -Voilà, dit-elle ! Ce n’est pas un des meilleurs de l’auteur mais…
    -D’accord, mais ça dit quoi ? Lui demanda Felton.

    Hier, aveugle j’étais et pourtant ?
    Alors qu’une nuit en plein rêve
    Je le vis, saltimbanque virevoltant

    Il me guida dans le noir
    Vêtu, tel un as de pique
    Si tu es digne de sa gloire,
    Tu suivras le chemin qu'il t'indique.

    Me parlait-il de l’Empereur ?
    Non pas, j’en ai bien peur
    De qui alors, sinon ?
    Vois ! Abraxas est le nom.


    -Mince, on dirait que ça parle d’Ezek, non ? Un aveugle dans le noir et je ne sais quoi… Lâcha Derreck.
    -Ça pourrait tout aussi bien parler d’un démon, non ? S’étonna Lek. Ce nom… Abraxas, c’est qui ?
    -Ce pourrait être le nom de n’importe qui ou de n’importe quoi, justement, lâcha Rico.
    -Qui pourrait nous renseigner en dehors d’universitaires ? Demanda Poppy.
    -Tsali le pourrait surement, répondit Felton.
    -Alors appelons-la !
    -Elle est à la capitale, à deux-cent-cinquante kilomètres. Nos vox ne captent pas, j’ai déjà essayé.
    -Nos vox non, mais le magistratum dispose de vox longue portée qui captent via des relais. La couverture est planétaire comme celle de tous les adepta.

    Cinq minutes plus tard, ils avaient demandé au lieutenant de pouvoir utiliser le vox de son véhicule de commandement. Poppy demanda qu’on lui passe le ministère de Finances de Hub City. Au bout de quelques instants, elle parvint à avoir Tsali en ligne. Elle la passa à Felton.
    Un peu gêné, ce dernier chercha à rester plutôt factuel avec Tsali, se contentant de lui raconter les derniers évènements, ce qui parut tout d’abord confus pour la jeune femme.
    -Attends… je ne comprends rien à cette histoire de poème et de phrase. Vous cherchez quoi, en réalité ?
    -Ezek avait été enlevé, tu te souviens ? Et à son retour il nous a parlé d’une vision qu’il aurait eu. Il a parlé d’une grande maison, d’une sorcière avec un cube, d’un couloir et d’une tour, le numéro dix-sept, un xenos pris dans la toile, la Sanguinala, un tapis vert…
    Tsali l’interrompit.
    -Attends… Tu sais, les visions des psykers sont toujours très obscures. Bien avisé celui qui parvient à les déchiffrer, si compté qu’elles aient vraiment un sens.
    -Et ça parlait aussi d’une bibliothèque avec sept livres qui livrent un message, un mot. Mais pour le coup, on n’y comprend rien.
    -C’est le propre des énigmes il me semble… Mais cette phrase est intéressante, je trouve. Commençons justement par là. Sept livres qui livrent un message, un mot. Mais n’avez-vous pas découvert sept livres, justement ?
    -Si.
    -Et ils livrent bien un message ?
    -Ils nous donnent des phrases mais c’est un vrai charabia.
    -Ce qui est logique, car on ne cherche qu’un mot, finalement. Et sur quel mot avez-vous bloqué ?
    -Sur le mot Abraxas…
    -Précisément. Je crois que tu as ta réponse, non ?

    Poppy lança un début de sourire à Rico.
    -Direction le manoir d’Andarion.

    Ils reprirent la route après avoir laissé quelques consignes au magistratum pour les suites de l’enquête. Felton avait informé Tsali qu’ils retournaient à Newburg afin de fouiller le manoir et c’est donc en début de soirée de ce troisième jour qu’ils arrivèrent sur place. Ils y retournèrent avec leurs armes et leur équipement et avec une idée plus précise de ce qu’ils recherchaient désormais. Le plan qu’avait utilisé l’heretek indiquait que la bibliothèque se trouvait initialement dans l’aile est du manoir. Une cheminée en pierre était juste à côté et en l’inspectant de près, ce fut Derreck qui finit par découvrir un petit mécanisme dissimulé dans une des gravures représentant Sainte Elana. Ils entendirent un bruit métallique accompagné d’un raclement dans la pièce juste à-côté de la bibliothèque. Un tapis vert, désormais déchiré couvrait toujours le sol. En inspectant la pièce, ils trouvèrent un panneau mural qui s’était ouvert, dévoilant dans une niche taillée à même le mur, un panneau de contrôle disposant d’un clavier alphanumérique et d’un écran sur lequel était indiqué : « mot de passe ? ».
    Fébrilement, Poppy saisit le mot Abraxas. Derreck restait les sens aux aguets, mais ne perçut aucune activité psychique dans l’immédiat.
    Le sol trembla légèrement alors qu’un passage était en train de s’ouvrir donnant vers des escaliers en pierre sans doute plus ancien que la maison. Le passage plongeait vers des profondeurs insoupçonnées voilées par une multitude de toiles d’arachnides.
    Ezek leur avait parlé de livres qui ouvraient cette bibliothèque qui donnaient sur des escaliers qui descendaient à l’infini vers des profondeurs insondables.
    Pour l’instant il n’avait pas l’air de s’être trompé…
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 21/05/2022 à 23:52 Citer ce message

    Ils retournèrent à la Hive Runner afin de s’équiper, prendre quelques armes d’assaut, des munitions et un peu de matériel. Lek récupéra le fusil Armageddon à lunette, Poppy prit un Mastoff M4, Derreck sélectionna un des fusils laser radiant alors que Lexxi récupérait son bolter. Tous prirent plusieurs chargeurs. De leur côté, Rico et Felton avait fait le plein de munitions pour leurs armes de poing.
    Profitant de la nuit, ils retournèrent ensuite vers le passage sous la villa. Rico prit avec lui le brassard réfracteur et l’enfila sur son avant-bras gauche. Le champ généré projetait une sorte d’écran légèrement ronronnant, miroitant et translucide qui devait mesurer à peine un mètre de diamètre. Il lui était donc possible de le diriger à l’aide de son bras, comme s’il tenait un bouclier. Il ne connaissait pas la capacité de sa cellule énergétique vu sa petite taille et sa haute consommation, aussi l’appareil n’avait sans doute pas été conçu pour rester activé en permanence mais juste au besoin. La cellule en question n’était cependant pas très différente de celle d’une arme laser et devait se recharger de la même façon. Il préféra le désactiver en attendant.

    Il décida de passer devant, avec Lexxi. Lek et Derreck les suivaient, puis Felton et Poppy fermaient la marche. Le tunnel menait vers les profondeurs, quelque part sous la ville, pourtant personne n’avait dû emprunter ce tunnel depuis des années, voire des siècles. Durant les premières dizaines de mètres, les escaliers étaient en pierre taillées, tout comme les parois dont le plafond, plutôt bas, avait été façonné par la main de l’homme. Cela devait correspondre à d’anciens souterrains ou quelque passage secret tel qu’il est fréquent de trouver dans la plupart des vieux châteaux ou anciennes demeures. Parvenus à une trentaine de mètres sous la surface, le tunnel partait vers des galeries bien plus anciennes et sans doute très antérieures à la construction de la ville, ou remontant sans doute à ses origines post-coloniales. Des conduits avaient été murés ou effondrés, des siècles ou peut-être des millénaires plus tôt et un seul tunnel continuait de serpenter devant eux. Ici, les parois n’avaient pas été taillées ou maçonnées mais plutôt découpées à l’aide de foreuse laser ou de canons à fusion, cela se voyait clairement à la manière dont les surfaces étaient vitrifiées, polies, avec une absence totale de rugosité au touché, un peu comme si l’on passait sa main sur une pierre polie avec la quasi-perfection du verre. Sur toutes les parois, parmi les éclats de quartz ou de schiste de la roche, ils crurent percevoir des motifs, symboles ou des schémas en transparence dans la pierre. Pourtant cela n’avait aucun sens, comment aurait-il été possible de tracer des inscriptions plusieurs centimètres derrière la surface ? Derreck cru pourtant déceler comme une sorte d’émanation aethérique mais sans en identifier la source. En l’absence de réponse cohérente, ils poursuivirent.

    Le luminateur de Lexxi leur procurait un éclairage cru pourtant concentré en une simple rai de lumière blanche dans ce boyau exigu, claustrophobique et totalement obscur. L’humidité s’était infiltré partout le long des parois et s’étalait au sol en de vastes flaques clapotantes des gouttes qui filtraient le long de stalactites qui saillaient du plafond. Des moisissures blafardes, toiles d’arachnides aux longues pattes translucides et autres vermine endémique indiquaient qu’une vie parasite cavernicole s’était développée dans cette absence totale de lumière, ce qui était encore plus inquiétant. Leur environnement était chaud et humide, presque étouffant, signe possible d’une activité géologique pourtant invisible.
    De ça, de là, ils durent enjamber des éboulis instables, passer dans des zones inondées où l’eau leur montait jusqu’aux cuisses ou éviter des crevasses. Pour couronner le tout, leurs pas et leurs voix se répercutaient en un écho inquiétant, comme si ce tunnel n’allait jamais avoir de fin.
    Lexxi rattrapa Rico de justesse par un bras, au moment où ce dernier faillit basculer dans le vide. Une partie du sol s’était effondrée vers des profondeurs abyssales et, les pieds ballant dans le vide, il réalisa vers quelle funeste destin cela l’aurait précipité. Elle le hissa à la force de son biceps et l’aida à reprendre pied. Rico souffla et la remercia d’un signe de tête. Ils reprirent leur progression jusqu’au moment où Lexxi repéra une sorte de lueur à cent mètres devant eux. Là, le tunnel avait l’air de déboucher dans une vaste caverne. Elle se fixa, s’accroupit et éteignit son luminateur, les plongeant soudain dans l’obscurité. Les autres en firent de même et s’immobilisèrent.
    -Tu entends ça ? Chuchota-t-elle.
    -On dirait des bruits métalliques, répondit Rico sur le même ton.
    -C’est aussi ce que je me dis. Y a du monde. Je vais passer devant et aller voir ça.
    -Attends. Prends Lek avec toi, pour couvrir tes arrières. Vous savez être discrets, tous les deux.
    Elle acquiesça et allait y aller mais Rico la retint encore.
    -Quoi ? Lui dit-elle.
    -L’Empereur protège.
    Elle hocha la tête.
    -Et je suis son courroux, murmura-t-elle en retour entre ses dents.
    Elle ralluma sa lampe et fit signe à Lek de la suivre. Ils se coulèrent furtivement sur la centaine de mètres qui les séparaient du bout du tunnel. Ils progressèrent prudemment, avec le reste du groupe, vingt mètres derrière. Tandis qu’elle ouvrait la marche, Lexxi réalisa trop tard que son pied venait de couper le rayon d’une cellule laser, comme ceux employés pour les capteurs volumétriques. Elle maudit son imprudence juste au moment où un objet jaillit depuis les ombres, quinze mètres devant elle, projetant une lueur rouge qui balaya le couloir. Elle venait d’activer un servo-crâne auspex qui était sur le point de les repérer et de donner l’alerte à Trône-sait-qui.
    Lek l’avait vu lui aussi et ses réflexes firent la différence. Il pointa le canon de son fusil Armageddon à silencieux et tira une seule balle avec un claquement étouffé. Le projectile traversa sa cible avec un bruit de craquement. Le servo-crâne retomba comme une boite qu’on aurait jeté au sol, son œil augmentique perforé, laissant échapper un filet de fumée et une odeur de plastek brûlé. Rico vint les trouver et ramassa ce qu’il restait du petit drone avant de le fourrer dans sa sacoche. Lek et Lexxi avaient repris leur progression.
    Parvenus au bout, ils s’accroupirent puis s’allongèrent au sol, à même la roche. Ils rampèrent jusqu’au bord de ce qui devait être un parapet, ou une sorte de corniche qui débouchait à flanc de muraille. Ils se trouvaient à quinze mètres du sol de ce qui était une vaste caverne artificielle de forme vaguement pyramidale. De là où ils étaient, il était difficile d’en connaitre les dimensions exactes à cause de la semi-obscurité qui y régnait. Pourtant des lumiglobes avaient été allumé et diffusaient une lueur chaude mais parcellaire sur ce qui ressemblait à d’anciennes ruines dont la fonction et l’origine étaient difficiles à percevoir. Des silhouettes, peut-être une douzaine, s’activaient à diverses tâches sans que cela ne soit très clair. Certains étaient armés et semblaient monter la garde, ce qui confirma la présence du servo-crâne, bien que personne ne semblât les avoir encore détectés.
    Lexxi repéra des connexions vers de petits generatoria portatifs qui pulsaient d’une lueur bleutée. Le tout servait à alimenter des appareils complexes, eux-mêmes connectés aux structures et aux ruines. Lek nota d’anciens rails qui courraient autour des ruines, eux aussi en grande partie détruits. Ce qui indiquait que l’endroit devait être très ancien et avait dû jadis servir de mine.
    Il épaula son fusil Armageddon et regarda à travers la lunette de visée, cherchant à percevoir un détail important. Sur leur gauche, il repéra un petit groupe d’individus devant des tables où étaient entreposées des cartes, des plans et des cogitateurs. Ils avaient dressé devant eux, des tableaux sur lesquels ils avaient accrochés des images pix, des notes et autres schémas. Il tenta d’en comprendre le sens, mais sans succès.
    -Je peux regarder ? Chuchota Lexxi qui posa son bolter à terre et essuya la sueur qui perlait sur son front. Il lui passa son arme et elle s’en saisit. Elle s’accroupit et s’approcha tout près du bord, sans la moindre crainte pour sa sécurité. Elle épaula l’arme d’un geste exercé et porta la lunette à son œil mais son pied dérapa et elle manqua glisser. Elle se rattrapa in extremis au bord de la paroi mais le fusil lui échappa des mains et bascula dans le vide. Lexxi retint son souffle, accrochée d’une main. Elle sentit son cœur cesser de battre alors que l’arme termina sa chute juste sur le crâne d’un des gardes situés en dessous. Il ne l’avait pas repéré et se prit l’arme en pleine tête, ce qui dû le sonner net. Il s’écroula, le bruit du choc et de sa chute venaient d’être couvert par le son aigu d’une foreuse, un peu plus loin. Les autres personnages, tous situés à quelques dizaines de mètres du garde assommé, n’avaient encore rien repéré. Lexxi reprit sa respiration et se hissa à la force des bras sur la corniche. Lek était resté figé, entre la crainte d’être découvert et la colère de voir ainsi son arme disparaitre. Rico et Poppy en avaient profité pour le rejoindre, voyant que la situation risquait de déraper. Ils étaient restés cependant un peu en retrait afin de ne pas se faire repérer.
    -Désolée, se contenta-t-elle de lui dire en se repositionnant sur la corniche.
    -Va falloir un peu te concentrer, ma grande. On peut pas laisser ce type comme ça, il va finir par donner l’alerte, lâcha Lek.
    Lek jeta un regard noir à Lexxy et demanda à Poppy de lui passer son Mastoff M4 à silencieux, ce qu’elle fit sans discuter. Il arma la culasse, retira la sécurité, bascula le sélecteur sur automatique, ajusta l’arme à l’épaule, se pencha sur le bord de la corniche, visa et ouvrit le feu. Il se recula et tendit l’arme à Poppy sans même regarder le résultat de son tir. A cette distance, il savait qu’il ne pouvait pas le manquer. L’homme juste en bas venait de se prendre deux balles en pleine tête.
    -Tu as raison, répondit Rico qui observait la caverne qui s’étendait devant eux en contrebas. Il était maintenant presque certain que les silhouettes à capuche étaient d’obscurs technoprêtres ou pire encore, accompagnés de leurs séides cybernétiques et sans aucun doute d’un bon paquet de soldats armés. Probablement ces mêmes clones déjà rencontrés. Ils avaient connecté l’un d’eux, un sinistre personnage bardé d’augmentiques sur une sorte de trône connecté à des machineries arcaniques aux fonctions inconnues. Rico avait beau ne pas s’y connaitre, il comprit que les adeptes en question cherchaient forcément à activer quelque chose. Certaines structures en forme de cadrans, parmi les édifices tournaient et pivotaient sur leur axe, certaines dans le sens des aiguilles d’un chrono, d’autres en sens inverses. Des bourdonnements dissonants et autres bruits caverneux se répercutaient dans toute l’immense cavité. Des lueurs bleus, vertes et pourpres émanèrent de certaines parties de ce qui avaient dû être un temple ou peut-être même une nécropole, à moins que ce ne fut les deux, pensa-t-il.
    A ses côtés, Derreck qui avait passé le plus clair de son enfance à bord d’un gigantesque vaisseau à l’état d’épave, avant d’être trouvé par l’Astra Telepathica, observait la structure avec attention, repensant aux légendes stellaires et réalisant que l’ensemble aurait tout aussi bien pu être la partie enfouie d’un space hulk vieux de dizaines de milliers d’années, sinon plus.
    -Et on fait quoi ? Lui demanda Poppy tout en vérifiant son arme et remettant la sécurité.
    -Maintenant, on va surtout pas laisser un corps en plein milieu. Dans même pas cinq minutes, ils finiront par lui tomber dessus, lui dit Felton qui ajustait sa cape nocturne tout en mettant la capuche sur sa tête. Ainsi, dans la pénombre, il devenait difficile de discerner les contours de sa silhouette, même à quelques mètres. Je peux y aller avec Lek et régler ça rapidement.
    Rico analysa la situation en quelques instants.
    -On descend comment depuis cette corniche ?
    -Il y a un petit parapet puis des escaliers sont aménagés à même la paroi, dans la pierre, répondit Lexxi. -D’accord. Dans ce cas, allez-y tous les deux, dit-il à Lek et Felton, mais pas d’imprudence, vous dégagez le corps de là, rapidement et vous vous planquez. On vous couvre d’ici.
    -Et après ? Demanda Lexxi qui avait récupéré son bolter, tout en désignant les hommes armés parmi les ruines. Si ça commence à barder, on les arrose ?
    Felton eut un petit rire sarcastique.
    -Tout doux, Sly Marbo, sinon dans deux minutes tu vas commencer à nous lancer des grenades un peu partout.
    Elle lui rendit un regard noir en faisant jouer les muscles de ses mâchoires, au point que Rico chercha à apaiser la tension qui allait monter d’un cran. Felton n’avait pas entièrement tort, la catachan avait la détente facile mais en cas de grabuge, ils seraient tous bien contents de pouvoir compter sur la puissance de feu de Lexxi. Pourtant, vu les adversaires en face, il se dit qu’ils allaient certainement devoir employer la manière forte. Les technoprêtres, vu leur blindage et les armes arcaniques, allaient forcément leur donner un sacré fil à retordre. Il vit dans son regard qu’elle avait eu la même idée que lui.
    -Je crois que je vais remonter chercher le canon sismique, lui dit-elle.
    -Tu n’auras jamais le temps de…
    -Si, fais-moi confiance, lui dit-elle tout en vérifiant son luminateur. Evoluer en terrain hostile, ça me connait et seule j’irais beaucoup plus vite, d’autant plus que je connais déjà le terrain.
    -Soit prudente, lui intima Derreck qui lui lança les clés de la Hive Runner en lui faisant un clin d’œil. Elle les attrapa au vol alors qu’elle se mettait déjà à courir.
    Lek était déjà en train de descendre le long de la paroi rocheuse, profitant de la pénombre pour espérer passer inaperçu. Felton alla le rejoindre. En quelques minutes, ils étaient en bas, à tirer le corps du garde pour le mettre à couvert. Derrière un des parapets se trouvait une crevasse qui tombait une dizaine de mètres plus bas. Ils décidèrent de le trainer par-là, en silence tout en évitant de se faire repérer. Une chance pour eux, les autres gardes et technoprêtres se situaient à quelques dizaines de mètres de là et ne semblaient pas prêter attention à ce qui se passait par-là.

    Depuis leur point en hauteur, Rico demanda à Derreck de surveiller tout mouvement suspect et de couvrir leurs camarades, le temps que Lexxi soit de retour.
    Poppy vint se glisser à côté de Rico et observait à son tour, tout en chassant la sueur qui coulait sur son front. Elle gardait son Mastoff pointé sur un des gardes qui semblait avancer tranquillement mais en direction de Felton et Lek. Elle activa son microvox.
    -Mouvement à treize heures. Distance vingt mètres, en approche.
    -Reçu, lâcha Lek.
    Lui et Felton venaient tout juste de se dissimuler derrière un mur en pierre, prenant bien soin de cacher le corps du garde avec eux. Lek en avait profité pour ramasser son fusil Armageddon et déplora la lunette qui était cassée. Par chance le fusil n’avait rien. C’était une arme robuste et comme la plupart des armes impériales de conception militaires, elle était réputée presque indestructible grâce à l’éternel courroux que leur prodiguait le Dieu-Machine, loué soit sa grande sagesse. La preuve en était que certaines armes, si les rituels d’entretien étaient correctement appliqués, étaient toujours en service après des siècles de bons et loyaux services.

    -Etrange, non ?
    -Quoi donc, preator ? Lui dit Rico qui observait la scène, lui aussi.
    -Si des clones cherchaient ces livres et ce code pour accéder à cet endroit, alors comment se fait-il que des clones y soient déjà et bien avant nous ? Vu leurs installations, ils doivent être ici depuis des jours.
    -Remarque pertinente, preator, lâcha-t-il dans un murmure. Mais pas de conclusion hâtive, on ne sait pas encore à qui nous avons affaire.
    Elle tourna son visage vers lui. Une larme coulait de son œil gauche, pris d’un léger tic nerveux.
    -Alors pourquoi être aussi persuadé de les attaquer dans ce cas ?
    -On n’attaque pas… on observe, pour l’instant.
    -Un de vos hommes vient d’abattre un de ces types, de sang-froid, à ce qu’il me semble.
    -Un simple accident.
    Elle se permit un petit rire nerveux. Poppy avait eu l’occasion d’accéder à l’intégralité de leurs dossiers, via ses connexions au bastion de Fort Glory. Le Justicar Cain était son supérieur direct et c’est lui qui avait validé son transfert à la demande de l’agent Jézabel Callidia des Ordos. Rico l’ignorait sans doute, ou peut-être pas, mais cela lui importait peu, mais Poppy connaissait aussi très bien la prétorienne Gaia Orlando qui était en charge de leur arrestation lors de l’affaire Reginas Ulth. Elle savait notamment que certains d’entre eux avaient la gâchette facile, à commencer par Rico, lui-même.
    -J’ai cru comprendre que ça arrivait souvent dans cette équipe, lui dit-elle.
    Il la dévisagea avec son sourire charmeur et parfaitement déroutant, bien que cela n’eut pas d’effet sur elle.
    -Et bien nous sommes deux, ma chère. N’oubliez pas que vous avez bien faillit abattre Lexxi pas plus tôt qu’il y a trois jours de cela.
    Elle secoua la tête, préférant ne rien répondre, au risque de débattre des heures avec le jeune prêtre et ainsi manquer de vigilance. Reportant son regard en contrebas, elle repéra Lek qui avait bougé de sa position et qui semblait avancer prudemment mais droit vers le centre du vaste complexe chtonien. Elle interrogea Derreck du regard, se maudissant pour leur imprudence à tous les trois.
    -Il fait quoi et où est Felton, par les neufs Saints ?
    -Il est avec lui mais on le voit presque pas, à cause de sa cape.
    -Trône, mais on ne leur a pas demandé de bouger ! S’esclaffa Rico. Il activa son microvox.
    -Felton, tu nous fais quoi ?
    -Reconnaissance, lui répondit-il dans un murmure. On a besoin de savoir ce qui se passe ici.
    -Revenez, vous allez vous faire repérer.

    Derrière eux, ils entendirent Lexxi qui venait de les rejoindre en petite foulée. A peine essoufflée, elle bascula le lourd canon sismique qu’elle portant dans son dos et activa la cellule énergétique du rayon de conversion qui se mit à bourdonner. Elle vint se positionner à côté d’eux.
    -Quelle cible ?
    Derreck lui pointa du doigt le technoprêtre connecté sur le trône situé à cinquante mètres de là.
    Rico lui fit signe d’y aller doucement.
    -Tu ne tires que sur mon ordre, compris ?
    Elle se contenta de hocher la tête et activa le système de visée de l’arme lourde afin de calibrer la portée. A cette distance, le canon pouvait éventrer une Chimère et tous ses occupants en une déflagration dévastatrice.

    Soudain, ce qu’ils craignaient venait d’arriver. Un des gardes pivota d’un coup, leva son fusil radiant en braillant une série de sons en binaire et ouvrit le feu en direction de Lek. Un autre garde vint le rejoindre et se mit à arroser à son tour. Une volée de rayons laser concentrés fusèrent tout autour de Lek qui se mit à couvert, tout en ripostant avec son Armageddon. D’une rafale bien ajustée, il faucha net un des gardes mais un des tirs le toucha au bras, bien que légèrement. Il ne put s’empêcher de lâcher un cri. L’alarme fut lancée et leurs adversaires comprirent, tel un seul homme, où était leur cible. Felton n’avait pas encore été repéré apparemment mais sans un sérieux soutien, Lek était clairement condamné.
    Rico donna l’ordre à Lexxi d’ouvrir le feu.
    Le canon sismique n’était pas une arme subtile. Il projetait un rayon crépitant et dévastateur qui transformait tout ce qu’il percutait, en une micro-déflagration d’énergie subatomique. Mais plus la distance était grande et plus l’énergie dégagée était puissante. Ce genre d’engin avait été utilisé en des temps anciens par des guildes minières pour forer des montagnes ou excaver des parois rocheuses. Les modèles militaires, parfois plus compacts mais plus rares étaient employés eux, par les unités spécialisées pour briser des murs d’enceinte lors de sièges ou faire exploser des blindés. Avec le temps et le manque de subtilité des conflits, ce type d’arme se retrouvait même au sein d’unité d’élite pour réduire à l’état de pluie sanguinolente des unités d’infanterie, véhiculées ou non.
    Lexxi assura ses appuis tandis que le faisceau de conversion jaillit de l’arme, tel un éclair déchirant le ciel. Il frappa sa cible comme la foudre, libérant une explosion à l’impact avec la puissance d’un tube-charge. Le trône fut arraché de son support et projeté en arrière avec son occupant, arrachant certains câbles au passage. Un lourd servitor qui se trouvait non loin de là, fut épargné par l’explosion. Ces jambes augmentiques renforcées par des vérins hydrauliques lui permirent de se stabiliser et encaisser le souffle sans la moindre peine.
    Rico se releva et fit signe à Poppy de le suivre.
    -Derreck et Lexxi, couvrez-nous d’ici. Poppy, avec moi. On descend les aider !
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 03/06/2022 à 19:33 Citer ce message

    Lek était désormais pris dans un tir croisé nourrit, aussi il se mit à rebrousser chemin en courant, tête baissée pour se mettre à couvert derrière un muret, malgré les balles et les tirs de laser qui fusaient tout autour de lui. Il venait de se faire toucher au bras et, l’adrénaline aidant, il était bien plus gêné, à ce moment-là par le sang qui coulait sur son avant-bras et sa main, que par la douleur. A quelques mètres de lui, Felton s’était dissimulé et ouvrait le feu, blessant légèrement un des servitors de combat mais réalisa qu’un autre heretek se dirigeait rapidement vers eux, faisait crépiter une énergie rouge inquiétante au bout de ses doigts. Il relâcha un éclair en direction de Lek qui fut frappé de plein fouet, ce qui le paralysa durant plusieurs secondes, le corps parcouru par des décharges d’énergie particulièrement douloureuses.
    Voyant la situation qui allait leur échapper, son Mastoff pointé devant elle, Poppy courut dans leur direction, profitant des ruines éboulées pour progresser en partie à couvert, bien décidée à les faire sortir de là. Selon elle, le plan de Rico risquait bien de tourner en un suicide pour son équipe. Les hereteks qui se trouvaient dans cette grotte étaient lourdement armés et bien équipés. De plus, celui qui avait été connecté à une sorte de trône déjà touché par le canon sismique de Lexxi avait l’air d’être toujours opérationnel. Un lourd servitor de combat était en train de reconnecter la machine avec ses gestes saccadés et robotiques mais parfaitement imperturbables.
    Poppy, callée contre un mur, voxa Rico en criant afin de couvrir le vacarme assourdissant des échanges de tirs qui fusaient tout autour d’elle.
    -Dites à vos hommes d’évacuer de là, je vais tâcher de les couvrir. Lexxi ? On va avoir besoin de votre puissance de feu, maintenant ! Tâchez de trouver un point faible dans la structure !
    -Praetor, vous ne voulez tout de même pas que je fasse écrouler toute la grotte ? Répondit-elle.
    -S’il le faut, pourquoi pas ? On doit juste se tirer d’ici avant.
    De son côté, Rico venait de s’approcher de leurs adversaires, usant des murets en pierre pour rester en partie dissimulé, mais voyant que la praetor avait une analyse juste de la situation qui n’avait pas l’air de tourner à leur avantage, il ne pouvait que lui donner raison. Ils allaient devoir créer une diversion sans quoi Felton et Lek étaient condamnés. Il lança une grenade fumigène au beau milieu d’une passerelle en pierre par laquelle arrivaient des clones et un lourd servitor de combat dont le bras avait été remplacé par une arme à énergie menaçante. Tandis que le nuage de fumée se propageait et leur bloquait la vue, les empêchant ainsi de prendre Lek et Felton à revers, il fila le long d’un muret et dégoupilla une grenade inferno, bien décidé à s’en servir sur un autre magos heretek tout proche.

    Depuis la corniche où ils se trouvaient en hauteur, Derreck et Lexxi cherchaient à couvrir le reste de l’équipe mais avec assez peu de succès jusque-là. La fumée, la pénombre et les nombreux couverts n’aidaient pas. De plus, des clones venaient de les repérer et commençaient à concentrer une partie de leurs tirs dans leur direction. Des balles et des tirs de laser se mirent à claquer sur les murs autour d’eux. Une rafale de plasma incendia la paroi juste à côté, lâchée par un des servitors de combat. Derreck baissa la tête pour éviter une rafale, mais Lexxi restait concentrée malgré les tirs autour d’elle, analysant la structure de la passerelle en pierre qui partait du pied de la paroi où ils se trouvaient. Cette dernière reliait une énorme structure concentrique au bout de la grotte, là où se situait l’heretek placé sur une sorte de trône sur lequel elle avait précédemment tiré. Elle fut bien tentée de le prendre de nouveau pour cible, lui où son congénère situé tout proche et aux prises avec Felton mais elle se ravisa. Un groupe de clones en armes convergeait droit vers Poppy et Rico en tirant et cette satanée passerelle lui paraissait bien instable. Elle pivota le canon de sa lourde arme énergétique, visa le centre du pont en pierre et libéra un rayon dévastateur d’énergie, avec cette satisfaction de voir toute la structure exploser puis s’effondrer dans un fracas de poussière et de roche pulvérisée qui se fracassait en cascade. Au moins trois adversaires disparurent en un instant, dont le servitor au lance-plasma.
    Tandis que l’onde choc se répercutait dans toute la grotte en grondant, Rico en avait profité pour lancer sa grenade inferno sur le magos heretek. Ce dernier prit feu mais cela ne l’arrêta pas autant. Lévitant et ignorant ses robes qui s’embrasait en une nuée de cendres rougeoyantes, il chargea Rico, faisant tirer ses armes à énergie connectées à ses mécadendrites. Il brandit une sorte de hallebarde dont la lame pulsait d’une énergie verdâtre qui semblait terrifiante. Rico chercha à reculer, évitant les tirs au moment où le magos abattit son arme et pulvérisa une partie du muret derrière lequel il s’abritait encore.
    De leur côté, Felton et Poppy étaient toujours pris dans un dangereux échange de tirs avec des clones et hereteks plutôt coriaces. Lek reprenait ses esprits et sans perdre une seconde, se remit à ouvrir le feu en rafale sur les clones avec son fusil Armageddon. Sa puissance de feu, combinée à celle de ses équipiers leur permit tout juste de reprendre le dessus, abattant les soldats clones, les uns après les autres de tirs bien ajustés en pleine tête. Un autre tir dévastateur de Lexxi permit enfin de les débarrasser de l’heretek aux éclairs rougeoyants qui prenait désormais Felton pour cible.
    Pendant ce temps, Rico était toujours aux prises avec le magos heretek visiblement furieux. Il venait une fois de plus d’échapper à ses coups mortels et sa vivacité lui permit d’atteindre les marches de pierre qui menaient à la paroi où Derreck et Lexxi étaient retranchés. Il se mit courir puis à gravir les marches quatre à quatre, espérant pouvoir mettre le plus de distance entre lui et cette abomination. Depuis la corniche, Lexxi l’aperçut. Derreck avait bien tenté de désactiver des augmentiques du magos à l’aide de ses pouvoirs mais cela n’eut aucun effet. Lexxi laissa tomber le lourd canon sismique au sol et dégoupilla une grenade antichar qu’elle jeta au pied de la paroi, juste au moment où le magos allait se mettre à la gravir. La détonation sourde lui arracha une partie de son blindage et de ses mécadendrites. Le souffle ne fut pourtant pas suffisant pour le stopper totalement, il continua sa progression, hurlant des incantations binaires inintelligibles. Elle récupéra son bolter qu’elle portait en bandoulière, arma la culasse et s’apprêta à l’accueillir au moment où Rico, à bout de souffle, venait de déboucher sur la corniche tandis que Derreck l’aider à s’y hisser.
    Lek et Poppy venaient d’abattre les derniers clones de quelques rafales. Alors que Poppy achevait les derniers survivant et rechargeait son Mastoff M4, elle et Lek virent Felton en difficulté avec un servitor de combat. Ils se précipitèrent vers lui, venant lui prêter main forte. Leurs tirs combinés et répétés, presque à bout portant, eurent finalement raison du lourd cyborg blindé qui s’affaissa sur lui-même, criblé d’impacts fumants.
    Rico se sentait presque tiré d’affaire, au moment où il sentit une pince lui enserrer la cheville et le tirer en arrière. Derreck et Lexxi ne purent rien faire alors que le magos l’attirait vers lui et le projeta dans le vide. Rico chuta en gesticulait puis s’écrasa dix mètres plus bas sur la passerelle de pierre dans un choc sourd où l’on entendit des os craquer. L’instant d’après, le magos venait de se hisser sur la corniche et ouvrit le feu d’une de ses mécadendrites qui zébra le tunnel de rayons d’énergie. Derreck eut juste le temps de se jeter de côté pour éviter les tirs mortels, ce qui laissa le temps à Lexxi de plaquer le canon de son bolter sur l’heretek. Elle tira une rafale en plein dans le torse du magos qui explosa dans la même seconde, projetant le contenu de son exosquelette en une bouillie de fluides organiques et de matières biosynthétiques. Presque coupé en deux, ses restes basculèrent dans le vide et allèrent se fracasser dans les escaliers avant de s’écraser au sol, non loin de Rico qui était toujours en vie mais visiblement à l’agonie.
    Derreck et Lexxi descendirent à leur tour afin de l’aider. Sa jambe était brisée en plusieurs endroits et la blessure n’était pas belle à voir. Le psyker utilisa aussitôt ses pouvoirs de soins sur lui, réduisant l’hémorragie et cherchant à remettre sommairement les os en place.

    Trente minutes plus tard, Rico était stabilisé et sous stimulants grâce à Derreck. Seul Lek avait aussi été blessé au bras mais sans trop de gravité. Ils s’en sortaient plutôt bien, en partie grâce à l’incroyable puissance de feu de Lexxi, aux tirs chirurgicaux de Lek mais aussi grâce aux tirs combinés et efficaces de Felton et Poppy.
    Cela leur avait laissé le temps de fouiller la grotte, récupérer quelques munitions sur les corps et s’assurer qu’il n’y avait plus d’heretek dans les parages. Rico ne pouvait plus se déplacer à cause de sa jambe, aussi demanda-t-il qu’on lui apporte au plus vite les notes sur lesquelles le magos avait travaillé. Il s’agissait d’un ensemble de schémas, de croquis mais aussi de textes traduits à partir de signes et symboles d’origines inconnus. Lek et Lexxi qui avaient quelques petites connaissances sur les artefacts et races xenos ne purent identifier l’origine des ruines où ils se trouvaient, ni en déduire quoi que ce soit, en revanche, les notes du magos semblaient déjà plus avancées.
    Alors qu’elles continuaient d’explorer la structure alentours avec Lek, Poppy et Lexxi se demandaient si elles ne devaient pas informer les autorités au plus vite, au sujet de cette découverte. Tous trois gardaient aussi un œil sur l’unique survivant, un heretek connecté au trône mécanisé que les magos avaient certainement amené avec eux.
    -Les autorités, je ne sais pas, lâcha Lek, mais notre hiérarchie, je crois que ça s’impose.
    Lexxi lui jeta un regard en coin.
    -On pourrait demander à Felton d’appeler Tsali. Il faut que nos contacts au Reliquaire voient absolument ça.
    -Le Reliquaire ? S’étonna Poppy.
    -Les Ordos, si tu préfères. Tu as rencontré Jézabel, notre cheffe, il me semble ?
    Poppy se contenta de hocher la tête.
    -Bien, on les contacte comment ? On est Trône sait où sous terre et on a laissé le comm-vox dans la voiture, en surface.
    -Bin, on va devoir remonter de toute façon, lâcha Lek.
    Poppy lança un regard grave en direction de Felton et Rico, situés à quelques mètres de là alors qu’ils s’approchaient d’eux. Ce dernier était toujours en train de se faire prodiguer des premiers soins par Derreck. Ce qui ne l’empêchait pas de commencer à analyser les documents découverts.
    -Rico va avoir besoin d’un chirurgien de toute façon. Elle lui lança un signe de la main. Rico y répondit.
    -Vous avez assuré, Rico. Vraiment.
    Il lui rendit son sourire avant de reporter son attention vers les notes du magos heretek, cherchant à se concentrer sur tout autre chose que l’état catastrophique de sa jambe.
    -Il parle de fragments de textes découverts dans les ruines et inscrits sur des feuilles d’or retrouvées dans des cristaux de quartz, commença Rico.
    -Ils disent que la datation fournie par un antiquorum indique cinquante millions d’années, s’esclaffa Felton. Merde, mais on parle de quoi, là ?
    -Va savoir… Le texte fait mention d’une race xenos supposée antérieure ou contemporaine des mythes aeldari. Trône, de quelle abomination parle-t-on ? La traduction du texte original écrit dans une langue inconnue a été réalisé grâce à une translitération en proto-aeldari, elle-même traduite en langue hrud, puis en techna-linguis.
    -Et ça dit quoi, tu arrives à lire ce charabia ?
    -Attends, il y a aussi une translitération en bas gothique avec des annotations. Voilà ce que ça dit :

    « Avant que le temps n’existe, E’atl, dernier grand mage (traduction approximative de « être qui donne vie aux énergies ») de la première génération a inscrit le Grand Plan sur ces tablettes d'or, conservée ici dans la ville-temple d’Al’aqa (notes : nom donné par ces entités xenos à l’ancienne ville de Newburg qui s’étendait peut-être sur une zone bien plus vaste). C’est lui qui avant sa prochaine réincarnation, nous a prévenu de la destruction des portes de ce monde (notes : connexions possibles avec le warp ? Avec la Toile ?) et même de l'invasion du Septentrion par les Yaam-kheh (notes : traduction possible « fléaux de métal ou êtres miroirs maléfiques ?»). Il a en outre annoncé l'apparition dans les cieux (notes : traduction plus exacte : espace, galaxie ?) de Mag'ladroth (nom d’une entité ?) ...
    (Paragraphe manquant).
    … Après la guerre, l’esprit d’E’atl a ensuite continué à voyager, caché lui aussi, dans la terre entre les mondes (notes : allégorie de son voyage vers la mort/l’au-delà ? ou vers un autre monde ?).
    (Paragraphe manquant).
    …ici que les Quatre portes s’ouvrent aux horizons et toutes marquent un élément créateur, tel que fut et tel que sera éternellement… (passage manquant). Chacune menant vers un de ses domaines célestes, mais elles resteront voilées car la Grande Roue indique un temps qui n’existe pas en des lieus qui n’existent pas. Une fois les six alignés, la Vie, le Rire, le Sang ouvriront la quatrième voie, celle qui est occultée car E’atl restera masqué jusqu’au moment où il… (passage manquant) … de la Voie lumineuse, car c’est le chemin désigné par Celui-qui-se-rie-des-dieux et que seul l’aveugle a vu, le seul qui mène au labyrinthe de (fin du texte manquant) ».

    -T’y comprends quelque chose, parce que moi, là, je suis complètement largué, souffla Felton.
    -Trône, c’est incroyable…
    -Quoi, tu as saisi quelque chose ?
    -Non…
    -Eh merde…
    -En revanche… Rico se mit à sourire avant de poursuivre, oubliant presque sa jambe et Derreck grâce aux stimms qui commençaient à altérer ses sens. En revanche… je me demande à quel point une prophétie peut être imbriquée dans une autre prophétie. Cette histoire d’aveugle à qui l’on montre le chemin, je trouve ça éminemment intéressant, dit-il tout en continuant à sourire.
    -Des élucubrations xenos, à mon avis.
    -Peut-être… Rico engloba du regard toute la structure alors que son rythme cardiaque s’accélérait et que ses pupilles se dilataient. Il avait l’impression soudaine de voir des schémas se dessiner dans son esprit, en même temps que le long des structures concentriques que formaient les ruines. Son cerveau réfléchissait alors à une vitesse prodigieuse tandis qu’il comprit ce que le magos et ses séides cherchaient à faire.
    -Le voyage dans la terre entre les mondes… C’est un portail… Les quatre portes qui marquent un élément créateur… la Vie, le Rire, le Sang…
    Fébrilement, il étala les différents schéma tracés et reproduits sur les parchemins devant lui. Ils montraient des plans de la structure de la grotte. On y voyait les cercles de pierre, ainsi que la structure circulaire concentrique qui y était connecté, celle sur laquelle était toujours placé le trône où se trouvait un heretek enchainé dessus. Pour l’instant il était neutralisé mais était toujours en vie. Rico n’avait pas voulu le tuer, préférant le livrer aux Ordos pour interrogation. Trois cercles de pierre pulsaient de trois couleurs différentes. Vert, bleu et rouge.
    -La quatrième voie, celle qui est occultée… Poursuivit-il.
    Il regarda sous leurs pieds, là où il se trouvaient et là où le magos et ses équipes creusaient juste avant qu’ils n’arrivent. La terre et la roche avaient été excavé et on pouvait deviner l’ébauche d’une structure similaire et encore partiellement enfouie dans le sol.
    -Voilà la quatrième voie… Dit-il dans un murmure. Celle qu’ils recherchaient.
    -Et ? Le questionna Felton tout en fronçant les sourcils.
    -Une fois les six alignés, la Vie, le Rire, le Sang ouvriront la quatrième voie. Il releva un regard extatique vers Felton et les autres. Les cercles concentriques portent aussi les mêmes couleurs que les trois premiers portails, le vert, le bleu, le rouge mais aussi le jaune et là, nous sommes juste au-dessus du portail jaune. Si on aligne les pierres des cercles concentriques selon le bon schéma, on ouvrira le portail !

    Le sol se mit soudain à gronder alors que l’ensemble de la structure tremblait comme sous l’effet d’un léger tremblement de terre. Des pierres tombèrent de la voute, venant s’écraser à quelques mètres d’eux. Lexxi comprit que les explosions successives qu’elle avait causées n’avaient fait que fragiliser une structure déjà ancienne et rendue précaire à force d’excavations. La grotte risquait maintenant de s’effondrer au moindre nouveau choc violent. Le grondement ne cessa pas pour autant, pourtant le trône pulsa d’une énergie crépitante alors que les cercles concentriques se remirent en mouvement, certains dans le sens des aiguilles d’une montre et les autres en sens inverse, faisait léviter une partie de leur structure qui se désolidarisa en plusieurs blocs circulaires distincts, gravitant comme par magie à quelques mètres du sol. Ils se mirent à tourner à une vitesse inouïe, impossible à suivre à l’aide de l’œil humain. L’air se chargea d’ozone ionisée et d’électricité statique alors que des sons subsoniques parcoururent la cavité, créant une étrange symphonie qui n’avait pas été composée pour être perçu par l’oreille humaine. Les vibrations étaient telles qu’elles leur faisaient vibrer les os. Ils voulurent bouger mais eurent l’impression de se mouvoir sous l’eau, englués sous une pression colossale. Du sang coula de leur nez tandis que des formes vaporeuses se matérialisaient, à la manière d’une projection holo présentant un film en accéléré. Des paysages étrangers, des étendues cosmiques, des architectures grandioses, des êtres humanoïdes aux traits inquiétants et à la peau lumineuse, occupés à bâtir psychiquement un empire sur des millions de galaxie. La vie était leur création… Leur volonté…
    Que restait-il à présent ?
    Un héritage oublié, tout au plus.
    La douleur. Le froid de la mort. Le vide. L’oubli.


    Combien de temps avait-il pu se passer ? Une heure ? Un jour ? Comment savoir lorsque toute notion de temps vous échappe au point que vous ignoriez même à quel endroit vous vous trouvez exactement ?

    Rico se redressa péniblement sur un coude et ne put s’empêcher de vomir un filet de bile. Ses vêtements et sa peau étaient encore recouverts de givre et il était pris de quelques légers spasmes. Ses cinq compagnons étaient tous là, comme lui, à même le sol, peinant encore à reprendre conscience, embrumés dans les affres de ce cauchemar.
    Où étaient-ils ? Ce lieu n’était pas la grotte. Mais une salle circulaire. Une tour, oui une tour circulaire visiblement. Large, vaste et haute. Son architecture était moderne et assurément gothique mais il ne reconnut pas l’endroit. Un escalier menait vers une porte, à l’étage supérieur. Il grimaça en bougeant, se rappelant que sa jambe gauche le faisait souffrir le martyre. Il vit alors les runes sur le sol. Les signes et symboles occultes, les pigments employés et les bougies ainsi que les câbles qui ondulaient vers six formes enchainées, placées à plusieurs mètres de là, tout autour du cercle dans lequel ils se trouvaient. Les six n’étaient plus que les ombres de ce qu’ils avaient été jadis. Entravés par des liens arcaniques au point de ne plus pouvoir se mouvoir, leur crane avait été perforé par des tiges en psycurium afin de canaliser et drainer leurs énergies psychiques vers la matrice aethérique qui servait à alimenter cette machine infernale. Rico en avait déjà vu un exemple un jour, dans un livre interdit traitant de légendes diaboliques du passé. Jadis, on appelait cela un portail de Farnov, du nom de Deynisia Farnov, la première à en avoir étudié et compris, jadis, son fonctionnement. Si l’origine même de ce type de portail était sans aucun doute d’origine xenos, son adaptation était assurément humaine. Il était précisé qu’il pouvait être alimenté et activé à l’aide de procédées ésotériques interdits et du concours bien involontaire de psykers sacrifiés sur l’autel de la science occulte.
    Rico déglutit en réalisant avec horreur que les psykers captifs, aux lèvres retroussées et aux yeux révulsés par la douleur n’étaient en rien des humains… Il se remémora les notes qu’il avait lu dans le Grimoire noir qui précisaient que Farnov avait conclu lors de ses recherches que les psykers eldars faisaient de bien meilleurs conducteurs psychiques pour alimenter ce genre de portail.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 07/06/2022 à 00:31 Citer ce message

    Les tunnels gelés qui menaient dans les profondeurs insondables, au cœur glacé même de la lune courraient sur près de mille kilomètres selon les rapports détaillés des augures. Les combats qui y avaient fait rage s’étaient prolongés sur plus de six mois. La moitié d’une année à tenter de contenir un flot incessant de démons vomis par le warp. Le Chapitre 666 n’avait fait qu’appuyer celui des Star Phantoms qui défendait Memento Mori, leur propre monastère sur la lune glacée de Jahga. En tout autre circonstance, le satellite qui orbitait dans le système Archaea aurait tout bonnement subi un Exterminatus. Mais le monde d’un Chapitre-monastère, tant qu’il n’est pas définitivement perdu, mérite que la Très Sainte Inquisition y réfléchisse à deux fois. Les inquisiteurs Dimitrov, Adarno et Sémiramis Nihila n’eurent que peu d’autres choix en vérité et contenir la horde démoniaque leur infligea de nombreuses pertes même si cela ne fut pas en vain, car Izumat avait été contenu et dans l’incapacité de sortir de son tombeau et enfin, le chapitre-monastère avait pu être sauvé par l’intervention des Ordos. Les trois inquisiteurs avaient mené une âpre défense de la lune durant de longs mois en occupant ainsi le poste de légats de l’Inquisition. Ils eurent toute prérogative sur la flotte de l’Amiral Nova Krentz en orbite, sur les troupes inquisitoriales au sol, sur les Astartes du Maitre de Chapitre Obadon Tiresias et même sur le Grand Maitre Covan Leorac de la 7ème Confrérie des Chevaliers Gris.
    Soudain, sans que l’inquisition ne comprenne, les démons avaient reflué. Ou plus exactement, le flot avait tout bonnement cessé de submerger l’astre gelé. Un début de victoire se profilait enfin, aussi le conclave dût prendre une décision.

    L’air était froid mais loin d’être aussi glaciaire qu’en surface. La température était même supportable, bien que le terme supportable soit tout à fait relatif. Ils se trouvaient au bout de ces mille kilomètres sous la surface, là où le cœur en méthane gelé de la lune avait été foré dans le feu par les démons afin de s’en échapper. Aussi lorsque Winter Argroves posa sa bottine sur le sol, en sortant du Rhino avec son escouade de Chevaliers Gris et ses agents, elle referma le col de son long manteau violine. Sa buée se cristallisa instantanément dans les lueurs des servo-luminateurs qui les accompagnaient et elle réalisa à quel point les sons résonnaient le long des parois polis tels des miroirs scintillants. Le warp avait été utilisé en ce lieu, elle pouvait encore en sentir les effluves tenaces. Les incendiaires de Tzeentch qui l’avaient foré, y avaient laissé leurs empreintes, de subtiles et délicates arabesques reproduites à l’infini sur toute la longueur du tunnel. Les symboles sculptés par les flammes, appelaient la folie. Derrière la surface lisse, à bien y regarder, on pouvait deviner des visages hurlant par centaines, par milliers même. Ce n’étaient pas des effets de lumière à cause des luminateurs ni même des motifs, mais bel et bien des âmes retenues captives et gelées dans un permafrost aethérique. Leurs yeux implorants bougeaient, tout comme leur bouche qui criait des sons totalement inaudibles. Elle ordonna à ses hommes de ne surtout pas y attarder leur regard sous peine de terminer comme ces âmes en peine.
    Armes pointées, ils firent les derniers cent mètres à pied lorsqu’elle leur ordonna de faire halte. Comme supposé, le tunnel partait d’une salle immense, bâtie des millénaires plus tôt par une magie censée contenir la sorcellerie du prince démon qui devait y être enfermé à tout jamais. Mais là encore, l’idée d’éternité était un concept tout à fait relatif. La salle était immense, faisant deux ou trois cents mètres de diamètre et autant en hauteur, le tout soutenu et parcouru de centaines de colonnes en moelle spectrale totalement délitées, comme elle pouvait s’y attendre. Le tombeau, fait de même matière avait la taille d’un Baneblade et avait été marqué de runes de protection qui se superposaient sur des bas-reliefs représentant des êtres graciles combattant des créatures infernales. Malgré cela, la plupart des sceaux avait fondu avec le temps. A moins que ce ne soit tout autre chose qui n’ait justement rien à voir avec le temps.
    -Justicar ?
    Le chef d’escouade Chevalier Gris, approcha, faisait bruisser imperceptiblement les servo-moteurs de son armure énergétique argentée. Il vint se positionner à ses côtés, mais très légèrement en retrait, posant la pointe de sa Claymore Némésis dans le sol gelé.
    -Dame Inquisitrice ? Répondit-il à travers l’ampli-vox de son heaume.
    -Restez ici avec votre escouade. Je vais aller investiguer les lieux avec mes agents, lui dit-elle dans un simple murmure.
    -Madame… mes ordres sont d’assurer votre protection.
    Elle releva son regard vers le colosse en armure et plongea son regard violet dans les optiques bleutées de son casque.
    -Les ordres, c’est moi qui les donne ici, Justicar. Protocole Tenebrae Terminus, sans discussion.
    Sans se soucier de son avis, elle fit signe aux quatre personnages qui l’accompagnaient de la suivre vers l’immense tombeau.
    Ils progressèrent prudemment et lentement car le sol avait été rendu traitre par les éboulis et les éclats de moelle spectrale qui gisaient au sol tels les os fossilisés d’un antique diablodon. Seuls leurs servo-luminateurs éclairaient les alentours de leur rai de lumière crue. Tout le reste était plongé dans la pénombre la plus totale. Asaïd, son assassin Callidus, vint se tenir à ses côtés. Elle portait une tenue moulante et furtive sous un court blouson en cuir au col en fourrure xenos zébrée noire et blanche. Cela se mariait plutôt bien avec son maquillage, réhaussé par l’éclat rouge sang de ses yeux. Ses deux pistolets à plasma sanctifiés bourdonnaient légèrement en dégageant un air ionisé bleuté de leurs évents magnétiques.
    -Demones omnes videntur ? Lui dit-elle dans son haut Gothique sans accent.
    Elle tourna son regard violine vers elle et lui effleura la joue peinte de ses doigts gantés, ce qui fit frissonner la Callidus.
    -Je ne sais pas s’ils sont tous partis, mais c’est bien la raison de notre présence ici, Sicaria Bella. Garde un œil ouvert.
    Elle s’approcha alors du tombeau monumental et interrogea son austère savant Vanus du regard. Comme à l’accoutumé, il était connecté via ses implants cérébraux et ses interfaces digitales à ses holo-projecteurs d’un vert translucide sur lesquels défilaient des flots d’informations en continue. Les affichages ainsi projetés lui coloraient le visage d’une même teinte. Les données étaient simultanément relayées en direct par ses trois servo-crânes qui volaient de façon synchrone autour de lui.
    -Niveau aethérique résiduel ? Lui demanda-t-elle.
    -Huit point quatre, Madame. Avec une rémanence Immateria en perpétuelle fluctuation.
    Elle effectua une petite moue désapprobatrice en tapotant ses lèvres de son index. Elle savait que ce genre de situation rendait toujours Absolom nerveux.
    -En augmentation ?
    -Je dirais non…
    -Mais ?
    Il releva son regard caché derrière ses lunettes, n’osant croiser le regard perturbant de l’inquisitrice.
    -Même si les indices Malifica restent dans les constantes acceptables, je ne saurais que vous conseiller la plus grande prudence, Dame Inquisitrice.
    -Continue d’enregistrer les flux et n’arrête pas de les transmettre à Requiem. Je veux qu’il envoie ces paquets de données sur Surngraad au plus vite.
    -La transmission vers votre vaisseau est en cours, Madame.
    Elle le laissa à ses analyses et effectua quelques pas en direction de la structure, prenant bien soin de ne rien toucher. Elle vint rejoindre les deux autres membres de sa suite. Conrad Altimore et celle qu’elle ne préférait pas nommer, toujours dissimulée sous un long manteau à capuche. Elle flottait plus qu’elle ne marchait. Conrad la tenait en laisse, au bout d’une chaine en argent sanctifié, comme il aurait promené un simple canide.
    Depuis sa dernière résurrection, Conrad avait commencé à changer. Elle s’était finalement lassée de chercher à l’éliminer. Le savoir désormais à ses côtés était bien plus intéressant. Dans son ancienne vie, il avait été un psyker plutôt médiocre malgré un potentiel hors du commun. Ce potentiel n’avait finalement été révélé que le jour où il avait pactisé véritablement avec Baalzabeth. Quelle ironie en fin de compte. Cet acte avait damné son âme à jamais alors qu’il s’était toujours tenu sur le bord du précipice, même avant cela. Cette liaison privilégiée, presque intime avec la démone, avait considérablement modifié son destin et l’empêchait, pour l’heure, de mourir, tout simplement. Mais cela lui avait retiré aussi une partie de son humanité puisque son âme ne lui appartenait plus désormais. Conrad avait toujours été un être sarcastique, voire cynique et désabusé mais cela avait fini par s’accentuer avec le temps.
    Un jour, elle lui avait demandé s’il regrettait et s’il conclurait de nouveau un tel pacte avec sa démone, si c’était à refaire. Sans réfléchir, il lui assura qu’il le referait mille fois et ne regrettait absolument pas ce choix. Conrad était devenu un être tourmenté, résolument dépendant au contrôle qu’elle exerçait sur lui, physiquement et mentalement.
    Winter le trouvait bien étrange mais en réalité, cette situation malsaine l’intéressait particulièrement. Les rapports impurs qu’il entretenait avec sa démone permettaient de la garder sous un certain contrôle. Au début, elle avait voulu s’en débarrasser, il est vrai. Elle avait vraiment souhaité la détruire, la bannir vers son plan d’existence et ne plus en entendre parler, mais force était de constater que la démone s’était montrée fort habile et des plus persuasives pour prolonger son existence hors de l’aether. C’était le propre des possédés, ils avaient beau détester être retenu captifs, ils ne pouvaient s’empêcher de savourer le pouvoir d’attraction qu’ils exerçaient. Ils étaient manipulateurs, dangereux et pernicieux, sachant jouer plusieurs coups d’avance avec les mortels. A la différence que Winter n’était justement pas une mortelle. Elle ne se laissa pas abuser pour autant mais préféra établir un accord entre elles.
    Ses connaissances insondables, hermétiques s’étaient avérés éminemment utiles face à des menaces bien plus grandes encore. Mais avec le temps, Winter avait fini par penser que la faiblesse de Baalzabeth était cette curiosité impure, ce frisson exotique que lui octroyait le contact des mortels. Jouer avec eux lui procurait un plaisir infini et pour cela, la Gardienne des Secrets était prête à partager parfois une étincelle de son savoir.
    Et puis Baalzabeth enfantait de temps en temps de bien curieux rejetons aux propriétés étonnantes. Winter devait bien avouer qu’elle appréciait fortement de pouvoir en disposer comme bon lui semblait pour ses recherches approfondies sur la nature même du warp.

    Winter vint se tenir à côté de Conrad. Baalzabeth flottait en silence, à ses côtés.
    -Un avis, Monsieur Altimore ?
    Il effectua une petite moue avant de répondre, comme si quelque chose le contrariait. Ses pouvoirs de télépathie et de divination avaient toujours été incroyables, bien que très souvent sous-exploités par le passé. Ce qui n’était plus le cas à présent. Le warp brûlait dans son regard, de façon continue.
    -Quelque chose me chiffonne.
    -C’est un bon début. Etonnez-moi.
    -Eh bien… Je dirais que son essence était là, il y a encore peu mais à présent, est-il encore là… je n’en suis plus si sûr. Pourtant son éveil aurait été ressenti…
    Elle se contenta de hocher la tête, elle était parvenue à cette même conclusion. Cela était des plus déroutant en réalité. Etaient-ils passé à côté de quelque chose ? Comment était-ce possible, au point que ni elle, ni les Chevalier Gris n’avaient rien ressenti ?
    Elle finit par venir se tenir devant la silhouette encapuchonnée.
    -Parle. Dis-moi ce qui s’est passé ici.
    De sous la capuche, une langue sinueuse et serpentine sortit de l’ombre en sifflant, comme cherchant à attraper quelque chose devant elle. Baalzabeth abaissa sa capuche avec une lenteur toute calculée, de ses mains fines et à la peau couleur de perle et aux ongles d’argent. Son visage angélique apparut mais préféra rester dans l’ombre, par pur réflexe. Son large sourire carnassier dévoila une rangée de dents blanches aux petites canines pointues. Seul l’éclat brûlant de ses yeux roses scintillait dans le noir, laissant se deviner sa longue chevelure sombre qui ondulait telle celle d’une gorgone.
    -I….zuuuu…. maaattt…
    -Cesse de prononcer ce nom et parle ! Dit-elle en la foudroyant du regard.
    La démone se mit à onduler, comme bercée par une houle. Elle lui rendit un sifflement.
    -Tu perds ton temps ici, Winter et tu le sais !
    -Où est-il ? Cria-t-elle.
    Baalzabeth releva son visage, faisant mine de l’ignorer. Elle laissa passer quelques secondes avant de replonger son regard vers l’inquisitrice. Elle se mit alors à pouffer de rire, comme une jeune enfant.
    -Tous… Vous perdez tous votre temps !
    Argroves la saisit à la gorge, d’une main et la força à se baisser devant elle. Le contact de sa main sur la peau de la démone émit un sifflement alors que de la fumée commençait à s’en échapper. Baalzabeth ne cessait pourtant de sourire même si elle savait que cette simple attaque risquait d’endommager son corps physique.
    -Ne joue pas à ça avec moi, espère de garce ! Lâcha l’inquisitrice. Dis-moi ce que tu nous caches !
    -Je ne cache rien, Winter… Mais je sais…
    -Tu sais ? Tu sais quoi ? Parle !
    -Il n’a jamais été ici, lui dit-elle dans un simple murmure.
    L’inquisitrice la relâcha. La démone s’affaissa au sol, prise d’une quinte de toux ou peut-être d’une crise de fou-rire.
    -Que dis-tu, maudite ? Comment cela, jamais ici ? Et tous ces démons ? Cette guerre qui dure depuis des mois ? Elle l’attrapa et la força à se relever sous le regard médusé de Conrad.
    Baalzabeth se redressa comme une vouivre ondulant tout contre elle. Elle vint coller son visage séducteur tout près de celui de l’inquisitrice, humant son odeur, comme un prédateur sentirait sa proie. Sa voie, suave et chargée de phéromones n’était qu’un simple souffle. A l’exception que les sortilèges de la démone n’avaient aucun effet sur l’inquisitrice. Baalzabeth le savait pertinemment mais elle adorait jouer avec le feu.
    -Il n’est plus ici depuis bien longtemps, Winter… Il s’est joué de vous… Comme toujours… N’avais-tu pas deviné son petit jeu ? Ne confonds pas l’Architecte du destin avec cet abruti de Kharn Ozgul.
    -Sauf que moi, je ne joue pas et je commence à me lasser sérieusement de tes égarements. Maintenant tu vas me dire où il est !
    Baalzabeth recula son visage et afficha un petit sourire.
    -Il va y avoir une condition à cela, Winter. Et tu le sais…

    Le sous-secteur Endymion était en proie à une guerre d’usure qui avait vu de nombreuses factions chercher à s’attribuer de nouveaux territoires. Les T’aus avaient bien réalisé quelques incursions téméraires et des hordes orks en avait profité, comme les opportunistes drukhari qui continuaient de piller certains mondes reculés. Mais pour couronner le tout, les forces du Chaos venaient de jeter une nouvelle tête de pont sur certains systèmes, actuellement âprement défendus par les troupes de l’Imperium restant dans la région. Assailli de toute part, l’Imperium ne comptait nul allié. Ni ici, ni ailleurs.
    C’est pourtant au cœur de ce champ de bataille galactique que le Thanatos Crucifère avait fait route depuis le système Archaea, à plus de trois-cent-cinquante années-lumière de là et près de quarante jours de voyage par le warp. Selon les rumeurs, c’est ici que la Sainte se serait rendue avec sa croisade. C’est ici qu’elle mènerait bataille, dans cette région perdue et désolée de l’Imperium parce que des mondes sanctuaires comme Piety ou Sacristan le méritaient.
    L’inquisiteur Karl Anders avait décidé, pour des raisons personnelles de retourner sur Endymion, des années après son dernier passage. Cela lui faisait un point commun avec Mia. C’est là qu’ils y avaient rencontré Tessa et Thôtmès, d’ailleurs. Cela devait bien remonter à cinq ou six ans désormais. A cette époque, ce n’était qu’un agent de l’Inquisitrice d’Angelis et ils étaient en guerre contre des hybrides genestealers. Que diable allaient-ils retrouver de ce monde, pris dans une guerre ouverte où le champ de bataille s’étalait sur plusieurs systèmes ? Selon les derniers rapports, il n’y avait pas d’autres inquisiteurs connus dans les parages, aussi, allait-il devoir établir, avec ses agents, une nature de la menace, tout comme localiser la sainte et son armée.

    Quelques petites unités de troupes de choc aéroportées avaient été déployé de nuit, au sol afin d’effectuer des reconnaissances à proximité de points névralgiques comme certaines villes.
    Le lieutenant Venkman et ses cinq hommes avaient opéré un repli tactique après une prise de renseignements aux abords d’une bourgade à quelques kilomètres de Récompense, la capitale alors que les Maelstrom Dogs opéraient dans la région en appui d’unités Red Corsairs et sans doute d’une autre légion renégate alliés à des orks turbulents. Les T’aus eux, avaient été cantonné aux régions nord où ils possédaient quelques enclaves qu’il ne fallait pas négliger, à cause des moyens lourds dont ils disposaient. Venkman et ses hommes avaient été briefé pas des agents des Ordos plus aguerris sur la nature des menaces, même si eux aussi faisaient désormais des troupes inquisitoriales.
    Ils se trouvaient sur leur zone d’évacuation où une Valkyrie viendrait les exfiltrer d’ici moins de quatre minutes afin de les ramener vers le Thanatos Crucifère.
    Alors qu’ils attendaient, immobiles, dissimulés dans les fourrées, ils sentirent soudain une surpression accompagnée d’électricité statique. Comme un seul homme, ils pointèrent leur fusil radiant mais une fraction de seconde trop tard. L’archonte qui venait de se matérialiser avait employé sur eux, sa sorcellerie qui entravait leurs mouvements. Ils étaient comme englués, pris dans une toile invisible. Les cinq autres aeldari qui venaient de se matérialiser à ses côtés, désactivèrent leur champ holographique, dévoilant leurs armures saillantes, noires et crème. Tous portaient une armure intégrale et un arsenal xenos disparate, mêlant des armes à shuriken ou à fusion aeldari et d’autres, employant de l’antimatière, clairement d’origine drukhari. Au moins deux d’entre eux étaient des rangers, reconnaissables à leurs longs fusils de précision et à leur cape caméléoline et au moins deux d’entre eux avaient dû être des drukhari ou des arlequins, à cause de leur casque cornu et grimaçant. L’archonte effectua un signe de la main et ils baissèrent leurs armes sans pour autant baisser leur vigilance. Elle s’approcha du lieutenant et s’accroupit, sa longue lame sorcière accrochée dans son dos. Elle vint se mettre à la hauteur de son visage et enleva son casque qu’elle plaça sous son bras, ses cheveux couleurs or étaient ramenés en une queue de cheval haute et ses yeux insondables variaient d’un vert doré en passant par le turquoise. Malgré les traits amers et fins de son visage eldar, il était difficile de déceler la moindre intension dans son regard félin. Elle s’exprima dans un bas gothique chantant mais impeccable.
    -Je suis Weena Lan’enad, esdain des Ynnari. Tu vas nous mener à ton inquisiteur, humain.
    Le lieutenant serra les dents et fit certains efforts pour lui répondre sans lui cracher au visage.
    -Et pourquoi… Ferais-je cela, raclure xenos ?
    -Dis-lui juste que nous avons des informations cruciales sur le cube. Et dis-lui que c’est urgent, il comprendra.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 10/06/2022 à 23:37 Citer ce message

    Tandis qu’ils reprenaient tous leurs esprits, Rico semblait fasciné par les silhouettes enchainées et entravées qui étaient connectées au portail de Farnov. Il s’approcha de l’une d’elles et observa son visage xenos avec attention. Pendant ce temps, Lek avait gravi les escaliers, son canon de poing à silencieux à la main, suivi par Lexxi armée du fusil Armageddon. Les autres cherchaient à comprendre où avaient-ils bien pu atterrir, inspectant la vaste salle circulaire à la recherche du moindre indice.
    -Ne devrions-nous pas en libérer un ? Ou au moins en débrancher un ? Leur demanda Rico qui s’était approché de l’un d’eux, fasciné.
    Les autres se lancèrent un regard surpris.
    -Et risquer de tout faire péter ? Sans moi. Rétorqua Lexxi.
    -Lexxi a raison. On est, Trône sait où et c’est peut-être même notre seule porte de sortie, répondit Derreck.
    -Tu es inconscient ou quoi ? On parle de xenos, là ! Lâcha nerveusement Felton vers Rico, les yeux exorbités, toujours sous le choc de ce qui venait de se produire. Il était encore tremblant et semblait se gratter les bras.
    -Oui, et ? Je suis sûr qu’ils pourraient nous apprendre quel est cet endroit et ce qu’ils font ici.
    Poppy eut un rire désapprobateur, à son tour.
    -Libérer des xenos ? Vous n’êtes pas sérieux ? Vous faites un bien étrange prêtre, vous.
    Rico se redressa et lui renvoya un large sourire tout en levant les mains en signe d’apaisement.
    -Je me suis peut-être mal exprimé. Loin de moi l’idée de les libérer. Je comptais juste en interroger un.
    -Le Credo nous dit « ne parle pas au xenos, n’écoute pas le xenos ». Ils ne sont que duplicité et mensonge, l’avez-vous déjà oublié ? Lâcha la praetor, tout en fronçant les sourcils.
    -Certes… Mais vu ce qu’ils semblent subir en ce moment, je doute fort qu’ils soient là volontairement.
    Felton vint se tenir devant lui, cherchant à s’interposer entre Rico et les xenos.
    -Et qu’en sais-tu, toi après tout ? Qui te dit qu’ils n’apprécient pas ça ? Tu connais quoi de leur mode de vie dépravé à ces saloperies ?
    Lek coupa court à leur débat tandis qu’il était en haut des escaliers et leur signifia de se taire, il venait d’ouvrir la porte discrètement et leur fit signe de les rejoindre. Ce qu’ils firent. Derreck aida Rico à se déplacer, à cause de sa jambe brisée.
    Tandis qu’ils montaient à leur tour, Lek en profita pour se faufiler dans le couloir, suivi par Lexxi. Des lumiglobes diffusaient une lumière douce et la décoration indiquait un style impérial classique. Une lucarne donnait sur l’extérieur et apparemment il faisait nuit. Un long couloir s’étendait devant eux et une porte donnait vers leur droite. Il écouta sans un bruit et identifia une musique jouée un peu plus loin dans le bâtiment, ainsi que des éclats de voix qui venaient de devant ainsi que sur la droite, là aussi. Ils étaient dans une sorte de salon au bout d’un corridor.
    Les autres vinrent les rejoindre et ils se dissimulèrent comme ils le purent afin de faire le point.
    -On cherche quoi ? Leur demanda Lek, à voix basse.
    -Un moyen de sortir d’ici, lui répondit Rico sur le même ton.
    -On ne sait même pas où on est, rétorqua Lexxi.
    -Il y a du monde, par-là, indiqua Lek en leur désignant une porte sur leur droite.
    -Il faudrait que l’on sache à qui nous avons affaire avant de prendre une décision, lâcha Rico.
    -L’hérésie flagrante du portail n’est pas un indice suffisant, selon vous ? Répondit Poppy.
    Derreck jeta un coup d’œil par la lucarne et l’ouvrit. Il fit signe à ses compagnons.
    -Nous sommes en mer…
    -Comment ça ? S’étonna Rico.
    -On bouge. On est sur un… une sorte de…
    -Un bateau ?
    -Je n’en sais rien mais je pense pouvoir sortir et aller jeter un coup d’œil.
    Il passa par la fenêtre et usant de ses pouvoirs, parvint à escalader la paroi du bâtiment. Au bout d’une minute, il revint et repassa par le même chemin, rejoignant le reste de l’équipe.
    -Alors ? Lui demanda Rico.
    -On est en pleine mer, de nuit et sur une sorte de palais flottant. Le truc doit faire des centaines de mètres de long et y a des bâtiments partout dessus. Ils ont même des hangars à bateaux et une plateforme d’atterrissage pour navettes.
    -Il y a des navettes ? S’empressa de répondre Rico.
    -Oui, j’en ai vu une vers la poupe.
    -Parfait, on a notre porte de sortie !
    -Et l’un de vous sait-il piloter ? Parce que ce n’est pas mon cas, ajouta Poppy.
    Rico effectua une grimace, se rappelant soudain que leur seule pilote dans l’équipe était Lorne.
    -C’est quoi ce palais sur la mer ? On est où là ? Leur dit Lexxi.
    -Tu n’as pas vu une côte ou un port ? Demanda Rico à Derreck.
    -Non, rien que la mer, à perte de vue.
    -On peut être n’importe où au large, en fait.
    -Et rien ne prouve qu’on soit toujours sur Archaea, dit Poppy.
    -Bon, trouvons autre chose, dans ce cas, on doit sortir de là, de toute façon, lâcha Lexxi.
    Rico leur désigna la porte menant vers la droite du bâtiment.
    -Et si on tentait de voir à qui nous avons affaire ?
    -C’est risqué, vu ce qu’on a vu en bas, je ne m’attends pas à de simples citoyens, lui dit Poppy.
    -Bin si c’est des hostiles, on va vite les calmer, ajouta Lek en désignant son Carnodon. Rico et Lexxi acquiescèrent.
    -Non mais vous êtes pas bien ? On va pas commencer à tirer partout, sous prétexte qu’on ne sait pas où on est ? S’esclaffa Felton.
    -Non, mais s’ils se montrent agressifs, on a de quoi les accueillir.
    Felton était totalement sidéré. La situation n’était déjà pas à leur avantage, d’autant plus qu’ils venaient d’être téléporté, le warp sait où, ce qui le stressait au plus haut point et maintenant Rico et les autres voulaient encore jouer les pistoleros avant de chercher à comprendre.
    Poppy vint le prendre à part, voyant son état de nervosité et entreprit de faire en sorte qu’il se ressaisisse, même s’il ne pouvait lui donner tort sur la prudence dont ils devaient faire preuve.
    -Je vais juste m’approcher de la porte, chuchota Lek, puis je tâcherai de l’ouvrir pour voir qui est dedans. De ce que j’ai entendu, ils sont trois ou quatre et ils ont tout l’air de passer quelqu’un à tabac.
    -Ah, bravo… et vous pensez qu’on va aller parler avec ces gens-là, tranquillement, lâcha Felton, « Désolés, messieurs, dames, on passe juste dans le coin… Auriez-vous un pilote pour votre navette ? On doit filer d’ici ? ».
    -Bien sûr que non, mais au moins on saura peut-être où on est, ajouta Rico.
    -Moi je dis qu’on est déjà dans un nid d’emmerdes, là… Si en plus, on en rajoute…
    Lek retira une grenade de sa veste et leur désigna. Il s’agissait d’une de celles ramassées précédemment dans la grotte sur certains gardes. L’arme était une sphère métallique de quelques centimètres de diamètre.
    -C’est une grenade incapacitante Nova. J’ouvre un peu la porte, je leur balance et on sera fixé, leur dit-il avec un large sourire.
    Rico et les autres approuvèrent, à l’exception de Felton. Poppy resta réservée mais faute de mieux, elle se rangea de l’avis de Lek.
    Il se positionnèrent dans une petite antichambre qui donnait vers la porte en question, armes pointées. Lek ouvrit très légèrement la porte puis dégoupilla sa grenade, s’apprêtant à la lancer. Le faible entrebâillement était tel qu’il ne voyait rien de ce qui se passait à l’intérieur. Au même moment, les voix depuis la pièce cessèrent. L’une d’elle, masculine et grave aux accents inconnus interpela d’autres personnes.
    -J’avais dis de laisser cette porte fermée !
    -Elle était fermée, répondit une voix féminine, à l’accent tranchant.
    Ils entendirent des bruits de pas venant vers eux puis qui s’arrêtèrent lorsqu’une troisième voix, plus androgyne retentit.
    -Attends… Qui est là ? Entrez donc.
    Les compagnons de Lek se figèrent. Il ouvrit légèrement la porte et lança sa grenade, la laissant rouler sur le sol carrelé et la vit, avec horreur, tomber par la grille d’un tout-à-l’égout. Elle détonna dans les conduits, ce qui produisit un bang sonore et un flash de lumière totalement étouffés pour les canalisations. Lek ouvrit la porte en grand, brandissant son canon de poing. Les trois individus avaient cependant vu la grenade et avaient saisis que quelque chose ne tournait pas rond. Vifs comme l’éclair, ils venaient de dégainer des pistolets laser courbés, aux lignes élégantes et plaqués de métaux dorés, sertis de gemmes colorées. De leur autre main, ils firent jaillir des lames courbes énergétiques. Leur apparence désormais ne laissaient plus de place au doute. Leur corps élancés et athlétique à la peau huilée et légèrement teintée de pourpre ou de bleu pastel, leurs vêtements légers, transparents, amples et chatoyants, leurs bijoux et accessoires baroques ressemblaient à ceux de la noblesse impériale qu’avait côtoyé Rico durant ses jeunes années à la cour des Milagria sur Eshunna.
    A la différence que ceux-ci arboraient en plus, quelques légères mutations, cornes recourbées, yeux de couleurs vives, pointes osseuses, longues langues serpentines, qui les désignaient comme des mutants. Leur beauté malsaine n’était qu’un leurre perfide destiné à tromper les sens. Les symboles, électrotatouages et amulettes qu’ils affichaient fièrement n’étaient que pure blasphème envers le Credo qu’ils vomissaient. Un homme nu et ensanglanté, leur victime visiblement, était encore entravé et ligoté sur une croix sur l’un des murs, signe de leur évidente dépravation. Ils étaient dans une salle de torture, un donjon décoré de chaines, de crochets et de tout un éventail d’instruments plus pervers les uns que les autres.
    Leurs sourires cruels, aux dents avides et leurs pupilles dilatés indiquaient qu’ils étaient sous l’emprise d’une substance psychotrope. Extatiques, ils ouvrirent le feu par pur plaisir, tout en poussant de petits cris, forçant Lek et ses compagnons à se mettre à couvert sous les tirs de laser qui criblèrent le chambranle de la porte. Lek riposta et plaça un tir bien ciblé qui toucha l’une des mutantes à la tempe, la faisant pivoter mais sans pour autant l’arrêter. Son visage fut aspergé de son propre sang alors qu’elle poussa un cri de folle, entre rage et plaisir, léchant son visage à l’aide de sa langue reptilienne. Pourtant Lexxi ne lui laissa pas le temps de s’extasier devant sa blessure. Elle ouvrit le feu en rafale, avec son fusil Armageddon à silencieux, presqu’à bout portant. Les balles tueuses la criblèrent et traversèrent la jeune femme comme une poupée de chiffons, dont le corps désarticulé fut projeté en arrière dans la salle. Des filets de sang s’échappaient de chaque impact reçu. Elle était très certainement morte avant même d’avoir touché le sol. Poppy en profita pour demander à ses compagnons de la couvrir, tandis qu’elle dégainait sa matraque à décharge et chargea l’homme puissamment bâtit, à la peau bleuté et affichant des cornes de taurox. Sa lame énergétique en main crépita tandis qu’il para le coup de Poppy sans le moindre effort. L’autre fille chargea à son tour en hurlant de rage et chercha à décapiter Lexxi mais elle ne fit que planter sa lame énergétique dans le montant de la porte. Elle poussa un cri tandis que Lek ouvrit le feu sur elle à bout portant et que Derreck lui asséna un coup de l’épée transsonique qu’il avait ramassé dans la grotte juste avant. La fille tomba en arrière, en recrachant son sang. Cela avait dégagé la voie pour Lexxi qui vint soutenir Poppy en corps à corps et ainsi attirer l’attention du mutant sur elle. Cela fonctionna car Poppy parvint enfin à lui asséner un coup de matraque électrifié, ce qui le sonna net. Il s’écroula inanimé et Poppy leur indiqua de les achever, soudain prise par un sentiment de dégout face à des cultistes des Sombres Puissances, à ce point marqués dans leurs chairs.

    Ils avaient eu de la chance, il n’y avait eu que trois adversaires, mais leurs armes auraient pu sérieusement les blesser, voire pire. Lek essaya de ramasser une des lames mais se ravisa en voyant les runes qui les marquaient. Il préféra ne pas y toucher et averti ses équipiers. Certains d’entre eux avaient tenté de ranimer le captif toujours ligoté mais ce dernier venait de succomber à ses blessures. Ils ne purent en apprendre plus, d’autant que les maigres indices dans la salle de torture ne leur fournirent aucune indication utile. Ils laissèrent les corps en place, ressortirent de là et décidèrent de remonter le couloir à la recherche d’une autre sortie. Plusieurs voies semblaient mener vers des salles aux portes closes où pourtant des bruits, des voix et de la musique étaient clairement audibles. Leur situation était clairement précaire et des plus risquées. Ils étaient sur un navire, en pleine mer, au beau milieu de nulle part, avec un équipage composé sans doute que de fanatiques dépravés et aucune certitude quant à la possibilité de sortir d’une telle situation.
    Lek leur signifia des sons venant de certains couloirs donnant vers des salles closes. Rico identifia la musique jouée comme étant une parodie de plusieurs morceaux classiques impériaux mais fortement altérés et mélangés afin de créer une cacophonie épouvantable. Derreck leur confirma que les sonorités avaient même un écho dans le warp et risquaient clairement d’affecter leur santé mentale s’ils restaient à proximité à l’écouter. Ils préférèrent décamper le plus vite possible.
    Lek poursuivit son chemin vers le bout du couloir, profitant que les cultistes paraissaient occupés et perdus dans leurs débauches. Il trouva un escalier menant vers les étages et décida de les gravir, suivi par Lexxi. Le reste du groupe était juste derrière, à quelques mètres. Parvenu à l’étage, Lek poursuivi son chemin le long d’un autre couloir, trouvant le même genre de configuration. Ici aussi, on pouvait entendre que du monde se trouvait derrière les portes closes depuis les couloirs. Une orgie s’étalait ainsi sur de nombreuses pièces. La situation commençait à devenir de plus en plus tendue. Lek et Lexxi se positionnèrent dans l’angle d’un couloir et observèrent les alentours. Lek voxa à voix basse le reste de leur équipe qui montaient les escaliers pour les rejoindre.
    -On fait quoi à présent ? Il y a du monde dans toutes les pièces.
    -Vous voyez quoi de particulier en dehors des portes ? Des signes particuliers ? Des indications ?
    Lek réfléchit et observa autour de lui, avec l’aide de Lexxi.
    -On voit des numéros sur certaines portes. Mais c’est tout.
    -Quel genre de numéros ?
    -Du genre 21, 22…
    -Attendez un instant... Tu vois le numéro 17 ?
    -Non, pourquoi ?
    -Trône… La vision d’Ezek… Il nous a dit de suivre des couloirs jusqu’au numéro 17. La femme au cube…
    -Et de ne surtout pas entrer dans les chambres, compléta Felton, qui voyait clairement où Rico voulait en venir.
    Rico se calla contre un mur, prenant un instant pour souffler et digérer l’intuition qu’il venait d’avoir.
    -Messieurs, dit-il dans un souffle. Nous sommes très certainement dans l’antre de Jocindyr d’Andarion…
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  • Illuminati
    Illuminati

    le 18/06/2022 à 21:59 Citer ce message

    Ils se trouvaient désormais dans un corridor qui donnait sur plusieurs portes fermées. Depuis le couloir derrière eux, toujours plongé dans une lumière tamisée, ils pouvaient entendre les bruits des occupants des lieux. Un mélange de cris indéfinissables et la cacophonie d’une mélodie torturée. Une chance pour eux, cela couvrait totalement leurs propres bruits, tant que personne ne sortait de la moindre pièce. Ils venaient de faire un rapide point de situation avec Rico. Ils ne savaient toujours pas où ils se trouvaient exactement. Sur un palais flottant au beau milieu de l’océan et s’ils en croyaient la vision d’Ezek, c’était sans doute ici même que se trouvaient l’archi-hérétique Jocyndir d’Andarion et son cube xenos recherché par les ordos et au moins par un de ces satanés aeldari. Cela laissait encore planer trop d’inconnues. Notamment comme sortir d’un tel guêpier. Derreck avait bien noté, en passant par une des lucarnes un peu plus tôt, qu’une navette et des bateaux de sauvetages se trouvaient à bord. Malheureusement, aucun d’entre eux, au sein de l’équipe ne savait les piloter.

    Lek avait cependant noté la remarque de Rico à propos des numéros des pièces et était à présent à la recherche de la chambre numéro 17. Lui, Lexxi et Poppy cherchaient un moyen d’y accéder mais ne trouvèrent que les 18, 19 et celles au-delà.
    -Ce qui veut dire que la chambre 17 est très certainement derrière une de ces pièces, lâcha Lek dans un murmure.
    Tandis que Lexxi écoutait ce qui se passait derrière ces portes et que les autres couvraient le couloir, Poppy attira leur attention à tous en levant la main et en leur signalant la porte située juste devant eux.
    -Du mouvement, souffla-t-elle. Ils sont armés, je les entends.
    Rico lança leur dernière grenade Nova à Lex qui l’attrapa au vol et se tint prêt à activer l’arme incapacitante en la dégoupillant. Il fit signe à tout le monde de se tenir paré. Ils se plaquèrent le long des parois et pointèrent leurs armes. Lek entrebâilla légèrement la porte en question et laissa rouler la grenade au sol vers la pièce. Mais au même moment, la porte vola en éclats avec lui et Poppy qui furent projetés au sol. L’onde de choc d’une arme sonique leur coupa littéralement le souffle et les sonna au point que leurs oreilles sifflèrent et que leur vue devint floue. A terre et peinant à reprendre ses esprits, Lek avait du sang qui lui coulait de la bouche. Il serra les dents et sentit qu’il avait surement une ou deux côtes fêlées.
    Les autres eurent le temps de voir des silhouettes armées à l’intérieur qui ouvrirent le feu au moment où la grenade nova détona dans un flash aveuglant. Leurs tirs, dont une volée de laser et plasma, faillirent bien toucher Derreck qui venait de se protéger à l’aide d’un de ses pouvoirs qui le rendait presque invisible. Il riposta avec son pistolet mitrailleur dont la rafale toucha un des tireurs en pleine tête, faisant gicler une bruine de sang alentours. L’homme au fusil laser bascula à la renverse. Lek ouvrit le feu, presque par pur réflexe mais manqua sa cible. Les autres ouvrirent le feu et Lexxi blessa la femme qui portait l’arme sonique, l’envoyant au sol. Poppy qui luttait pour reprendre ses esprits, se releva en titubant, dégaina sa matraque à décharge et entra en trombe dans la pièce, profitant que les tireurs étaient encore aveuglés par les effets du flash de la grenade nova. Elle chargea la fille au fusil à plasma et coiffée d’une crête d’un rose vif et lui asséna un coup à décharge, l’assommant net.
    Le reste de l’équipe l’avait suivi et ils achevèrent les blessés rapidement. C’est alors qu’une des portes s’ouvrit en qu’en sortit une jeune femme vêtue d’une longue robe colorée qui chercha à fuir discrètement vers le couloir mais Lexxi l’aperçut. Aussitôt plusieurs d’entre eux la prirent en chasse car si elle parvenait à donner l’alerte, c’en serait fini pour eux, d’autant plus qu’elle était accompagné d’un servo-crâne. Poppy parvint enfin à la rattraper et à la frapper avec sa matraque à décharge. Derreck vint la rejoindre et préféra l’achever là aussi, avec son épée transsonique. Sur le moment, le servo-crâne donna l’impression qu’il allait faire quelque chose et tous deux se dirent qu’ils allaient devoir l’attraper. Pourtant ce dernier sembla changer d’apparence, l’espace d’un instant. Ils eurent l’impression qu’il venait de se métamorphoser en une sorte d’oiseau de nuit, comme une chouette. Puis, il disparut comme ferait un ballon qui éclate, projetant une sorte de brume multicolore et scintillante qui s’évapora aussitôt. Poppy resta médusée par cette étrange apparition. Derreck qui avait ressentit l’aura démoniaque du volatile, indiqua à la praetor de reculer de cet endroit, par pure précaution. La femme au sol, avait été une astropathe, il pouvait le voir à son ancienne marque d’assermentation recouverte de la rune d’une des pires Puissances de la Ruine.
    Il traina le corps depuis le couloir, malgré la trainée de sang et l’ajouta aux trois autres cadavres entassés dans l’antichambre.

    Cela avait laissé le temps à Lek et Poppy de faire sauter le système de sécurité de la porte qui menait à la salle 17, une tour ronde, comme l’avait annoncé Ezek lors de sa vision à l’hôtel d’Overpass. Ils finirent par l’ouvrir au bout de quelques instants et Lek réitéra la même tactique en lançant une grenade incapacitante dans la salle circulaire. Ils eurent le temps de voir deux servo-crânes menaçant qui pointaient les viseurs laser de leurs armes, mais Derreck et Lek ne leur laissèrent aucunement le temps d’agir et les détruisirent. Il n’y avait pas d’autres occupants dans la pièce .
    Ils se trouvaient dans une sorte de salle forte improvisée dans laquelle avait été entreposé à la hâte des bijoux, de l’argent et des objets de valeur. Rico leur demanda de prendre tout ce qu’ils pouvaient. Lek trouva une épée tronçonneuse de très belle facture, tandis que Rico trouva une exceptionnelle robe en noctesoie, cette matière scintillante et irisée dont la couleur change de façon tout à fait sidérante au point d’inquiéter les psykers. Enfin, ils virent le cube. Un bloc noir d’une dizaine de centimètres de côté, parcouru de runes d’un vert luminescent et maintenu dans une sorte de champ de stase.
    -Le cube dont parlait Ezek, lâcha Rico. Il faut qu’on le récupère !
    Alors que Lek, aidé de Poppy et Felton trouvèrent un moyen de couper le champ de stase, ils fourrèrent le cube dans un sac et allaient s’apprêter à repartir lorsque Poppy leur signifia de ne plus faire de bruit. Depuis une porte adjacente, elle entendit des bruits de pas, comme si des personnes montaient ou descendaient un escalier.
    -On devrait filer d’ici et vite, lâcha-t-elle.
    -Et si c’était d’Andarion ? Répondit Rico.
    -Raison de plus, non ?
    -Non, on va l’accueillir, justement. Imaginez si nous parvenions à la capturer ?
    Ils se positionnèrent dans l’antichambre, armes pointées vers la porte et attendirent. La porte s’ouvrit en trombe et ils virent deux psykers dont les énergies psychiques méphitiques crépitaient autour d’eux. Dans une nuée rose et ennivrante, une créature du warp, dont un des bras était une longue lame osseuse violacée, se matérialisa en plein milieu d’eux. Si ses formes féminines étaient trompeuses, sa peau couleur de perle, ses pattes griffues et sa queue serpentine lui donnaient des airs de créature tout droit sortie des enfers. Rico, mais aussi Derreck et Lexxi s’enfuirent aussitôt vers le couloir en voyant une telle abomination. Poppy resta pétrifiée et seuls Lek et Felton surent dominer leur peur. Felton dégaina son pistolet bolter chargé de psy-bolt et ouvrit le feu mais la démone les évita sans le moindre mal en bougeant très vite. Elle chargea Poppy mais cette dernière l’évita de justesse en se ressaisissant. Dans la même seconde, Lek ne chercha pas à réfléchir et malgré la douleur qui lui cisaillait les côtes, ramassa le fusil à plasma qu’une des cultistes avait utilisé sur eux juste avant. Sans chercher à maitriser la dangerosité de l’arme dont l’accumulateur magnétique bourdonnait, il la pointa sur les deux sorciers et ouvrit le feu, surpris de voir que l’arme cracha une rafale. L’un d’eux s’écroula au sol, ses robes perforées de trous incandescents. Le deuxième sorcier venait de tomber aussi mais sans avoir été toucher, emporté par la chute du premier.
    Felton tira de nouveau sur la démone mais cette dernière esquiva souplement son tir. Poppy en profita pour la frapper avec sa matraque, ce qui n’eut aucun effet. Lexxi se rua vers elle et la frappa avec sa lame sans autres effets alors que la créature du warp cherchait à les embrocher. Finalement ils se reculèrent tous, préférant aller terminer les deux psykers avant que ses derniers n’invoquent d’autres démons. Dégainant son autre arme de poing, celle chargée des balles sanctifiées, Lek en profita pour tirer sur la démone à bout portant et fit mouche. Les munitions bénies lui firent exploser le torse et la tête dans un geyser de fluides et une onde de choc qui les projeta tous au plafond. Ils retombèrent lourdement, tous un peu sonnés. La fumée, les sons discordants et le choc les avaient mis dans un sale état. Certains comme Lek, étaient même mal en point et peinait à bouger. Derreck commençait à devenir fébrile, à force d’avoir puisé dans le warp, Felton était à court de munitions anti-psy et tous étaient au bout de leurs limites.
    Dans la brume éthérée qui flottait encore autour d’eux, ils virent des silhouettes émerger. Un mutant ou un homme-bête mais aussi une femme aux cheveux gris et au regard plein de haine, celle de la vision d’Ezek : Jocindyr d’Andarion. Sans leur laisser le temps de se ressaisir, elle laissa l’entité qui l’habitait reprendre le contrôle tandis qu’une onde de pure malignité les frappa tous de plein fouet. Des éclairs se mirent à crépiter de ses mains griffues et de ses yeux embrasés tandis que toutes les lumières s’éteignaient une à une...
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    Illuminati

    le 24/06/2022 à 16:38 Citer ce message

    L’Inquisiteur Karl Anders avait convoqué toute la cellule Invictus dans le strategium du Thanatos Crucifère. Un récent message venant d'une aeldari voulant le rencontrer, l’intriguait particulièrement. Il lança un regard à ses agents qui l’écoutaient avec gravité dans la salle plongée dans une semi-pénombre et éclairés par la projection holo d’une mappemonde de la planète autour de laquelle ils orbitaient depuis trois jours. Quelques servo-crânes flottaient à quelques mètres de là en bourdonnant.
    -Elle a défini un lieu de rendez-vous au sommet d’une colline située ici, dans le désert des Monts aréopages au sud du continent d’Endymion. J’aimerai avoir le ressenti de l'équipe sur cette information.
    Enoch Vorgen, l’ancien Juge de l’Arbites leva un de ses sourcils en effectuant une petite moue. Il reposa sa tablette de données sur laquelle figurait le dernier rapport du lieutenant Venkman envoyé la veille en reconnaissance avec ses commandos.
    -Vous comptez réellement rencontrer cette… créature ? Ne serait-ce pas un piège provenant de son tortueux cerveau ? Ces xenos sont connus pour être retors. Si vous y allez, prenez toutes les précautions possibles.
    -Ce serait une mauvaise idée d’y aller seul, ajouta Morr, de sa voix qui tenait plus d’un léger murmure. L’assassin Vindicare était dans son élément, une ombre, tapie dans l’ombre. Seul l’éclat rouge de ses inquiétants yeux augmentiques trahissaient la présence de la jeune femme. Il nous faut plus d’informations sur cette xenos, dit-elle. Dans tous les cas, nous devrions étudier la topologie des lieux pour voir d'où je pourrais vous couvrir.
    Anders hocha la tête.
    -En ces temps troublés, je préfère ne me fermer aucune porte. Je n'ai pas encore pris ma décision, mais si j'y vais ce ne sera pas sans assurer mes arrières. Je ne suis pas naïf et si elle tient à me tendre un guet-apens elle devra payer un lourd tribut. Donc non, si j'y vais, je ne compte pas y aller seul. J'ai déjà établi un plan mais j'aimerai écouter vos suggestions au préalable.
    -Je doute que ces xenos aient un intérêt à s'en prendre physiquement à vous, ajouta Orpheus, son nouvel agent Psykana, tandis qu’il jouait nonchalamment avec le pierre-esprit qu’il portait accroché à son cou. S'ils veulent vous parler, je pense qu'il y a deux explications. Soit, ils sont désespérés, soit ils espèrent vous utiliser. Un échange pourrait s'avérer intéressant comme source d'information. Cependant, je suis bien de l’avis de notre juge ici présent, ces xenos sont connus pour leur maitrise de la manipulation et de la duperie. Pour moi, s'il y a un danger, il sera soit psychique, soit stratégique.
    -D’accord avec le psyker, murmura Morr depuis les ombres. D'où ma question. Que sait-on sur ces aeldari ?
    -Que ce sont des xenos psychiques. Partant de là, tout est possible, compléta l’Inquisiteur.
    Jezail, la pilote commando, se racla la gorge avant de prendre la parole à son tour.
    -Est-ce qu'il n'y aurait pas un moyen de les capturer et de récupérer ces informations ? En même temps, je serai d’avis qu’on leur donne le moins d’informations possible sur nous et notre dispositif.
    Wyatt, le second commando, au corps cybermodifié, moins loquace que sa consœur, approuva ses paroles. Je serais d’avis d’amener une solide couverture armée avec nous, cela dit, compléta-t-il.
    -Je suis du même avis que Wyatt, ajouta le juge Vorgen.

    -Pour répondre à Jezail, non, je n’ai pas pour l’intention de négocier quoi que ce soit, répondit Anders. Cela dépendra de comment la conversation tourne, mais pour l’instant j’y vais pour seulement écouter ce qu’ils ont à me dire. Voici le plan que j’envisage : Morr se rendra sur place dès que possible pour faire une reconnaissance de la zone et se positionnera afin d'offrir une couverture de tir à distance du lieu de rendez-vous. Je me rendrai au rendez-vous accompagné de Jezail qui commandera une escouade de troupes de choc avec une première Valkyrie. Le reste de l'équipe : Vorgen, MakGuill et Orpheus, sera dans une deuxième Valkyrie prêts à intervenir. Elle sera positionnée à une distance d'intervention inférieure à une minute et restera dissimulée tant qu'il le faudra. L'équipe sera suppléée par des commandos des troupes de choc, avec eux dans la Valkyrie. Est-ce clair pour tout le monde ?
    -Je tenterai d'ouvrir mes sens psychiques pour éviter un maximum de surprises, ajouta Orpheus.
    -Attention à ne pas vous faire repérer non plus, nota l’Inquisiteur. Ces xenos disposent de sorciers particulièrement puissants.
    -Pourquoi ne pas tous vous accompagner, dans ce cas ? Demanda Wyatt.
    -Je suppose que c'est dans l'éventualité où l'inquisiteur tombe dans un piège lors de ce rendez-vous. Cela nous permet de garder une certaine chaîne de commandement.
    -Sauf que nous sommes censés intervenir de toute façon en cas de problème. Répondit le commando.
    -A une minute de vol ? Nous n'aurons pas encore décollé que le combat sera terminé !
    -Inférieure à une minute. Nous devons être prêts à intervenir. Ce sont les instructions. Je ne les invente pas.
    -La plupart des rixes auxquelles j'ai assisté ou participé se sont terminées en moins de trente secondes. Plus, ça devient une bataille et ça sous-entend des belligérants en nombre ou une des deux parties retranchées. Mais je pense qu'en tant que soldat, vous connaissez déjà tout cela, mon cher MakGuill ?
    -Ce sont les instructions. Tu peux toujours en débattre avec l’inquisiteur. Mais si tu veux mon avis, si tu n’as combattu que trente secondes, c'est que ton équipe ne faisait pas le poids ou alors peut-être étaient-ce ceux d'en face. Dans tous les cas, c'est pas glorieux, mon cher juge….
    Anders tapa sur la table.
    -C’est bon, on peut poursuivre ? On se calme tous les deux. Le but est justement que ça ne dégénère pas mais je préfère prendre des précautions. J'aurais une escouade de troupes de choc avec Jezail et moi. Ils devraient pouvoir tenir en respect les xenos si les choses venaient à s’envenimer le temps que vous interveniez. Mais je vais également vous répondre sur le pourquoi je vous garde en réserve et pas avec moi lors de l'entretien. Vorgen est un excellent juge mais son code de conduite rigoureux l'empêche d'être suffisamment ouvert aujourd'hui pour ce genre d'entrevue. Orpheus a l'avantage mais aussi l'inconvénient d'être un psyker. Je ne veux pas courir le risque qu'il puisse être utilisé par les puissants sorciers qu'il pourrait y avoir à cette rencontre. Quant à vous, MakGuill, vous êtes encore trop tête brûlée et trop grande gueule pour assister à une rencontre avec ces xenos. Le but n'est pas de les provoquer, et je crains que vous n'ayez pas encore assez de retenue pour ça. Et votre échange avec Vorgen à l'instant me conforte parfaitement dans cette opinion. N'y voyez rien de personnel messieurs, ce sont uniquement des choix pragmatiques. Je n'ai pas le luxe de me couper d'éléments tels que vous uniquement par caprice caractériel. Mais sur ce coup-ci, je préfère y aller prudemment. L'Empereur jugera si j'ai fait les bons choix ou non.
    -Entendu. On vous couvre, lâcha le commando.
    -Je reste bien en couverture à distance de tir si nécessaire, monsieur ?
    -Absolument, agent Morr. Je ne suis pas crédule, mais je ne veux pas les provoquer gratuitement non plus.
    -Prenez juste garde aux manigances, ajouta Orpheus. Ces xenos ont sûrement plusieurs coups d’avance sur cette partie de Régicide. Le seul point commun que nous avons avec eux est que nous ne voulons pas que la galaxie finisse en flammes.
    -Seul l'Empereur sait ce que veulent ces xenos... N'intervenez que sur mon ordre ou pour vous défendre d'une attaque. Je vous donne toute latitude pour vous organiser comme vous le souhaitez. S’il y a besoin de trancher une décision, Vorgen aura le dernier mot. Morr sera autonome sur cette mission. Déploiement en surface tel qu’indiqué dans le briefing. Nous restons tous en liaison vox sécurisée. Vous pouvez disposer.

    Un peu avant minuit, l’heure du rendez-vous, la Valkyrie se posa sur la colline. Jezail coupa les moteurs mais resta à bord, parée à redécoller, au cas où. Anders en descendit avec une escouade de Tempestus, mais préféra leur demander de l’attendre ici. Il se dirigea vers le centre de la colline, situé à moins d’une centaine de mètres de là, où se trouvait une sorte de cromlech très ancien. Un cercle de pierres, datant sans doute d’une ancienne colonie pré impériale, mais Anders n’était pas là pour admirer le passé archéologique d’Endymion.
    -Marteau de guerre à Vengeur, tu me reçois ?
    -Affirmatif, Marteau de guerre. En position, lui répondit Morr qui était perché au sommet d’un des arbres de la colline. Depuis la lunette de son fusil Exitus, elle pouvait transpercer un Space Marine de part en part, à deux kilomètres, au besoin.
    -Garde un œil. Tu as toute latitude pour employer la force. Protocole Invideo. Terminé.
    Morr avait un petit sourire sous son masque Vindicare, ce qui était plutôt rare chez elle. Cela faisait trois bonnes heures qu’elle était en position, parfaitement immobile, au point que les oiseaux de nuit qui nichaient dans les arbres ne l’avaient pas prise pour une menace, malgré leurs sens nocturnes. En revanche, elle savait que les trois rangers eldar, tout aussi immobiles qu’elle, postés dans les autres arbres à cent mètres de là, l’avaient clairement repéré. Mais au moins ils savaient en retour, qu’elle le savait. Tant que personne ne bougerait, il n’y aurait aucunement besoin d’ouvrir les hostilités. Ils se surveillaient, comme le font les prédateurs dans la nature. Patients, immobiles et attentifs au moindre changement d’humeur de leurs adversaires…

    L’inquisiteur venait de rejoindre le cercle de pierre, alors qu’une silhouette lui apparut au détour d’un des menhirs. Il s’agissait d’une psyker que les aeldari nomment prophétesse ou quelque chose comme ça dans leur langue. Fine et élancée, elle portait de longs cheveux blonds et un visage fin sans âge, qui, de près, possédait des traits clairement étranges, presque félins. Sans doute à cause de ses oreilles en pointe et de ses yeux en amande aux reflets d’un vert doré. Elle portait une longue robe pourpre, garnie de runes noires et or et portait une lance ouvragée dont les reflets irisés trahissaient un potentiel psychique évident. Son attitude semblait parfaitement neutre. Elle regardait vers les étoiles, au loin alors que sa chevelure suivait le gré de la brise. Malgré la nuit, le ciel était d’un gris pourpre à cause de la proximité avec le Maelström. Elle resta ainsi immobile, le regard perdu dans les étoiles.
    -Je suis Weena Lan’enad, prophétesse d’Ynnead. Comme mes messagers vous l’ont dit, j’ai besoin de vous parler d’un sujet qui nous concerne tous.
    Elle s’exprimait dans un bas gothique fluide, avec une pointe d’accent mélodieux qu’un humain peinerait à reproduire. Elle tendit sa main, paume vers le haut et une sorte de projection holo ou psychique apparut, montrant ce qu’Anders reconnut comme étant le labyrinthe tesseract, le cube nécron. Il semblait flotter en l’air, ainsi à quelques centimètres au-dessus de sa main tendue.
    -Vous connaissez cet objet, lui dit-elle.
    La question était rhétorique, elle savait très bien qu’il le connaissait. Que savez-vous exactement à son sujet ?
    -Qu'il peut contenir toutes sortes de choses. Vivantes comme inanimées.
    -Et comme tout contenant, il est amené à rester clos. Ou à être ouvert. Mais cela dépend grandement des mains dans lesquelles il se trouve.
    Elle riva son regard insondable vers le sien.
    -Vos semblables ont toujours été tels des enfants excités à l’idée d’ouvrir un nouveau jouet, ignorant totalement que ce qu’ils prennent pour une simple boite, un simple cube… renferme en réalité des secrets plus anciens que votre propre espèce. Des secrets qui ne demandent qu’à être libérés. Si cela ne devait pas arriver, je n’aurais aucunement pris la peine de vous rencontrer. Mais il se trouve que cela vous concerne. Vous. Votre… inquisition.
    Anders eu un petit rire blasé.
    -Epargnez-moi le laïus de votre race soi-disant supérieure qui considère l’Humanité comme une sous-espèce qui a besoin d’être éduquée. Nous ne sommes pas la race en déclin dans cet univers. Parlez clairement. Vous avez besoin de nous apparemment.
    L’image disparut alors de sa main. Elle releva un de ses sourcils, comme si ce qu’elle allait dire était une pure évidence. Surtout depuis ce récent changement de millénaire.
    -Vous vous méprenez, inquisiteur. Je ne suis pas là pour vous demander je ne sais quelle aide. Je suis là pour vous apporter la mienne.
    -Allons bon. Je suis tout ouïe. Quelle aide pouvez-vous nous apporter ?
    -Vos semblables sont fascinés à propos de ce tesseract. Certains pensent pouvoir l’utiliser pour attirer les Sombres Puissances sur vos mondes. D’autres pensent au contraire pouvoir l’utiliser pour contrer ces mêmes Puissances... Cet artefact est tombé entre de mauvaises mains et il va tomber en d’autres mauvaises mains juste après. Certains de vos mondes vont disparaître, inquisiteur. C’est une certitude et cela va arriver très rapidement maintenant. Voilà pourquoi je peux vous apporter mon aide. Vous prévenir que le Tesseract va changer de main. Avant que cela n’advienne, je peux vous y conduire maintenant car vos vaisseaux ne pourront jamais arriver là-bas avant un mois, au mieux. Vous le comprendrez, ce Tesseract doit être détruit. Je peux vous y aider, à la condition que vous me permettiez de vous aider à le détruire. Telle est ma condition.
    -Et où comptez-vous m’emmener, ainsi ?
    La question parut l’étonner, comme lorsque l’on doit expliquer une évidence.
    -Sur le monde que votre aveugle a vu. Là où se trouve le Tesseract. Mais il n’y sera pas longtemps. D’autres savent et ils viennent aussi pour lui. Nous pouvons ouvrir un portail et faire passer votre navette. Si vous me suivez, je suis en mesure de vous faire passer sur ce monde. Pour la suite…
    Vous devrez vous acquitter de ma demande à propos du Tesseract. Est-ce dans vos possibilités, inquisiteur ?
    -À condition que mes agents me suivent. Nous allons au-devant d’ennuis importants, j’aurais alors besoin de toutes les ressources disponibles immédiatement.
    -Soit. Mais vous ne pourrez nous suivre qu’avec une navette. Mais oui, libre à vous de choisir qui vous accompagne.
    -Que se passera-t-il si le Tesseract est détruit ? Qu’arrivera-t-il aux choses qu’il contient ?
    -Nous aimerions sauvez une de nos semblables qui s’y trouve. Tout le reste devra être détruit.
    -Et qui me dit que votre semblable ne tentera rien contre l’Imperium ensuite ? Ne suis-je pas en train de collaborer pour libérer un futur ennemi de la race humaine ?
    -Rien ne vous le dit. En effet. Nous seuls choisissons nos ennemis, Inquisiteur.

    L’onde de pure malveillance les traversa telle une décharge électrique. Leurs muscles et leurs nerfs étaient frappés de spasmes qui les mirent au supplice. Lek, malgré la douleur qui assaillait ses membres, parvint à pointer le fusil à plasma d’une main tremblante et ouvrit le feu, presqu’à bout portant. Les décharges frappèrent la possédée mais sans plus d’effets que quelques traces noircies sur sa peau brulantes d’énergie psychique.
    De l’autre côté du couloir, Rico se mit à crier, voyant arriver droit vers eux, d’autres cultistes. Sans perdre de temps, il lança une grenade Inferno droit vers eux. La grenade rebondit sur le sol et détona au milieu des cultistes. La boule de flammes engouffra le premier qui s’embrasa en hurlant mais sa compagne, parvint à se mettre à l’abri et appela des renforts qui arrivèrent aussitôt d’une pièce adjacente. La cultiste portait un pistolet laser et une épée courte, elle ouvrit le feu, forçant Rico à se mettre à couvert. Quant aux renforts, il s’agissait d’hommes-bêtes. Le premier, à la tête bestiale d’où jaillissait une longue langue similaire à celles des fourmiliers de Catachan, était muni d’une pince barbelée à la place d’un bras et brandissait une hache à lame courbe. Le second était une sorte de minotaure musculeux à la peau mate, armé d’une sorte de sabre et d’un fusil laser. Ils chargèrent. Aussitôt, Derreck et Felton s’interposèrent malgré leur allure effrayante et bestiale, brandissant leurs épées pour les contrer. Les coups redoublés des cultistes finirent par faire reculer Derreck qui se prit une rafale de laser du minotaure et s’affaissa au sol. Lexxi, restée en retrait, en avait profité pour dégoupiller une grenade antichar et la lança dans le couloir, en cria à Felton de l'aider à attraper Derreck et de se mettre à couvert. La grenade détonna et engouffra le fourmilier et la fille dans sa détonation sourde qui les projeta contre les parois, leur corps brisé et ensanglanté. Felton en profita pour recharger son pistolet bolter à la hâte, le temps que le troisième mutant, celui à tête de minotaure, se ressaisisse du souffle de l’explosion. Il était blessé très légèrement ce qui ne l’empêcha pas de pousser un beuglement tout en s’apprêtant à charger. Il avait dégainé sa lame dentelée et fonça droit sur Felton, au moment où ce dernier enclencha son chargeur, arma la culasse et tira deux bolts, presque à bout portant sur le colosse mutant. Les bolts autopropulsés le cueillirent de plein fouet, en pleine poitrine. Les pointes en adamantium n’eurent aucune peine à forer la cuirasse légère du mutant, ne laissant qu’un léger filet de sang jaillir à l’impact. Une fraction de seconde plus tard, ils détonèrent. Le torse musculeux du mutant explosa en deux cratères d’où jaillirent une gerbe de sang qui macula les murs.
    De l’autre côté du couloir, Lek et Poppy, rejoints par Lexxi avaient ouvert le feu en rafale sur l’abomination qu’était devenu Jocindyr d’Andarion. Les impacts la frappèrent avec une rare fureur mais sans pour autant la terrasser. Ce furent les munitions sanctifiées de Lek qui firent la différence, créant des cratères béants dans la possédée, dont les chairs s’embrasèrent aussitôt, la forçant à reculer en hurlant sa rage. Elle projeta de nouveau sa sombre magie qui leur paralysa les membres. Leurs tirs faiblirent quelques secondes mais certains impacts la forçaient toujours à reculer. Lek notamment et malgré ses blessures, avait ses deux Carnodons en mains et n'arrêtait pas de la cribler de balles aux dégâts dévastateurs, ce qui commença à produire des effets.

    Le couloir était enfin dégagé, du côté de Rico mais il était mal en point et toujours sévèrement blessé ; Derreck était au sol, fauché par une rafale de laser et avait perdu connaissance. Seul Felton ne s’en tirait pas trop mal. Il couvrait le couloir à l’aide de son Tronsvasse alors que Lexxi vint les rejoindre à la demande de Rico. Elle aida Derreck à se remettre sur pied, ce qui lui arracha quelques cris de douleurs. Ils allaient devoir trouver une autre issue car Felton leur indiqua que d’autres mutants venaient de faire leur apparition au bout du couloir. Des tirs de laser commençaient déjà à fuser autour d’eux. A l’inverse de leurs camarades restés au sol et éparpillés dans des marres de sang, ils préférèrent jouer la prudence et ouvrirent le feu depuis leur position.
    -La voie est bloqué de ce côté, cria Felton tout en se mettant à couvert.

    D’Andarion finit par s’évaporer dans une brume d’un rose sombre, laissant son enveloppe corporelle en flammes et déchiquetée, s’écrouler au sol. Son essence démoniaque s’en échappa et disparut par un conduit. Cela leur laissa une voie libre vers un bureau, une sorte de bibliothèque là où se trouvaient des escaliers menant à l’étage inférieur. Rico leur indiqua de vite se replier vers ce passage, tout en demandant à Lexxi de piéger rapidement le couloir, avant que le reste des mutants ne les rattrape. Elle posa une charge de démolition à la hâte avant de les rejoindre. Ils s’engouffrèrent dans la bibliothèque, barricadèrent la porte et laissèrent Lek et Felton descendre les escaliers en colimaçon, leurs armes pointées devant eux. Ils débouchèrent dans ce qui était un autre niveau de la bibliothèque. Il n’y avait pas âme qui vive dans la vaste pièce, pourtant les sons de la musique discordante – qui n’avait pas cessé – s’entendaient beaucoup plus clairement, à mesure qu’ils descendaient, ce qui faisait vibrer les murs et le sol. De l’autre côté du couloir et des murs alentours, il y avait encore du monde. Les autres finirent par les rejoindre. Poppy aidait Rico à marcher et Lexxi en faisait de même pour Derreck qui grimaçait toujours à cause de ses récentes brûlures.
    Lek et Felton sortirent prudemment dans le couloir. Ils prirent sur leur droite, vers ce qui ressemblait à un vestibule, se disant qu’une sortie pouvait être proche. De son côté, Rico avait bien envie d’aller à l’opposé, malgré les contestations de Lexxi et Poppy.
    -Je me rappelle qu’on est passé par ce couloir, là-bas, en arrivant. On avait entendu des gémissements derrière un des murs.
    -Et alors ? Lui répondit Lexxi. Ça pourrait être n’importe quoi et certainement une poignée de ces malades de cultistes.
    -Et si c’étaient des prisonniers ? Lui dit-il en collant presque son visage au sien.
    -C’est malheureux, mais je ne vois pas comment on pourrait gérer des prisonniers. La moitié d’entre vous êtes déjà blessés, ajouta Poppy.
    -Ils pourraient faire une diversion, ou mieux encore. Si l’un d’eux savait piloter une navette ? Lui dit-il.
    Poppy acquiesça et elles le couvrirent, alors qu’il se précipitait dans le couloir en direction d’une des portes, se disant qu’il n’avait peut-être pas tort.
    A l’opposé, Lek venait d’ouvrir la porte du vestibule et tomba presque nez-à-nez avec deux autres hommes-bêtes, des slaangors, reconnaissable à leur tête de bovidé. Il ouvrit le feu par réflexe et en toucha un qui gronda plus de rage que de douleur. Son équipier se rua sur Lex et le frappa de toutes ses forces à l’aide d’une longue machette. Le coup fut d’une telle puissance qu’il lui trancha net le bras droit, au niveau du coude. Celui qui pointait un de ses Carnodons. Lek se mit à hurler tandis que le sang jaillit de son moignon. Il s’affaissa au sol. Felton riposta aussi avec son pistolet bolter mais manqua de peu. Il recula tout en cherchant à tirer Lek avec lui et appelant à l’aide. Déjà, à l’autre bout du corridor, trois psykers renégats venaient de faire leur apparition, leur crâne bulbeux, crépitant d’énergie.

    A trente ou quarante mètres de là, Rico était parvenu à la porte dans le long couloir et entreprit de l’ouvrir lentement.
    Il avait vu juste. La pièce, qui devait être un des quartiers d’équipage était emplie d’hommes et de femmes suppliants, ligotés, enchainés et bâillonnés. Tous étaient torse nu, vêtus d’un simple pantalon ou de sous-vêtements. C’étaient des civils, il le vit à leurs marques sur leur peau. Des tatouages d’Aquila ou de dévotion, comme en portaient presque tous les citoyens dans l’Imperium. Ils étaient terrorisés, les yeux écarquillés. Certains pleuraient ou gémissaient car ils avaient été entassés là, à attendre leur tour. Leurs geôliers avaient pris un plaisir sadique à leur annoncer ce qui les attendait et pendant combien d’heures ils subiraient les pires supplices en agonisant, ne pouvant expirer qu’avec le bon vouloir de leurs cruels tortionnaires. Alors ce serait au tour des suivants de passer entre les mains des séides du Prince des plus sombres Plaisirs.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 08/07/2022 à 19:37 Citer ce message

    La Toile est un environnement aussi effrayant que fascinant pour n’importe quel humain ne l’ayant encore jamais emprunté. Non pas parcouru, mais emprunté. Car nul humain ne peut ni ne pourrait parcourir la Toile seul, au risque d’y rester piéger hors du temps et de l’espace. Certains xenomanciens arcanum ont bien tenté d’en percer les secrets mais sans jamais y parvenir totalement. Rares sont ceux, parmi les savants de l’Imperium, qui y sont entrés par leurs propres moyens et à ce jour, aucun n’en est jamais ressorti.
    Une légende – sans doute exagérée - raconte que même un des Primarques y serait encore et ce, depuis des millénaires, engagé dans une chasse sans fin contre de terribles xenos.
    Depuis ses origines, l’Humanité a toujours parlé – au travers de sa mythologie - de l’existence de Portes des étoiles, de Portails dimensionnels et autres Trous de ver évoqués par les astromanciens. Ces légendes prétendent qu’il s’agit d’un vaste réseau interdimensionnel aussi ancien que l’univers, composé d’énergie quantique reliant chaque monde, en dehors des lois du temps et de l’espace.
    Invisible aux sens, ou cachée par une obscure magie, les points d’entrée et de sortie de la Toile se trouveraient un peu partout sans que l’Imperium ne parvienne jamais à les découvrir. Lorsque cela a lieu, bien souvent, l’Inquisition se charge de détruire systématiquement de tels accès. Du moins, de façon officielle.
    Jusqu’à présent, et sans que l’on ne sache comment, seule la sorcellerie eldar a été capable de maitriser le fonctionnement de la Toile, permettant à cette race ancienne et perfide d’emprunter de telles voies de communications galactiques avec une rare aisance, comme on emprunterait un simple élévateur dans une spire.

    Depuis la Valkyrie Delta-Six-Sigma, l’Inquisiteur Anders et ses hommes pouvaient voir défiler cette brume éthérée et opalescente, un peu comme s’ils se trouvaient au cœur de l’œil d’un cyclone. L’endroit paraissait étrangement paisible et en même temps, son absence de dimension en faisait un lieu étrange, évanescent, comme issu d’un rêve où l’on ne percevrait rien d’autre qu’un brouillard pour tout horizon. Pourtant leur navette filait à vive allure, mais vers une destination impossible à estimer. Depuis son cockpit de pilotage, la capitaine Jézail Magdala restait nerveuse car les affichages sur son tableau de bord indiquaient des données parfaitement contradictoires. Sa vitesse, son altitude, ainsi que tous les différents paramètres étaient tous à zéro, comme si son appareil était immobilisé au sol, tous moteurs éteints. Pourtant, elle était sûre de voler à plus de Mach 2. Même le chronographe de bord s’affolait, défilant en sens inverse, ce qui était totalement surréaliste. Jézail naviguait totalement à l’aveugle, ignorant si des parois délimitaient l’espace irréel où ils se trouvaient et quand bien même allaient-ils pouvoir en sortir et comment. La seule certitude qu’elle avait était qu’elle devait suivre une navette eldar, un Falcon de couleur bleu nuit. C’est tout simplement ce que la prophétesse des aeldari avait demandé à l’Inquisiteur. Le temps n’avait eu aucune emprise. C’était-il passé une heure ? Une journée ? Il était impossible de répondre à une telle question en un tel lieu.

    Le retour soudain, presque brutal dans un espace vectoriel et euclidien en trois dimensions, rassura et surprit Jézail en même temps. Il n’y eut aucune autre impression qu’un bref flash de lumière, une furtive sensation de tournis, le temps que les sens se recalibrent avec le retour au monde normal. Les voyants sur le tableau de bord s’affolèrent car au moins l’esprit de la Machine avait bien réalisé, lui aussi, que le passage entre les dimensions n’avait rien de naturel, du moins, d’un point de vue impérial.
    Elle reprit habilement le contrôle de l’appareil avant que ce dernier ne soit de nouveau sujets aux lois implacables de la gravité, coupant les alarmes sonores une à une, apaisant ainsi l’esprit de la Valkyrie.
    Elle laissa la navette se stabiliser, malgré la descente qui faisait vibrer la carlingue alors qu’elle filait droit vers la couche nuageuse au-dessus d’un continent situé au beau milieu du vaste océan d’un monde qu’elle ne reconnut pas.
    -Ça va derrière ? Lâcha-t-elle dans l’intercom, à destination de la Cellule Invictus installée à l’arrière de l’appareil.
    -Dis-nous juste qu’on est enfin sorti de ce merdier… Commença l’Inquisiteur.
    -Affirmatif, Monsieur. On vient d’entrer dans l’atmosphère d’une planète, mais impossible de l’identifier pour l’instant. Les augures peinent encore à se recalibrer, comme le compas magnétique.
    -Continue de suivre le Falcon. J’espère juste qu’ils savent où ils nous emmènent.
    -Bien reçu.

    Ils se posèrent trente minutes plus tard sur une sorte d’archipel situé au cœur d’un petit continent. Il faisait nuit et la Valkyrie se posa au milieu d’une petite clairière bordée d’arbres. Une fois les moteurs coupés, ils purent entendre les bruits de la faune endémique et arboricole. Ils se déployèrent autour de la navette. L’Inquisiteur avait emmené ses cinq agents avec lui, en comptant Jézail. Il avait jugé bon de compléter son équipe avec quatre commandos Tempestus équipés d’armures carapaces et de fusils radiants.
    Le Falcon était déjà là, deux ou trois cents mètres plus loin et les aeldari qu’il avait transporté en étaient sorti et se dirigeaient au nord, disparaissant déjà dans les ombres.
    -Quelles sont les consignes, Inquisiteur ? Demanda Vorgen.
    -On les suit.
    -Et on sait ce qu’on est censé faire ici ? Lâcha Wyatt, tout en s’allumant un cigalho.
    -La mission n’a pas changé. On est là pour le Tesseract. Je vous rappelle qu’on doit le détruire une fois que cette prophétesse de malheur en aura fait sortir une des leurs. Quoi qu’il puisse se passer, notre priorité est la destruction de ce Tesseract, que ces maudits xenos soient parvenus ou non à pratiquer leur sorcellerie.
    -On a une idée de comment le détruire ? Lui demanda Orpheus.
    -Je comptais justement sur vos connaissances d’officier psykana et d’agent du Reliquaire. Les aeldari semblent savoir comment procéder. Au pire, un psy-bolt devrait solutionner le problème de façon définitive. Bien, on se met en route. Wyatt et Morr, vous passez devant, je préfère éviter les mauvaises surprises. Jézail, tu restes avec la navette, au cas où. Tâche de capter des communications ou n’importe quel moyen de localiser cet endroit, en attendant.
    -Bien reçu, se contenta-t-elle de répondre.

    Ils se déployèrent et filèrent en direction du nord, coupant à travers la forêt nocturne. Au bout de quelques centaines de mètres, ils perçurent les premières lueurs d’un village. Du moins de ce qui avait été initialement un village. Le warp et la sorcellerie avait totalement ravagé un ensemble de maisons de ce qui devait être un ensemble d’habitats. Des protubérances aethériques saillaient de la rue et des bâtisses détruites, tels les tentacules d’une créature marine colossale. Une lueur violine, malsaine se dégageait des lieus en même temps qu’un parfum écœurant et entêtant, à la fois liquoreux et sans doute psychotrope. Ceux équipés de casque et de respirateur, s’empressèrent de se protéger d’une telle sorcellerie car une sorte de sombre assemblée se tenait au centre du village, à plus de deux cents mètres de là. Une vingtaine de cultistes pratiquait, à n’en pas douter, une sorte de rituel.
    L’Inquisiteur et ses hommes prirent position le long de murets en ruine et observèrent. Les aeldari venaient de prendre par l’est et disparurent entre les maisons, sans se faire repérer.
    Anders venait d’enfiler le casque de son armure énergétique et bascula sur un affichage magnoculaire. Il amplifia sa vision sur le centre du rituel et sur celle qui semblait présider l’assemblée. Il s’agissait d’une jeune femme, plus grande d’une simple humaine, au corps de véritable déesse des enfers. La magie du warp brulait de ses yeux incandescents et de sa peau violacée et fumante. Elle portait une sorte d’armure d’or d’un autre âge et plusieurs de ses séides étaient à ses pieds, impatients de lui offrir leur vie. Au sol, tout autour d’eux, se trouvaient les restes fumants de dizaines de corps. Peut-être même des centaines, à en juger par la taille du village. Il devait sans doute s’agir des restes des malheureux habitants.
    -Ashakanesh l’Inassouvie… Lâcha Anders dans un murmure.
    Il ne l’avait jamais vu mais l’Ordo Malleus la connaissait de longue date.
    -Qui ça ? Lui demanda Orpheus.
    -Une autre des Quatre Fléaux de Phargos Hex. Celle qui est là pour ramener à la vie Kalish’Ashakiis, son Prince démon.
    -Comme Blodmorgor comptait faire avec Kharn Ozgul ?
    -Exactement… Il aura fallu détruire presque toute une région d’Archaea pour les en empêcher. Sans compter le sacrifice de nos hommes.
    -Et qu’avons-nous aujourd’hui à lui opposer ?
    -Mettons-nous en mouvement. Nous allons les contourner par l’ouest. J’espère juste que la prophétesse eldar sait ce qu’elle fait.
    -On pourrait demander à Jézail de nous couvrir depuis la navette, non ? Demanda Vorgen.
    -Une sorte d’appui-feu, ce ne serait pas idiot, répondit Wyatt. Son multilaser de proue ne sera pas de trop, vue la menace.
    -D’accord, mais seulement une fois que nous serons en position, répondit l’Inquisiteur. De nuit, ils vont l’entendre arriver de loin et je ne tiens pas à ce qu’ils la descendent. Delta-Six-Sigma, tu me reçois ?
    -Affirmatif, répondit-elle dans le microvox.
    -Tiens-toi parée au décollage. A mon signal, tu te positionnes pour un appui-feu sur zone, compris ?
    -Bien reçu.
    Au passage, il attrapa Morr, son assassin Vindicare par le bras.
    -Trouve-toi un point haut, sur un de ses bâtiments là-bas. Tu me couvres la zone au maximum. Quand je t’en donne l’ordre, tu nettoies tout ce qui te parait le plus gros ou le plus hostile, compris ?
    -Reçu.
    -A tous, que l’Empereur soit avec vous.
    Ils firent le signe de l’Aquila puis se déployèrent et commencèrent à longer les maisons en ruine, en direction du rituel.

    Autour d’Ashakanesh, une coterie d’athlétiques hédonites, de sorcières hiérodules mutés par le warp et de virils slaangors aux muscles saillants se trémoussaient, extatiques et en adoration, au rythme des pulsations lâchées par des armes soniques. Au moins deux démonettes se tenaient parmi cette sinistre assemblée. La femme-déesse se tenait devant un mausolée, sorte de massif sarcophage richement ciselé et fraichement exhumé de terre. Six captifs y étaient enchainés tandis qu’une prêtresse ânonnant d’occultes antiennes, les aspergaient d’un fluide rouge et fumant. Depuis le toit où elle venait de prendre position, allongée sur les restes de tuiles brisées, Morr les observait dans la lunette amplificatrice de son fusil Exitus. Elle activa l’implant-vox de son casque.
    -Vengeur Un en position. J’ai un visuel sur les captifs.
    Anders, malgré son armure énergétique, prenait soin de se déplacer en silence. Il prit position derrière un mur porteur dans une longue bâtisse au toit effondré. Il venait de dégainer Terror Daemonum, Sa longue épée énergétique sanctifiée. Elle s’anima en s’auréolant aussitôt d’une aura bleutée. Il ressentit l’esprit immaculé qui animait sa lame et qui brulait d’en découdre, rien qu’en sentant la lame vibrer dans sa main gantée.
    -Ici Marteau de guerre, répondit-il. Les captifs ne sont pas notre priorité.
    -Et si on les connait… ?
    -Comment ça ?
    -Je suis prête à parier que Rico est parmi eux, ainsi que deux de vos acolytes.
    -Trône !... Tu es sûre ? Nous ne sommes pourtant pas sur Archaea ? Si c’est confirmé, il va falloir qu’on les sorte de là, mais pour l’instant la mission reste inchangée. On se concentre sur le rituel qu’on va devoir arrêter coûte que coûte.
    Il vérifia que tout le monde était en position. Wyatt se tenait non loin de lui, accroupie devant l’encadrement d’une fenêtre arrachée, pointant son bolter combiné devant lui tout en préparant des grenades. Orpheus était un peu plus loin sur sa gauche, son épée de force en main. Il récitait des mantras psykana. Les quatre Tempestus avaient pris position tout autour, restant parés avec leurs fusils radiants. Vorgen couvrait leurs arrières, comme Morr. Il s’était positionné côté rue, derrière une charrette retournée. Il avait ajusté son fusil de précision, bien décidé à en découdre, lui aussi.
    -Vengeur Un, visuel sur les eldars ?
    -Négatif.
    -Delta-Six-Sigma, parée au décollage. Que le tonnerre se déchaine.
    -Bien reçu, lui répondit Jézail depuis le microvox.

    Quelques secondes plus tard et avant que la cellule Ultima ne perçoive le moindre bruit, les slaaneshi tournèrent soudain leurs visages vers le sud. Certains firent de grands gestes et une clameur parcourut leur assemblée.
    -Ils ont entendu la Valkyrie, lâcha Anders. C’est le signal… Feu à volonté !
    Lui et Wyatt s’y étaient attendu et lancèrent chacun une grenade en direction des cultistes et d’Ashakanesh. L’explosion les engloba dans une boule de flammes. Les cultistes, déjà sur le qui-vive, réagirent comme un seul homme et avec une rapidité fulgurante. Les deux démonettes se ruèrent droit sur le bâtiment d’où avaient jailli les grenades. Mais l’une d’elle fut fauchée par un tir de précision de la Vindicare. La balle Exitus lui pulvérisa la tête dans une bruine rosée. Le corps décapité parcourut encore quelques mètres en zigzaguant et titubant avant de tomber à genoux, un fluide glaireux et épais jaillissant de son cou sectionné. La seconde bondit en avant et se propulsa par une des fenêtres brisées, se réceptionnant avec souplesse dans la pièce, un rictus lui déformait la bouche d’où pointaient des canines tranchantes. Anders, Wyatt, Orpheus et deux Tempestus en eurent le souffle coupé, incapable de réagir face au charme maléfique de la démone.
    De l’autre côté de la rue, les aeldari venaient aussi de passer à l’offensive et leurs tirs combinés fauchèrent deux sorciers. Leurs laser de précision leur traversèrent le crâne comme s’il s’agissait de ploins trop mûrs. Les slaaneshi ne restèrent pas inertes pour autant et ripostèrent. Les slaangors et les hédonites ouvrirent le feu tandis que certains chargeaient vers les aeldaris. Un des commandos Tempestus fut touché par une rafale de mitrailleuse et eut la vie sauve grâce à son armure carapace, et ce, malgré ses blessures qui aurait dû lui être fatales. La fumée des explosions des grenades se dissipa, laissant deux corps au sol. Pourtant aucune trace d’Ashakanesh n’était visible.
    Une des hédonites, une sculpturale et terrifiante hécatrix au corps musculeux et couvert de cuir bardé de lames, brandit une énorme lame tronçonneuse et bondit tel un carnodon, se ruant par une des fenêtres. Elle écrasa sa lame de toutes ses forces sur l’inquisiteur. Ce dernier tenta d’éviter son attaque mais la puissance des coups éventra la cuirasse de son armure énergétique dans une gerbe d’étincelles et de fragments de céramite. La lame mordit dans ses chairs et fit craquer ses os dans une sinistre mélodie. Ses yeux se révulsèrent et il s’affaissa en laissant tomber sa lame sanctifiée. Couverte de sang, la cultiste, haletante, se délecta d’une telle victoire. Elle tourna ses yeux de maniaque en direction de Wyatt et Orpheus déjà engagés au corps à corps contre la démonette. En hurlant, elle se rua sur eux.

    La Valkyrie effectua un passage en trombe, son canon de proue crépita. Le canon rotatif pulsa des tirs de laser d’un rouge incandescent qui mitrailla la rue, là où se trouvaient le gros des cultistes. Le tir manqua de précision, pourtant l’un des fanatiques fut fauché net, presque coupé en deux par les rayons mortels. La navette pivota et prit de l’altitude, parée à effectuer un deuxième passage. C’est là que Jézail la vit, flottant dans les airs. Ashakanesh se tenait à quelques dizaines de mètres de son appareil. Elle raligna sa position afin de pointer le multilaser droit sur elle mais des éclairs se mirent à danser dans son cockpit. Elle ressentit une décharge remonter le long de sa colonne vertébrale et saturer son cerveau avec assez de force pour lui faire perdre connaissance. Ses yeux roulèrent dans ses orbites et elle s’affaissa dans son siège.

    Depuis le toit où elle était allongée, Morr était en train de faire un véritable carnage dans les rangs des cultistes. Chaque tir en succession rapide, emportait une tête dans une bruine de sang. Aucun adorateur des Puissances n’était à l’abri de ses redoutables balles Exitus. Aucun Slaangor, aussi massif qu’il soit, n’était assez solide pour survivre à la dévastation de son fusil de précision. Ici une tête arrachée, là, un torse éventré. Nul n’échappait au courroux vengeur d’un agent de l’Assassinorum. Elle avait pourtant assisté, impuissante à l’attaque des tentacules warp qui avaient jailli du sol et qui avaient emporté deux des Tempestus et au moins un des aeldari. Elle-même avait failli se faire emporter par ces appendices gluants et avait constaté que les tirs ne les affectaient pas. Elle avait dû se repositionner et y prendre garde. En contrebas dans la rue, elle voyait Vorgen qui continuait de faire feu, lui aussi, alignant en priorité les sorciers ou porteurs d’armes soniques ou à plasma. Même si ces tirs n’étaient pas aussi dévastateurs que les siens, il obtenait des résultats plus que satisfaisants, forçant les ennemis qui ne succombaient pas, à se mettre à couvert.
    La sorcellerie des aeldari vint finalement frapper les tentacules qui furent parcourus d’éclairs, relâchant les deux Tempestus avant que ses derniers n’étouffent, écrasés par l’entité warp. Ils retombèrent non loin de Vorgen. L’un d’eux peina à reprendre son équilibre et se fit faucher d’une rafale de plasma. Le second courut se mettre à couvert à côté de Vorgen, ripostant aussitôt avec son radiant. Cela laissa le temps à une des sorcières hiérodules de leur tomber dessus. D’un geste rapide, elle planta sa lame aethème empoisonnée dans un des optiques du casque du commando Tempestus, le laissant agoniser, elle se rua sur Vorgen, mais se dernier évita la lame d’une roulade et dégaina sa masse énergétique qui s’auréola d’éclairs crépitants. Elle se jeta sur lui en hurlant mais il lui asséna un coup puissant dans le torse qui lui enfonça la cage thoracique dans un craquement de bois humide, lui broyant les poumons. Elle se mit à vomir du sang et s’effondra à genoux, tentant de gargouiller quelque chose alors qu’elle se noyait dans ses propres fluides. Vorgen la laissa à son triste sort et se remit aussitôt à couvert alors qu’il était de nouveau pris pour cible. Une rafale tirée par un fusil d’assaut venait de perforer son armure carapace. Les blessures étaient assez sérieuses et la douleur vive lui indiqua qu’il n’allait pas pouvoir supporter un autre tir comme celui-là. Il plaqua sa main sous son plastron et la ressortit rouge de sang. Il grimaça, se positionna de nouveau et ajusta le canon de son fusil de précision vers les cultistes.
    C’est à ce moment que lui et Morr virent la Valkyrie de Jézail virer sur l’aile et décrocher. Sur le fuselage se trouvait Ashakanesh qui se mit à courir sur une des ailes, comme prenant son élan, puis bondir dans les airs et fondre, pieds en avant droit sur la bâtisse où devait se trouver la prophétesse eldar et ses guerriers, sans doute pris eux aussi dans un âpre corps-à-corps. Le toit de la maison et tout une partie de sa structure explosa à l’impact dans une boule de débris et de poussière.

    Morr comprit pourtant, via son microvox, qu’Orpheus et Wyatt étaient en très mauvaise posture. Ils se trouvaient désormais face à deux hécatrix et deux démonettes. Elles venaient de massacrer les deux Tempestus et l’Inquisiteur et une des hécatrix avait porté un coup sur Wyatt qui avait bien failli lui trancher la tête. Le Trône soit loué, une partie de son crâne était augmentique et blindé, ce qui lui avait sauvé la vie, bien qu’une partie de ses prothèses bioniques avaient été totalement arraché. Orpheus se démenait face à ses adversaires, sa lame de force brandit comme ultime rempart.
    Morr quitta sa position rapidement, remettant son fusil long en bandoulière, dégaina son lourd automatique et sauta avec souplesse depuis le toit vers l’intérieur de la maison, courant vers leur position à une cinquantaine de mètres de là.
    Elle fit irruption dans la pièce en dérapant et ouvrit le feu de manière reflexe, fauchant une des hécatrix d’une balle en pleine tête, la projetant en arrière, le sang éclaboussant le mur juste derrière. Bien que mal en point, Wyatt venait tout juste de ramasser Terror Daemonum, ce qui avait l’air de forcer les démonettes à reculer, hésitantes et ressentant le danger mortel qu’incarnait une telle arme légendaire, plusieurs fois tueuse de démons. Il profita de cet effet pour faucher l’une d’elles, la coupant en deux. Orpheus abattit sa lame sur la deuxième, le tranchant elle aussi sans autre forme de cérémonie. Enfin, Morr abattit la dernière cultiste, de deux balles alors qu’elle chargeait. Une dans le torse et une en pleine tête.

    Jézail reprit soudain son souffle en une grande inspiration, comme si elle venait d’échapper à la noyade. Tous les voyants du cockpit avaient viré au rouge et hurlaient tel un animal blessé. La Valkyrie était en chute libre, filant droit vers la cime des arbres. Elle se cramponna au manche et redressa l’appareil dans un hurlement de moteurs, sentant les branches des arbres se fracasser contre la carlingue comme des impacts de mitrailleuse lourde. Elle redressa enfin l’appareil. Reprenant son souffle, elle reprit les commandes et effectua un virage, réalisant qu’elle était partie bien plus loin qu’elle ne le pensait, manquant presque s’abimer en mer.

    Orpheus venait déjà de se précipiter sur leur inquisiteur et employa un de ses sorts pour arrêter l’hémorragie de sa blessure et tenter de la stabiliser en ressoudant ses chairs et ses os ravagés. Ce dernier ouvrit les yeux en serrant les dents. La douleur l’assaillit un instant, juste le temps que son armure lui injecte un cocktail de stimulants de combat. Orpheus le vit aussitôt aux pupilles de l’Inquisiteur qui se dilatèrent. Il attrapa le bras du Psyker en crachant un peu de sang tout en toussant.
    -Le Tesseract ?
    Ils l’aidèrent juste à se relever. Orpheus lui indiqua l’autre côté de la rue, à moins de cinquante mètres de là. La maison où se trouvaient les aeldari n’était plus qu’un immense tas de gravats. Des éclairs blancs-bleus et violacés se percutaient avec rage tandis que les silhouettes de la prophétesse et de la possédée Ashakanesh s’élevaient toutes deux dans les airs en tourbillonnant, dans une danse mortelle, à trente ou quarante mètres du sol. Elles se frappaient à coup de décharges psychiques dévastatrices, chacune capable de traverser un Space Marine de part en part alors que la lame sorcière s’entrechoquait avec l’épée démon de la possédée. Chaque coup aurait eu assez de puissance pour éventrer un blindé de l’Astra Militarum, d’un seul coup. Leur lutte acharnée dura de longues secondes, projetant des ondes de choc et des éclairs alentours qui embrasèrent des arbres ou pulvérisaient des façades encore debout.
    La Valkyrie venait de se repositionner dans l’axe et filait droit vers cette lutte titanesque. Jézail n’hésita pas et enclencha la commande de tir, faisant de nouveau crépiter son canon laser rotatif. Les raies écarlates fusèrent vers les combattantes. « L’Empereur reconnaitra les siens » comme le dit le vieil adage.
    La lame sorcière trancha la main d’Ashakanesh, celle qui tenait le Tesseract, au moment où cette dernière allait s’en servir contre la prophétesse aeldari. La main tenant le cube vola dans les airs au moment où la possédée hurla de rage et s’apprêta à abattre sa lame démon sur la psyker eldar. Les tirs de laser les frappèrent à ce moment-là. La prophétesse projeta un bouclier psychique devant elle, ce qui encaissa la majeure partie des impacts mais cela la força à reculer, luttant contre la puissance des impacts énergétiques qui fissurèrent son bouclier. La lame démon vola dans les airs, tandis qu’Ashakanesh se retrouva percutée, elle, par les rayons d’énergie. Son essence démoniaque absorba la majeure partie des dommages malgré les dégâts dévastateurs. Sur son corps, des cratères fumants indiquaient les impacts qui l’avaient traversé de part en part. Elle parvint pourtant à résister mais la lutte commençait à devenir trop inégale et elle n’aurait jamais le temps de régénérer ses blessures avant la fin de ce combat. Sans arme, ayant perdu le Tesseract et assaillie d’ennemis, elle préféra tirer sa révérence. Elle aurait bien le loisir de les recroiser une prochaine fois. Dans un déchirement aethérique, elle bascula dans le warp, afin de se rendre dans un lieu connu d’elle seule.

    Anders et les rescapés de son équipe s’étaient réunis autour du mausolée et venaient de détacher les six captifs, toujours plus ou moins inconscients. Certains étaient grièvement blessés. D’autres l’étaient moins mais Orpheus était en train de s’occuper d’eux. Plus loin, Jézail venait de poser la navette et s’apprêtait à les rejoindre.

    Weena Lan’enad se laissa redescendre doucement jusqu’au sol, ses robes et sa chevelure flottant autour d’elle. Elle se posa parmi les décombres encore fumants, laissant le Tesseract venir directement se poser dans sa main.
    L’inquisiteur reporta son regard vers elle, tandis que ses agents l’entouraient. Malgré leurs blessures et la perte des Tempestus, ils étaient parvenus à éliminer tous les cultistes. Les tentacules étaient en train de refluer dans le sol en gémissant. La menace était pourtant encore loin d’être éradiquées. D’autant plus que la sorcière eldar pouvait encore les doubler à tout moment. Ses pouvoirs n’étaient clairement pas à négliger.
    Anders effectua un petit signe discret à l’attention de ses hommes, leur indiquant de garder leurs armes parées, au cas où.
    La prophétesse écarta les bras et récita une mélopée dans sa langue incompréhensible. Une énergie tourbillonna lentement autour d’elle alors que les corps de ses guerriers se relevèrent les uns après les autres, leurs armes à la main. Elle tendit ses mains vers eux alors que leurs pierres-esprits se détachaient de leurs armures pour venir graviter lentement autour d’elle. Les guerriers se tenaient pourtant toujours là, parfaitement stoïques. De son autre main, le cube pulsa d’une lueur verte et une silhouette apparut, tel un double de la prophétesse mais chancelante et brisée. Elle tendit la main vers Weena puis les pierres-esprits furent aspirés par la nouvelle venue et fusionnèrent sur son armure runique. Elle reprit soudain des forces, ses yeux brulant d’une énergie renouvelée. Elle échangea quelques paroles avec Weena dans leur langue.
    Les observant de loin, Vorgen cracha au sol.
    -Pourriture de nécromants, lâcha-t-il entre ses dents, tout en tenant son arme, prêt à s’en servir. L’Inquisiteur fit un petit geste, lui indiquant de ne surtout pas bouger.
    Les deux prophétesses se dirigèrent alors vers eux, suivit par les guerriers eldars qui se déployèrent.
    Elles s’arrêtèrent à trois mètres devant l’Inquisiteur. Weena tenait toujours le Tesseract d’une main et sa lame sorcière de l’autre.
    -Il nous reste une dernière chose à accomplir, Inquisiteur…

    Leur échange fut soudain interrompu par la descente d’une autre navette, une Valkyrie Vendetta noire qui se posa non loin d’eux. Anders leva les yeux au ciel en pestant, reconnaissant à l’avance qui allait en descendre.
    Winter Argroves, suivie de son assassin Callidus, d’un sinistre Space marine et de deux autres personnages qu’ils ne reconnurent pas. L’un d’eux était assurément un psyker, reconnaissable à son crâne d’où partaient des implants psykana. L’autre n’était qu’une silhouette emmaillotée dans un long manteau à capuche, la dissimulant entièrement. Ils approchèrent et vinrent se tenir à égale distance des aeldari et de la cellule Invictus. Les prophétesses murmurèrent quelques incantations à l’approche de cette étrange coterie, identifiant parfaitement la nature de certains d’entre eux.
    -Anders…. Débarrassez-nous de ces affreux xenos et terminons ce pourquoi nous sommes là.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 19/07/2022 à 21:40 Citer ce message

    Les aeldari venaient de se déployer lentement mais prudemment, sentant la menace poindre dans les paroles de l’inquisitrice. Autour d’Anders, ses agents observaient la scène, parés à la moindre éventualité. Ils observaient les nouveaux venus avec une certaine crainte. La présence notamment du Space Marine et de l’assassin Callidus n’était pas pour les rassurer. Orpheus avait discrètement ramassé un fusil à plasma, bien décidé à en faire usage s’il le fallait. Ses équipiers tenaient leurs armes parées, eux aussi. Quant à Morr, elle tenait son fusil Exitus et enclenchait deux munitions spéciales, s’attendant, elle aussi à devoir faire un carnage.
    Passant sur la fréquence vox interne de leur cellule, Vorgen leur parla à voix basse.
    -Quels sont les ordres, Inquisiteur ?
    -Tenez-vous prêt, je vais tenter de désamorcer la situation. Orpheus ?
    -Oui… Monsieur… ?
    -Activité psychique ?
    -Affirmatif… Quelqu’un essaie de me…

    Anders effectua quelques pas en direction de Winter Argroves. Il planta la pointe de Terror Daemonum devant lui, avant de prendre la parole.
    -Voilà ce que j’appellerai un sens du minutage, Madame. Nous aurions apprécié disposer de vos forces pour combattre Ashakanesh et ses séides.
    -Trêve de sarcasmes, Anders. L’essentiel du combat reste encore à mener et vous le savez.
    -Sommes-nous perçu comme une menace ? Il semblerait qu’un de vos… Psykers tente d’interférer auprès de mes agents.
    Elle leva sa main gauche et effectua un petit signe. Aussitôt, la pression psychique que Baalzabeth exerçait sur Orpheus cessa. Ce dernier signifia à l’inquisiteur que ça pouvait aller.
    Anders reporta son regard vers Winter Argroves.
    -Bien… Comme je le disais, nous venons de contrer un rituel perpétré par une des Quatre Fléaux. Cette dernière est parvenue à s’enfuir, mais une chance que les aeldari, ici présent, nous aient assisté.
    -Le Tesseract reste le seul objectif, raison justement de ma présence. Quant aux xenos… n’allez pas imaginer un seul instant, Anders, qu’ils sont vos alliés.
    -Alliés de circonstance en tout cas.
    -Chimère que tout ceci. Le xenos n’est que mensonge et duplicité. Ils vous trahiront comme ils ont toujours trahi. La fourberie est dans leurs gènes. Voilà pourquoi nous ne pouvons laisser le Tesseract entre leurs mains plus longtemps.
    -Je me range pourtant à leur avis et suis convaincu qu’il doit être détruit.
    -C’est là que vous vous trompez et qu’ils vous ont abusé. Ce cube ne doit aucunement être détruit.
    -Et pour quelle raison ?
    -Il est le moyen le plus sûr de capturer l’essence des quatre Princes démons et pourra ainsi mettre fin à cette prophétie qui plane sur tout ce secteur depuis bien trop longtemps. N’allez pas tout gâcher avec je ne sais quelle fausse idée d’alliance.
    -Il semblerait pourtant que le Primarque ne soit pas de cet avis. On dit qu'il serait proche d'une de leurs émissaires...
    -Pernicieuse rumeur que tout ceci. N’allez pas avaler toutes ces théories complotistes visant à jeter à bas les fondements même de l’Imperium. N’allez pas croire un instant que Guilliman serait assez stupide pour laisser une de ses aeldari contrôler ses... décisions.
    -Je crois que nous avons besoin de revoir nos chances contre les Sombres Puissances, justement. Et ce que contient ce cube serait une menace encore pire si ce qu’il renferme venait à être libéré. Il est de notre devoir d’empêcher que cela advienne. A tout jamais.
    -En laissant votre destin entre les mains de sorcières xenos ? Soyez sérieux.
    Anders raffermit la prise sur la garde de son épée sanctifiée.
    -Au contraire, je suis, on ne peut plus sérieux…
    -Alors nous avons un problème…
    La tension, déjà palpable, venait de monter subitement d’un cran. Un silence venait de s’installer sur les ruines du petit village où ils se trouvaient. Autour d’eux, pour seul décor, se trouvaient les restes des bâtisses dont certaines étaient encore en train de se consumer. Une brume âcre et piquante, chargée de braises couvraient les ruines des maisons. Le charnier, composé des corps de villageois sacrifiés et des cadavres de cultistes, jonchait la terre qui était maculée de sang. L’odeur écœurante d’abattoir mêlée à celle plus sirupeuse et entêtante du warp, commençait à agresser leurs sens, tandis qu’à l’horizon, le jour se levait timidement, nimbé dans la brume matinale. Même les créatures arboricoles des alentours s'étaient tues.

    Winter Argroves savait que cette situation n’allait pas pouvoir se régler par la voie de la raison – du moins selon son propre point de vue. Ses yeux se mirent à luire d’un éclat encore plus violet que d’habitude. Elle plongea sa volonté dans celle d’Anders, chercher à le faire céder…
    Baalzabeth n’attendait que ce signal pour agir. Elle rejeta en arrière son long manteau à capuche qui vola dans les airs et dévoila son corps de démone aux longs membres nus, garnis de griffes et dont la chevelure noire comme la nuit ondulait autour d’elle. Si par le passé, la possédée avait été extrêmement puissante, avec les années et les rituels de liaison démoniaques successifs, Argroves étaient parvenue à en faire une créature, non pas docile, mais bien plus aisée à contrôler. Cela avait aussi amenuisé considérablement ses pouvoirs. L'inquisitrice radicale ne s'en plaignait pas. Ainsi, bien que lucide sur la duplicité qu'incarnait la démone, elle était parvenue à la dompter et la plier à sa propre volonté.
    Baalzabeth s’éleva dans les airs et projeta un éclair violacé avec la puissance de la foudre en direction de la prophétesse qui tenait toujours le Tesseract. Mais vive comme un félide, Weena Lan’enad avait anticipé ce qui allait se produire et para l’éclair à l’aide de sa lame sorcière, produisant une gerbe d’énergie destructrice autour d’elle. S’élevant dans les airs, telles des sylphides, les deux prophétesses attaquèrent aussitôt la possédée en retour.
    Anders parvenait à résister à l’assaut psychique tant bien que mal mais ne flanchait toujours pas, s’apprêtant à riposter. De leur côté, les agents d’Argroves se mirent à attaquer. Asaïd, l’assassin Callidus, venait de dégainer deux épées énergétiques qu’elle fit tourner dans ses mains et se rua au milieu des guerriers aeldari, en tuant deux dès son premier assaut, elle était suivie de Conrad, le psyker primaris qui joignit son épée de force à son attaque. Requiem, le Space Marine Carcharodon se rua lui aussi à l’assaut. Il pointa son pistolet bolter et tira sur Vorgen mais se denier évita les tirs mortels de justesse, ayant lui aussi anticipé l’assaut. Il abattit son épée tronçonneuse sur Wyatt mais ce dernier l’évita aussi au dernier moment. Les coups puissants du Space Marine n’étaient pas à prendre à la légère. Ils étaient parfaitement capables d’ouvrir en deux un guerrier bien bâti. Vorgen profita que Wyatt et l’Astartes luttaient au contact, pour se reculer de quelques pas, visa le casque du Marine et fit feu, presqu’à bout portant avec son fusil de précision. La balle blindée de gros calibre arracha tout de même une partie du casque, dévoilant la moitié du visage du Carcharodon. La blessure était légère mais elle n’était pas anodine pour autant. Orpheus tira avec le fusil à plasma ramassé juste avant mais manqua sa cible de peu.
    Anders avait cette impression de combattre sous l'eau. Par chance, son armure énergétique lui procurait la vigueur nécessaire de charger Winter Argroves. Leurs lames s’entrechoquaient et il était même parvenu à la blesser d’un tir de son pistolet bolter au bras. Celui où elle tenait aussi un pistolet bolter, la forçant à le lâcher tout en poussant un cri.
    De son côté, Baalzabeth était en plein corps à corps contre les deux prophétesses aeldari. Elle s’acharnait particulièrement sur la porteuse du Tesseract. Elle porta notamment un coup qui la projeta violement en arrière, brisant son aura psychique dans une volée d’éclats colorés. Weena traversa une cloison dans une explosion de briques et de poussières. Blessée, elle dérapa de quelques mètres dans une gerbe de flammes alors que la possédée se ruait de nouveau sur elle. Elle décida alors de lancer le Tesseract dans les airs et ce fut la seconde prophétesse qui bondit et l’attrapa au vol, juste au moment où Baalzabeth percutait Weena de toute sa puissance. Elle lui éventra son armure runique et la blessa à plusieurs reprises. Mais, l’espace d’un instant, son attention venait d’être détourné par le cube volant dans les airs et elle ne vit que trop tard la lame sorcière sur laquelle elle venait de s’empaler jusqu’à la garde, en plein cœur. Si elle en avait eu encore un en état de fonctionner, le coup aurait pu lui être fatal. Pourtant, l’énergie psychique dévastateur de la lame sorcière était en train de déverser un torrent de feu aethérique dans le corps de la possédée qui allait se faire consumer de l’intérieur, incapable de résister à l’intensité d’une telle attaque. D'un bond, elle se dégagea, tout en frappant Weena à l'aide de ses griffes. Un de ses coups la désarma et propulsa son corps à quelques mètres de là, l'envoyant s'écraser contre un mur qu'elle écroula. La démone, le corps parcouru de flammes aethériques, bondit alors dans les airs et percuta la seconde prophétesse, celle qui tenait le Tesseract. Elle la frappa à bout portant de ses éclairs. D'une main, elle empoigna le cube et de l'autre, elle lui enserra le cou, l'égorgeant sans autre forme de cérémonie. Dans un bruit d'os qui craquent et de succion humide, elle lui plia violemment le corps en arrière, faisant céder ses cervicales et lui arracha la tête avec une partie de sa colonne vertébrale. Ses deux trophées en main, elle vint se poser parmi les ruines encore fumantes d'un bâtiment, faisant voler alentours une pluie de débris dans une onde de choc. La démone hurla sa rage au moment où sa tête fut traversée de part en part dans une gerbe d’un rose gélatineux.
    Morr avait attendu cet instant précis pour placer son double tir. Le premier avec sa balle perce-écran, capable même de neutraliser une aura démoniaque et le second avec une munition Turbo Penetrator. Le type de balle qui traverserait même un blindé. Sans attendre que le corps de Baalzabeth ne retombe au sol, elle arma la culasse de son fusil Exitus, pivota et plaça un autre tir sur le Space Marine, pile au moment où ce dernier venait de soulever Wyatt du sol et s'apprêtait à le démembrer. La balle toucha ce qu'il restait du casque de l’Astartes, l'explosant dans une pluie d'éclats. Relâchant sa prise, il pivota en arrière et s’écroula au sol. Il n’était pas mort, mais l’impact allait le clouer à terre quelques instants. Morr chercha une nouvelle cible mais vit que le psyker primaris venait de se faire clouer à terre de façon nette par une rafale de radiant tirée par Jézail et peut-être aussi par des tirs de Vorgen.
    L’assassin Callidus avait fait un carnage parmi les guerriers eldars et les avait tous éliminé. Pourtant, la dernière prophétesse venait de se relever et était parvenue à l’aide de ses pouvoirs à la paralyser, la laissant ainsi engluée, comme dans une toile d'arachnide. A l'aide de ses pouvoirs kinésiques, elle força une partie d'un bâtiment avec toute sa charpente à s'écrouler sur l'assassin, l'ensevelissant pour de bon.
    Morr venait de recharger son fusil Exitus et pivota alors sa ligne de mire droit vers le combat central, là où se tenait Anders et plaça un autre tir. Argroves était finalement parvenue à soumettre l’inquisiteur à sa propre volonté psychique. Il venait de poser un genou à terre, avait déposé ses armes et elle se tenait là, devant lui, prête à abattre sa lame sur son cou.
    Son geste se figea pourtant au moment où la balle Exitus l'atteignit en pleine tête, mettant ainsi fin au combat. L’Inquisitrice radicale fut projetée en arrière et disparue dans l'effondrement d'un plancher qui s'écroula dans la cave d'une maison alors qu'une gerbe de flammes et de gravats s'écroulaient sur elle.
    Anders était en train de reprendre son souffle, comme se remettant d'une noyade, le visage couvert par le sang de Winter Argroves. Bien que contrôlé psychiquement durant ces dernières secondes, il avait été conscient de tout ce qui s’était passé. Lui-même n’y croyait pas. Il y avait eu le concours des aeldari, certes, ce qui avait grandement penché en leur faveur. Mais les talents de Morr n’étaient plus à faire à présent. Elle avait clairement fait penché le combat en leur faveur, ce qui était totalement inattendu.
    -Pas de blessés ? Dit-il à l’attention de ses agents tandis qu’il se redressait, assisté par son armure énergétique.
    Ils répondirent par la négative. Seuls Orpheus et Wyatt avaient été touché, tout comme lui, mais leurs blessures n’étaient pas trop sérieuses.
    -Jolis tirs, ajouta-t-il à l’attention de la Vindicare.
    -Exitus, acta probat. Vorgen et le reste de l’équipe m’ont bien aidé, répondit-elle, tout en rechargeant son arme rapidement. Sans eux, ça n’aurait pas été aussi simple.
    -Le Space Marine n’est pas mort, annonça Vorgen. Doit-on l’achever ?
    -Non… On va essayer de le garder en vie. Je voudrais d’abord m’assurer qu’il ne soit pas contrôlé psychiquement.
    Orpheus vint le sonder et confirma que ce n’était pas le cas.
    -Vous voulez le garder en vie ? Il ira tout raconter et dira que c’est vous qui avez tué votre supérieure. Il signera notre arrêt de mort !
    -Il n’a pas vu Argroves tomber. Ce sera alors sa parole contre celle d’un inquisiteur. Je pense pouvoir l’utiliser à mon avantage.
    -Permettez-moi d’insister mais je pense qu’il est une véritable menace.
    -Au contraire. Les Carcharodons Astra sont des plus loyalistes envers l’Imperium mais aussi envers l’Inquisition. Ils ne se soucient pas de politique. Je pense que son Chapitre sera reconnaissant de pouvoir le récupérer. En attendant, on va le garder avec nous. Je le veux sous bonne garde. Nous aviserons plus tard. Il nous reste encore à faire.
    Il effectua quelques signes à Vorgen et aux autres.
    -Surveillez les abords, je ne veux pas d’autres surprises.
    Il reporta son attention vers la dernière aeldari vivante. Blessée, elle était agenouillée et pleurait parmi les dépouilles de ses semblables. Il approcha d'elle.
    -Vous comptez toujours détruire ce Tesseract.
    Elle se redressa. Des larmes maculaient ses joues couvertes de suie et de sang. Elle prit quelques secondes avant de répondre.
    -Oui. Je dois utiliser mes pouvoirs sur le sarcophage Mais pour cela, vous allez devoir écarter tous vos hommes. La zone est encore très dangereuse. Le rituel que je vais employer aura besoin de beaucoup d’énergie et aucune interférence ne doit venir le perturber.
    Anders indiqua à ses agents de détacher et d’emporter leurs acolytes, toujours sonnés ou sous les effets de quelques drogues. Ils étaient en train de reprendre leurs esprits. Il devrait les interroger mais il avait plus urgent à gérer dans l’immédiat.
    Orpheus approcha malgré tout. Weena désigna son pendentif, ayant reconnu la pierre-esprit qui scintillait accrochée au cou du psyker. Il avait prévu sa réaction et avant même qu’elle n’adopte une attitude menaçante, il détacha le collier et le leur tendit.
    -Tenez, je comptais justement la rendre à son peuple. Sachez que cette pierre m’a rendu bien des services et son aide m’a été précieuse.
    Weena la prit dans sa main, avec une infinie précaution, comme si elle tenait un petit animal blessé.
    -Il ne s’agit pas d’un vulgaire porte-bonheur, humain. J’apprécie cependant votre geste spontané. Il aurait été dommage que j’eus été contrainte de la prendre moi-même.
    Soudain, Jézail les alerta tous en désignant la cime des arbres, à quelques centaines de là. Une Valkyrie venait de prendre son envol.
    -La navette d’Argroves !
    -Trône ! Lâcha Anders. Absolom, son agent Vanus, il va nous échapper.
    Déjà Morr était en train de faire feu, mais ses tirs, bien que précis, n’eurent qu’un faible effet sur l’appareil qui filait déjà au loin.
    L’inquisiteur désigna Vorgen et Orpheus.
    -Restez ici avec les acolytes. Vous me gardez le Space Marine à l’œil. Il fit un signe à Jézail, Morr et Wyatt de le suivre à leur propre navette. Il n’était pas question qu’un des agents d’Argroves donne l’alerte, sans quoi, lui et sa cellule risquaient bien de finir Excommunicate traitoris plus vite que prévu.

    Leur navette lui donna la chasse sur des kilomètres avant qu’ils ne parviennent à entrer en contact vox. Malgré les injonctions de l’Inquisiteur, le fuyard ne comptait clairement pas obtempérer. Au bout de longues minutes, Anders donna l’ordre à Jézail.
    -Tirs de semonce. Force-le à atterrir.
    -A vos ordres.
    Les tirs de multilaser furent particulièrement précis et dissuasifs. Il lui fallut malgré tout, trois rafales pour le forcer à se poser sur une petite ile.
    Ils allaient se poser non loin lorsque Jézail cria dans le vox :
    -Le pilote, il vient de sortir de la navette et il s’échappe vers la forêt !
    -Tir de semonce dans sa direction !
    Jézail ouvrit le feu mais l’homme courait toujours.
    -Il va nous échapper !
    -Alors abattez-le !
    Alors que leur navette remontait, Anders sauta à terre. Depuis les portes latérales, Morr et Wyatt ouvrirent le feu avec les bolter lourds. Un des tirs finit par toucher et il s’écroula au loin dans les hautes herbes.
    Anders finit par le retrouver. Le type en question était bien Absolom, l’agent Vanus d’Argroves. Il avait le ventre ouvert et la masse de ses organes s’étaient répandue de sa plaie béante. Il haletait et savait qu’il n’en avait plus pour longtemps. Il ne pouvait même plus parler à cause du sang qui remontait dans sa gorge. Un ensemble d’implants et de mécadendrites endommagés par les tirs continuaient de cliqueter frénétiquement autour de lui.
    Anders lui planta la pointe de sa lame dans la gorge, moins pour abréger ses souffrances, que par pur pragmatisme. Il retira son épée puis se pencha sur sa dépouille et collecta une sacoche ayant survécu aux tirs. Elle contenait un pistolet écorcheur, un voleur vox et de petites boites contenant des mouches-pix et des blattes-comm. Il ramassa le tout et retourna vers leur navette qui était sur le point de se poser pour le récupérer. Wyatt et Vorgen étaient descendus eux aussi de la Valkyrie et se dirigeaient droit vers la navette de l’agent Vanus, posée à deux cents mètres de là. Anders eut une soudaine intuition et allait leur voxer quelque chose au moment où elle explosa dans une boule de feu. Par chance, ils étaient encore loin et ne furent pas touché par l’onde de choc.
    -L’enfoiré, il l’avait piégé, gronda Jézail dans le vox.
    -Pas le temps de s’attarder, on retourne là-bas, leur annonça Anders.

    Elle venait de reprendre conscience et se demandait si diable, elle était enfin morte, ou dans un état proche, à rôtir dans les flammes du warp. Elle réalisa cependant qu’une fois de plus, la mort semblait ignorer son existence. Elle se dégagea avec peine des poutres et gravats qui paralysaient ses membres et ne put s'empêcher de grimacer à cause de la douleur. Une de ses jambes était brisée, tout comme plusieurs de ses côtes. Quant à sa tête et au sang qui coulait sur son visage, elle n'osait même pas imaginer le sérieux de la blessure qui lui avait arraché une bonne partie du cuir chevelue. Elle parvint à ramper tant bien que mal et à s'extraire de son trou. Elle n'avait plus d'armes, plus de force et ses pouvoirs psychiques allaient demander trop d'énergie pour qu'elle en fasse usage. Parmi les débris encore fumants, elle parvint à ramper en serrant les dents et vit à une centaine de mètres de là, la prophétesse aeldari en train d'accomplir son rituel. Elle pourrait encore s'approcher et tenter de l'en empêcher, il n'était pas trop tard. Elle vit alors deux des agents d'Anders, non loin de là, occupés à enchainer Requiem.
    Il était en vie... Tout espoir n'était donc pas encore perdu. Elle continua de ramper lentement parmi les gravats et finit par les voir, eux aussi, un peu plus loin. Les corps de Conrad et Asaïd étaient là, gisant dans les ruines d'une maison. Le psyker ne survivrait pas à ses blessures. Elle s'approcha alors lentement du corps de la Callidus. Elle vivait encore, mais ses blessures étaient telles qu'elles auraient été fatales, même sur un solide gaillard. Pourtant, à son approche, l'assassin redressa son visage androgyne vers elle, un sourire carnassier lui déformait les traits alors que ses yeux brûlaient d'une aura rosée et que de la vapeur d'eau fumait depuis sa peau. Argroves comprit en cet instant qu'Asaïd n'était plus et que Baalzabeth venait de se trouver un nouvel hôte.
    -Sic, psykae vivere. Le psyker vivra, se contenta de répondre la démone.
    La navette Valkyrie était de retour. Celle d'Anders et ses hommes. En restant là, elle allait mourir, ou pire, elle finirait comme Requiem, enchainée et capturée par les hommes de Karl Anders. Elle eut un sourire amer en pensant que c'était elle qui en avait fait un inquisiteur. Quelle ironie du sort, se dit-elle. Il avait gagné cette partie, c’était indéniable. Mais il restait encore tant à faire.
    Elle jeta un dernier regard à Requiem, au loin, alors que la Valkyrie se posait non loin de là. Elle effectua un petit signe de tête à la démone qui s'empressa de les téléporter tous les trois.

    Anders et ses agents étaient de retour dans le village en ruine. Le jour s’était levé et lors de leur retour à bord de la Valkyrie, ils avaient aperçu une sorte de palais flottant qui mouillait non loin de la côte, à moins d’un kilomètre du village. Il s’agissait d’un de ces argonautiques de luxe, comme en possédaient certains mondes paradis.
    -On n’est pas sur Archaea, en tout cas, lâcha Jézail à l’attention de Morr et de Wyatt, en descendant de l’appareil et en retirant son casque. Plus loin la prophétesse était en train de pratiquer le rituel. Selon elle, le cube allait lui permettre de neutraliser l’esprit de Kalish’Ashakiis, comme cela avait déjà été fait au préalable pour Izumat et Kharn Ozgul. Ainsi trois des princes démons seraient neutralisés. Il ne resterait plus que celui de Nurgle. Sa localisation prêtait encore à la controverse et le temps allait forcément jouer en leur défaveur. Elle préférait détruire le cube avec les trois premiers princes, ainsi il n’en resterait qu’un, plus faible et isolé, il serait alors moins compliqué d’en venir à bout en combinant leurs forces. Anders avait finalement décidé de se ranger à cette idée.

    Il était retourné auprès de Vorgen et Orpheus et s’entretenait avec eux au sujet des acolytes. Les autres agents se chargeaient de collecter certaines armes. Anders avait demandé qu’elles soient analysées avant de commencer à s’en servir.
    -Vous êtes certains que les acolytes ne présentent aucune trace de possession ou de contrôle warp ?
    -Je n’ai rien détecté, en dehors d’un état de choc, mais ils sont en train de récupérer.
    - Et des traces de corruption ?
    -Je dirais… qu’ils sont dans la bonne moyenne. Le warp les a affectés, c’est certains mais rien de bien significatif.
    -J’ai besoin de certitudes, Orpheus, pas d’à peu près. Je dois interroger l’un d’eux. Nous avons peu de temps, je veux qu’il soit opérationnel.
    Le psyker se contenta de hocher la tête.

    Cinq minutes plus tard, l’Inquisiteur se tenait devant Rico qui venait de lui exposer les derniers évènements qu’ils avaient vécu sur Archaea ces deux derniers mois. Il évoqua le réseau du Syndicat de l’Ombre qui s’étendait au-delà de l’agrimonde et qui impliquait plusieurs chartistes ainsi que des libres-marchands dans un vaste trafic de commerce froid. Cela incluait divers artefacts xenos dont le point d’orgue était justement le Tesseract qui impliquait des hérétiques de tous bords. Il évoqua le fait qu’avec sa cellule, ils avaient commencé à faire le ménage et la plupart des hommes de Grendel Haxt avaient déjà été tué. Il restait encore quelques bras droits et certainement des hommes de main, mais Rico était persuadé que les effectifs du Syndicat avaient pris de sérieux bolts dans l’aile.
    -Parlez-moi de la Kasballica, l’interrompit l’Inquisiteur. Vous me dites que McLatchy serait en rapport avec une baronne de cette organisation ?
    -Oui, elle aurait un plan pour nous infiltrer dans le Syndicat et Felton est l’homme tout désigné pour cette opération. Elle pourrait nous permettre d’approcher Haxt. Nous pensons qu’elle veut sa place et c’est la raison pour laquelle, Felton compte se servir d’elle.
    -C’est pas idiot. Les noyauter de l’intérieur est une idée à creuser. Et cette piste sur Jocindyr d’Andarion, du coup ? C’est celle qui vous a mené jusqu’à ce bateau, c’est bien cela ? Elle était bien en possession du Tesseract, du coup ?
    -Oui, il se trouve qu’elle était une possédée d’une des Sombres Puissances. C’est elle qui était bien en possession du cube, en effet. Nous avons suivi sa piste depuis Archaea dans son palais à Newburg. Il y avait un code, une sorte de crypte xenos avec un portail. Il y avait aussi des hereteks à la recherche du Tesseract. Des agents de l’Hydre ou quelque chose comme ça. On les a éliminés, enfin presque tous. C’est ce qui nous a mené ici. On a suivi une vision qu’avait eu Ezek et à la suite de ses indications, nous avons pu mettre la main sur le Tesseract. On a éliminé d’Andarion et une partie de ses sbires mais finalement nous nous sommes fait capturer et emmener ici.
    -Sérieusement, si tout ce que vous me dites est vrai, je suis impressionné. Je ne donnais pas deux semaines de survie à votre équipe.
    -C’est-à-dire que nous nous sommes… Comment dire… Un peu spécialisé chacun dans un domaine respectif. Felton travaille à se faire passer pour un noble de la Kasballica, Derreck travaille sur le warp, Lek sur l’arment, quant à moi, je me suis constitué un réseau avec l’Ecclésiarchie.
    -A ce sujet, Ezek, Lorne et Tsali sont absents ?
    -Lorne a été tué. Quant à Ezek et Tsali, ils travaillent sur Archaea, en lien avec Jézabel.
    -Ah… Très bien. J’ai reconnu Lek, celui qui a un bras en moins, mais les deux femmes, qui est-ce ?
    -Lexxi, une ancienne de l’Astra Militarum qu’on a recruté et l’autre, c’est une praetor de l’Arbites qu’on a rencontré récemment. Jézabel les a recrutés toutes les deux. Elles ont su se montrer des plus efficaces.
    -Dans ce cas… je lui fais confiance. Je la contacterai dès que possible, mais si elle confirme vos dires, concernant, le Syndicat, le complot heretek et la mort de d’Andarion, vous auriez alors accompli de sérieux résultats.
    -Vous avez des consignes particulières pour infiltrer la Kasballica ?
    -Si cela permet d’évincer Haxt, ce sera parfait, sinon il faudra trouver autre chose. Méfiez-vous des objectifs de la Kasballica, c’est tout ce que je peux ajouter. Je vous laisse faire au mieux, dès lors que l’objectif est atteint. Quant à ces ruines xenos, cela m’intrigue. Je vais y réfléchir et voir si j’implique ou non l’Arbites dans cette affaire, en attendant que je prenne une décision. Je vous transmettrai peut-être un message à leur remettre.
    -Et nous repartons comment ? Si c’est pas indiscret ? Nous ne savons même pas sur quel monde nous nous trouvons.
    -Je me suis entretenu avec les aeldari. Une fois que je me serai assuré qu’elles ont détruit le Tesseract, avec Invictus, nous allons retourner sur Endymion comme c’était initialement prévu.
    -Mais nous ?
    -Vous allez retourner sur Archaea. Il vous reste à faire tomber Grendel Haxt.
    -Par quel moyen on y retourne ?
    -Cela risque de ne pas vous plaire, mais il n’y aura pas d’autres solutions.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 28/07/2022 à 00:01 Citer ce message

    Le Reliquaire
    Bureau inquisitorial sur Archaea
    Tempus estimare 971.020M42 – 08H23
    44ème jour sur Archaea.

    Cela faisait maintenant deux jours que Rico et son équipe avaient été retrouvé, inconscients, dans les décombres du manoir d’Andarion à Newburg. Jézabel et les membres de la cellule Tenebrae les avaient sortis de là, puis placés sous sédatif afin de les transférer au Reliquaire, les locaux secrets de l’Inquisition. Là, ils avaient subi une batterie de tests génétiques, psychologiques et psychiques, afin de déceler toute trace de corruption dues à l’exposition au warp. Tous avaient été affecté par ce qu’ils avaient vécu et subi ces derniers jours, mais la plupart s’en sortaient avec assez peu de séquelles. Seuls deux d’entre eux indiquaient des signes un peu plus préoccupants, qu’il faudrait surveiller. La corruption et la folie ne les avaient pas entièrement épargnés.
    Ce qui les avait en grande partie sauvés, selon les agents de l’Inquisiteur, était le fait qu’ils étaient restés inconscients durant le rituel débuté par Ashakanesh.
    Tous avaient été blessé et en portaient encore les stigmates, tels que des hématomes, des coupures et pour certains, des bandages sur leurs plaies recousues et traitées. Rico marchait à l’aide d’une béquille, ayant une jambe placée dans une atèle, tandis que pour Lek, son bras droit récemment sectionné, venait d’être remplacé par un augmentique de belle qualité, tout en métal et composite noir. Mais encore affaibli et sous tranquillisant, il n’était pas tout à fait familiarisé avec les connexions de son nouveau membre.
    Après leur réveil et leur débriefing, ce furent Tsali et Jézabel qui les réunirent dans le strategium du centre opérationnel. Cette dernière leur demanda de prendre un siège autour de la grande table ovale.
    Une partie des questions restaient encore en suspens mais la cellule Tenebrae était justement sur place, à Newburg afin que les sombres secrets enfouis sous le manoir ne puissent refaire surface. Les forces de l’ordre avaient été sollicité pour simplement fermer le site et en interdire l’accès au moindre curieux. Le motif invoqué avait été un éboulement causé par l’effondrement d’anciens tunnels en partie inondés. La dangerosité et les risques d’accidents avaient tout de suite éloigné les badauds qui avaient bien d’autres félides à fouetter, de toute façon. L’année touchait plus que jamais à sa fin et la Sanguinala était sur toutes les lèvres. Ce jour était un jour de célébration dans tout l’Imperium et ce soir, des défilés, chants et autres carnavals allaient animer les rues. Autant dire que l’éboulement sous un manoir abandonné était bien le cadet des soucis des citoyens.
    Jézabel attendait le rapport de Tenebrae pour prendre une décision. Mais s’il s’avérait que la menace était toujours active – que le moindre portail xenos était encore en activité ou que le Trône savait quelle horreur risquait d’en jaillir, elle devrait en référer à leur inquisiteur. Elle devrait sans doute en informer aussi Assumptia Isabal de l’Ordo Xenos, en espérant qu’elle et son équipe soient joignables. Pour l’heure, elle priait l’Empereur, la Sainte et tous les Saints et devait faire avec les moyens du bord, à savoir deux cellules d’acolytes, dont une qui avait frôlé la mort de peu. C’était là, tout ce qu’elle avait de mieux à déployer sur le terrain. Pas de troupes de choc, pas de sœurs de bataille et encore moins d’Astartes. Ces derniers étaient tous déployés sur les zones de guerres incessantes qui jalonnaient les bordures du secteur et les rapports étaient loin d’être optimistes. Le mieux qu’elle avait pu obtenir, était une poignée de gardes impériaux qu’elle espérait transformer en commandos pour sécuriser le Reliquaire dans un premier temps.
    C’étaient là, les raisons pour laquelle elle ne pouvait se permettre de retirer Obscurus du service actif. Et puis, Rico et son équipe étaient plein de ressources et avaient cette incroyable faculté à se sortir des situations les plus dangereuses.
    Mais à s’y mettre aussi…
    Elle comptait aussi leur annoncer qu’ils étaient devenus des acolytes de confiance « officiels ». Comme si ce titre avait réellement un sens au sein d’une organisation secrète, sans avoir la moindre existence reconnue. Mais au moins, certains d’entre eux avaient peut-être une chance de devenir un jour des agents du Trône. Leurs premiers faits d’armes étaient déjà intéressants, vu le peu de temps qu’ils avaient passé sur le terrain. Mais c’était aussi cela, intégrer l’Inquisition. Combattre le mal sous toutes ses formes, avec peu de temps pour s’y préparer et encore moins de temps pour s’en remettre. Il fallait soit être un sacré combattant, soit un sacré petit malin pour s’en sortir et gravir les échelons. Et même ainsi, les places étaient rares et peu d’hommes ou de femmes survivaient avec les années.

    -Il y avait aussi des hereteks sur place. Je crois l’avoir mentionné, non ? Lâcha Rico.
    -Nous l’avons noté, en effet.
    -L’un d’eux était encore en vie, je tiens à le préciser.
    -Tenebrae pourra nous le confirmer.
    -Ils les ont trouvés ?
    -Seulement des corps. Je n’ai pas encore tous les éléments.
    -Ils font partie d’une organisation appelée Hydre ou Hydra. Quelque chose comme ça.
    -Nous avons noté cela. Sachez juste que leur présence est prise très au sérieux. Ce sont des hérétiques de la pire espèce.
    Jézabel fit un geste de la main, lui indiquant qu’elle souhaitait aborder un autre sujet. Elle poursuivit.
    -En attendant le rapport de Tenebrae, j’aimerai que vous vous concentriez sur votre enquête principale. Celle sur Grendel Haxt.
    -On a du nouveau sur lui ?
    -C’est ce que j’aimerai savoir, justement. Nous avons intercepté une communication vox, vers cinq heures, ce matin, émanant du Magistratum. Ils étaient sur les lieux d’un incendie, à l’est du quartier des Docks.
    Elle fit un signe à Mazarin, son servo-crâne. Ce dernier émit quelques tonalités binaires avant de lâcher quelques mots.
    -Picturas ? Si ! Velox … !
    De son projecteur oculaire, une série de pix holo s’affichèrent au-dessus de la table ovale. Jézabel leur commenta les images.
    -Comme je le disais, un incendie a ravagé un établissement appelé le Vertigo. Un cabaret ou quelque lieu de débauche dans le genre.
    -Il y a des victimes à déplorer ? Lui demanda Poppy.
    -A déplorer, je ne sais pas… Mais il y a des victimes, oui. D’après les derniers échanges vox interceptés, il se pourrait que Grendel Haxt et Gloria Everdynn en fassent partie.
    -Trône… Comment sait-on avec certitude que ce sont bien eux ?
    -On ne le sait pas justement. Voilà pourquoi, vous allez vous rendre sur place. Pour l’instant c’est le Magistratum qui dirige les opérations et je ne tiens pas à ce qu’ils soient informés que les ordos comptent s’en mêler. Faites preuve de discrétion, nous ne savons pas qui surveille les lieux et si certaines oreilles trainent déjà sur place.
    Elle fit un petit signe vers Poppy Sandwall.
    -Preator ?
    -Madame ?
    -Je peux compter sur votre présence et sur votre badge de l’Arbites pour faciliter cette enquête ?
    -Vous pouvez compter sur moi.
    -Bien. Mazarin va vous communiquer l’adresse. Je veux que vous ma passiez la zone au peigne fin. Indices sur place, témoins de la scène et analyse des corps. Je veux savoir si ce sont eux. Ce qui va soulever deux questions. S’il s’agit bien de Haxt et de sa femme, qui les éliminé et pourquoi ? En revanche, si ce n’est pas eux, cela soulève autant de question. Qui est derrière cette mise en scène et pourquoi ?
    -Il pourrait s’agir de la Kasballica ? Répondit Rico.
    -Il pourrait s’agir de seul l’Empereur sait qui, Monsieur Gallileus. Je n’attends pas de réponse dans l’instant. J’attends des réponses après votre enquête. Autre chose…
    Cela ne vous aura sans doute pas échappé, mais ce soir nous fêtons la Sanguinala…
    -Par Terra, s’esclaffa Rico, mais j’avais mon projet de radio à lancer, moi ! je devais…
    Jézabel releva un sourcil, s’attendant à ce qu’il évoque aussi son fantasmagorique commerce de vin dans lequel il avait investi une petite fortune.
    -L’Evêque apprendra à se passer de vos talents, croyez-moi. En revanche, la traque de l’hérésie passe en priorité haute. Le jour du sacrifice du Saint Primarque ne risque pas d’être férié pour ceux que nous traquons, répondit-elle sans le moindre humour. Ce qui signifie que votre tâche risque d’être rendue bien plus compliquée. La ville sera en pleine effervescence, la plupart des activités et services seront fermés, quant aux forces de l’ordre, elles seront toutes mobilisées afin de sécuriser les cortèges et autres défilés dans les rues et ce pour toute la soirée et toute la nuit. Autant vous dire que circuler vous sera impossible ou presque.
    -Un risque d’attentat est-il envisagé, Madame ? Lui demanda Poppy.
    -Le risque est maximum, en effet. L’Arbites et le Magistratum sont déjà mobilisés.
    Elle ordonna à Mazarin de couper sa projection holo et consulta son chrono.
    -Je vous laisse le temps de vous préparer. Vous partez dans moins d’une heure. Vos effets personnels et vos armes ont été récupéré, ainsi que votre véhicule qui est garé non loin d’ici. Tsali vous donnera les dernières consignes.
    -A-t-on des nouvelles de l’Inquisiteur, Madame ? Lui demanda Rico. Sait-on ce qu’il en est de ce rituel, du Tesseract et du lieu où nous étions retenus ?
    -Je ne dispose d’aucune information sur ces sujets.
    Elle leur signifia alors qu’ils pouvaient disposer.

    Lexxi connaissait les lieux pour y avoir déjà séjourné quelques semaines plus tôt, quand elle avait été recrutée dans la cellule Obscurus. Elle y avait passé une semaine à apprendre, dans un premier temps, les armes et artefacts xenos. C’est là qu’elle avait fait la connaissance de certains membres de Tenebrae, comme Elisha. Toutes les deux envisageaient de devenir des agents du Reliquaire, expertes en armes et artefacts exotiques. C’est là aussi qu’elle commença à étudier en compagnie de l’omniprophète Elios Ordax-Kappa de l’Adeptus Mechanicus. Un être énigmatique, à l’instar de tous ces technoprêtres bardés de mécadendrites, de membres mécanisés et dont le visage n’en était plus un mais un patchwork d’implants, ce qui était toujours déroutant, la première fois qu’on le voyait. Il était cependant doté d’un humour grinçant, ce qui détonnait considérablement avec son allure mécanique. Lexxi en profita pour passer le voir à son atelier et le saluer.
    Elle le trouva penché sur une sorte d’établi, éclairé par des servo-lumens. Sous ses robes rouges, crènelées de blanc, elle pouvait discerner ses implants chromés et ses mécadendrites occupés à opérer des microsoudures sur ce qui devait ressembler à un corps étendu sur l’établi. Elle approcha et le salua, observant ce qu’il faisait. Sans même qu’il ne se retourne, une des mécadendrites terminée par un implant optique se tourna vers elle, la scannant de la tête aux pieds.
    -Sergent Anderson ? L’Omniméssie soit loué, que me vaut cette visite ? Dit-il depuis son implant vox.
    Elle observa ce qui était allongé sur l’établi. A première vue, il s’agissait du corps d’une jeune fille nue, comme si elle se trouvait sur une table d’opération, le torse et le crâne ouverts et le tout connecté à toute une batterie de servo-medicae. Mais à bien y regarder il ne s’agissait pas tant d’organes biologiques que d’implants augmentiques, à tel point qu’elle n’avait jamais vu une telle précision ni une telle minutie dans ce type de modifications cybernétiques corporelles. La plupart de ses implants devait remplacer certains organes d’origine et le tout était recouvert d’une couche d’épiderme de synthèse qui imitait la peau humaine à la perfection.
    -Trône, j’ai déjà vu des servitors mais jamais un modèle qui passe à ce point pour un humain. Son corps est incroyable.
    Elle se garda bien d’ajouter que les technoprêtres, en général, n’avaient rien d’humain, eux non plus.
    -C’est parce qu’il ne s’agit en rien d’un servitor, ma chère. C’est une factor. Une technaugure dont la fonction est de servir d’émissaire, ou d’infiltré. En fonction de ce que l’on veut en faire.
    -Ah ?
    -Un de mes confrères biologis l’avait laissé ici avec tout un stock de pièces détachées. Ses fonctions cérébrales ont été oblitérées mais son corps est resté en parfait état de fonctionnement, loué soit la Machine, j’ai bon espoir de la remettre en état.
    Il interrompit ce qu’il faisait puis se tourna vers elle, rivant ses optiques augmentiques dans son regard.
    -Mais je vous ennuie avec mes histoires de bricolage… Laissez-moi deviner… Vous avez enfin décidé de vous faire augmenter ? Mmm ? Une greffe musculaire ? Une arme d’assaut implanté ? Ou un blindage dermique au niveau du… Torse ?
    Elle ne put s’empêcher d’avoir un sourire gêné.
    -Heu… Peut-être une autre fois, Elios. En réalité, lorsque nous nous nous sommes croisés l’autre jour, je vous avais passé une commande et confié des viseurs biométriques à paramétrer.
    -Oh, des améliorations d’armes absolument parfaites. Nos troupes skitarii en sont équipées, le savez-vous ?
    -A vrai dire, non…
    Il resta en attente pendant quelques instants.
    -Il va falloir que je scanne le profil de vos équipiers, ma chère.
    -Je vais les appeler.
    -Pour l’un d’eux, c’est déjà fait, cela dit.
    -Lek ? Son bras augmentique, c’est vous ?
    -Qui d’autre, voyons ? Et n’est-il pas mieux ainsi ? Humm ? Augmenté…
    -Si, si… Bien sûr…
    -D’ailleurs, vous-même… Une telle anatomie… Je vois tellement de possibilités.
    -Oui, bin… Je vais les chercher.
    Elle en profita pour lui présenter Rico et les autres, curieux de rencontrer un technoprêtre dans son atelier et soudain enthousiastes à l’idée de savoir qu’il pourrait leur fabriquer quelques bricoles. Seul Felton ne parut pas des plus passionné par tout ce tintamarre autour des armes et des munitions. Ils devaient plutôt se concentrer sur leur prochain objectif et il ne comprenait pas pourquoi Rico et les autres perdaient autant de temps à deviser sur le coût d’augmentiques hors de prix qu’il ne pourrait même pas se payer. Il préféra fureter dans le couloir à la recherche de Tsali qui faisait mine d’attendre. Tous les deux ne s’étaient pas revus depuis plusieurs jours et se croiser était rare ces derniers temps.

    A quelques couloirs de là, Justine entra dans le strategium et referma la porte derrière elle, voyant bien que sa consœur avait son regard des mauvais jours. Jézabel lui fit signe de s’assoir. Elle lui servit un amasec et s’en servit un pour elle aussi, signe que la situation était des plus préoccupantes.
    -Un problème avec Obscurus ?
    -Non… C’est autre chose.
    -Tu as eu des nouvelles de Karl ?... De l’inquisiteur ? Lui demanda Justine.
    -Les nouvelles ne sont pas terribles, justement.
    -Quoi ?... Le Tesseract ?
    -Non, ce n’est pas ça… Enfin, espérons juste qu’il ne se soit pas fait embobiner par ces maudites xenos, il semblerait que les aeldari aient toujours le cube en leur possession… Non, c’est à propos de Winter Argroves.
    -Encore ? Mais Trône, c’est quoi son problème avec Karl Anders ?
    -Ils ont eu un accrochage. Un sérieux accrochage…
    Justine posa sa main sur sa bouche, les yeux écarquillés. Elle en savait suffisamment sur Winter Argroves pour savoir qu’un accrochage avec elle, était un véritable euphémisme.
    -Et… ?
    -Et d’après Karl… Ils l’auraient tué. Elle et toute son équipe. Enfin presque.
    -Non ?... Tu plaisantes, là ?
    -Pas le moins du monde.
    -Et eux, ça va ? Je veux dire, Invictus.
    -Il faut croire.
    -Argroves, tuée ? Elle ? Avec sa sorcellerie, non, mais tu y crois, toi ?
    -Pas plus que toi. Et c’est justement ce qui m’inquiète. Son vaisseau n'à pas été retrouvé, pas plus que son corps.
    -Trône, mais il s’est passé quoi ?
    -Un différent à propos du Tesseract. Et à propos des xenos aussi. Mais je n’ai pas tous les détails. Il y a eu un combat… Tout a commencé avec les aeldari… Argroves aurait employé un possédé apparemment.
    -Par tous les Saints…
    -Comme tu dis…
    Justine avala son amasec et fit une grimace deux secondes plus tard, regrettant presque son excès de confiance.
    -Mais ils étaient où, je ne comprends pas ? Le Thanatos est bien dans le sous-secteur Endymion, non ?
    -Je n’ai pas tous les éléments encore, mais il semblerait que ça se soit passé sur Isin.
    -Isin IV ? Le monde paradis ? Mais c’est tout proche !
    -C’est pas tout. Juste après, ils ont capté un message vox transmis vers un vaisseau en orbite.
    -Des témoins…
    -L’agent Vanus. Ils l’ont abattu, mais il a eu le temps de transmettre juste avant. Et le pire… C’est que le vaisseau aurait disparu, peu de temps après.
    Justine se passa une main dans ses cheveux, se servant un autre amasec au passage.
    -Un expert en communication et en transfert de données… Ce qui signifie qu’il a pu envoyer l’enregistrement pix et vox de toute la scène. Et que des gens l’ont reçu… On est vraiment dans la merde…
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 10/08/2022 à 16:45 Citer ce message

    La Capitale
    Est du Quartier des docks
    Tempus estimare 971.020M42 – 10H15
    44ème jour sur Archaea.

    Derreck gara la Hive Runner à quelques rues de l’adresse du Vertigo. La matinée était déjà bien avancée et les préparations de la Sanguinala animaient déjà toute la ville. Dans toutes les rues, des décorations, guirlandes et autres lumières colorées avaient été accroché un peu partout. L’Aquila, les ailes d’ange et des rubans rouges flottaient à chaque réverbère et à chaque fenêtre comme autant de banderoles et de fanions à l’effigie du Primarque : une goutte de sang ailée. Rico et son équipe firent le reste du chemin à pied. Il divisa la cellule en trois binômes, ce qui serait plus discret et plus opérationnel. Derreck et Lexxi iraient parmi la foule de badauds pour se rendre visibles et ainsi créer une diversion au cas où tandis que Felton et Lek, à distance seraient chargés de les couvrir mais aussi de repérer le moindre suspect. Enfin, pendant ce temps, Rico allait profiter de l’autorité de la praetor pour franchir le cordon de sécurité et pouvoir ainsi en apprendre un peu plus au sujet des corps retrouvés dans l’incendie.
    Comme il l’avait prévu, les agents du magistratum avaient bouclé les rues tout autour du Vertigo, la boite qui avait brûlé et ils s’assuraient que la foule, massée là, ne franchisse pas la limite. Leurs fusils Mastoff étaient clairement là pour leur remémorer qu’on ne badinait pas avec les autorités. Ils notèrent que les véhicules du Magistratum n’étaient pas les seuls présents sur place. Il y avait aussi des camions des gardes-feu et un ou deux fourgons des hospitalières. Malgré tout la foule était nombreuse, au point que Rico et Poppy durent jouer des coudes pour passer. La plaque de la praetor coupa court toute tergiversation avec les agents.
    A sa demande, ils lui indiquèrent l’intérieur du bâtiment incendié, là où devaient encore se trouver les enquêteurs. Ils y allèrent sans plus attendre. Rico en profita pour vérifier sa liaison vox avec le reste de l’équipe et s’assura qu’ils étaient en place. Ce qui était le cas.
    Une fois sur les lieux, ils purent constater l’ampleur des dégâts. Le bâtiment avait été entièrement ravagé par les flammes et seuls les murs en lithobéton avaient résisté. La toiture et tout l’intérieur avaient été entièrement consumé. Il ne restait plus que des amas de gravats noircis et fumant, parmi une épaisse couche de cendre noyée dans les marres d’eau laissées par les gardes-feu. Retrouver le moindre indice allait être particulièrement ardu. Ils arpentèrent plusieurs salles dévastées avant de se faire conduire vers les enquêteurs. Poppy leur présenta de nouveau sa plaque et commença à entamer la conversation. A sa grande stupeur, Rico reconnu les deux enquêteurs. C’étaient l’homme et la femme qu’ils avaient déjà croisés, presqu’un mois et demi auparavant. Ils avaient été laissés pour morts, ou presque, fauchés par l’équipe d’assassins envoyés par Haxt pour liquider une partie de leurs contacts, comme l’armurier ou le prêtre du temple de l’Angelus. Tsali avait bien failli y passer ces jours-là. Le type s’appelait Amos Parks, un grand gaillard approchant la quarantaine, avec une barbe rousse, un long manteau et un chapeau. A sa façon de marcher en claudiquant, il venait de se faire poser une jambe métallique articulée. Sans doute bien moins efficace que son membre d’origine, mais au moins il ne finissait pas avec une seule jambe. Son équipière s’appelait Shanis Merica et elle portait, elle aussi, les stigmates de l’attentat qui avait bien failli les tuer. Une partie de son crâne et de son visage avait été reconstruit et portait encore de nombreuses cicatrices. D’ailleurs, son œil droit était sans doute une prothèse et rien ne garantissait qu’elle était augmentique.
    Rico se demanda s’ils l’avaient reconnu, car il nota qu’ils l’observaient avec attention, alors qu’ils discutaient avec Poppy. Si cette dernière portait son armure de l’Arbites, Rico, pour sa part, avait eu la bonne idée de s’habiller en écclésiaste, ce qui, pour un tel jour, le faisait passer plutôt inaperçu. Poppy leur raconta que leurs services collaboraient justement, à cause de l’évènement en cours. Ce qui fit taire toute question superflue. Elle leur demanda les détails sur le sinistre ainsi que sur les victimes et n'eut que peu d’informations. Les corps se trouvaient déjà à la morgue pour autopsie, les indices sur place étaient maigres, à l’exception d’une piste potentiellement criminelle sur le départ de feu, quant aux témoins, il n’y eu rien de bien concluant. Les serveurs confirmèrent la présence de Haxt et de Gloria Everdynn mais aucun des occupants, au moment du drame et ayant quitté les lieux à la hâte, ne furent retrouvés.
    Poppy récupéra les identifiants vox des deux enquêteurs et ils leur laissèrent les leurs, souhaitant obtenir les rapports d’autopsies au plus vite, ainsi que les analyses des indices. Ils quittèrent alors les lieux afin de retrouver le reste de la cellule.
    Rico leur voxa les quelques informations recueilles. De son côté, Felton venait de croiser le visage furtif d’un individu déjà vu auparavant en compagnie de Bosinski… Il reconnut clairement son visage mais le perdit dans la foule, avant même de savoir si le type les avait identifiés ou non. Il s’agissait d’un des psykers renégats qui composait l’équipe de ces assassins justement, un de ceux qu’ils n’avaient encore jamais clairement affronté. Un certain Titus Guillam…
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 15/08/2022 à 18:59 Citer ce message

    Après quelques dizaines de minutes de recherches infructueuses, Rico et la cellule décidèrent de trouver rapidement quelque chose pour le déjeuner avant de faire un point de situation.
    Tandis qu'ils s'étaient tous réunis, non loin des échoppes de rues et autres vendeurs ambulants, Poppy indiqua à Rico qu'elle allait prendre quelques minutes afin de discuter avec les deux enquêteurs. 
    Suite à l'incendie du Vertigo, le quartier restait bouclé par les forces de l'ordre, malgré cela, la foule était toujours omniprésente. L' approche des festivités rendait tout le monde fébrile.

    Rico en profita pour acheter quelques foulards et écussons aux couleurs de la Sanguinala afin de les distribuer à ses compagnons. Chacun dans les rues affichait un chapeau, un brassard, un foulard ou quelque insigne en rapport avec l'image du Primarque, aussi préféra-t-il qu'ils passent inaperçus le plus possible. 
    -Je pense qu'on devrait attendre que ces enquêteurs nous recontactent. Pour l'instant, nous n'avons plus grand chose à faire ici, annonça Rico à ses équipiers, réstės un peu en retrait. Je ne sais pas pour vous, mais avec la Sanguinala ce soir, nous ferions mieux de profiter des célébrations. Vous ne croyez pas ?
    Derreck et Lexxi ne sûrent que penser, tiraillés entre la mission en cours et l'idée proposée par leur chef de cellule.
    -Je ne sais pas trop si c'est une bonne idée en ce moment, se hasarda Lek.
    Felton fronça les sourcils.
    -Et on laisse tomber l'enquête en cours ? 
    Rico leva les yeux au ciel en secouant la tête.
    -Je n'ai pas dis ça. En l'absence d'indices, que veux-tu faire ?
    -Je ne sais pas... Notre job : en chercher ?
    -On a cherché et tu vois bien que ça ne donne rien.
    -Et Guillam ? Le tueur du Syndicat que j'ai aperçu ? Sur les lieus, comme par hasard ?  On en fait quoi ?
    -Il sait sans doute qu'on est là, ajouta Lek. Felton n'a pas tort.
    -Oui, mais on a perdu sa trace, lâcha Rico d'un ton désinvolte, tout en jetant un coup d'oeil aux brochettes qui cuisaient sur l'étal d'un vendeur. D'ailleurs, n'as-tu pas un informateur qui serait en ce moment-même sur la piste des frères Milagria ?
    -Une informatrice, si. 
    -Tu vois ? Nous sommes bien forcés de déléguer pour être plus efficaces.
    -J'en saurais sûrement plus, ce soir ou demain... Avec la fête à venir et la foule dans les rues, ça va devenir compliqué, ajouta Lek.
    -C'est bien pour ça que l'on devrait laisser cela au Magistratum, ils ont déjà tous les éléments. Si on en croit Poppy, nous devrions obtenir des débuts de réponses dans l'après-midi.
    Il consulta l'horloge accroché au fronton d'un bâtiment, avant de poursuivre.
    Malgré sa robe rouge d'ecclésiaste, Rico affichait toujours ses tatouages et sa coupe exentrique, rappelant à quel point il etait encore ce ganger de ruche juvénile qu'il avait été, peu de  temps auparavant. Cette image lui collait encore à la peau. 
    A l'inverse de Rico, Felton était resté aussi un ganger dans l'âme, mais tenait à ne pas trop le montrer. Il était certes plus âgé et faisait tout son possible désormais pour donner l'image d'un citoyen distingué et plus noble. Du moins en apparence. Mais ses ennuis avec la justice pouvaient le rattraper à tout moment, il devait donc se montrer prudent.
    -Déléguons cela au Magistratum, continua Rico. ils ont déjà tous les éléments à leur disposition. Ce qui nous laisse largement le temps de prendre quelque chose a déjeuner et d'aller faire quelques boutiques juste après.
    -Des boutiques ? Qu'est-ce qu'on doit encore acheter ? S'étonna Felton.
    Rico le dévisagea avec un certain amusement. 
    -Alors toi, tu as dû vivre sur un space hulk parmi je ne sais quels païens, comme Derreck, c'est pas possible...  Cela t'aura sans doute échappé, mais la Sanguinala, c'est aussi la nuit où Sanguinius a offert son sang et sa vie pour l'Empereur et pour l'humanité, voila pourquoi tout bon croyant offre des présents à ses proches cette nuit-là. Tu sais... Tsali, par exemple ?
    -Oui... bin j'y penserai... En attendant je vois Poppy qui nous cherche...

    Alors qu'elle vint les trouver, elle leur fit part des dernières informations.
    -On ne va pas s'attarder, d'après ce que m'a dit l'enquêteur Parks, les autopsies sont sur le point de se conclure. Nous pourrions donc passer à la morgue. Leur dit-elle.
    Felton se tourna vers Rico et lui lâcha un petit sourire ironique.
    -Et les témoins ? Ça a donné quelque chose ? 
    -Ils sont toujours à l'hôpital, en soins intensifs, répondit Poppy.
    -Sous surveillance ?  La questionna Lek.
    Elle l'interrogea du regard.
    -Il y a des gardes mais... Vous avez des informations sur une possible menace ? 
    -Si j'étais ceux qui ont fait le coup, je les ferais taire... définitivement. Oui. 
    Poppy se mit à réfléchir.
    -Nous ferions bien d'y passer aussi dans ce cas. Je pense que votre ami n'a pas tort.
    -D'accord, répondit Rico qui ne put s'empêcher de penser à l'ennui mortel d'une telle mission. On se prend quelque chose à manger et on file. 

    Rico avait jugé bon de diviser le groupe en deux. Une équipe avec Poppy irait à la morgue située à Fort Glory - à cinq minutes à pieds -  tandis que lui et le reste de la cellule se rendraient au quartier du Temple,  donc à l'opposée, à quatre ou cinq kilomètres de là, à l'hôpital du Chagrin Silencieux. Ils décidèrent d'y aller en voiture.
    Ainsi, Poppy, Derreck et Lexxi se rendirent à la morgue. Une fois de plus, la plaque de la Praetor leur simplifia la tâche, sans quoi il aurait été tout bonnement impossible d'y entrer de manière légale. Après avoir rempli un formulaire, ils furent conduit au sous-sol, là où les corps étaient autopsiés et conservés. Un adepte novice, reconnaissable à sa tonsure et à ses robes grises, les conduisit, les bras chargés de dossiers, jusqu'à une salle carrelée qui empestait le désinfectant qui peinait à masquer l'odeur écoeurante de viande avariée et de chair brûlée. Il leur demanda de bien vouloir patienter et entra deposer les dossiers sur un bureau. Il vint s'entretenir quelques instants avec la medic qui officiait, une hospitalière vêtue de sa tenue complète. Elle échangea quelques mots avec l'adepte puis lui remit une autre pile de dossiers avant de lui donner congé. Elle s'installa enfin à son bureau et entreprit de signer plusieurs documents. 
    -Entrez, Praetor. 
    Elle releva brièvement son regard de ses papiers. Comme la plupart des soeurs, elle faisait vraiment jeune, malgré son titre de chef medicae. De sa main libre, elle fit signe à Poppy d'entrer. Sur son bureau, se trouvait un petit arbre de Sanguinala avec un ange en papier coloré, à l'image du Saint Primarque. De l'encens parfumé à l'angélique brûlait sur un petit autel où trônait une icone peinte de l'Empereur et des cierges allumés. Deux servo-crânes medicae flottaient en bourdonnant, affairés à quelques tâches médicales subalternes. 
    -Praetor Sandwall, j'imagine ? Je suis la chirurgienne Violance Agostina, mais je tiens à être claire avec vous, je n'aurai que peu de temps à vous accorder. Vous souhaitiez des informations sur quel corps ?
    -Je vais être brève dans ce cas. J'ai besoin de connaître vos conclusions sur les deux corps retrouvés brûlés vifs au Vertigo.
    L'hospitalière chercha dans sa pile et y préleva deux dossiers, les posa sur son bureau devant Poppy, puis continua de remplir et parapher ses documents. Cette dernière s'en saisit puis commença à les parcourir en détails, cela lui prit quelques minutes. Elle partagea ses analyses avec Lek et Lexxi.
    -D'anciennes blessures... des corps impossibles à identifier en l'état... Pas de fumée dans les poumons...
    Elle se tourna vers la soeur.
    -Si je lis bien vos conclusions, ma soeur, rien ne prouve qu'il s'agit là de Grendel Haxt ni de sa femme.
    -Ces deux-là étaient certainement déjà morts au moment de l'incendie. Qui que soient ces deux-là, il faudra découvrir leur identité. Voilà pourquoi j'ai demandé une analyse genetoria auprès de vos services du Verispex. Ce pourrait être eux, or, pour l'heure, rien ne l'affirme.
    -Bien vu. Je veux en être informée à la première heure. 
    -Ce sera fait.
    -Dites... des objets ont été retrouvés ? Bijoux, armes, cartes ident ? Lâcha Lek.
    La soeur leur désigna une table où se trouvaient les effets personnels des victimes, contenus dans des sachets en plastek. Outre quelques bijoux, une arme de poing et quelques objets triviaux abîmés par le feu, il ne trouva rien de bien pertinent. Il alla prélever les cartes ident, en partie brûlées. Il devait bien s'agir de celles de Haxt et sa femme, même si certains détails comme les tailles des corps, ne cadraient pas parfaitement.
    Poppy referma les dossiers. 
    -Puis-je en garder une copie chirurgienne  ?
    -Ce sont déjà des copies. Elles sont pour vous. Que l'Empereur vous garde. Et joyeuse Sanguinala.
    Poppy la remercia et en fit de même, indiquant à ses équipiers qu'il etait temps de prendre congé et d'aller retrouver Rico et les autres. 

    Pendant ce temps, à l'autre bout de la ville...
    Cela faisait une bonne heure que Rico et Derreck arpentaient les emporias du Commercia à la recherche de cadeaux. Ils avaient garé la voiture à quelques rues de là, non loin du quartier du Temple et avaient fait le reste à pied. De toute façon, chercher à  circuler dans le quartier devenait tout bonnement impossible étant donné la masse de croyants qui commençait à se concentrer là. En cette période de fêtes de fin d'année, tout le monde se ruait pour tenter d'acheter quelque chose, à la hauteur de ses moyens, pour sa famille ou ses proches. Depuis la nuit des temps, les commerçants en avaient fait une tradition et comptaient sur la symbolique de l'offrande, incarnée par le Saint Primarque qui avait offert son sang et sa vie pour l'Empereur. Voyant que Rico etant bien déterminé à faire les boutiques, Felton avait d'abord objecté qu'ils n'étaient pas venus pour ça.
    -Je vous rappelle que l'on devait interroger les témoins à l'hôpital.
    -Tu as bien vu ce que l'infirmière nous a dit ? Ils sont sous respirateur pour l'instant. Dans l'état qu'ils sont, crois-moi, ils ne risquent pas d'aller bien loin, lui répondit Rico. Franchement, le soir de la Sanguinala, devoir rester à l'hôpital, pour faire quoi ? Les types en question doivent être sous sédatif, s'ils ne sont pas dans le coma... Au moins, on sait deja où sont leurs chambres. Que veux-tu qu'il se passe ?
    Il pointa l'atelle qu'il avait toujours à sa jambe blessée. Grâce à elle il pouvait marcher, certes en boitant, mais c'était déjà ça.
    -J'aime autant penser à faire la fête en ce moment, vois-tu ? On n'a pas eu un instant à nous depuis combien de temps ? Là on a un peu de temps devant nous et puis... toute cette agitation... toute cette fête... ça ne vous donne pas envie de vous amuser un peu  ? Tenez... on achète quelques cadeaux, on reprend la voiture et on file à Lynnbarra... ça vous dit ?
    -Ton village de bouseux ? T'es pas sérieux ? Vous avez bien failli tous y passer la dernière fois. C'est sans moi, lâcha Felton.
    -Derreck ? Interrogea Rico.
    -Je ne dis pas non, c'est sûr, mais... et heu... et les autres ?
    Rico lui fit un clin d'oeil complice.
    -T'inquiète, on leur demandera... Et puis convaincre Lexxi de t'accompagner ne sera pas bien difficile.
    Il se tourna vers Felton, à nouveau.
    -Tu nous accompagnes au moins pour faire les boutiques ? Je sais que Lek a acheté quelque chose, tout à l'heure. Tu ne vas quand même pas oublier Tsali ?
    -J'aime beaucoup Tsali, mais je compte bien faire passer cette enquête avant les distractions. Je crois que je vais retourner à l'hôpital, en fait. 
    Rico ne put s'empêcher de lever les yeux au ciel. 
    -Très bien... on se retrouve là-bas tout à l'heure.

    Cela faisait maintenant plus de trente minutes que Felton cherchait à contacter Sybel de Castel Sinclar mais en vain. La dernière fois qu'ils s'étaient parlé, c'était pour qu'elle le mette en garde sur l'arrivée de Caleb Cox de la Kasballica. Ce qu'il comptait tramer en secret, ici, avec un des bras droits de Haxt, pouvait s'avérer absolument crucial. Cela remontait maintenant à des jours et il n'aimait clairement pas cela. Ce genre de mauvaise surprise était le grain de sable qui pouvait réduire à néant toute nouvelle tentative d'approcher Haxt. 
    Passer au manoir Shelley allait lui prendre trop de temps, aussi il décida de laisser un message à Sinclar puis retourna en direction de l'hôpital en pestant. Rico était un véritable inconscient mais Il avait raison sur un point, Felton ne comptait pas oublier sa mission mais il comptait encore moins oublier Tsali. Il avait déjà repéré la boutique, tout à l'heure, aussi decida-t-il d'y entrer. 

    L'après-midi était déjà bien entamée et Poppy, Lek et Lexxi approchaient eux aussi, soudain surpris de tomber sur Felton, presque nez-à-nez, au coin d'une rue.
    -Felton ? Vous avez déjà terminé, ou bien les autres sont encore à l'intérieur ? Lui demanda Poppy.
    -Je ne sais pas, j'ai dû passer un coup de vox.
    -Et ça a donné quoi ? Je veux dire avec les témoins. 
    Felton prit le temps de s'allumer un cigalho avant de répondre avec un petit sourire en coin. 
    -Ça, je te laisse voir avec Rico...
    Lek et Lexxi étaient restés sur leurs gardes et, en même temps, perçurent que quelque chose était en train de se passer. L'entrée de l'hôpital était à moins de dent mètres, pourtant ils virent tout de suite les vigiles se mettre à courir vers l'intérieur, tout en dégainant leurs armes.
    -Tu es sûr qu'ils n'ont rien fait de stupide, au moins ? Lâcha Lek, tout en dégainant son arme. Lexxi en fit de même. 
    Pourtant, Poppy les arrêta aussitôt d'un geste. Abasourdie, elle était en train de leur désigner l'autre côté de la rue. Rico et Derreck approchaient tranquillement en riant, les bras chargés de paquets. Elle n'allait pas perdre de temps à sermonner qui que ce soit, cela pourrait toujours attendre. Elle dégaina un de ses canons de poing, elle aussi et leur cria de se dépêcher.
    Rico et Derreck se précipitèrent pour les rejoindre. 
    -Il se passe quoi ?
    -C'est ce que je veux savoir, lâcha Poppy, nos témoins ont sûrement reçu de la visite. Ou sont leurs chambres ?
    -Bloc 4, aile sud...
    Elle vérifia son chargeur. 
    -Felton et Derreck, avec moi. On va passer par l'aile est pour les contourner. Rico.... filez avec les deux autres, vite !

    Sans besoin de confirmation, Lexxi et Lek lui emboitèrent le pas et se mirent à courir dans le long couloir menant à l'aile sud. Lek cru reconnaître au bout d'un couloir menant à l'aile est, le psyker déjà aperçu par Felton un peu plus tôt. Il voxa toute l'équipe au moment où des tirs retentirent. Il vit Lexxi, vive comme l'éclair qui se jeta de côté et evita ainsi de justesse une rafale de tirs automatiques qui laboura le mur en plâtre juste derrière elle. Ils ripostèrent mais manquèrent leurs cibles. Seul Lek parvint à blesser au bras un des deux tireurs qu'il venait de localiser. Soudain le couloir sembla onduler, comme sous les effets de la chaleur. Un goût métallique et une sensation d'électricité statistique les envahit. La vague kinésique frappa Rico de plein fouet, le souleva du sol et le projeta à cinq mètres de là. Il percuta une cloison qu'il explosa dans un nuage de plâtre et dans un grand vacarme. Lexxi profita de la confusion pour dégainer l'épée tronçonneuse qu'elle avait récupéré au Reliquaire. Elle chargea ventre à terre et percuta le type blessé au bras. Il ouvrit le feu mais la manqua, sa lame le faucha et lui coupa une jambe au niveau du genou dans un craquement d'os et de sang qui gicla. Elle ne se soucia plus de son sort alors qu'il hurlait à la mort, cherchant à atteindre la femme qui l'accompagnait. 
    Cette dernière avait cependant pris le temps de se concentrer de nouveau. Lek chercha à l'atteindre et la toucha de justesse à l'épaule, mais sans gravité. Elle sut qu'elle n'aurait jamais le temps de bloquer la furie qui se ruait sur elle, aussi en appela à plus de puissance psychique. Les vitres volèrent toutes en éclats dans tout l'hôpital tandis que les parois tremblèrent. Son sort percuta Lexxi de plein fouet et la projeta contre un mur avec assez de force pour en éclater les plâtres et lézarder les briques derrière. Le coup aurait pu tuer ou blesser grièvement n'importe quel homme adulte, mais la catachan n'était pas faite de ce même bois. Elle se releva en toussant, crachant un filet de sang au passage. Elle avait deja connu bien pire contre des orks sur Shaprias. Elle ramassa son épée tronçonneuse et s'apprêta à charger de nouveau. Mais Lek venait de la devancer, ses canons de poing à la main. Une première rafale manqua louper la psyker mais une des balles la toucha en plein torse. Un second tir, pour faire bonne mesure la cueillit en plein front dans une gerbe de sang. La tête parcourue d'éclairs, elle s'effondra en arrière, tuée sur le coup. Lek approcha d'un pas décidé pour achever l'homme à la jambe coupée mais ce dernier venait de succomber. Il se tourna vers Lexxi.
    -Va t'occuper de Rico, je vais vérifier les chambres.

    Elle allait faire demi tour lorsque Rico apparut, titubant, couvert de plâtre et de sang, visiblement entier mais mal en point. Lek allait entrer dans la première chambre lorsque des vigiles firent irruption, pistolets à la main, pointés sur eux. Les corps au sol, les échanges de tirs et le vacarme n'allaient pas jouer en leur faveur. Lek et Lexxi regardèrent Rico qui leur signifia d'obtemperer. Ils posèrent leurs armes et se mirent à genoux, les mains sur la tête, comme demandé par les vigiles. Rico approcha alors et sa tenue d'ecclésiaste, blessé de surcroît, sauva la situation. 
    Il désigna les corps.
    -Ces gens ont tenté de me tuer, le Trône m'en est témoin, je dois la vie à ces deux-là. Ils n'ont fait que leur devoir, libérez-les. 
    Les gardes obtempérèrent sans poser la moindre question. 
    -Il y en a d'autres dans l'hôpital,  lâcha Rico dans un souffle. 
    Les vigiles les laissèrent et se deployèrent,  percevant effectivement des coups de feu venant de l'aile est, là où se trouvaient Poppy et les autres. Ils laissèrent une équipe medicae prendre le relai.  Alors qu'ils se chargeaient de Rico, Lek et Lexxi entrèrent enfin dans les chambres.

    Quatre des cinq témoins étaient déjà morts. Le dernier venait tout juste de passer en arrêt cardiaque. Les machines qui faisaient fonctionner leurs respirateur avaient toutes été  débranchées...
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 03/09/2022 à 11:31 Citer ce message

    La Capitale
    Sanitarium du Chagrin Silencieux
    Nuit de la Sanguinala
    Tempus estimare 973.020M42 – 06H05
    45ème jour sur Archaea.

    Les heures qui suivirent eurent ce goût amer pour les acolytes de la cellule Obscurus. Aucun des cinq témoins soignés à l’hôpital n’avaient finalement survécu à leurs assassins. Le pire était que Rico et Lexxi avaient été sérieusement blessés dans l’attaque et bien qu’ils soient parvenus, avec Lek, à éliminer deux d’entre eux, ils étaient arrivés trop tard et venaient de perdre de précieux témoignages sur la mort supposée de Grendel Haxt ainsi que sur l’identité des coupables. Cette nuit était amère car Rico, Lexxi et Lek avaient passé ces dernières heures entre les mains des sœurs hospitalières à se faire recoudre quelques blessures de trop, ce qui ne faisait que les ralentir dans leur enquête, une fois de plus. Et elle était encore plus amère car passer la fête de la Sanguinala dans un hôpital – bien que les sœurs fussent en parfaite communion avec la foi et l’esprit du Primarque – était loin d’être le projet de certains. Prenant leur mal en patience, ils prirent quelques heures de repos et pendant ce temps, faute de mieux, certains fêtèrent même le réveillon avec les sœurs. De son côté, Poppy s’absenta afin de prendre quelques informations auprès de l’Arbites.

    Au petit matin, Lek sortit de l’hôpital, malgré ses blessures et en profita pour prendre des nouvelles de son informatrice, une gosse des rues qui s’appelait Noémie ou quelque chose comme ça. Il lui donna rendez-vous derrière un des quais de chargement, à l’abri des regards. La gamine ne devait pas avoir plus de quinze ans, même si elle en paraissait encore moins. Elle ressemblait à ces centaines d’orphelins de guerre qui subsistaient tant bien que mal grâce aux quelques dons de l’Ecclésiarchie. Certains d’entre eux avaient l’âge d’être enrôlés pour travailler mais la plupart étaient livrés à eux-mêmes. La pègre et les trafiquants en tout genre mettaient la main sur une majorité d’entre eux, malheureusement.
    Comme la plupart d’entre eux, la Souris vivait de petits trafics en tout genre pour subsister depuis la mort de ses parents durant la dernière guerre. Elle connaissait la ville comme sa poche et elle savait surtout se faufiler partout sans se faire repérer, ce qui était un véritable atout pour Lek.
    Elle préférait se faire appeler la Souris et ça lui allait. Depuis quelques temps, elle avait pris l’habitude d’être ses yeux et ses oreilles en ville. Lek savait notamment que le Syndicat de l’Ombre avait mis un contrat sur lui, pour trahison, et que l’ensemble du réseau lui était désormais totalement fermé. Remettre les pieds dans certains endroits était devenu extrêmement dangereux à présent et même s’il se montrait des plus prudents, il savait qu’il avait une cible dessinée sur le front. La Souris avait surveillé la planque Kadoshi pour lui, celle située dans le quartier des entrepôts, près du port, là, où les frères Milagria avaient été repéré la dernière fois.
    -Et donc, tu n’es pas en mesure de me confirmer s’ils sont toujours là-bas ?
    Elle était adossée contre un mur, occupée à se rouler une barrette de lho avec une certaine dextérité. En haillons rapiécés et pieds nus, rien ne pouvait laisser supposer qu’elle était bien plus qu’une simple sans-abri. Elle releva ses grands yeux délavés vers lui, soufflant de manière agacée sur une de ses mèches blondes qui lui tombaient sur le visage, malgré son bandeau.
    -Nan… Mais y avait du monde, c’est sûr. Et puis j’y ai vu un autre type. Il est entré dans la planque et y est resté… Peut-être quoi ? Quinze minutes avant de ressortir. Une voiture est venue le chercher juste après.
    -Et il ressemblait à quoi, ce type ?
    -Grand... Enfin… Pas grand, grand mais tu vois quoi… Il était brun, plutôt bien sapé et il avait un tatouage, là, sur le côté droit du visage. Comme les caïds de la pègre.
    Lek arrêta de respirer l’espace d’un instant en écoutant la description physique de Felton, cherchant à se demander, ce que leur équipier avait été faire là-bas, dans leur dos.
    -Un tatouage ? Quel genre de tatouage ?
    -Bin, un truc tribal, tu vois ?
    -Merde… et ses cheveux, ils étaient longs ?
    -Nan… il avait les cheveux courts, même très courts je dirais, pourquoi tu le connais ?
    -Un instant, j’ai cru que oui. Mais tu as fait du bon boulot. Continue de me garder un œil sur la planque et prends garde à toi, ces types sont dangereux. Très dangereux, surtout pour une… fille comme toi. Je n’aimerai pas qu’ils te mettent la main dessus.
    Elle s’alluma sa barrette et souffla la fumée aux relents épicés et lui lança un large sourire, lui dévoilant un poignard qu’elle avait glissé à sa ceinture, sous ses vêtements.
    -T’inquiète, je sais me défendre s’il le faut, tu sais.
    Il aurait bien souri à cette naïveté touchante, mais la situation ne l’amusait pas.
    -Je suis sérieux, p’tite Souris…
    Elle tira sur sa barrette, voyant que son sourire charmeur ne prenait toujours pas. Elle tendit la main.
    -Allez, file-moi un peu de monnaie, je suis à sec.
    Lek fouilla dans la poche de sa veste et lui glissa un billet de cinquante crédits dans la main.
    -Garde un œil et continue de me tenir au courant sur ces mecs. Fais gaffe à toi surtout et bonne Sanguinala, au fait.
    Elle fourra le billet dans sa poche avant d’effectuer le signe de l’Aquila sur sa poitrine. Puis avec un petit clin d’œil satisfait, elle décampa dans les ombres.

    Dix minutes plus tard, il avait réuni toute l’équipe dans la chambre qu’occupait Rico à l’hôpital, s’assurant que personne d’autre n’écoutait. Rico terminait de s’habiller en serrant les dents, aidé par Derreck. Sa fracture à la jambe terminait à peine de se remettre qu’il venait de se fêler trois côtes à la suite de leur dernier affrontement. Lek sortit une boite de son sac et l’ouvrit. Il s’agissait d’une boite de Salamanders, de gros cigares de luxe produits sur Archaea, inspirés de ceux appréciés par les officiers de l’Astra Militarum sur Cadia ou Catachan notamment. Il en distribua un à chacun.
    -Aujourd’hui, c’est la Sanguinala et avec tout ça, on n’a même pas eu le temps de s’acheter un petit quelque chose… Aussi, je me suis dit que…
    -Touchante attention, mon cher Lek, le remercia Rico. Tous en prirent un. Il en garda un autre pour Poppy. Lexxi en prit un avec un petit sourire, se remémorant quelques souvenirs.
    -Avec tous ces évènements, on n’a même pas pensé à acheter des cadeaux, lâcha finalement Derreck.
    Tandis qu’ils se servaient, Lek ne se formalisa pas et leur parla de son informatrice et des derniers événements sur la planque Kadoshi. Il leur évoqua aussi le fait qu’elle n’avait pas eu confirmation si les frères Milagria étaient présents ou non. En revanche, il leur donna la description du type au tatouage que venait de lui décrire Noémie.
    -A tout hasard, ça vous dit quelque chose ?
    Tous se lancèrent des regards, tout en répondant par la négative.
    Felton se manifesta après quelques instants.
    -C’est Caleb Cox.
    Au même moment, la porte de la chambre s’ouvrit et Poppy fit son entrée. Elle referma derrière elle, voyant qu’ils faisaient silence. Lek lui offrit le cigare et elle le remercia avec un sourire sincère. Poppy était fumeuse et elle reconnut la marque qui avait dû lui couter son pesant de crédits.
    -Qui c’est ce Caleb Cox ? Lança-t-elle à l’assemblée.
    Felton les réunit autour de lui et poursuivit à voix basse.
    -Bon, vous connaissez tous mon histoire ? Je suis arrivé sur Archaea avec certains d’entre vous… ça fait combien ? Quelques mois, maintenant ? Lexxi et Poppy ne connaissent peut-être pas les détails.
    Lexxi confirma d’un simple hochement de tête.
    -J’ai eu accès à votre dossier, j’en sais déjà suffisamment, compléta Poppy.
    Felton lui renvoya un petit sourire carnassier.
    -Ça fais trois mois, depuis qu’on s’est rencontré un soir pour partir à la recherche de Reginas Ulth, répondit Rico, idée de couper court à leurs chamailleries. Et ça fait un mois et demi qu’on travaille officiellement pour qui vous savez.
    -Ok, donc trois mois… Vous savez que c’est la Kasballica qui m’avait envoyé ici pour infiltrer le Syndicat de l’ombre et travailler avec Ulth justement ?
    Les autres hochèrent la tête.
    -Et dès le premier jour, j’ai été balancé puisque l’Arbites m’attendait à l’astroport.
    Il riva son regard dans celui de la praetor tout en effectuant un grand sourire sans humour.
    -Je n’étais pas là, ce jour-là. Sinon, les choses auraient pu être différentes, lâcha Poppy, sur le même ton.
    -Quoi qu’il en soit, j’avais flairé l’embrouille à la dernière minute et c’est là que j’ai eu l’idée de changer d’identité. C’est ce qui m’a sauvé la peau. Je vous passe les détails. J’ai compris à ce moment-là que quelqu’un m’avait balancé et y avait pas grand monde qui me connaissait à l’époque. Surtout ici, sur cet agrimonde boueux. Le pire c’est que je n’étais pas le seul à tomber. Reginas Ulth s’était fait balancer aussi et c’est là que toute cette histoire nous a pété à la figure. A ce moment-là, Caleb Cox, le type au tatouage dont nous parle Lek, c’était mon boss dans la pègre sur Eshunna. C’est lui qui m’a envoyé ici et j’ai appris récemment que c’était lui qui nous avait balancé.
    -Bin merde, lâcha Lexxi.
    -Tu as eu ces informations par Sinclar, c’est bien ça ? Lui demanda Rico.
    -En partie. Mais le reste je l’ai deviné par moi-même.
    -Et Sinclar, c’est qui par rapport à Cox ? Une rivale ? Demanda Rico.
    -Non. Sinclar est sa supérieure directe dans la hiérarchie de la Kasballica.
    -Mince ! Il essaie de la doubler, du coup ?
    -Au sein de la pègre, on va dire que c’est courant, mais le fait que ça m’implique, ça a tendance à me foutre en rogne. Et puis, Sinclar m’avait prévenu il y a des jours de cela, mais avec ce qu’on a vécu à Newburg… Cette histoire de portail et de tesseract… On a fini par perdre le fil. Et là, j’ai l’impression qu’il est ici depuis tous ces jours…
    -Et donc, ce Caleb Cox est déjà ici… Finit par lâcher Rico. Mince… Déjà que j’ai les Milagria aux fesses…
    -Cet enfoiré risque surtout de faire foirer tous nos plans si on ne l’arrête pas, compléta Felton. S’il double Sinclar ou se met de mèche avec Haxt, ça va considérablement compliquer nos plans.

    Rico terminait d’enfiler sa robe de prêtre.
    -N’empêche qu’il faudra qu’on reparle de tout ceci. Je ne comprends toujours pas comment ces cinq témoins ont pu échapper à votre vigilance, lâcha Poppy.
    -Oui et bien, on verra ça plus tard, là on ferait bien de ne pas trainer. Le magistratum est venu m’interroger tout à l’heure à propos de ces assassins justement. Ils voulaient savoir si je savais quelque chose en lien avec les témoins et ce qu’il s’est passé au Vertigo hier. Je suis parvenu à m’en débarrasser sans leur donner d’informations.
    -Et vous avez dit quoi ? L’interrogea Poppy.
    -Rien, évidemment. Je ne connaissais pas ces enquêteurs. Et quand bien même, je préfère en dire le moins possible. Et de votre côté, ça a donné quoi ? C’est bien Haxt et sa femme à la morgue ?
    Poppy se contenta de sortir les rapports d’autopsie de la poche intérieure de son manteau long. Elle les lui tendit. Rico s’en saisit et les parcourut avec attention.
    -Ce pourrait être eux, en revanche, la légiste ne peut le confirmer, c’est bien cela ?
    -Absolument.
    -Le type a plusieurs autres blessures, à ce que je vois… Deux anciennes blessures par balle et… un éclat de grenade qui remontent à un mois ? Trône… Une blessure par grenade ? C’est pas commun, ça.
    Il interrogea Lexxi du regard.
    -En dehors des militaires ou durant la dernière guerre, qui utilise des grenades ici ?
    Lexxi haussa les épaules.
    -La dernière personne qu’on a vu utiliser une grenade, c’est Lexxi justement, non ? Lâcha Lek, presque sur le ton de la blague.
    Felton le pointa du doigt.
    -Mais oui… Rappelez-vous sur le toit, lors de l’attaque de l’entrepôt, là où Bosinski gardait les trois filles captives !
    -On était monter sur le toit d’une maison à cause d’un tireur, compléta Lexxi. C’est vrai.
    -Tu avais ouvert le feu sur lui avec ton Armageddon et tu l’avais touché, non ?
    -Oui, deux fois… Et comme un second tueur venait de la rejoindre…
    -Tu as lancé une grenade, alors qu’on t’avait dit de ne surtout pas le faire, à cause du bruit… Ajouta Felton, qui se frappa le front avec le plat de sa main.
    -Trône… Lâcha Rico. Le type à la morgue, c’est ton bonhomme du coup ?
    -C’était le Fossoyeur, ajouta Lek, on savait qu’il s’en était tiré, malgré ses blessures. Bon, c’est peut-être tiré par les cheveux… ça ne prouve pas que c’est vraiment lui…
    -La coïncidence, quand même, ajouta Felton, j’y crois moyen.
    -Ce qui confirmerait bien que ce corps à la morgue est là pour nous faire croire que c’est bien Haxt, compléta Poppy. Et la femme ?
    -Oui, si ce n’est pas Gloria Everdynn, ça pourrait tout aussi bien être une de…
    -Une des trois filles que l’on connait. Abigaïl, Mira ou Emelia, lâcha Rico, d’un air sombre.
    -Merde… Se contenta de souffler Lek. Mira était pour ainsi dire, comme sa petite amie.
    -Bon, résumons… Reprit Rico. Haxt ou quelqu’un d’autre cherche à nous faire croire qu’il est mort. Pourquoi ?
    -Pour prendre la fuite ? Se hasarda Derreck.
    -Non, je ne crois pas, lâcha Felton. Un baron de la pègre n’est pas du genre à fuir. Au pire, il va se mettre au vert un moment ou changer d’identité à la limite. La fuite est un signe de faiblesse dans ce milieu.
    -Caleb Cox pourrait être derrière tout cela, tu crois ?
    -Aucune idée…
    -Et on sait où le trouver ? Il a des habitudes ici ? Lui demanda Lek. Je peux mettre Noémie sur le coup.
    -Non, je le connais bien et je connais aussi sa façon de travailler. Ce type est un véritable salopard et il est malin comme un jokaero. Il a certainement plusieurs coups d’avance sur nous.
    -C’était ça ta bonne nouvelle ?
    -Non, mais je connais surtout son point faible. Rappelez-vous qu’on a travaillé ensemble.
    -Pourquoi tout ceci ne m’étonne même pas, lâcha Poppy dans un souffle.
    -Oui, eh bien, madame « la juge », d’où je viens, j’ai appris avant tout à survivre. J’ai peut-être fait des trucs pas très net, mais ça m’a maintenu en vie.
    Rico fit un signe d’apaisement de la main, avant que l’échange ne s’envenime une fois de plus.
    -Et c’est quoi son point faible ?
    -Caleb dirigeait un réseau de prostitution et un commerce d’esclaves sur Eshunna. Mais en plus de cela, il était… Comment dire… Pas mal dépendant…
    -La drogue ?
    -Non, les filles. Il a une sorte de… perversion. Il aime les jeunes filles. Très jeunes, je dirais. Chaque soir, il a besoin de s’en procurer. Mais pas n’importe où. Des endroits selects. Il aime le luxe.
    -Je vais vomir, lâcha Poppy, tout en serrant les poings.
    Les autres avaient l’air tout aussi horrifiés.
    Ce fut Lek qui rompit le silence après quelques instants.
    -Je saurais peut-être où chercher dans ce cas, il y a des établissements qui…
    -On les connait, compléta Felton. Il y avait les Trois Chérubins, mais c’est fermé. Il y a aussi le Crazy Grox, là où on avait rencontré Bozinski.
    -Ce lupanar ? C’est pas un peu bas de gamme pour votre « baron » ? S’étonna Poppy.
    -C’est en tout cas ce que la capitale a de mieux à lui proposer en ce moment, lâcha Felton. S’il s’y est rendu, c’est là qu’il a dû aller pour trouver ce qu’il cherche.
    Rico consulta l’heure de l’horologium, il était encore très tôt.
    -Tu penses qu’il y est encore à cette heure-ci ?
    -Non, ça doit même être fermé. Cox est un oiseau de nuit, on ne le trouvera pas la journée et encore moins le matin.
    -Vous êtes sérieux ? On fait quoi en attendant ? On attend qu’il se lève ? Fulmina Poppy.
    -Non, on peut le débusquer justement. Sinclar m’a laissé un message hier soir. Elle a quitté le manoir Shelley car elle savait que l’endroit était compromis.
    -Cox logerait là-bas, selon toi ?
    -Ce serait bien le genre.
    Rico termina de ramasser ses affaires.
    -Parfait, alors ne perdons pas de temps. S’il est au manoir Shelley, on va devoir s’en assurer. Felton et Poppy, vous venez avec moi…
    Il se tourna vers Lek.
    -J’aimerai quand même que l’on s’assure de qui se trouve dans la planque Kadoshi. Vous pouvez aller y faire un saut avec Lexxi et Derreck ? On se retrouve après.
    -C’est comme si c’était fait.

    Moins de trente minutes plus tard, Rico, Felton et Poppy garaient la Hive Runner à deux pas de la grille du manoir Shelley. Rico préféra y envoyer Poppy seule. D’une part, elle pourrait invoquer son statut d’arbitrator et d’autre part, si Cox était sur place, certes, il saurait que l’Arbites est là, mais il ne risquait pas de la reconnaitre. Sa plaque pouvait aussi bien ouvrir des portes mais aussi en fermer, c’était un risque que Rico était prêt à prendre, d’autant plus qu’il avait pensé à la suite. Lors de leur rencontre avec leur inquisiteur sur Isin, Rico avait récupéré une mouche pix et quelques autres bricoles. L’insecte mécanique ne dépassait pas la taille d’un ongle et si on n’y prêtait pas attention, il passait pour un insecte tout à fait banal, à la différence qu’il était capable de prendre des vidéocaptures de son environnement. Il le sortit de sa petite boite dans laquelle il était rangé et activa la tablette de données qui le contrôlait à distance.
    -Garde ton microvox allumé, on pourra t’entendre à distance et garde aussi ce petit drone sur toi, je tiens à ce qu’on voit la même chose que toi. Felton est le seul à pouvoir reconnaitre Cox.
    -Vous pensez vraiment qu’il est là ?
    -On ne sait jamais. Mais vu l’heure matinale, le lendemain d’une fête impériale, je doute que les occupants de cette pension de luxe soient debout. C’est férié aujourd’hui en plus. Regarde le registre aussi, s’il est là, il aura laissé son nom.
    -Je ne pense pas, lâcha Felton. Ce ne sera pas le genre à laisser son vrai nom comme ça.
    -Alors un pseudo, sans doute. Justement, comme tu le connais, quelque chose te sautera peut-être aux yeux.

    Poppy passa la grille et les gardes après d’interminables palabres avec eux. Finalement, l’un d’eux l’accompagna jusqu’à l’accueil, à la réception. Elle présenta sa plaque au majordome et demanda à vérifier le registre, prétextant une enquête en cours, en lien avec le Vertigo. Elle parcourut les pages mais sans succès, d’autant plus que la liaison pix était mauvaise. Rico lui demanda de gagner du temps, tandis que Felton l’aidait à calibrer les curseurs de la tablette. Au bout de quelques minutes, ils eurent enfin une image stabilisée et assez nette des noms manuscrits. Felton faillit s’étrangler en voyant son nom à peine déformé dans le registre. Il était écrit « Mac Felton ».
    Poppy interrogea le majordome qui lui indiqua qu’effectivement, la personne en question avait quitté l’établissement hier soir, après un séjour de cinq jours. Elle lui demanda à visiter sa chambre. Par chance, la femme de ménage n’était pas encore passée. Le réceptionniste la conduisit et lui ouvrit la porte en question avant de retourner vaquer à ses occupations. Elle entreprit alors de fouiller méticuleusement la pièce, point par point. C’est finalement dans la corbeille qu’elle trouva les restes d’un petit parchemin à moitié brûlé sur lequel avait été griffonné les mots « RDV avec le Plasticien, demain 16h ». Une fois assurée qu’il n’y avait plus rien à trouver dans la chambre, elle redescendit au rez-de-chaussée, remercia le majordome et ressortit du bâtiment. Elle alla retrouver Rico et Felton dans la rue.
    -Le Plasticien est, comme son nom l’indique, un chirurgien de la pègre sur Eshunna, leur confirma Felton qui s’était absenté quelques instants pour recevoir un message vox. J’ai appris par Sinclar qu’il était ici, tout récemment à la demande de Grendel Haxt. Elle m’a confirmé qu’il n’était pas mort, comme on l’avait deviné.
    -Ils auraient donc rendez-vous demain ? Leur demanda Rico.
    -Impossible de savoir, ajouta Poppy. Le message ne précise pas quand il a été rédigé. Cox a occupé cette chambre pendant cinq jours.
    -Alors Cox a peut-être déjà pris l’apparence du warp sait qui…
    -A moins que ce ne soit Haxt qui ait changé d’apparence, finit par conclure Felton.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 09/09/2022 à 18:16 Citer ce message

    Ils retournèrent à la voiture garée non loin de là. Rico en profita pour consulter l’heure.
    -Je compte faire un saut à Lynnbarra ce midi avec Lexxi et Derreck, vous voulez que je vous dépose avant ?
    Felton et Poppy se lancèrent un regard étonné.
    -Attends… Tu sais qu’on a une mission sur les bras, là ? Lâcha Felton.
    -C’est la Sanguinala, tu sais que c’est important pour moi… et puis c’est pas comme si ce… Caleb Cox allait apparaitre ce matin. Cela ne devrait me prendre que quelques heures tout au plus et puis vous êtes bien assez nombreux, non ?
    -Felton a raison, ajouta Poppy. On ne sait pas où et quand Caleb Cox pourrait réapparaître, on a besoin d’être tous sur le coup. D’autant plus que l’on pourrait parler de cet échec à l’hôpital.
    -On n’a juste pas eu de chance, voilà tout. On est arrivé juste après, se défendit Rico.
    -Juste après ? Juste après quoi ? Après être allé faire vos boutiques pendant deux heures ? On a perdu nos cinq témoins, par le Trône. A aucun moment, l’un de vous n’aurait eu l’idée de rester sur place pour surveiller ce qui risquait de se passer ?
    -Hey, mais on est passé à l’hôpital, c’est juste qu’on n’a pas pu accéder à leurs chambres. Comme on perdait du temps, on a préféré aller acheter quelques cadeaux. Felton était là, demande-lui, il pourra te le dire.
    -J’étais là, mais je n’étais pas d’accord, je te le rappelle. C’est toi qui a été nommé primus de cette équipe, pas moi.
    -Hé bien parfait. Je te nomme primus adjoint dans ce cas. Vas-y propose-nous un plan.
    -Le problème, Rico, ajouta Poppy, est que je vous trouve un peu trop désinvolte sur ce coup-là. Vous étiez trois pour garder un œil sur des témoins dans cet hôpital et force est de constater qu’ils se sont fait tuer tous les cinq pendant que vous faisiez tout autre chose. Cette erreur n’aurait jamais dû être possible. En tant que responsable de l’équipe, vous êtes évidemment responsable de ce qui se passe. Autant des réussites que des échecs et quels que soient vos arguments.
    -Donc ton escapade à Lynnbarra, tu fais comme tu veux, mais tu vas devoir la reporter, lâcha Felton. On a bien plus urgent sur les bras.
    -Encore une fois, je suis d’accord avec Felton. Si nous devions nous retrouver à devoir gérer une urgence en votre absence à tous les trois, cela risquerait encore de compromettre cette opération. Ce n’est pas le moment, croyez-moi, Rico.
    La mort dans l’âme, Rico finit par se soumettre.
    -Bien. D’accord. C’est quoi le plan ?
    -On va retrouver les trois autres à la planque Kadoshi. Voir s’il y a du nouveau puis je serai d’avis d’aller faire un saut au Crazy Grox. Si Caleb Cox compte trouver des filles plutôt jeunes, commençons par-là, c’est le genre d’établissement où j’irais me renseigner, personnellement.
    Poppy hocha la tête, approuvant l’idée, bien qu’étant absolument horrifiée par ce genre de pratique.

    Trente minutes plus tard, ils avaient garé la Hive Runner dans le quartier des entrepôts et s’entretenaient avec Lek tandis que Lexxi et Derreck continuaient de surveiller la planque, un peu plus loin.
    -Donc, vous n’avez vu personne entrer ou sortir ? Le questionna Rico.
    -Non, rien n’a bougé. On est bien allé faire une reconnaissance autour de la planque mais tout est fermé et je me demande même si y a quelqu’un à l’intérieur. On a préféré ne pas entrer, on ne sait jamais.
    -D’accord, lâcha Rico. On pourrait quand même tenter de…
    Lek l’interrompit d’un geste de la main, réalisant que Derreck était en train de le joindre sur son microvox, il bascula sur la fréquence générale.
    -Du monde approche. Un véhicule utilitaire vient d’entrer pour se garer dans la planque. Cinq types armés. Ils en descendent…
    -Ils font quoi ?
    -Ils discutent et là, ils… Oui, ils montent à l’étage… Attends… Y en a deux qui referment les portes de l’entrepôt… Merde, on perd le visuel.
    -Quel genre de type ? Lui demanda Poppy.
    -Des hommes de main, compléta Lexxi via le vox.
    -Et leurs armes ?
    -Des fusils à pompe et des canons de poing, de ce que j’ai vu.
    -D’accord, tâchez de surveiller ce qu’ils font, lui répondit Rico qui entreprit de sortir sa mouche pix et sa tablette, s’apprêtant à l’envoyer en reconnaissance.
    -Il nous reste un mécatraqueur ? Le questionna Felton.
    -La balise de localisation ? Oui, elle est dans un des sacs dans le coffre de la voiture, pourquoi ?
    -On pourrait la poser sur leur véhicule, comme ça, dès qu’ils ressortent, on pourrait savoir où ils vont.
    -Pas idiot. Mais comment poser cette balise, maintenant ?
    -Je connais la planque, ajouta Lek. Il y a une porte par-derrière. Si on parvient à l’ouvrir pendant qu’ils sont à l’étage, on devrait parvenir à entrer dans le garage et poser la balise sur leur véhicule puis ressortir. Mais faudra faire ça en toute discrétion.
    -Ne comptez pas sur moi, lâcha Rico avec un signe de la main. Avec ma jambe et mes côtes brisés, ça sera sans moi.
    -Je peux m’en occuper avec Lek, lui répondit Felton.
    -D’accord, mais ne prenez pas le moindre risque. Prévenez Derreck et Lexxi, qu’ils restent en couverture. Et Poppy va assurer vos arrières aussi. Je vais rester ici à la voiture, au cas où.

    Ils se répartirent les rôles puis Lek et Felton contournèrent le bâtiment et trouvèrent la porte en question. Felton se plaqua contre la porte et sortit sa multiclé, demandant à Lek de surveiller les alentours. Il crocheta la serrure sans le moindre mal, voyant qu’il n’avait pas perdu la main. La porte s’ouvrit avec un léger cliquetis métallique. Il dégaina son Tronsvasse et se faufila furtivement dans le garage, profitant des ombres des caisses et bidons pour se déplacer jusqu’au véhicule, un lourd Cargo-8 gris mat. Il se plaqua contre une des ailes du camion, attendant que Lek le rejoigne. Dehors, Poppy les attendait tout en surveillant les abords.
    A l’étage juste au-dessus, ils pouvaient entendre des voix et des éclats de rire. Le moindre faux pas de leur part, le moindre bruit et ils seraient découverts. Felton avait sorti le petit traqueur qui n’était pas plus gros qu’une pièce d’un crédit et le colla sur le véhicule en suivant les indications de Lek. Une fois le mécatraqueur en place, ils rebroussèrent chemin en silence, refermèrent la porte puis Felton réenclencha la serrure à l’aide de sa multiclé, afin de ne laisser aucune trace de leur passage. Ils retournèrent avec Poppy, à la voiture pour y retrouver Rico.
    -Il fonctionne ? Demanda Felton.
    Rico hocha la tête.
    -On pourra les suivre jusqu’à deux kilomètres environ. C’est déjà ça.
    -D’accord et on fait quoi en attendant ? Lâcha Rico. On attend qu’ils sortent ?
    -C’est exactement ça, conclut Poppy. Vous allez attendre ici et dès qu’ils sortent, suivez-les avec la voiture. On doit savoir où ils vont. Avec un peu de chance, ils pourraient nous mener à Cox ou même à Haxt. C’est donc primordial de ne pas les perdre de vue.
    Elle se tourna vers Felton et Lek.
    -Vous comptiez passer au Crazy Grox pour enquêter sur Caleb Cox, il me semble ?
    -C’était l’idée.
    -Allons-y, je vous accompagne.

    Vingt minutes plus tard, ils étaient devant l’établissement qui venait tout juste d’ouvrir. La dernière fois qu’ils s’y étaient rendus, c’était pour y rencontrer Bosinski qui leur avait fait cette proposition avec une mallette pleine d’argent en échange de leur départ. Une fois de plus, Poppy préféra les attendre à l’extérieur, mais cette fois-ci, pour une autre raison. Mettre les pieds dans une maison close tandis qu’elle était encore vêtue de son armure carapace de l’Arbites risquait bien de faire avorter leur enquête avant même de la commencer. Elle resta à surveiller la rue de derrière, là où se trouvait une porte de service. Des fois qu’un suspect décide de s’enfuir, elle ne le louperait pas.
    -Je pense que vous saurez vous en sortir sans mon intervention. Mais en cas de grabuge, on reste en liaison vox.
    Felton hocha la tête et accompagné de Lek, ils poussèrent la porte de l’établissement, bien décidés à obtenir enfin des résultats.
    Après une heure passée à l’intérieur, cinq cents crédits dépensés et quelques questions posées aux filles, les deux compères ressortirent de là, plutôt satisfaits. Ils retrouvèrent Poppy qui ne préféra rien connaitre des méthodes employées. Elle plissa les yeux en les voyant approcher. Leurs chemises mal aboutonnées, les traces de rouge à lèvres sur leur cou et l’odeur de parfums capiteux qui flottait autour d’eux à tel point qu’on devait les sentir jusqu’à Terra.
    -J’espère au moins que vous avez obtenus des réponses ? Lâcha-t-elle.
    -Il est venu ici, y a deux jours et il a bien cherché ce qu’on pensait, commença Felton, tout en se plaquant contre un mur et s’allumant une barrette.
    -Et ?
    -Et il n’a pas obtenu ce qu’il cherchait, ajouta Lek.
    -Quoi ? Et c’est tout ?
    -Nan, ma p’tite dame, ajouta Felton, en soufflant sa fumée, avec un large sourire.
    -Il s’est fourni sur le port. Un marchand d’esclaves vend justement ce qu’il recherche, conclut Lek.
    Poppy ne dit rien pendant quelques instants, prise d’un petit tic nerveux. Une larme coula au coin de son œil. Elle fit un petit signe à Felton, indiquant son paquet de lho. Il lui en tendit une et elle se l’alluma avant de répondre.
    -Sinclar doit vous recontacter quand, au fait ?
    -Ce soir, si tout va bien.
    -Elle aura des informations sur Cox et sur Haxt, j’imagine ?
    -C’est ce qu’elle espère obtenir.
    -Parfait. Ne la lâchez pas. Allons faire un petit tour sur le port en attendant, je crois qu’il est temps de passer un peu à l’action, finit-elle par leur dire.

    Rico venait de garer la moto tout-terrain qu’il venait de voler un peu plus tôt dans le quartier des entrepôts. Lexxi et Derreck s’en sortaient parfaitement de toute façon et n’avaient pas vraiment besoin de lui. Il avait juste laissé la voiture garée à deux rues de là et il les avait prévenus de toute façon. Derreck était plutôt favorable à l’idée qu’ils y aillent tous les trois mais Lexxi, bien que partagée, avait tout de même préféré suivre la mission. Cox et surtout les Milagria avaient été aperçu ici, plusieurs jours auparavant et il était devenu crucial pour leur mission d’en apprendre plus sur leurs intentions. Savoir tout ce petit monde dans la nature, avec maintenant un chirurgien plasticien qui pouvait refaire le visage de Trône savait quel adversaire n’était pas pour les rassurer. Pour l’heure, leurs pistes étaient maigres en plus. Haxt s’était fait passer pour mort, Bosinski et ses hommes étaient le warp sait où, quant aux Milagria, leur spectre mortifère et insaisissable planait toujours sur la ville, sans que l’on ne sache où et pour couronner le tout, le Syndicat de l’Ombre disposait toujours d’hommes et de moyens comme ils avaient pu le constater.
    Rico ne comptait pas pour autant se laisser impressionner et il avait de plus, une gestion de priorités à maintenir. La Sanguinala était une fête qu’il avait toujours pris très au sérieux, tout comme entretenir de bonnes relations avec une réseau de connaissances qu’il appréciait.
    Certes, Felton et Poppy avaient tout à fait raison, mais avec ses récentes blessures, son attelle à la jambe qui le faisait boiter et ses trois cotes fêlées, de toute façon, il n’était plus d’aucune utilité sur le terrain. Il était grand temps qu’il s’accorde une pause, raison pour laquelle il avait préféré déléguer le pouvoir à Felton en attendant.
    Il descendit de sa moto et grimaça, regrettant presque de ne pas avoir plutôt pris une voiture pour faire la route. La moto était plus rapide mais il allait déguster dans les heures qui allait suivre, il pouvait en être certain. Tous ses os le faisaient souffrir le martyr. Pourtant en ce jour saint, la joie de revoir Ghilda, Narcia et les autres l’enchantait déjà au plus au point. Il avait raté le repas de midi mais au moins il était là et c’était le plus important. Il attrapa son sac chargé de cadeaux et se dirigera vers la ferme en trainant un peu la patte. Il frappa et entra, content soudain de retrouver cette odeur familière faite de feu de bois, de légumes qui cuisent dans la grande cheminée et d’herbes aromatiques. La pièce était sombre malgré cet après-midi d’hiver mais il reconnut plusieurs filles de ferme qui étaient là en cuisine et se qui retournèrent. Il vit le visage de Ghilda…
    Le visage effrayé de Ghilda.
    -Monsieur Ricardo Gallileus… Ce jour est décidemment une bénédiction des cieux ! Cela faisait un petit moment que l’on espérait enfin vous retrouver. Son sang se glaça tandis qu’il reconnut cette voix rauque qu’il n’avait plus entendu depuis bien des mois.
    Quelqu’un refermait la porte à clé, juste derrière lui. Ghilda porta sa main à sa bouche tremblante, les yeux écarquillés et humides alors que Berekiah Milagria sortit des ombres et plaqua le canon de son impressionnant canon de poing sur la tempe de la jeune femme. Elle poussa un petit cri. Rico laissa tomber son sac au sol sachant pertinemment qu’il n’hésiterait pas le moins du monde à lui loger une balle en pleine tête, à elle et à toutes les filles présentes dans la pièce. Il allait bouger quand, depuis son dos, quelqu’un le frappa avec une rare violence à la tête. Il chancela puis tout devint noir.

    Lexxi envoya une pichenette à Derreck et lui désigna la porte de l’entrepôt qui était en train de s’ouvrir. Ils entendirent le moteur du Cargo-8 qui ronronnait tandis qu’il était en train de s’engager dans la rue.
    -Merde ! Lâcha-t-il, ils s’en vont ! On fait quoi, on les suit ?
    -Trône et Rico qui est parti… dépêche-toi d’aller récupérer la voiture, on ne doit absolument pas les perdre, lui dit-elle tout en tentant de maintenir la balise active sur la tablette que Rico leur avait confié…
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 16/09/2022 à 16:27 Citer ce message

    Village de Lynnbarra
    Tempus estimare 974.020M42 – 15H13
    45ème jour sur Archaea.

    Le contenu du broc d’eau glacée qu’il se prit en plein visage lui fit l’effet d’une véritable gifle. Il suffoqua et se mit soudain à paniquer, reprenant pied dans la réalité. L’instant d’avant, il était au mariage de Ghilda et Gideon, à rire avec la petite Narcia, comme deux progenia sur le discours qu’avait prononcé Orl. Il avait même dansé avec Olda, c’est pour dire à quel point il s’était mis dans un drôle d’état avec Abelard et Jero. Et puis l’instant d’après, il avait basculé brutalement dans cette réalité glacée. Il se rappelait maintenant. Il avait cru urgent de venir prévenir Ghilda et tout le village de la menace qui planait sur eux, ayant compris que les Milagria risquaient de remonter sa piste jusqu’ici. En revanche, ce qu’il n’avait pas prévu, c’était que les trois frères l’auraient déjà devancé. A présent, il était seul, loin de son équipe et dans l’impossibilité de faire quoi que ce soit. Ses sens commençaient à revenir progressivement, en même temps que la vive douleur qui remontait de ses récentes blessures. Pour l’heure, il était ligoté et on l’avait pendu par les poignets à une des poutres de la salle commune, comme un jambon de grox. Il était torse nu et du sang avait sans doute coagulé sur son visage tuméfié. Ses pieds ne touchaient pas le sol et il se balançait lentement, ce qui aggravait encore plus son état fébrile et nauséeux.
    Ghilda et les autres filles étaient là aussi. Il y avait Olda, Alina et il reconnut Narianne, Thébie et Phébie, les filles de ferme qui travaillaient avec Ghilda. Elles s’étaient toutes faites belles pour l’occasion et le repas qu’elles avaient dû servir ce midi pour fêter la Sanguinala. Ghilda portait même une robe de mariée, du moins en partie et vus les tissus et le matériel de couture déployés dans la pièce, elles devaient en être à l’étape de l’essayage de la robe.
    Mais à présent, toutes étaient bâillonnées et ligotées sur des chaises. Elles étaient totalement terrorisées et pleuraient en silence. Rico n’entendait que le grincement de la corde par laquelle il était pendu, le crépitement du feu dans la cheminée ainsi que le tic-tac de l’horologium.
    Les frères Milagria étaient là, bien entendu, à l’observer avec un rictus mauvais qui déformait leurs traits menaçants d’oiseaux de mauvais augure. Il pouvait les reconnaitre malgré son œil sans doute poché. Leur style était un mélange sombre de nobles déchus avec un petit côté chasseurs de sorcières, à cause de leurs longs manteaux et de leurs grands chapeaux qui leur donnaient des airs de croque-morts. Ce qu’ils n’étaient pas loin d’être en réalité.
    Berekiah, Ezekiel et Lazarius. Les frères de la comtesse Swan Milagria, noble héritière décadente d’une ancienne maison déchue sur Eshunna de la spire Optimus Mons. Rico était âgé d’à peine seize ans quand lui et d’autres gosses des rues furent recrutés – enlevés, serait un terme plus exact en réalité - par les hommes d’armes de la Maison Milagria. A l’époque il trainait avec de jeunes racailles, tous issus de la sous-ruche et tous pris sous l’aile d’un ancien écclésiaste défroqué et alcoolique qui ne leur apporta que le vice et la misère. Pourtant, c’est avec lui que Rico découvrit le chant et son goût prononcé pour la musique. A sa mort, lors d’une banale rixe entre gangs, Rico avait déjà acquis une certaine réputation parmi les gangs. A cette époque, il faisait partie d’un groupe de Barbare qui se produisait le soir dans certaines tavernes entre les districts de la Potence, des Trois gibets et du Carnivora du 3ème Discrict. Il réalisa que ce n’étaient pas leurs faibles prouesses martiales qui intéressait la comtesse, mais tout autre chose. Rapidement il devint un de ses minions, un de ses jouets personnels, puis son véritable favori, celui qui devait la satisfaire en privé et qu’elle aimait exhiber fièrement bien mieux qu’un esclave, mais comme un animal de compagnie.
    Swan Miligria était une femme redoutable mais charismatique et encore des plus séduisantes malgré un âge qu’il était impossible à estimer. Elle donnait l’impression de n'avoir gère plus de quarante ans, mais pouvait en avoir en réalité trois ou quatre fois plus. Rico s’en moquait à l’époque, c’est avec elle qu’il apprit à vivre dans l’opulence. Lady Swan aimait les soirées fastueuses et flamboyantes ainsi que les divertissements exotiques. Rico avait des qualités qui lui plaisaient et pas seulement en privé. Il était là pour lui plaire mais aussi pour divertir ses nombreux invités au point qu’elle investit beaucoup d’argent pour faire de lui une célébrité qui allait enflammer les gangs de la ruche et Rico devint une star, à un point qu’il n’aurait jamais envisagé. Ce n’est qu’avec les années qu’il réalisa un jour l’envers du décor qu’était la prison dorée dans laquelle il évoluait en toute insouciance, ainsi que le rôle pernicieux qu’il était amené à y jouer. A partager l’intimité de sa riche mécène, il en vint à comprendre quelles en étaient ses activités les plus secrètes. Le Commerce froid de drogues ou d’alcools illicites, n’étaient pas un problème pour sa conscience jusqu’au moment où il comprit que les Milagria touchaient à quelque chose de bien pire que cela. Les clubs privés qu’ils contrôlaient et où Rico se produisait ne servaient pas seulement à attirer les jeunes des gangs pour y faire d’énormes bénéfices et y écouler des pilules de Satrophine, d’Idylle ou de Nirvana. En réalité, ces clubs servaient avant tout à y concentrer des proies et à y récolter de la chair fraiche à chacun de ses concerts. Rico était là, sans le savoir, pour en faire venir toujours plus. Les adolescents qui y venaient étaient tous issus de la basse-ruche et ne manqueraient à personne de toute façon. Aucune investigation du Magistratum n’allait perdre son temps à enquêter sur quelques disparitions dans ces quartiers sordides. Ainsi la Maison Milagria pourrait se fournir, sans la moindre difficulté pour satisfaire une demande toujours plus élevée. Il avait évidemment entendu ces rumeurs qui circulaient parmi certains cercles qui s’amusaient à voir en Lady Swan, une vieille vampire ou quelque horreur du même acabit. Rico ne s’en était jamais réellement soucié, mettant cela sur le compte d’un certain cynisme de la noblesse, oscillant entre jalousie et méchanceté. Et puis un jour, il posa les yeux sur ce qu’il n’aurait pas dû voir. Des documents confidentiels sur une tablette dans la chambre de Swan, parlaient de commandes et de chiffres, comme s’il s’était agit de fournitures ou de simples bouteilles d’alcool. En revanche, le détail parlait de l’âge et du sexe du « matériel ». Aucun ne devait avoir plus de seize ans selon le cahier des charges qui stipulait que les sujets de sexe féminin étaient de bien meilleurs donneurs. Il était question de dizaines d’adolescents fournit chaque mois, en vie et en bonne santé, à un laboratoire de la haute spire appartenant à une noble dynastie. Ce dernier avait pour mission de prélever sans la moindre anesthésie, leur sang, leur moelle et une partie de leurs tissus cérébraux afin de les distiller avec certaines drogues aux origines secrètes pour en produire une enzyme qui allait entrer dans la composition d’élixir rejuvenant. Les corps, devenus inutiles, étaient même revendus en secret, aux guildes de recycleurs de viande des Mortuarius Factoria, afin que rien ne se perde et que les bénéfices soient maximums.
    Ainsi, toute la stratégie de la Maison Milagria venait de sauter aux yeux de Rico, comme un mange-visage de Catachan, réalisant dans quel cercle infernal il était impliqué bien malgré lui. Les traitements rejuvenant rapportaient des milliards de crédits chaque année aux consortiums pharmaticae devant répondre à des demandes toujours plus croissantes malgré les contrôles – très relatifs - de l’Officio Medicae. Sa tête lui tournait et il ne put se retenir d’aller vomir. Cette nuit-là, il prit une décision qui allait bouleverser sa vie. Allait-il pouvoir continuer à vivre avec ce qu’il savait à présent ? Ou allait-il continuer à vivre une fois qu’il les aurait trahis ?
    Il prit la fuite avec les documents qu’il remit le soir-même à une de ses connaissances, Uriel, un ancien ruchard avec qui il avait sympathisé depuis quelques temps après ses concerts et autour d’un verre. Uriel était un ancien flic et à présent il était mercenaire ou garde du corps ou quelque chose comme ça, mais ça lui arrivait de bosser encore avec les autorités, à ce qu’il disait. Enfin, il lui avait glissé ça, un jour, en douce, profitant que l’attention des gardes de la Maison Milagria était détournée. Sur le moment, Rico n’avait pas bien compris pourquoi Uriel lui avait dit ça, mais à présent, il commençait à comprendre que les Milagria étaient surveillé par bien plus gros que le Magistratum.
    Ce soir-là, il lui dit qu’il avait bien fait et c’est lui qui organisa son exfiltration vers Archaea. Ça c’était l’idée d’Epiphany, une fille incroyable que travaillait avec Uriel. Apparemment, elle connaissait bien cet agrimonde et elle lui promit que là-bas, les Milagria n’allait pas pouvoir lui remettre la main dessus.

    Mais Epiphany s’était lourdement trompé…

    Il ne vit pas le poing qui le frappa en plein visage et qui lui brisa certainement le nez. La douleur arriva la seconde d’après, comme une brulure alors qu’il sentait son propre sang, chaud et poisseux couler de nouveau sur son visage. Les filles se mirent à gémir de plus belle malgré leurs baillons et un des frères alla en corriger une d’une gifle qui la fit tomber à terre.
    Tandis qu’il se balançait au bout de sa corde, Berekiah vint l’attraper par les cheveux et l’immobilisa.
    -Je ne sais pas si tu as bien saisi dans quel enfer tu t’es fourré, gamin ?
    -Je suis prêts à vous… On pourrait dis… Discuter…
    Le second coup de poing lui coupa le souffle, le frappant juste sous ses cotes déjà fêlées. Il sentit les os craquer et n’eut même pas la force de crier tellement la douleur le paralysait. Berekiah dégaina un de ses canons de poings, un long et sublime Khayer-Addin.
    -Je crois que tu n’as pas bien compris, Rico. On ne va pas discuter avec une petite raclure de sous-ruche dans ton genre. Tu vas payer pour ce que tu as fait à notre sœur, mais on voulait d’abord te faire souffrir. Avant d’en finir avec toi, on tenait à ce que tu saches que nos activités ont repris et sont encore plus florissantes que jamais.
    Berekiah arma le chien de son canon de poing et plaqua le canon juste sur la jambe blessée de Rico et tira. La détonation fit sursauter les filles en même temps que Rico qui se mit à hurler. Derrière lui, une des filles se mit à pousser des cris étouffés malgré son bâillon. Agacé, Berekiah se retourna, pointa son arme droit vers elle et fit feu. La puissance d’arrêt du projectile de l’impressionnant revolver la jeta en arrière, faisant voler les voiles de sa robe blanche, immaculée. Il lança un regard mauvais à ses deux frères.
    -Trône, faites-moi taire ces satanés bonnes-femmes ou je les plombe moi-même ! Une truie ferait moins de raffut qu’elles !
    Il reporta son attention vers Rico qui était sur le point de tourner de l’œil, à cause de la douleur. Ghilda était étendue au sol dans ses belles robes blanches sur lesquelle une tache rouge était en train de s’agrandir. Berekiah claqua des doigts à plusieurs reprises, juste devant le visage de Rico avant de lui asséner un coup de poing en plein visage.
    -Oh, gamin ! J’ai toute ton attention à présent ? Il nous a fallu du temps, tu sais pour te retrouver mais on a eu de la chance, mes frères et moi. Tu n’es pas du genre très discret ni très prudent pour un gars en cavale. Tu laisses des traces un peu partout, tu parles beaucoup et les gens se souviennent de toi en plus, à croire que tu le fais exprès tellement c’était simple. Il semblerait que tu aies laissé une forte impression à certains locaux, n’est-ce pas, « Monsieur Jéricho Black » ? Eh oui, on a quelques contacts dans le coin. Et vois-tu, cette imprudence de ta part, ça nous a été particulièrement utile. Ensuite, ça a été un jeu d’enfants de remonter ta trace jusqu’à ce charmant village de merde où tu aimes prospérer.
    Berekiah cracha par terre avant de poursuivre.
    -Trône, j’ai toujours eu une sainte horreur de ces agrimondes, ça pue la bouse de grox et ça me file des allergies. Et tu sais ce qui a été le plus facile, Rico ? Faire parler ces ribaudes. Surtout une, au point où je me suis demandé si vous n’étiez pas… un peu plus intime, tu vois ce que je veux dire ?
    Berekiah se retourna et observa Ghilda au sol. Il fit une petite moue faussement désolée.
    -J’y suis peut-être allé un peu fort avec elle. Sa robe est foutue, en tout cas. Mais de toute façon, je ne comptais pas les laisser vivre elles non plus. Je veux juste que tu sois là pour les voir se faire…
    Sa phrase fut interrompue par la porte d’entrée qui s’ouvrit d’un coup, laissant apparaitre Gideon Zukerman, vêtu d’un élégant costume. Il écarquillait les yeux, un revolver à la main.
    -On a entendu des coups de f…
    Sa phrase mourut elle aussi tandis qu’il se prit une balle en pleine tête qui lui explosa le haut du crâne. Son sang gicla contre la porte et son corps fut projeté en arrière alors qu’il s’étalait les bras en croix dans la cour. Derrière lui se tenaient plusieurs personnages. Le père Gordo et une quinzaine de zélotes et d’hommes des Frateris Militia, tous armés, venus spécialement pour la Sanguinala. Ezekiel et Lazarius, les frères de Berekiah pointèrent leurs armes de poing dans leur direction et ouvrirent le feu sans hésiter depuis la fenêtre.
    Gordo venait de dégainer un pistolet inferno et ouvrit le feu sans la moindre sommation. Les miliciens ripostèrent à leur tour de leurs fusils, criblant la porte et les fenêtres de projectiles qui éclatèrent le bois et le mobilier dans un vacarme assourdissant. Berekiah repoussa la porte d’un coup de pied pour la refermer à la hâte tandis qu’elle encaissait le gros des impacts puis bascula une commode afin d’en bloquer l’accès.
    -Par la porte de derrière, vite ! Cria-t-il à ses frères, réalisant qu’ils n’auraient pas l’avantage.
    Avant de les rejoindre, il tourna son regard vers Rico toujours accroché au bout de sa corde.
    -On se reverra, gamin, crois-moi. On sait où tu vis, de toute façon. Ce n’est qu’une question de temps.

    Gordo et ses hommes finirent par enfoncer la porte. Ils allèrent détacher les femmes et il ordonna qu’on appelle le docteur Emerson Obadiah au plus vite alors qu’une partie des miliciens se précipitaient à l’arrière de la maison. Le prêtre vint se tenir devant Rico mais ne chercha pas à le détacher. Il lui lança un regard noir.
    -Merci… lâcha Rico dans un souffle.
    -Si nous sommes intervenus et si j’ai fait appeler le medicae ce n’est pas pour vous, Gallileus. C’est pour la petite Jonessi. Mes prières l’accompagnent pour qu’elle vive et si elle survit à cela, elle devra vivre avec le deuil de son futur époux, tout cela par votre faute.
    Il continua de lui lancer un regard dur.
    -Souffrez un peu. Cela ne vous fera pas de mal. L’Empereur-Dieu souffre Lui aussi mais au moins Lui, Il le fait pour nous laver de nos péchés. Je vous laisse méditer ces paroles.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 19/09/2022 à 14:35 Citer ce message

    En ville, au même moment, ignorant tout du sort de Rico ; Felton, Lek et Poppy avaient décidé de suivre la piste qu’ils avaient obtenu au Crazy Grox et qui les menaient vers le marché du Front de mer sur Port Saint. Trouver le marché aux esclaves ne fut pas le plus compliqué car Lek en avait déjà entendu parler. Il s’agissait d’une vaste et ancienne demeure marchande, d’un style colonial un peu désuet mais non sans un certain charme. Le tout était entouré d’une enceinte et d’un vaste jardin exotique. La bâtisse avait été reconverti en une salle des ventes qui tenait lieu aussi de cabaret. Ils restèrent quelques instants, à l’abri des étals du marché encore animé, à observer ce qui se tramait à l’entrée du bâtiment, dans la rue d’en face. Un fronton en bois peint, indiquait qu’il s’agissait du Mercator Sanguis, la guilde officielle des marchands d’esclaves. Leur attention fut cependant attirée par les gardes à l’entrée, qui se chargeaient de contrôler les clients. Toute arme semblait prohibée à l’intérieur, aussi, les personnes qui en possédaient, devaient-ils les laisser dans une consigne.
    -On ne passera jamais avec toutes nos armes, lâcha Lek.
    -Ni moi avec ma tenue de l’Arbites, ajouta Poppy.
    -D’un autre côté, à deux, nous aurons plus de chance de trouver Cox s’il y est. Je vais y aller avec Lek, juste en observation. Inutile de faire du grabuge. S’il est là, on le saura assez vite, compléta Felton. Je préfère que Poppy nous attende ici. On va lui confier nos armes.
    Elle se contenta de hocher la tête tandis que Felton lui passait ses armes sans hésiter. Lek en fit de même mais préféra dissimuler un de ses carnodons sur lui, au cas où. Ils y allèrent de manière assez détendue, prenant garde à ne pas montrer qu’ils étaient ensemble. Felton passa le contrôle et la fouille sans le moindre souci. En revanche, un des gardes repéra le Carnodon sur Lek et lui interdit l’entrée aussitôt, lui faisant comprendre qu’il était inutile pour lui s’insister malgré ses plus plates excuses.
    Lek dû rebrousser chemin et s’en retourna vers Poppy.
    -Il s’est passé quoi ? L’interrogea Felton depuis son microvox, alors qu’il traversait le jardin du Mercator Sanguis pour se diriger vers l’entrée du bâtiment.
    -Je me suis fait refouler. Ils ont vu que j’étais armé… Désolé.
    Felton s’arrêta, juste avant l’entrée.
    -Poppy, tu peux prendre la relève ?
    -Pour cela, il faudrait que je retire mon armure, il n’est pas question que j’entre comme ça.
    -Ça te prendrait combien de temps ?
    -Quelques minutes…
    -D’accord, fais au mieux, je t’attends. Lek ?
    -Oui ?
    -Pendant que tu seras dehors, profites-en pour voxer Rico. Demande-lui où ils en sont avec cette histoire de planque.
    -Reçu.

    Avec l’aide de Lek, Poppy trouva un coin discret entre deux boutiques, derrières des futs de vin et en profita pour détacher sa massive armure carapace. Juste en-dessous, elle portait son uniforme de l’Arbites, duquel elle dégrafa les divers insignes, patchs et grades et confia le tout, avec ses armes et sa plaque, à Lek. Enfin, elle enfila de nouveau son long manteau afin de dissimuler en partie son treillis noir et ses bottes de combat qui lui donnait un air des plus militaires. Elle alla rejoindre Felton à l’intérieur, passant les gardes sans le moindre souci.
    L’intérieur de l’établissement donnait l’impression de n’être qu’un de ses grands saloons, à mi-chemin entre le bar et le cabaret. Une musique entrainante y était jouée depuis le fond de la salle enfumée. Une foule de clients s’y pressait, admirant les différents spécimens mis en valeur sur une scène afin d’y être vendu aux enchères. Le maitre des lieux animait le bon déroulement des ventes, n’hésitant pas à vanter les qualités physiques de tel ou tel captif. Si certains seraient destinés aux arènes de combats, il était clair que d’autres finiraient comme domestiques ou autres conditions encore moins enviables.
    Felton se fraya un chemin jusqu’à Poppy. Il se placèrent derrière une colonne, à l’abri des regards indiscrets.
    -Vous avez trouvé ce que l’on cherchait, MacLatchy ?
    -Pas vraiment. En revanche – il lui désigna le maitre des lieux – Tu vois qui tient la boutique ?
    L’homme en question était chauve et se déplaçait avec une canne. Il avait beau se donner des airs d’aristocrates, il n’était pas très difficile de deviner qu’il n’en était rien. Son regard puait la cupidité. Poppy se dit que si elle venait à le croiser de nuit, en pleine rue, elle le ferait arrêter de manière préventive, juste à cause de sa sale trombine.
    -Sa tête ne me dit rien.
    -Il se nomme Quinston Grish. Sur le coup, son nom ne m’a rien dit et puis je me suis rappelé que Cox m’en avait parlé une fois, il y a un an.
    -Et on sait quoi sur lui, en dehors d’être à la tête d’un commerce d’esclaves ?
    -Pas grand-chose, si ce n’est que lui et Cox se connaissent. Le problème est qu’il pourrait tout aussi bien me connaitre. Et je ne sais même pas s’il a des liens avec le Syndicat de l’Ombre et la Kasballica.
    -Je pourrais aller lui parler, je pourrais obtenir l’information, dans ce cas ?
    Felton lui désigna les gros bras qui se tenaient non loin de lui, en permanence, bien que de manière assez discrète. Les mêmes gardes aux muscles bien visibles se tenaient à chacun des angles de la salle. Felton n’avait pas loupé non plus la présence de deux ogryns bien menaçants. User de la force en tel lieu, relevait du suicide, à moins d’y entrer avec toute une escouade tueuse bien équipée. Poppy lui indiqua, à son tour, la présence d’un adepte qui devait lui tenir lieu de secrétaire. Autant Grish avait une véritable tête de fripouille prêt à vendre père et mère pour quelques billets de plus, autant le scribe en question donnait l’impression d’être plutôt effacé, voire austère et complètement absorbé par sa tâche.
    -Je pourrai tenter d’approcher son secrétaire. Ce sera une proie facile, de plus il doit bien connaitre tous les secrets de son maitre. Je pense pouvoir attirer son attention et l’attirer jusqu’ici, à l’écart. A deux, nous devrions parvenir à l’interroger. Tenez vous prêt à intervenir, en cas de besoin.

    Felton hocha la tête, ne voyant pas de meilleure solution dans l’immédiat.
    Poppy profita que les ventes venaient tout juste de se terminer, pour fendre la foule et s’approcher du scribe. Elle ouvrit les pans de son manteau, détacha ses cheveux pour leur donner un peu plus de volume, puis défit les premiers boutons de sa veste, cherchant à se mettre en valeur d’une manière un peu plus féminine. En temps normal, son armure carapace inhibait totalement le caractère féminin de la Praetor Sandwall, ce qui était parfaitement calculé et même souhaitable. Mais sans son armure, même Felton dut bien reconnaitre, qu’il se dégageait d’elle – non pas une véritable beauté – mais un petit charme non désagréable, accentué par un physique plutôt attrayant mais passablement mis en valeur par sa tenue martiale. De plus, Felton n’avait encore jamais vu Poppy user de ses charmes et en vint à se demander – non sans amusement - comment diable, un agent de l’Arbites, formaté comme elle, s’y prenait-elle ?
    Elle aborda le scribe avec un large sourire.
    -Alors mon joli, tu me payes un verre ?
    Le scribe releva son visage émacié et fatigué vers celui de Poppy mais resta bloqué pendant quelques instants, ayant toutes les peines du monde à pouvoir la regarder dans les yeux. Il ne put s’empêcher de rougir et de bafouiller quelques mots inintelligibles. Il parut alors évident que parler à une femme ne devait pas faire partie de ses prérogatives. Qu’une femme l’aborde tenait alors de l’improbable. Il resta là, totalement interdit, ne sachant ni comment réagir, ni quoi répondre mais disposé à tout avouer.
    L’instant d’après, Quinston Grish apparut, appuyé d’une main sur sa canne – à cause d’anciens augmentiques - tandis que de l’autre, il plaqua sa main fermement sur l’épaule de son scribe.
    -Graham, soyez aimable et allez donc dans votre sous-sol, remplir nos derniers registres, lui dit-il d’une voix érayée de fumeur de lho.
    -Oui, Monsieur Grish, s’empressa-t-il de lui répondre avec déférence.
    Le secrétaire referma son livre de comptes, remballa à la hâte ses autoplumes et autres accessoires hétéroclites d’écritures dans lesquels il s’empêtra, puis s’en retourna en trottinant. Grish reporta alors son attention vers Poppy, un sourire carnassier lui déformant son visage patibulaire. Deux de ses gros bras se trouvaient non loin, à les surveiller de près. Au-delà des matraques, fouets et armes de poing qu’ils portaient à la ceinture, ils étaient protégés par une armure composite intégrale, ce qui leur donnait des airs de gladiateurs des arènes.
    -Quinston Grish, pour vous servir. J’espère que mon secrétaire ne vous aura pas trop importuné ?
    -Pas le moins du monde…
    -C’est un indécrottable séducteur, une chance que je sois arrivé à temps… Je ne crois pas avoir retenu votre nom, au fait ?
    -Poppy.
    -Poppy… comment… ?
    -Juste Poppy.
    -Voilà un prénom tout à fait charmant. J’ai eu une adorable et docile chienne du même nom, jadis. Dites-moi, vous n’êtes pas d’ici ? Les affaires, j’imagine ?
    Elle prit sur elle pour ne pas relever le trait de sarcasme ou de goujaterie, se retenant de ne pas lui enfoncer sa canne dans le crâne.
    -On pourrait dire cela. Disons que je suis… En quête d'aventure.
    -D’où votre tenue quelque peu… Appropriée… Je comprends mieux à présent. Voilà qui est intéressant. Sans doute pourrais-je vous proposer certains de mes services ? En attendant, puis-je vous offrir un verre ?
    -Volontiers. Je vais prendre une Tentacula. A la cuillère, pas au shaker.
    Il lui fit signe de l’accompagner au bar où il commanda les deux mêmes cocktails. Elle en profita pour vérifier discrètement si Felton était bien dans les parages, ce qui était le cas. Après quelques instants, une serveuse servit leurs consommations.
    Poppy prit son verre puis toisa Grish avec un petit sourire.
    -J'ai l'impression qu'on pourrait bien s'amuser tous les deux.
    Il faillit s’étrangler avec son cocktail et se retint de ne pas recracher son contenu.
    -Trône ! Alors vous… Vous êtes… directe… Je pensais que vous étiez là pour parler affaire, justement…
    -Je n'ai pas de temps à perdre, la vie est trop courte. Et dans mon métier, ce n’est pas tous les jours que j’ai l’occasion de croiser un vrai mâle qui pourrait être à la hauteur.
    Il eut un petit rire gêné.
    -Oh, vraiment ? En général, j’ai plutôt l’œil pour ce genre de chose… N’y voyez nulle offense, vous êtes charmante, mais pour vous dire la vérité, j’aurais plutôt parié que vous n’étiez pas trop intéressé par les hommes…
    Elle lui caressa le bras d’une main puis soudain, de l’autre, chercha à lui empoigna l’autre poignet, comme pour le provoquer en duel ou lui faire une clé de bras.
    Il eut aussitôt un mouvement de recul, se dégageant, prit au dépourvu par une telle attitude. Derrière lui, ses deux gardes venaient de porter leur main à leurs armes, parés à intervenir pour aider leur maitre. Il leur fit signe discrètement de ne pas le faire, tout en réajustant les pans de sa veste redingote en velours brun. Il se reprit avec un sourire contrit et lui signifia de patienter une seconde. Il se retourna et glissa quelques mots discrètement à un de ses hommes. Felton venait de s’approcher en douce, intrigué par la scène et cherchait à comprendre où Poppy voulait en venir avec son dangereux numéro. Il tendit l’oreille et, malgré la musique et les brouhahas, ne manqua rien de leur échange. Il activa son microvox, prévenant aussitôt Poppy à voix basse.
    -Tu fais quoi avec lui, bordel ? Il va griller ta couverture !
    Elle n’eut pas le temps de lui répondre. Grish se retourna alors vers elle.
    -J’aimerai vous montrer ma collection dans mon bureau. Nous y serions bien plus à l’aise pour discuter.
    -Une collection de quoi ?
    -Qu’importe… Je vous en prie, j’insiste.
    Poppy lui empoigna de nouveau le bras et ne le lâcha pas.
    Felton, voyant que ses hommes de main avaient l’air sur leur garde et risquant lui-même de se faire repérer, en profita pour se retirer un peu parmi la foule et voxa de nouveau Poppy.
    -Merde, mais arrête ça, il est en train de se douter de quelque chose !
    Elle ne s’arrêta pas pour autant, cherchant à évaluer la force physique de son interlocuteur en le forçant à lui résister. Ils devaient être plus ou moins de force égale, pour autant il ne chercha aucunement à entrer dans son jeu. Elle le laissa se dégager le bras avec un air déçu, sans y opposer plus de résistance.
    -J’aurais peut-être mieux fait de suivre votre scribe, finalement...
    Elle se leva et termina son verre avec un petit sourire de défi, afin de lui faire regretter son geste. Elle reposa son verre puis se dirigea vers la sortie d’un pas bien décidé. Autour d’elle, les clients quittaient déjà les lieux et le personnel était en train d’accompagner les derniers retardataires vers la sortie, ce qui incluait Felton. Poppy se dirigeait ainsi vers la sortie et allait le rattraper lorsque deux autres gardes s’interposèrent.
    -Pas vous, mademoiselle. Veuillez nous suivre, lui dit l’un d’eux en lui posant la main sur le bras.
    Elle chercha à se dégager.
    -Lâche-moi, espèce de gros porc, tu vas me laisser sortir tout de suite d’ici !
    A quelques mètres de là, Felton vit la scène, peinant à comprendre quelle était la stratégie employée par Poppy et ne sachant s’il devait intervenir ou non. De toute façon, deux hommes armés étaient en train de le reconduire lui et d’autres personnes vers la sortie. Sans arme et seul, il n’allait pas pouvoir intervenir, pas maintenant, au risque de griller sa couverture. En revanche, il espérait que Poppy savait exactement ce qu’elle faisait avec son numéro. Là, elle était en train de se débattre mais les deux gros bras finirent par la maitriser, l’empêchant de sortir. Une larme se mit à couler, au coin de son œil droit. Maitrisée mais défiante, elle se mit à rire, puis haussant le ton, à l’attention de Quinston Grish, qui s’en retournait vers le fond de la salle, accompagné par deux de ses gardes.
    -Alors, ça y est on sort les muscles ? Dommage que ce ne soient pas les tiens !
    Elle se débattit et se jeta sur un des gardes, le mordant à la main de toutes ses forces, au point que le sang se mit à couler. Il se mit à crier et à jurer.
    Autour d’eux, les quelques derniers clients qui s’en retournaient, firent à peine attention à la scène. Ceux qui lui jetèrent un regard médusé, durent la prendre pour une espèce de folle, avec ses cris et sa bouche en sang, évitant le plus possible de s’en approcher. Felton venait d’être contraint de sortir avec les derniers d’entre eux. Les portes furent refermées juste derrière. Deux ogryns venus spécialement en renfort, s’en assurèrent.
    Continuant de se débattre, elle chercha à s’emparer d’une des armes de ses adversaires mais les deux hommes de main durent la maitriser de toutes leur force à nouveau, au point qu’elle mit un coup de tête en plein visage de l’un d’eux. Il recula en titubant, mais résista au choc.
    Elle se mit à rire, comme étant dans son élément, prête à en découdre, même désarmée face à deux gros durs qui ne l’impressionnaient pas le moins du monde. Elle colla un coup de pied entre les cuisses du second garde qui resta sonné pendant quelques instants, le souffle coupé.
    -Alors, ta maman a oublié de t'apprendre les bonnes manières, mon gros ?
    Le premier revint à la charge et lui asséna un coup de matraque mais elle l’esquiva sans peine. Ses années d’entrainement au sein des escouades répressives de l’Arbites lui avaient fait voir des situations bien pire que celle-là. Se dégageant, elle attrapa un chandelier en bronze posé sur une commode et allait s’en servir comme d’une masse pour leur défoncer le crâne, se demandant au passage ce que Lek et Felton attendaient bien pour intervenir et leur rentrer dans le tas.
    Mais personne n’intervint.
    Elle se trouvait donc seule face à deux gros bras qui avaient sortis leurs matraques de combat, bien décidés à ne plus la ménager. Quatre autres gardes venaient d’arriver en renfort, armes à la main et les deux ogryns étaient restés en retrait, mais observaient la scène d’un regard amusé. Grish refit son apparition avec un canon de poing à la main et le pointa vers le visage de Poppy.
    -Bien. Assez joué. Amenez-la moi.
    Elle laissa tomber le chandelier au sol, un sourire de défi sur le visage.
    Sous bonne escorte, elle fut conduite jusqu’au bureau de Quinston Grish. Il s’agissait d’une vaste pièce, élégamment meublée, bien que dans un style colonial un peu désuet, avec ses bustes de primarques en bronze, ses armes antiques aux murs et ses quelques toiles montrant des scènes mythologiques de l’ère pré-impériale. Les deux gardes lui retirèrent son manteau et en fouillèrent les poches puis la forcèrent à s’assoir sur un des fauteuils et restèrent derrière elle. Deux autres restèrent à l’extérieur. Ils refermèrent la porte.
    Grish fit le tour de son bureau puis alla s’assoir dans son fauteuil, lui faisant face. Il s’alluma un cigalho qu’il préleva dans une boite à cigares en marqueterie, avec une certaine satisfaction.
    Poppy l’observa faire, puis posa ses bottes sur le coin de son bureau avec une réelle provocation.
    -Quelle marque vos cigalhos ?
    Un des gardes lui flanqua un coup de matraques dans les pieds pour la faire changer d’attitude. Le regard que Grish lui lançait à présent n’avait plus rien de sympathique. Elle retira ses pieds du bureau.
    -Je ne sais pas à quoi vous essayez de jouer, Mademoiselle… Poppy, mais votre numéro commence à devenir vraiment lassant.
    -Oh, je pensais que tu étais autant intéressé que moi par ce petit jeu, mais je vois que je me suis trompée. Peut-être bien que d'autres jeux pourraient t'intéresser dans ce cas ?
    -Il y a bien des choses qui m’intéressent, en effet. Et pour commencer, vous allez changer de ton, avant que mes hommes ne vous corrigent pour de bon.
    -Oui, enfin c'est à toi que je l'ai proposé, pas à tes gorilles.
    Elle cherchait à évaluer ses chances, notamment où se trouvaient leurs armes de poing et combien de temps il lui faudrait pour éliminer les deux avant de se retourner vers Grish. Ils s’en rendirent compte et la plaquèrent sur sa chaise, plutôt fermement avant même qu’elle ne se jette sur eux de nouveau.
    -On va jouer à un tout autre jeu, ma belle, lui dit l’un d’eux alors que le second lui plaqua un injecteur automatique sur le cou. Elle ressentit une piqure et la brûlure d’un produit qu’on venait de lui injecter. Elle se mit à résister.
    -C'est quoi cette merde ?
    Voyant qu’elle se débattait de plus belle comme une furie, ils n’eurent d’autre choix que de lui ligoter les mains derrière la chaise et de lui attacher les pieds, sans chercher à lui répondre.
    Grish tira sur son cigalho avant de le poser dans un cendrier en argent.
    -Vous êtes en train de me poser un véritable problème, Poppy… ou qui que vous soyez, savez-vous ?
    Elle se mit à ricaner nerveusement. Des larmes coulant sur son visage.
    -Pourquoi ? Vous vous trouvez à ce point dégueulasse que vous ne puissiez imaginer qu’une fille comme moi s'intéresse à vous ? Au moins votre scribe n’aurait pas fait autant de manières, lui !
    -Justement. Graham est un peu plus… Comment dire ? Un peu plus influençable que moi. Votre numéro aurait sans doute pu fonctionner si vous aviez été plus mesurée et moins agressive. Mais force est de constater qu’aborder les hommes n’est clairement pas dans vos habitudes.
    Avant même qu’elle ne lui crache au visage, un des gardes lui plaqua sa matraque à décharge dans la nuque, la foudroyant avec une dose suffisante pour l’électrifier. Elle serra les dents tandis que la douleur et les décharges d’énergie ne lui parcourent toute la moelle épinière, du cortex cérébral jusqu’au sacrum. Luttant pour reprendre son souffle avec peine, elle cherchait à conserver un air empli de défiance. A présent les gardes, étaient en train de lui faire les poches, ouvrant son uniforme, sans ménagement. Un des gardes venait de déposer sur le bureau de Grish, le microvox qu’il avait prélevé sur elle. Ce dernier l’observa avec attention mais avec une moue sans surprise, juste avant d’employer le pommeau métallique de sa canne pour l’écraser et le briser en morceaux sur son bureau. Il l’observait avec la plus grande attention.
    -C’est là, tout le problème, voyez-vous, lui dit-il. Mon travail ici est justement de vendre des esclaves. Des citoyens déchus mais issus de tous les milieux. Et je pense m’y connaitre un minimum pour savoir identifier ma marchandise. Reconnaitre l’origine d’un homme ou d’une femme, fait partie de mes talents. Votre uniforme, bien que ne disposant pas de marquage d’unité, est le modèle porté ici-même par les forces de l’ordre. Vous portez des cicatrices, et je vois bien que ce ne sont pas des marques faites par une dure vie de labeur. Ce sont des impacts de balles ou de coup de couteaux. Vous êtes une femme physique, vous savez vous battre et avez su magistralement nous en faire la démonstration. Vous êtes née dans la violence et vivez pour la violence. Sur le moment, j’ai bien cru avoir eu affaire à un agent de l’Arbites. Vous en avez les aptitudes. Pourtant, je connais bien l’Arbites et je me demande pourquoi diable, Magnus Cain m’enverrait une telle furie se donner ainsi en spectacle devant mes clients. Et seule, en plus. Il se trouve que je connais très bien le Justicar et ce ne sont pas là ses manières de procéder. De plus, il sait que je suis réglo, comme ma licence de commerçant. Qui que vous soyez, cela laisse d’autres possibilités bien plus désagréables mais qu’il me faudra pourtant découvrir, telles que : pour qui vous travaillez ?
    Grish sortit un hachoir à viande qu’il posa sur son bureau.
    -A présent, j’attends une réponse claire et ma patience ne va pas être infinie. Il se trouve que vous avez dix doigts. Je vais donc vous reposez la question dix fois…

    Felton avait retraversé la place du marché bondée afin de rejoindre Lek. Ce dernier se trouvait toujours dans la ruelle où il était occupé à garder l’armure de Poppy, ses armes et son équipement ainsi que les armes de Felton qu’il s’empressa de lui remettre.
    -Alors, comment ça se passe ?
    -C’est la merde. Elle s’est fait attraper.
    -Quoi ? Mais comment ça ? Pourtant vous ne deviez…
    -Trop long à t’expliquer, écoute… j’ai rien compris à son numéro mais là, il va falloir qu’on trouve un plan très rapidement pour la sortir de là… Les trois autres, ils sont où ? Ils peuvent nous rejoindre en urgence ? Tu as pu les joindre ?
    -Oui, Lexxi a envoyé un message avec le comm-vox pendant que vous étiez à l’intérieur. Rico est parti en bus dans la matinée pour fêter la Sanguinala à Lynnbarra.
    -Quoi ? tout seul ?
    -Apparemment, oui
    -Nan mais attends, c’était quoi l’idée, là aussi ? Se faire tuer ? Dans son état, il ne tient presque plus debout, il a des tueurs aux trousses et il se tire comme ça chez sa fermière pour aller faire la fête pendant que nous on doit se coltiner tout le sale boulot… D’accord, donc lui, on peut l’oublier pour au moins les deux prochains jours. Bon et les deux autres, ils ont pu avancer en attendant ?
    -Lexxi et Derreck ? Nan, eux, ils sont restés en surveillance. Des types de la planque sont ressortis en voiture à un moment et ils ont tenté de les suivre mais sans résultat. Leur voiture était garée trop loin ou je ne sais quoi, donc ils n’ont pas pu. Du coup ils ont tenté de revenir vers la planque pour y entrer mais ils se sont fait repérer. Là, ils restent en observation à ce que m’a dit Lexxi.
    Felton se plaqua la main sur le visage, l’air totalement dépité.
    -Malheur… Et ça fait quoi ? Sept ou huit heures qu’ils sont là-bas à se tourner les pouces et à même pas être foutu de prendre la moindre initiative ? Essayer de retrouver la voitue, tenter une diversion, je ne sais pas moi ? Mais c’est une blague ? Si Rico revient dans trois jours, ils n’auront pas bougé de leur planque en fait ? Tu leur as dit quoi ?
    -Qu’on a été au Crazy Grox pour y trouver la piste de Cox, ce qui nous a conduit ici, au marché du port et qu’on est sur le coup. Mais le microvox ne captait pas très bien, je ne suis pas sûr qu’ils aient eu tout le message.
    -Eh bien parfait ! Il va donc falloir qu’on se démerde tout seul. Et en plus on a son armure et tout son bordel à trainer avec nous.
    -Si on y va en force, à l’intérieur, c’est comment ?
    -Oublie les flingues. Ils ont des gardes armés jusqu’aux dents et même des ogryns et vu tes blessures, ça risque de mal finir pour nous, plus vite que prévu. Non, j’ai peut-être un début d’idée et il va falloir que j’y aille au bluff pour la sortir de là. Et pour le coup, je ne suis vraiment sûr de rien.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 26/09/2022 à 18:42 Citer ce message

    Cinq minutes plus tard en ce début d’après-midi, Felton, accompagné de Lek, se présentait à la grille du Mercator Sanguis et sonna à la cloche. Afin de ne pas trahir son identité, au risque d’y croiser des membres du Syndicat de l’ombre l’ayant déjà croisé, il s’était injecté le contenu d’une des seringues que Sinclar lui avait confié. La drogue aux propriétés plastiques avait la faculté de lui modifier en partie, les traits du visage. Ce n’était pas aussi puissant que les drogues de l’Assassinorum mais cela produisait son effet, dans la mesure où on n’en abusait pas. Ses traits ainsi modifiés, portant ses riches vêtements de nobles, son épée énergétique ouvragée et son pistolet bolter à la ceinture, il comptait bien passer pour un de ses nobles marchands, un envoyé de la Maison Holdemert, une des banques du sous-secteur, de passage sur Archaea. Avec Tsali, ils avaient eu l’occasion de travailler ce genre de couverture justement, les semaines passées.
    Felton avait demandé à Lek de laisser les armes et armures de Poppy dissimulées dans un container au fond d’une ruelle, espérant que nulle racaille des rues ne vienne en profiter pour les dérober. Felton préféra prendre le risque. Après tout, Poppy ne lui laissait guère le choix.
    Un garde en armes se présenta à la grille et l’identifia aussitôt pour ce qu’il semblait être. Un noble marchand.
    -Désolé monsieur, mais l’établissement est fermé. Il faudra repasser à compter de dix-neuf heures.
    Felton sortit de sa poche un billet de cinq cents crédits et le brandit sous le nez du garde. La somme était plus que coquette, équivalent à un mois de salaire pour un citoyen lambda.
    -Je dois voir Monsieur Grish, c’est assez urgent. Cette somme devrait largement suffire à vous dédommager de tout éventuel désagrément, n’est-ce pas ?
    Le garde ouvrit la grille, préleva la somme au passage et pria Felton et Lek de les suivre vers le bâtiment. Une fois parvenus à la porte de l’établissement, il les fit entrer puis se tourna vers lui.
    -Qui dois-je annoncer ?
    -L’émissaire de la Maison Holdemert.
    Le garde les fit patienter dans un petit salon à l’entrée et demanda qu’on leur apporte des rafraîchissements avant de s’en aller vers une vaste salle. D’autres gardes étaient installés non loin de là, restant à les surveiller, comme il avait déjà pu le constater un peu plus tôt.
    Après quelques instant, Grish apparut en sortant de son bureau, escorté de deux gardes dont celui de la grille. Il approcha en claudiquant à cause de sa canne et de sa jambe augmentique. Felton se rendit compte qu’il avait l’air soucieux à cause de ses sourcils froncés. Il s’approcha et fit un petit salut en s’inclinant rapidement, ne manquant pas au passage de remarquer la tenue et les armes exceptionnelles de Felton.
    -Seigneur Holdemert… Quinston Grish, pour vous servir. Pardonnez mon personnel mais nous n’avions pas été informé de votre venue, impromptue certes, mais appréciée, soyez-en assuré.
    Il se redressa et tapa dans ses mains.
    -Allons bande d’empotés, faites apporter des rafraîchissements à ses messieurs.
    Il les convia à s’assoir.
    -Que puis-je pour vous, Monsieur ?
    Felton lui rendit son salut et s'assit en face de lui. Lek resta debout, un peu en retrait du fauteuil, jouant son propre rôle de garde du corps.
    Felton remercia la serveuse qui lui apporta une boisson mais n’y toucha pas tout de suite. Dans une de ses poches, il avait activé son augure de sûreté, capable de déceler la moindre trace de toxine. A un de ses doigts, il avait passé une impressionnante chevalière que Jézabel leur avait fournie. La bague était massive et ornée d’une jolie escarboucle mais dissimulait néanmoins une dose de poison.
    -Je vous remercie de me recevoir. Je conviens que ma venue est quelque peu cavalière mais je ne vais pas y aller par quatre chemins… Je suis venu vous demander de me restituer la fille que vous détenez.
    Grish se mit à sourire de toutes ses dents teintées par l’abus de lho.
    -La fille ? Quelle fille ? Veuillez me pardonner, Monsieur… mais il se trouve que j’en vends tous les jours… Vous n’êtes donc pas là pour une question d’ordre financière ? Mes… livres de comptes ?
    Felton poussa un long soupir.
    -Mon cher Monsieur Grish, pour vous comme pour moi, le temps est une constante des plus précieuses. De grâce, pourrait-on, je vous prie, passer le moment où vous me prenez pour un de ces nobliaux de province, quelque peu imbécile qui ne saurait nullement où il met les pieds ? Je parle bien évidemment de cette demoiselle qui vous aura donné du fil à retordre à vous et à vos gardes à la fin de la dernière vente. Cela vous revient-il enfin ? Une forte tête, j’en conviens... Et au charme quelque peu exubérant, oserais-je ajouter.
    Grish passa alors par plusieurs couleurs, réalisant soudain et avec une certaine gêne, son mépris et de quoi parlait Felton.
    -Cette fille ? Trône… j’ai du mal à saisir ? Vous aurait-elle aussi molesté ? J’étais justement en train de la faire corriger. Mais ôtez-moi d’un doute…
    Felton esquissa un sourire en levant la main pour lui faire comprendre de ne pas en dire plus.
    -Voyez-vous, Monsieur Grish, cette demoiselle est ma garde du corps. Elle a, certes ses défauts, je le reconnais volontiers et suis même prêts à discuter d'une compensation pour le désagrément qu'elle vous a causé, néanmoins elle fait du bon travail et c'est pour cela que je tiens à ce qu’elle me soit restituée. J'avoue même que son côté "vigoureux" est assez attendrissant, voilà pourquoi je lui passe volontiers ce genre d'écart. Une faiblesse de ma part, j'en conviens, mais je peux me le permettre. Aussi aimerai-je que vous arrêtiez de la corriger, séance tenante.
    Grish resta quelque peu interloqué et prit quelques secondes avant de réaliser. Il lâcha alors un large sourire soulagé.
    -Ah, mais Trône, voilà qui explique et va solutionner un bien épineux problème que j’avais sous la main… Votre… Garde du corps, vous dites ? Mmm… Je crains qu’elle ait eu quelques petits soucis avec l’alcool, voyez-vous ? Car non contente de m’avoir agressé, elle a blessé deux de mes gardes. Deux fois rien, à vrai dire. Ils le méritent après tout mais, par méprise nous aurions pu la corriger sévèrement… Je m’en serai voulu, vous pensez bien…
    Il tapa alors dans ses mains, de nouveau.
    -Eh bien, bande d’empotés, allez donc la chercher ! Aller !
    Puis se tournant de nouveau vers Felton.
    -Comprenez bien que je suis confus… Si je peux vous dédommager d’une quelconque manière…
    -N'en faites rien. S’il y a bien quelqu'un qui doit être confus ici, ce ne peut être que moi. Vous étiez dans votre bon droit et je n'aurais pas agi différemment si quelqu'un s'était comporté de la sorte dans un de mes établissements.
    -Monsieur est fort magnanime…
    Ses gardes la ramenèrent alors – libre, mais visiblement très sonnée. Elle n’avait pas l’air blessée, seuls ses vêtements un peu défaits étaient en pagaille, tout comme ses cheveux et son maquillage qui avait coulé sur ses joues.
    Felton se leva et fit un petit signe à Lek afin qu’il se charge d’elle.
    -Eh bien, j'espère que cela lui servira de leçon. Enfin j'avais déjà dit cela, la dernière fois... Bref. Je tiens à vous remercier pour votre compréhension, Monsieur Grish. Je ferai en sorte que cela ne se reproduise plus et veuillez encore l’excuser pour ce désagrément.
    II fit mine de partir puis se retourna.
    -Oh, j’allais oublier… J'ai ouïe dire qu'une connaissance commune était passé par votre établissement il y a peu. Je devais la rencontrer mais ai été retardé… Les affaires vous comprenez... Aussi aimerai-je bien essayer de le contacter pour prendre un verre avec lui avant de repartir. Malheureusement je n'ai pas pris le temps de me renseigner avant d'arriver sur Archaea pour savoir où il résidait. Peut-être pourriez-vous m'aider... ?
    -Bien entendu, si je peux m’acquitter de cette dette, j’en serais ravi.
    Il lui fit signe de se rassoir.
    -Quelle est cette personne que vous cherchez ?
    Felton se rapprocha de Grish et se mit à murmurer.
    -Il va falloir être très discret, mon bon ami. C'est un homme influent sur Eshunna et je ne voudrai pas que mon envie de partager un amasec avec lui compromette son identité, vous comprenez ? Je suis à la recherche de Monsieur Caleb Cox...
    -Eh bien, il n’est pas dans mes habitudes de donner des noms… Mais entre gens de bonne compagnie, je peux tout au moins vous rendre ce service étant donné que vous le connaissez déjà. Il est bien possible qu’il soit passé il y a quelques jours. Deux fois rien. Il avait une petite commande à passer, mais je n’ai pas eu l’occasion de le croiser.
    Felton chercha à voir s’il bluffait mais Grish était un homme habile, rompu tout comme lui à l’art du mensonge et de la flatterie.
    -Voilà qui est fort dommage. J’aurai aimé savoir s’il reviendrait... Il se trouve que ma maison a eu vent de certaines affaires, quelques placements sur Eshunna, rien de plus. Nous voulions lui en parler, voyez-vous ? Car je ne doute aucunement que cela devrait l’intéresser. Malheureusement il était déjà parti. Me sachant ici et comme je le connaissais quelque peu, on m'a alors contacté afin que j'essaye de le retrouver, mais j’avoue être un bien piètre enquêteur… Je suis descendu au manoir Shelley dans l'espoir de l'y croiser mais en vain... Si cela n’est pas possible, cela ne sera pas bien grave, mais je m'en voudrai de ne pas avoir tout tenté pour le contacter.
    -Oui, en effet… le manoir Shelley… il y séjournait, il me semble. Malheureusement, il semblerait que Monsieur Cox en soit déjà reparti depuis quelques jours.
    Une fois de plus, Felton ne sut dire si son interlocuteur disait la vérité.
    -Eh bien, on dirait que je joue de malchance pour cette fois. Je ne vais pas m’attarder plus longtemps, d’autres affaires requièrent mon attention et je ne voudrai nullement accaparer votre temps plus que de raison. Recevez toute ma gratitude pour vous être montré si compréhensif. Et une bonne Sanguinala à vous !
    Grish le raccompagna, lui et ses deux équipiers, lui souhaitant la même chose en retour.
    -J’ignore toutefois si cela peut vous aider, mais il a demandé que certaines commandes lui soient livrées à la gare de Witch Burn. Sans doute que cela pourra vous évoquer quelque chose ?
    Felton le remercia puis prit congé.
    Une fois dans la rue, ils se dirigèrent vers la ruelle, emportant Poppy avec eux, toujours un peu groggy à cause des décharges électriques reçues.
    -La gare de Witch Burn ? Demanda Lek. C’est à la sortie de la ville ? Y a un pénitencier et une garnison là-bas, non ?
    -Oui, c’est après la planque Kadoshi, des trains partent de là et desservent les villes de la côte ouest.
    -Tu m’as bluffé avec Grish. Merde, t’as appris où à parler comme ça ? Je t’aurais vraiment pris pour un vrai noble.
    Felton eut un petit sourire.
    -Ça m’a coûté, mais Tsali a su faire des merveilles, crois-moi.

    Quelques minutes plus tard, Poppy avait repris ses esprits et était en train de remettre son armure.
    -Je vous remercie pour le coup de main. Je ne sais pas ce qui m’a pris… Je… j’ai commis l’erreur de le sous-estimer. Mais cela ne se reproduira pas. Comment vous vous y êtes pris pour me sortir de là ?
    D’ordinaire Felton n'aurait pas manqué de lui lancer une pique sur le sujet. Mais il n’en fit rien, préférant ne pas charger Poppy plus que cela car l’issue s’était plutôt bien déroulée et puis cela ne lui servait à rien de dégrader ses relations avec elle. Ça leur arrivait à tous de se planter, voilà pourquoi ils allaient devoir apprendre à mieux travailler en équipe et non à jouer les francs-tireurs. Il s’alluma un cigalho, la laissant terminer de se rhabiller.
    -J’ai sorti mon plus beau sourire et j'ai dit s'il-vous-plaît. Et ton Justicar, Magnus Cain, va me devoir cinq-cents crédits…
    Son microvox vibra. Il se mit un peu à l’écart pour répondre. Cela ne prit que quelques instants. Il revint à la hâte, jetant son mégot dans le caniveau. Il fit signe à Lek qui surveillait la ruelle.
    -Appelle les autres et dis-leur de nous rejoindre fissa, à la planque d’Hécate.
    Lek se mit à l’écart et les appela.
    -C’était qui ? Demanda Poppy qui était prête.
    -Jézabel. Elle a cherché à te joindre toi et Rico, mais vous ne répondiez pas.
    -Mon microvox a été brisé chez Grish…
    -Bon, Rico est à Lynnabarra… je ne sais pas ce qu’il a été foutre encore là-bas, mais va falloir qu’on aille le chercher. Jéz veut nous voir demain à la première heure au Reliquaire. C’est important et elle veut qu’on lui fasse un rapport de situation… J’espère que Lexxi a quelque chose.
    Lek venait de couper la communication et revenait vers eux.
    -Alors, tu les as eus ? Demanda Felton.
    -Ils ont eu un problème avec la bagnole. Un pneu crevé et ils sont à plusieurs kilomètres de là.
    -Mais ils ont des infos sur les types qu’ils suivaient au moins ?
    -Je ne crois pas…
    -Nan mais c’est une blague ? Ils sont restés quoi ? Sept ou huit heures en planque pour finir je ne sais où avec un pneu crevé ?
    Il sortit une nouvelle barrette pour se l’allumer. Une petite pluie commença à tomber.
    -Bon, allons à la planque, ça me fatigue…

    Plus d’une heure plus tard, Lexxi et Derreck finirent par arriver, trempés comme une soupe.
    Felton les attendait sur une chaise, les bras croisés, l'air un peu énervé. Poppy et Lek étaient occupés à démonter et nettoyer leurs armes sur la table du séjour.
    -Eh bien, ça va vous deux ? N’allez pas vous faire un claquage, surtout ! C'était comment la sieste devant la planque Kadoshi ?
    Lexxi approcha les mains encore noires de cambouis, sans se démonter. L’eau ruisselait à grosse gouttes sur ses bras aux muscles saillants.
    -Tu veux que je m’essuie sur tes fringues ? Non ? Tu n’es pas le seul à avoir eu une journée de merde, Felton, alors passe tes nerfs sur quelqu’un d'autre. Ça donne quoi de votre côté ?
    -Peut-être un début de piste sur Cox. Et du coup à part le fait que tu as les doigts sales, tu as obtenu des renseignements sur la planque ? Sur ce que les gars trafiquaient ? Où ils sont allés ? Est-ce que vous avez obtenu quoi que ce soit pour l'enquête ?
    Elle alla se servir un verre avec Derreck.
    -Non. Non Et non. D'autres questions ?
    -C’est tout ce que je voulais savoir. Ça ira.
    -Rico est toujours à Lynnabarra, au fait ?
    -Je vais y venir. Maintenant que vous êtes tous là, j’ai eu un appel de Jézabel qui n’arrivait à joindre ni Rico ni Poppy. Elle veut qu’on soit tous demain à huit heures au Reliquaire avec un rapport sur l’avancée de l’enquête. Donc on doit récupérer Rico aujourd’hui et on le ramène ici. On fait profil bas jusqu’à demain matin. On sera mis au vert quelques temps après notre compte-rendu, parce qu’on a fait un peu trop de vagues ces derniers jours. Mais apparemment les autres de la cellule Tenebrae sont sur une piste.
    Une bonne heure plus tard, ils garèrent la voiture à l’entrée de Lynnbarra et se dirigèrent vers l’agriferme de Ghilda Jonessi. Ils avaient pris leur temps, ignorant parfaitement que Rico était en danger. Selon eux, il était là pour célébrer la Sanguinala, rien de plus. Ils avaient bien tenté de le joindre par vox mais la portée laissait à désirer, ce qui ne les inquiéta pas plus que cela.
    Le village, comme les anciennes traditions le voulaient, avait été décoré de guirlandes de fleurs, de bougies placées dans des lampions et d’un grand arbre garni de rubans rouges, d’Aquila et de petits anges en papier maché colorés, à l’image du Primarque. Pourtant, rapidement ils réalisèrent que quelque chose d’anormal venait de se produire. Des villageois couraient, certains se lamentaient mais une fois en vue de l’agriferme, ils virent tout un attroupement.
    -Ne me dites pas qu’il a encore fait une catastrophe ? Lâcha Lek. Felton tenta d’attraper un des passants mais ces derniers étaient visiblement encore en état de choc, parlant de grand malheur, de drame et de tragédie.
    Ils se précipitèrent vers la maison, écartant la foule massée là. Ils virent soudain un corps, étendu les bras en croix au beau milieu de la cour, recouvert d’un drap blanc et la tête baignant dans une flaque de sang.
    Craignant le pire, Felton et Lexxi se dirigèrent vers le corps, malgré les protestations. Felton s’agenouilla et souleva le drap, réalisant qu’il s’agissait en réalité de Gideon Zukerman, le marchand du village. Une balle lui avait emporté tout le haut du crâne, le tuant apparemment sur le coup. Il rabaissa le drap en jurant et accompagné du reste de l’équipe, entra dans la maison. Des femmes étaient au chevet de Ghilda alors que le docteur Emerson Obadiah s’occupait de ses blessures. Il y avait du sang partout dans la pièce. Rico était là aussi, allongé sur un lit de fortune, couvert de bandages ensanglantés. Ils ignoraient cependant s’il était à l’origine de ce carnage ou non. Ils allèrent trouver le médecin et lui posèrent quelques questions mais ce dernier était trop occupé pour leur répondre. La petite Jonessi était en pleine hémorragie.
    Rico reprit quelque peu connaissance et ils purent comprendre qu’il était tombé sur les frères Milagria qui étaient parvenus assez facilement à remonter sa trace et à lui tendre un piège ici-même. Il leur narra ce qu’il avait pu retenir de leur conversation sous forme de quelques mots hachés. Les frères avaient très certainement un lien désormais avec Bosinski, ce qui parut subitement logique pour Rico.
    Il paraissait cependant bien plus préoccupé par l’état de Ghilda et des villageois que de sa propre sécurité. Le docteur leur confia enfin, à la hâte, qu’il craignait que Rico perde sa jambe et qu’en l’état il n’était pas transportable à cause de nombreuses fractures. Quant à Ghilda, il ne savait même pas si elle parviendrait à passer la nuit. Une balle de gros calibre lui avait transpercé un poumon et en l’absence d’un bloc medicae, ses chances étaient minces.
    Lexxi attrapa Felton.
    -Je retourne à la voiture pour appeler un fourgon sanitaire, dans ce cas.
    Il interrogea les autres du regard. Ils acquiescèrent. Lexxi y alla en petite foulée.
    -Je pourrai utiliser mes… capacités ? Leur demanda alors Derreck à voix basse.
    Ils dévisagèrent le psyker.
    -Tu n’y penses pas ? Pas ici, lui répondit Lek, à voix basse.
    -Avec les villageois, ce serait une mauvaise idée, ajouta Poppy. Les superstitions et ce genre de… Pratique, ça risque vite de devenir incendiaire, si vous voyez ce que je veux dire…
    -Pourtant ça les aiderait…
    -Oui, bin pas la peine d’ajouter d’autres catastrophes, on va attendre les sœurs hospitalières, compléta Felton.
    Ils attendirent discrètement dans la maison, le temps que deux ambulances des sœurs hospitalières arrivent au village. Les deux véhicules étaient des fourgons sanitaires Goliath Mk VI aux couleurs rouge et noir de l’ordre du Chagrin Silencieux. Les hospitalières en descendirent se laissant diriger par les villageois vers la maison. Elles ne purent manquer le corps étendu sur le sol de la cour. L’une d’elle, depuis un des fourgons, utilisa un vox pour demander une équipe du Magistratum, déployant la procédure en cas d’homicide.
    Grandes et terribles dans leurs armures gothiques impressionnantes, elles rayonnaient de cette aura divine qui accompagne l’Adepta Sororitas lors de leurs déploiements emprunts de ferveur et de discipline. Aussi bien porteuses de vie que de mort, elles imposaient le respect, tout simplement. Des chérubins et autres servo-crânes les accompagnaient, tels des familiers macabres et menaçants.
    Leur venue ne passa pas inaperçu et fit apparaitre sur la place du village, le prêtre, Gordo et sa phalange de zélotes afin de montrer qui était l’autorité en ces lieux, surtout devant l’Adepta Sororitas. Les sœurs, furent accueillies dans la cour par Lexxi et le médecin Obadiah, qui leur expliquèrent la situation. Poppy était non loin, à surveiller les abords, juste au cas où.
    Derreck, resté à l’intérieur de la maison, en profita pour attraper Felton par le bras. Il lui désigna discrètement les filles de ferme qui étaient dans la pièce, elles aussi.
    -Occupe toi de les faire disparaitre…
    -Pourquoi ça ?
    -Je vais utiliser mes pouv… Mes capacités sur Ghilda. On a très peu de temps.
    -Quoi, là ? Avec toute une bande de religieux fanatiques à deux pas de la maison ? Tu es inconscient ou quoi ?
    -T’occupe, fais-le !
    -Comme tu voudras…
    Felton tapa dans ses mains.
    -Allez, mesdames, dehors. On doit préparer les blessés et je crois que les sœurs ont besoin de vous tout de suite !
    Les femmes ne se firent pas prier et se précipitèrent vers l’extérieur. Felton se tourna vers Derreck mais ce dernier était déjà penché au-dessus de Ghilda, les mains auréolées d’une lueur d’un blanc bleutée au-dessus de sa poitrine. Ses yeux brûlaient d’une même lueur. Il psalmodiait une étrange litanie lorsque tout à coup, le feu s’éteignit dans la cheminée. Un souffle glacé emplit la pièce en même temps que des formes qui se mirent à jaillir de l’âtre encore fumant. Des âmes de défunts depuis longtemps disparus se mirent à tourner dans la pièce. Certaines parlaient à un interlocuteur invisible, prononçant des phrases incompréhensibles, d’autres criaient ou jouaient avec des enfants fantomatiques. Si Derreck resta imperturbable, continuant son incantation, Felton eut l’impression que son cœur cessait de battre pendant quelques instants. Du sang coula de son nez tandis qu’une odeur de soufre et de brûlé accompagnaient ces visions de cauchemar. Il resta tétanisé pendant quelques instants, sentant le souffle méphitique du warp caresser ses cheveux, son visage…
    La porte s’ouvrit et tout disparut en un instant, comme si les spectres n’avaient été qu’une simple hallucination ou quelques formes dégagées par la cheminée. Derreck était là, les mains dans le dos, non loin de Ghilda, un air détaché malgré une flamme encore fugace dans son regard.
    La sœur hospitalière supérieure resta sur le pas de la porte, observant la pièce avec attention, tout en plissant les yeux. Elle huma l’air avec un rictus de dégout, la main sur la crosse de son pistolet lance-flamme sanctifié accroché à sa ceinture. D’un geste de son autre main gantée, elle claqua des doigts, laissant pénétrer un servo-crâne thuriféraire en bourdonnant qui diffusa son encens dans la pièce.
    -Que l’on ouvre les fenêtres et que l’on apporte de la lumière ici. Et que quelqu’un me rallume ce feu, à croire que l’on cherche à veiller les morts, ici.
    Les hospitalières prirent en charge les deux blessés et au bout de quelques minutes, les évacuèrent en civière vers leurs véhicules, sous les yeux des villageois regroupés là. Gordo et ses gaillards pyroclastes vinrent s’interposer en voyant Ghilda partir sur une civière.
    Une petite pluie froide se mit à tomber.
    -Cette femme reste ici, annonça-t-il. La foule de villageois, tout autour, sembla approuver.
    Lexxi attrapa le medicae Obadiah sans ménagement par le bras et le pria de l’accompagner jusqu’au vieux prêtre.
    Elle se présenta devant Gordo qui la reconnut. Lexxi avait passé un mois à Lynnbarra, quelques semaines plus tôt.
    -Vous ? Vous et votre clique de malfaiteurs récidivistes n’en avez donc pas fait assez comme ça ? Reprenez votre complice et disparaissez d’ici. Mais la petite, reste ici.
    Lexxi ne se laissa pas démonter.
    -Les sœurs ici présentes, vont emmener Ghilda Jonnessi pour sa propre survie. Si elle reste ici, elle mourra. Elle posa une main ferme sur l’épaule d’Obadiah. Expliquez-lui, doc.
    Ce dernier se râcla la gorge avant d’acquiescer.
    -Elle a raison, mon Père. Ghilda souffre d’une… hémorragie au poumon. Elle a perdu trop de sang, elle… Je n’aurais pas ce qu’il faut pour la sauver. Pas cette fois. Elle va devoir…
    -Il suffit, tonna Gordo en levant la main. Il fit un geste vers les sœurs.
    -Vous pouvez l’emmener, ajouta-t-il. Puis se tournant vers Lexxi.
    -Ramassez votre… Bande… Et quittez les lieux avant que nous n’ayons d’autres tombes à devoir creuser en ce jour saint. Car vous les aurez sur votre conscience !

    Ils quittèrent le village, suivant en voiture les deux ambulances jusqu’à l’hôpital à la capitale. Ils y passèrent la nuit, préférant ne pas laisser Rico seul, cette fois-ci. En fin de soirée, il sortit du bloc et ils purent constater avec effroi qu’il avait été amputé de sa jambe gauche juste au-dessus du genou. Il était encore sous les effets de l’anesthésiant et des stimms. Son visage et son torse étaient couverts de bandages.
    Ils prirent tous quelques heures de repos, puis au petit matin, Rico se réveilla et ils lui expliquèrent ce qui lui était arrivé. Il accusa le coup, tant bien que mal pour sa jambe mais préféra ne pas rester là, malgré l’avis des infirmières. Il chercha à savoir si Ghilda avait survécu et ils lui confirmèrent que c’était bien le cas. Les hospitalières avaient affirmé que sa blessure aurait dû lui être fatale mais son hémorragie avait été réduite comme par miracle. Ils se gardèrent bien de préciser que c’étaient les pouvoirs psychiques de Derreck qui lui avaient sauvé la vie en réalité.
    Rico, soulagé, demanda que ses équipiers le ramènent au Reliquaire. Ce qu’ils firent, faussant compagnie en douce, aux hospitalières et firent route vers le site secret des ordos.

    Sur place, Jézabel réalisa que certains d’entre eux étaient dans un sale état. Rico était mal en point malgré les stimms, Lek n’était guère mieux, Lexxi et Derreck étaient encore blessés et tous affichaient une fatigue bien visible. Elle les réunit rapidement dans le strategium, leur annonçant les raisons de leur convocation mais préféra raccourcir l’entretien vu leur état. Elle passa rapidement sur certains points concernant l’avancée de la cellule Tenebrea. La crypte qu’ils avaient découvert sous le manoir d’Andarion contenait toujours une sorte de portail dimensionnel et selon Ezek, leur astropathe, il était fort probable qu’il soit à l’origine d’une brèche ouverte directement sur Archaea, créant une anomalie warp sur l’agrimonde et pourrait servir alors de catalyseur psychique pour d’autres évènements. Selon lui, cette concordance, au moment de la Sanguinala pouvait être de fort mauvais augure et être à l’occasion de nombreuses malédictions présentes et à venir. La cellule Tenebrae œuvrait en ce moment pour trouver une façon de le sceller définitivement.
    Rico qui écoutait avec attention, se prit à penser que si cela était fondé, ces évènements pouvaient alors expliquer le coup du sort qui s’acharnait contre eux, ces derniers jours.
    Jézabel poursuivit son analyse et évoqua un lien découvert entre l’organisation de Jocindyr d’Andarion et un certain trafic de jeunes psykers émergents qui alimentait une part du réseau du Commerce froid. Ce point l’intriguait car la recrudescence de psykers émergents était en augmentation ces derniers temps, ce qui préoccupait les ordos au plus haut point. Rico se demanda de nouveau si les Milagria n’auraient pas un rapport avec toute cette affaire, eux qui justement avaient été liés à des enlèvements de jeunes sur Eshunna, de trafics d’organes et autres substances xenos. La question fut abordée avec la plus grande attention, tout comme la piste de Caleb Cox, qui selon Felton était bien sur Archaea avec l’idée derrière la tête d’infiltrer le Syndicat de l’ombre en se faisant passer pour un proche de Haxt. Pour cela, il avait fait appel au Plasticien, un chirurgien connu au sein de la pègre. Leur plan consistait désormais à devoir mettre la main sur Cox avant qu’il ne parvienne à ses fins et leur dame le pion en approchant Haxt. La crainte était que la Kasballica reprenne la main sur le Syndicat de l’ombre et mette tous leurs plans à l’eau.
    Pourtant devant l’état de santé de l’équipe, Jézabel préféra les ménager et leur accorda quelques jours de repos. De toute façon, Rico allait avoir besoin d’être remis sur pied – littéralement et la pose d’un augmentique allait s’imposer pour sa jambe. Quant aux autres, un peu de repos et de remise en condition ne leur ferait pas de mal.
    Elle évoqua aussi la question de Radio Antiphonia, précisant que le Cardinal Yared lui en avait touché un mot personnellement le soir de la Sanguinala et que le lancement officiel de cette radio écclésiarchique avait été remarqué, bien que cela ne faisait qu’à peine quarante-huit heures. Jézabel trouvait cela intéressant mais seulement dans la mesure où elle allait profiter d’une manière ou d’une autre à l’Inquisition. Rico, dans son projet avait eu une approche plutôt orientée vers le Credo avec une idée de diffusion de prêches, prières er émission religieuses. Même si les vertus de la propagande étaient mises en avant, Jézabel craignait que cela ne serve que les intérêts de l’Ecclésiarchie. A l’inverse, si la radio avait pour fonction d’aller collecter des événements et pas juste en diffuser, il devenait intéressant d’en faire un outil de contrôle de l’information qui circulait sur l’agrimonde. Elle demanda alors à Rico, dès qu’il irait mieux, de déléguer cette tâche à un contact auprès de l’évêché. Rico pensa naturellement au diacre Gamaliel et l’idée fut approuvée.
    Il fut alors pris en charge par l’équipe medicae en vue d’une intervention sur sa jambe et dut rester les jours suivants au Reliquaire de toute façon. Le reste de l’équipe en fit, plus ou moins de même, à l’exception de Derreck qui en profita pour rejoindre la station orbitale de l’Astra Telepathica afin d’y poursuivre sa formation de templier Psykana.
    Lexxi passa quelques jours en compagnie du technoprêtre du Reliquaire avec qui elle se forma à la maintenance et à la réparation des armes et du matériel. Il continuait de travailler sur la remise en état de Pixi et cela la passionna, l’assistant dans sa tâche et participant ainsi aux connexions de ses nouveaux implants cérébraux qui allaient définir sa nouvelle mémoire. De son côté, Lek passa le plus clair de son temps dehors, à enquêter et activer ses derniers contacts. Il était obsédé par l’idée de retrouver la trace de Mira et donc de Bosinski. Lexxi l’aida, notamment à retrouver en ville une ancienne connaissance. Une fille du Syndicat de l’ombre, une certaine Anya, malgré les mises en garde de Lexxi sur les dangers que cela impliquait. Pourtant Lek avait besoin de trouver des réponses et n’avait pas d’autres choix que de prendre des risques.
    Les quelques moments passés au Reliquaire, il les passa à s’entrainer au maniement des armes avec Lexxi et Felton. Felton lui, passa la plupart de son temps avec Poppy, ce qui amusa tout le monde car il passa le reste du temps auprès de Tsali. Pourtant avec Poppy, ces deux-là n’étaient pas partis pour s’entendre mais depuis l’épisode chez Grish, Felton finit par voir une fêlure dans la carapace de la praetor et la découvrit sous un autre jour, disons moins austère. Tous les deux passèrent quelques jours à s’entrainer au tir mais aussi au repérage sur le terrain. Enfin, les derniers jours, Rico en profita pour sortir un peu, malgré les mises en garde de ses équipiers, ayant au préalable modifié son apparence pour ne pas être reconnu. Il retourna voir Gamaliel au palais de l’évêché pour lui expliquer ce qui avait été décidé par Jézabel. Malgré quelques malentendus sur les intentions de Rico sur le marché noir, le diacre tomba d’accord sur la supervision de la radio et fournirait les informations à Rico, sans savoir que c’était pour les ordos en réalité. Enfin, le dernier jour, il décida de repasser rapidement à Lynnbarra, bravant tous les risques. Ghilda venait de sortir de convalescence et il tenait impérativement à s’excuser auprès d’elle et à laisser quelques cadeaux aux villageois, espérant se faire pardonner du désastre qu’il avait engendré, bien malgré lui. Si certains au village continuaient de l’apprécier, d’autres voyaient en lui un oiseau de mauvais augure, un porteur de péchés, ayant amené la malédiction le jour de la Sanguinala.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 01/10/2022 à 17:12 Citer ce message

    Le Reliquaire
    Bureau inquisitorial sur Archaea
    Tempus estimare 995.020M42– 09H33
    56ème jour sur Archaea. Deux jours avant le Nouvel An.

    Cela faisait maintenant presque sept mois qu’Archaea avait été libéré des séides des Sombres Puissances par les troupes inquisitoriales. L’heure était encore à la reconstruction et bien que l’agrimonde ait repris en partie sa production, il restait encore beaucoup à faire. Des infrastructures étaient encore à reconstruire et de vastes pans de l’économie étaient encore en ruines. C’était justement sur ces ruines que prospéraient des organisations criminelles telles que le Syndicat de l’ombre. A l’époque d’Oberon Jestilla, l’ancien gouverneur, ce genre d’activité mafieuse n’était pas aussi florissante et restait marginale, du simple domaine de l’acceptable. Mais avec le chaos amené par les troupes de l’Ennemi, un commerce parallèle s’était constitué, instaurant une économie criminelle, favorisant la vente d’armes de contrebande, de drogues illégales, de produits illicites au marché noir mais aussi d’êtres humains. Et ce, dans des proportions jamais atteintes auparavant.
    Lors de la récente guerre de pacification qui eut lieu juste avant la libération d’Archaea et qui dura une année entière, les troupes impériales s’étaient essentiellement concentrées sur les forces armées ennemies, avec lesquelles ils eurent déjà fort à faire. La pègre fut grandement épargnée cependant. Une simple gestion pragmatique des priorités imposée par la logique impériale.
    Cela laissa le temps à un réseau mafieux, comme le Syndicat de l’ombre de prospérer sur les cendres encore fumantes du conflit. Des hommes comme Grendel Haxt, profitèrent de cette manne inespérée pour faire fructifier un commerce parallèle et prohibé, ou commerce froid comme le nomment les autorités. Haxt n’en était pourtant pas à son coup d’essai, il possédait depuis des années, un réseau de trafiquants en tout genre spécialisés dans la contrebande et l’import-export en lien avec certaines guildes marchandes. Si son organisation n’avait pas été inquiété jusque-là, c’était notamment parce qu’elle comptait sur la protection de certaines maisons commerciales ou dirigeantes de l’époque.

    La nouvelle gouverneure, Katherine Jestilla, fille d’Oberon, était parfaitement consciente du problème que présentait Haxt et comptait bien l’éradiquer. Elle avait opéré une purge, en lien avec l’Arbites notamment et avait été contrainte d’abattre certaines maisons locales et leurs dirigeants, car tous impliqués de près ou de loin dans ces réseaux mafieux et parfois hérétiques. Poppy Sandwall ne le savait que trop bien. En tant que mortiurge de l’Arbites, elle avait fait partie de ces unités spéciales en charge des purges. Le fait que Grendel Haxt ait eu autant de soutien au sein d’anciennes maisons de l’agrimonde indiquait bien le niveau de danger qu’il représentait, même aujourd’hui. Une nouvelle police gouvernementale était actuellement en train d’être déployée pour assurer le relai de l’Arbites mais cela prendrait encore plusieurs mois avant que ses effectifs soient suffisants et pleinement opérationnels. Elle devait compter, pour l’heure, sur l’appui de milices de l’Ecclésiarchie, composées de zélotes sous-équipés mais motivés bien qu’assez inefficaces face à une activité souterraine bien organisée.
    C’est là qu’intervenaient justement les ordos. Le crime organisé entrait justement dans son collimateur dans la mesure où il touchait à certaines hérésies. Or le Syndicat de l’ombre avait déjà franchi cette ligne rouge depuis un moment. Ils étaient déjà perdus pour la société, mais désormais ils devenaient damnés à tout jamais. Faire commerce d’artefacts xenos avait été une première étape. Mais faire commerce de psykers émergents était le signe que la sanction devait être désormais sans appel.
    Haxt n’était pourtant qu’un rouage de toute cette machination. Rouage peut-être central, mais pourtant pas isolé. L’enquête avait révélé des noms et révélait l’ampleur de l’hérésie qui se jouait dans l’ombre de tout un sous-secteur. Les Princes de l’Inéquité, la Kasballica, des maisons nobles, les d’Andarion, Barthol Théodore, la Schola Arcana, des chartistes, des libres-marchands… Jusqu’où s’étendait cette nébuleuse ?
    L’ombre était justement le terrain de prédilection des ordos et de ses agents. Car agir en pleine lumière, à la vue de tous, pouvait parfois saper tous les efforts consentis.
    Du moins, c’était ce que pensait Jézabel Callidia, investigatrice et émissaire secrète des ordos sur Archaea. Elle ponctua son discours en appuyant son regard sur les acolytes de la cellule Obscurus et notamment sur Rico dont la confiance et l’enthousiasme étaient certes des qualités, mais elles avaient bien failli lui être fatales.
    Cela faisait maintenant presque quatre mois qu’une partie d’entre eux – Rico, Felton et Derreck – avaient posé le pied pour la première fois sur cet agrimonde, alors fraichement débarqués du navire chartiste, le tristement célèbre Daughter of Pandora. Tsali en faisait partie, elle aussi, il est vrai et Lek, bien que local, les avait rejoints juste à ce moment-là. Embarqués plus ou moins malgré eux dans cette affaire de trafic, liés à un capitaine criminel impliqué dans ce même commerce froid, c’est là qu’ils avaient mis un doigt dans cet engrenage infernal, cette frontière étroite où les ordos décident de qui va peut-être vivre pour servir et de qui doit mourir.
    A leur décharge, sur ces quatre derniers mois, ils ne travaillaient pour les ordos que depuis la moitié et Jézabel le prit en compte. Et encore, Poppy et Lexxi, bien qu’aguerries, ne venaient de les rejoindre que tout récemment. Obscurus ne pouvait être encore une cellule parfaitement rôdée aux techniques d’infiltration, d’espionnage, d’assassinat ou d’exfiltration. Ils faisaient leurs armes sur le terrain et cela devait évidemment se produire dans la douleur. Tous n’y parviendraient peut-être pas. C’était le prix à payer pour espérer un jour devenir des agents du Trône et pouvoir inspirer le respect ou la peur à un seigneur de guilde, à un baron de la pègre ou même à un gouverneur planétaire. La puissance et la crainte qu’inspirait la Très Sainte Inquisition ne pouvaient pas s’apprendre sur le papier. Elle devait se forger dans le sang versé des criminels et dans les flammes des bûchers d’hérétiques.

    Une semaine venait de s’écouler depuis leur dernière convocation au Reliquaire, le bureau secret des ordos, situé dans le quartier du Temple, dans les anciens locaux de l’ordre Pronatus. Une semaine durant laquelle, les acolytes avaient pris du temps pour améliorer leurs propres aptitudes. C’était nécessaire selon Jézabel. Une fois cette affaire terminée avec Haxt, elle comptait bien leur accorder une formation plus poussée mais pour l’heure le temps leur manquait cruellement. Tous s’étaient remis de leurs récentes blessures et seuls Rico et Lek en portaient encore quelques stigmates mais étaient en bonne voie de guérison s’ils ne s’exposaient pas au danger ces prochains jours.
    Au moins, Lek, Poppy et Felton étaient parvenus à obtenir trois pistes intéressantes durant cette semaine. Caleb Cox s’était fourni auprès de Quinston Grish, le marchand d’esclaves. Cette transaction les menait vers la gare de Witch Burn. Les Milagria, quant à eux, avaient été aperçu au casino et à la Basilique, aimant visiblement jouer à des jeux d’argent. Quant à Wosley Bosinski… Lek avait joué une carte intéressante bien que dangereuse, car un contrat lancé par le Syndicat était déjà sur sa tête. Avec de grandes précautions, il avait pris contact avec une ancienne porte-flingue qu’il connaissait bien et qui était devenue caïd au sein du Syndicat. Le pari était risqué et il le savait, pourtant il laissa courir le bruit qu’il comptait rencontrer Bosinski et proposa de fixer lui-même l’endroit d’un rendez-vous. En revanche, rien ne garantissait qu’il mordrait à l’hameçon facilement mais l’idée n’était pas sans intérêt si la cellule se préparait à l’avance.
    Selon les conseils de Poppy, l’équipe décida de se focaliser sur une piste à la fois, évitant ainsi de diviser leurs forces. Ils commencèrent par Cox et la piste de Witch Burn. En milieu de matinée, ils s’y rendirent et garèrent la voiture à proximité des entrepôts, le long de la voix ferrée. Il s’agissait d’une zone de transit de marchandises, la plupart remontant vers l’astroport d’Overpass, au nord et d’autres venant de la côte ouest, soit des Basses Terres poissonneuses, soit des terres agricoles d’Aberratia. Des zones de stockage, de déchargement étaient emplies de containers et de machines de levages manœuvrées par des ouvriers et des technomécanos. La gare ne comptait pas qu’un réseau ferré. Elle employait aussi une quantité de camions blindés à plusieurs remorques qui assuraient l’acheminement d’une grande partie des récoltes depuis les agrifermes des différentes régions et baronnies vers les manufactoria ou encore vers les gigantesques entrepôts du Munitorum à Overpass.
    Ils descendirent de la voiture et se divisèrent en deux groupes. Tous avaient revêtus pour l’occasion, des vêtements urbains banalisés. Poppy, Lek et Derreck se mirent en quête d’un bureau administratif et d’un responsable de site tandis que Felton, Rico et Lexxi allèrent trouver un groupe d’ouvriers pour leur poser quelques questions. Ils leur expliquèrent que la praetor qui les accompagnait, enquêtait justement sur des jeunes femmes disparues qui auraient pu transiter par ici et qu’ils cherchaient quelques infos sur le sujet. Les manœuvres restèrent un peu interloqués par ce genre de propos mais tous ceux interrogés, leur indiquèrent ne rien savoir.
    Pendant ce temps, Poppy et ses deux équipiers trouvèrent le bureau du chef de site au centre d’un ensemble de bâtiments austères en briques et en lithobéton. Elle y entra et constata rapidement qu’il était vide, bien qu’une tasse de récaf soit encore fumante sur le bureau. Elle activa son microvox – récupéré ces derniers jours auprès de ses anciens collègues au Bastion.
    -A tous. On a peut-être un suspect en fuite…
    Elle inspecta rapidement par les fenêtres sales du bureau, des fois qu’elle vit quelque chose, une main posée sur un de ses holsters. Un coup de chance, un homme était bien en train de prendre la fuite au loin, en direction du sud, se précipitant vers une ruelle entre deux bâtiments.
    -Il prend la fuite vers le sud ! se mit-elle à crier.
    Elle sortit de la pièce en trombe, mais déjà Lek et Derreck étaient en train de traverser les voies, courant dans la direction indiquée. Appelant les autres qui était plus loin, Lexxi décida de tenter de lui barrer une des issues en contournant les bâtiments, tandis que Rico et Felton retournèrent à la voiture pour le prendre à revers.
    Lek et Derreck venaient de perdre sa trace, au moment où Poppy vint les rejoindre. Ils se trouvaient dans une large cour entourée de plusieurs petits bâtiments et comptant de nombreuses issues mais aussi de nombreuses cachettes d’où tendre une embuscade. Ils avaient leurs armes à la main au moment où un tout-terrain rugit en marche arrière d’un hangar dans un dérapage. Lek l’évita de justesse mais pas Derreck qui fut percuté et projeté à quelques mètres de là. Sans la moindre hésitation, Poppy et Lek ouvrirent le feu, cherchant à atteindre une des roues. Leurs impacts laissèrent des trous dans la carrosserie dans des gerbes d’étincelles mais sans plus de dommage. Le véhicule avait déjà pris la fuite, le temps que Derreck, un peu contusionné, se remette debout et tente d’employer un de ses pouvoirs sur la machine. Malheureusement, il n’était déjà plus à portée et abandonna cette idée.
    Rico et Felton prirent le relais avec la voiture et se lancèrent à la poursuite du tout-terrain.
    Ne pouvant pas plus les aider, Poppy décida de retourner sur ses pas, en attendant. Elle fit signe à Lek et Derreck.
    -Vite, retournons à son bureau, peut-être aura-t-il laissé des documents. Mais gardez un œil ouvert, ils nous cachent clairement quelque chose.
    Les ouvriers avaient tous disparus dès les premiers coups de feu. Sans doute que l’évocation d’un officier de l’Arbites dans les parages n’était pas faite non plus pour les rassurer. Poppy demanda à ses deux équipiers de surveiller pendant qu’elle alla éplucher les dossiers. Au bout de quelques instants, elle mit la main sur un bordereau de livraison signé de la main de Quinston Grish au sujet d’un container. Avec un petit sourire, elle sut qu’elle tenait là quelque chose.
    Quelques minutes plus tard, Rico vint garer la Hive Runner juste devant.
    -On l’a perdu. Vous avez quelque chose de votre côté ?
    Elle lui tendit le document. Rico le parcourut, reconnaissant un nom aussitôt.
    -Kanoptech, par tous les Saints !
    Poppy l’interrogea du regard. Le nom ne lui évoquait rien, et pour cause, elle n’était pas encore au sein de cette équipe quand ils avaient vu ce nom.
    -La Basilique, l’entrepôt reconverti en arène de combat sur les docks. Le bâtiment est au nom de Kanoptech, une guilde de transport qui appartient au Syndicat de l’ombre.
    Lek leur désigna un des bâtiments juste un peu plus loin. Sur chacun d’eux se trouvaient de larges enseignes au nom des guildes. Mais sur l’un d’eux était justement indiqué Kanoptech Transports. Poppy eut un petit sourire en coin.
    -Et bien allons leur rendre une petite visite. Le bordereau indique que le container de Quinston Grish leur a été envoyé justement.

    Ils traversèrent un ensemble de bâtiments avant de se retrouver face à un vaste édifice qui regroupait des locaux administratifs, une zone de chargement et un quai pour les camions. Plusieurs dizaines de personnes devaient travailler là. Ils observèrent l’ensemble sans trop s’approcher, afin de ne pas se faire repérer. Ce fut Lek qui les reconnut en premier. Comme Rico et une partie d’entre eux, il avait assisté aux combats à la Basilique et se rappelait certains des gladiateurs. Trois d’entre eux étaient à l’intérieur, occupés à discuter à côté d’un ensemble de caisses qui étaient chargées dans un des camions.
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  • Illuminati
    Illuminati

    le 08/10/2022 à 20:22 Citer ce message

    Lek et Lexxi avaient fait le tour du vaste entrepôt sans se faire repérer. Ils rejoignirent Poppy et Derreck qui étaient restés en observation depuis l’autre côté d’un large boulevard juste en face. De là où ils étaient, ils avaient une vue d’ensemble sur Kanoptech. Mais trop s’approcher risquait évidemment de les faire repérer.
    -Alors ? Leur demanda Poppy.
    -Il n’y a que deux entrées et elles sont là, devant nous, commença Lek. Une pour le personnel, sur la gauche et une pour les camions, sur la droite. Ils ont des gardes armés mais plutôt détendus pour l’instant. Après… si on rentre, ça sera autre chose à mon avis.
    -C’est bien pour cela qu’il nous faudrait une autre approche, ajouta Poppy.
    -Tu y vas avec ta plaque, sinon ? Lui demanda Derreck.
    -C’est ça… Et si c’est le Syndicat de l’ombre qui gère l’ensemble comme on le pense, vous croyez qu’ils vont gentiment me faire la visite des locaux ? Oubliez tout de suite.
    Rico et Felton vinrent les rejoindre. Ils étaient retournés tous deux à la voiture, garée à une cinquantaine de mètres de là.
    -On a eu Tsali par vox, commença Rico tandis qu’ils se postaient à leurs côtés.
    -Et qu’a-t-elle suggéré ? Demanda Poppy.
    -On voulait lui demander si elle pouvait nous filer un coup de main pour obtenir des informations sur cette boite. Elle a ses entrées à l’Administratum. Je pensais qu’elle aurait accès à des dossiers, ajouta Felton.
    -Et ce n’est pas le cas ?
    -Si. Enfin, pas tout à fait. Elle ne trouvera rien de bien utile dans le délai qui nous intéresse. L’Administratum n’a pas un accès direct à la comptabilité des guildes commerciales. Ils n’y accèdent qu’une à deux fois par an, au moment des levées de taxes pour la dîme. Seul le Magistratum peut contrôler les chargements de temps en temps. Et encore, ils ne verront que ce que les dirigeants de Kanoptech voudront bien leur dévoiler. A moins qu’on ait un tuyau fiable sur un chargement et qu’on puisse les prendre la main dans le sac. C’est ce dont aurait besoin Tsali en réalité. N’oubliez pas que Bosinski est aussi le « comptable » de Grendel Haxt. Et on sait que c’est un malin.
    -Donc, ils n’ont aucun levier juridique pour les coincer ? Lui demanda Rico.
    -Tsali y travaille. Elle a ses accès au sein du gouvernement et compte bien obtenir l’appuis d’un des magistrats. Mais pour cela, elle a besoin qu’on lui fournisse une piste concrète. Une fois, la preuve de leurs crimes, elle pourra déclencher tout l’arsenal juridique sur ce genre de société. En attendant, imagine qu’il n’y ait rien dans ces locaux ? Rien d’intéressant, je veux dire. L’Arbites et les Ordos n’auront aucun argument solide pour déclencher toute leur fureur.
    -On sait pourtant que Kanoptech est contrôlé par le Syndicat, non ?
    -Beaucoup de guildes sont contrôlées par le Syndicat de l’ombre en vérité, ajouta Felton. Mais sans un flagrant délit, on n’a rien. Si c’est pour tomber sur un chargement de lho ou de bouteilles de Dammassine de contrebande… La belle affaire !
    -Felton a raison, l’Arbites ne bougera pas pour ce genre de trafic. Compléta Poppy qui s’allumait un cigalho dans son coin. Il nous faut du concret. Et pour cela, on va devoir trouver un moyen d’entrer et de trouver ces preuves.

    Lek donna un coup de coude à Felton, leur indiquant l’entrée de l’entrepôt. Deux camions étaient en train de quitter les lieux. A leur bord se trouvaient deux des gladiateurs déjà croisés à la Basilique, assis à côté des chauffeurs. Les poids-lourds s’engagèrent sur le boulevard, puis partirent dans des directions opposées. C’est là qu’il vit l’homme qu’ils avaient poursuivis juste avant. Le chef de gare. Celui qui avait pris la fuite à bord d’un véhicule tout-terrain. L’engin était justement garé un peu plus loin et le type en question était là, à une cinquantaine de mètres en train de traverser le boulevard, se dirigeant tout droit vers l’entrée de Kanoptech, tout en surveillant ses arrières, d’un air méfiant. C’est là qu’il dut se rendre compte de quelque chose puisqu’il se figea puis rebroussa chemin en courant.

    -Merde, le type de la gare. Il nous a repéré ! Lâcha Lek qui se mit à lui courir après. Derreck Lexxi et Poppy lui emboitèrent le pas tandis que Rico et Felton se dirigèrent vers leur voiture. Une véritable course-poursuite s’engagea entre le fuyard et Lexxi qui parvint à le rattraper juste au moment où ce dernier était parvenu à rejoindre son véhicule. Il entra dedans, démarra en trombe, mais la militaire resta fermement cramponnée à la portière et ce, malgré l’accélération. Le véhicule roulait ainsi sur une bonne cinquantaine de mètres alors que le conducteur cherchait par tous les moyens à lui faire perdre prise en effectuant des manœuvres risquées. En quelques coups de poing, elle explosa la vitre et l’attrapa par le col, luttant avec lui et tirant de toute se forces, elle le projeta hors du véhicule, par la lucarne. Dans son mouvement, elle chuta avec son adversaire et roula lourdement sur le trottoir tandis que le tout-terrain effectua une embardée et arrêta sa course en percutant un container. Lexxi était en train de reprendre ses esprits et cherchait à se relever, entendant ses compagnons qui allaient les rejoindre. Lek en tête, chercha à mettre l’individu en joue, mais ce dernier venait de dégainer un pistolet mitrailleur et ouvrit le feu dans leur direction, sans même chercher à viser. Pourtant Lek dut se jeter sur le côté afin d’éviter la rafale qui cribla le mur juste là où il se trouvait. Lexxi en profita pour se relever, mais le type avait déjà pris ses jambes à son cou et s’engageait dans une ruelle, juste au moment où la Hive Runner avec Rico et Felton arrivait à sa hauteur dans un dérapage contrôlé. Rico chercha à le bloquer mais il parvint à leur échapper de justesse. Felton sortit alors du véhicule, glissa sur le capot et courut juste derrière Lek qui était déjà sur le point de le rattraper. Lexxi, Derreck et Poppy étaient tout proche et allaient aussi s’engager dans la ruelle.
    -Arrête-toi ou je tire ! hurla Lek.
    Le fuyard s’arrêta aussitôt, haletant, les bras écartés. Son pistolet mitrailleur à la main. Lek le maintenait en joue, paré à faire feu à chaque seconde. Le type pivota d’un seul coup et envoya une rafale qui balaya la ruelle. Lek se fit toucher même si son bras augmentique dévia une des balles, deux autres lui déchirèrent légèrement le flanc et le bras gauche. Ce n’étaient guère plus que de grosses éraflures mais cela venait tout de même de laisser de vilains trous dans son costume. Il eut le temps de tirer et lui logea une balle avec une précision absolument chirurgicale, cherchant surtout à le désarmer. L’impact pulvérisa le pistolet mitrailleur et sectionna deux des doigts du fuyard dans la foulée. L’homme se mit à hurler, tenant sa main en sang. Lek se rapprocha, bien déterminer à l’achever d’une balle en pleine tête mais Rico posa sa main sur son bras, arrêtant son geste à la dernière seconde.
    -Non, celui-là, on va vraiment le prendre vivant.
    Les autres venaient de l’encercler et pointaient aussi leurs armes sur l’individu qui n’avait plus aucune issue désormais. Acculé, il tomba à genoux, tout en tenant sa main et en gémissant.
    Rico leur fit signe de baisser leurs armes. Lek laissa son pistolet pointé, ayant plutôt mal digéré de s’être fait ainsi tirer dessus.
    -J’ai quelques questions à te poser et je veux des réponses. Pourquoi tu t’es enfui ? Lâcha Rico.
    Le type se mit à ricaner, autant par défi que nerveusement.
    -Six putains de types armés en ont après moi… Sérieusement ? J’aurais dû faire quoi ?
    -Je ne sais pas… Eviter de t’enfuir et répondre simplement à nos questions ? Cela aurait éviter que l’on trouve cela des plus suspects, que l’on te coure après et que tu perdes des doigts bêtement, par exemple. On n’en a pas après toi mais après ceux pour qui tu bosses.
    -Merde mais vous êtes qui ?
    -Il ne vaut mieux pas que tu le saches, crois-moi. Et c’est moi qui pose les questions.
    Rico sortit le bordereau de sa poche et lui montra.
    -Tu reconnais ? C’était dans ton bureau, donc tu le reconnais forcément. Grish vous a livré un container il y a deux jours. Vous l’avez transféré chez Kanoptech. Je veux savoir où le container est allé ensuite.
    Le type hocha la tête par la négative.
    -Y a que les gars de Kanoptech qui ont l’information… Pas moi.
    Lek pointa de nouveau son canon de poing vers lui.
    -Te fous pas nous, tu peux me croire…
    -Je dis vrai !
    -On en a justement après le Syndicat et ses pontes et non après un simple sous-fifre comme toi, ajouta Felton. Poppy commençait à perdre patience et lui plaqua le canon de son pistolet bolter sous le menton, étant à deux doigts de lui exploser la tête. Le type finit par craquer et leur affirma qu’il ne savait que peu de chose sur l’ensemble de ce trafic, n’étant qu’un modeste rouage qui avait été contraint pour des raisons financières de mettre un doigt dans un engrenage infernal. Partant de simples contrebandes assez classiques, il en était venu à faire transiter des cargaisons de plus en plus illicites jusqu’à en devenir plus qu’interdites. Il évoqua le fait que ses transferts avaient alimenté des villes de l’ouest depuis un moment. L’homme était de plus en plus mal à l’aise en évoquant un commerce qui tenait du pire blasphème selon lui, au point qu’il lui devenait difficile de trouver le sommeil.
    Rico se releva et prit Felton et Poppy à part, leur signifiant à mi-mots qu’il saisissait de quoi il lui parlait – évoquant le Commerce froid et sans aucun doute un trafic de psykers émergents. Les transferts vers l’ouest parlaient très certainement de villes comme Newburg, là où se trouvait le manoir d’Andarion, mais possiblement aussi Sandbarra où une présence très probable de psykers émergents avait été constaté. C’était de plus, une cité où se trouvait l’ancienne villa de Grendel Haxt et une plaque tournante avérée du Syndicat de l’ombre.
    Lek n’avait cessé de le tenir en joue. Il se pencha sur lui, s’apprêtant à le questionner justement sur Bosinski, car toujours passablement remonté de s’être fait ainsi tiré dessus. Les blessures étaient superficielles mais il avait deux beaux trous dans son manteau, ce qui l’énerva copieusement, au point qu’il braqua son arme sur lui. Le coup partit alors et toucha le type en plein dans le ventre. Il s’écroula, le temps que les autres n’interviennent.
    -Bordel, Lek ! Mais je le voulais en vie ! Cria Rico qui venait juste de se retourner. Poppy et Felton firent signe à Lek de se calmer tout de suite, l’écartant du blessé.
    -Le coup est parti tout seul, mais de toute façon, je comptais bien lui coller une balle, à ce fumier.
    La blessure n’était pas belle et le type ne tiendrait pas plus de cinq ou dix minutes s’ils le laissaient comme ça. Rico demanda à Derreck d’intervenir et de tenter de lui sauver la peau. Ce qu’il entreprit de faire. Poppy prit Rico à part.
    -Pourquoi chercher à le sauver ? Lek n’a pas tort, on ne va pas le garder avec nous de toute façon ?
    -Et pourquoi pas ? Il fera acte de pénitence, voilà tout.
    -Acte de pénitence ? Et c’est vous qui allez vous en charger pour gérer cela ? Le type est mourant déjà ! je ne sais même pas si nous pourrons le transporter.
    -Et c’est pas comme si on n’avait pas plus urgent à gérer, ajouta Felton. Fais ce que tu veux avec lui, Rico, mais nous, on va devoir organiser une visite des locaux de Kanoptech.
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    Illuminati

    le 18/10/2022 à 23:59 Citer ce message

    Poppy aida Lexxi à bâillonner et ligoter solidement leur prisonnier déjà passablement blessé qu’ils placèrent dans une caisse que Derreck trouva dans la ruelle. Une fois enfermé, ils le transportèrent discrètement jusqu’à son propre tout-terrain et y déposèrent la caisse, laissa Rico le surveiller en attendant. Cela laissa le temps au reste de l’équipe de tenter une approche pour aborder le personnel de Kanoptech. Le type s’appelait Titus Vern et avait au moins fourni un nom, un certain Gad Rasham, le responsable de l’entrepôt. Selon Felton et les autres, il était à parier que ce Rasham était celui qui en savait le plus sur la contrebande qui transitait via cette société de transport contrôlé par le Syndicat de l’ombre.
    Dans le coffre de la Hive Runner, ils disposaient d’un voleur-vox fournit par Le Reliquaire. De retour, Poppy et Lexxi en profitèrent pour l’activer et tenter de capter des fréquences radio venant de Kanoptech juste en face puisque leurs locaux semblaient disposer d’un vox longue-portée. C’était bien le cas, ils purent entendre différents échanges vox entre les chauffeurs de camions et ce bâtiment. Mais rien de bien probant en dehors de leurs itinéraires. Pendant ce temps, Felton, Lek et Derreck en avaient profité pour changer d’apparence, en échangeant leurs vêtements et en modifiant leur traits grâce à la mallette de déguisement dont ils disposaient et que le Reliquaire leur avait aussi fourni. Leur plan était de se présenter à l’accueil du bâtiment, en présentant le bordereau récupéré à la gare juste avant et se faisant passer pour des hommes de main de Calex Cox, prétexter que le container en question n’était jamais parvenu à destination. Par prudence, ils demandèrent cependant à Lexxi et Poppy de rester dans leur véhicule afin d’écouter les communications. Ils espéraient ainsi que Gad Rasham contacte Cox et ainsi obtenir des informations sur sa localisation.
    Ils se présentèrent tous les trois à l’accueil et une fois avoir parlé du container en fournissant le bordereau en question, un employé de la compagnie, vêtu d’un bleu de travail au logo de la société leur demanda de bien vouloir patienter. Il s’éclipsa avec le bordereau, invoquant le fait qu’il devait aller chercher un responsable.
    Au bout de quelques minutes, Lexxi les voxa.
    -Ils sont en train d’appeler Cox pour vérifier ce que vous leur avez dit.
    -Vous feriez mieux de dégager, ajouta Poppy. S’ils parviennent à avoir Cox, votre plan tombe à l’eau.

    Felton jeta nerveusement son mégot de cigalho par terre.
    -Eh Merde ! Il fit signe aux deux autres de le suivre et de se dépêcher. Une fois dans la rue, ils traversèrent l’avenue et se dirigèrent vers une ruelle, juste à temps pour voir des hommes armés se précipiter vers l’accueil des locaux où ils étaient juste avant et se mettre à les chercher.
    -Cachons-nous, ils ont découvert notre plan. On retourne à la voiture.
    Une fois tous réunis, Lexxi leur confirma que Cox n’avait toujours pas répondu à l’appel vox de Rasham.
    -Ça ne change rien, ils se méfient quand même. Lâcha Felton.
    -Je connais bien le Syndicat, précisa Lek, ils sont prudents, voilà tout, ils savent que le Magistratum les a dans le collimateur aussi.
    -Et ils savent aussi qu’on existe puisqu’on a eu affaire à eux plus d’une fois, raison de plus. Ajouta Felton.
    -Du coup, l’approche en direct vient de tomber à l’eau, lâcha Poppy. On va devoir essayer autre chose.
    -On pourrait y retourner cette nuit ? Il y aura moins de monde. Peut-être quelques gardes, mais on devrait pouvoir gérer, proposa Lek.
    -Et s’ils ont des vidéo-pix ? Une alarme ? On fait comment ? Ajouta Felton.
    -On neutralise leur source d’alimentation en énergie. On voit des câbles qui alimentent le bâtiment, ils viennent forcément d’un génératorium, on pourrait faire ça, non ? Lâcha Lexxi.
    -Tu saurais faire ça ?
    -Plus ou moins… Je pourrais demander quelques conseils à mon contact technoprêtre au Reliquaire.
    -On a le temps pour ça, tu crois ?
    -On devrait prendre le temps, justement, coupa Poppy. On voit bien qu’y aller comme ça, sans la moindre idée de ce qui nous y attend est voué à l’échec.
    -Et toi, tu as une idée ? lui demanda Felton.
    -Peut-être bien… Le type dans la caisse… On pourrait le cuisiner un peu plus. Il connait Rasham puisqu’il nous a donné son nom. Il sait aussi ce que le Syndicat fait transiter de la contrebande, voire des cargaisons hérétiques. Il est impliqué dans ce commerce froid jusqu’au cou et son numéro de repentance pourrait justement nous servir. Si on repasse au Reliquaire… Il nous fait combien pour y retourner ? Quinze ou vingt minutes ? Nous pourrions alors en profiter pour le cuisiner tranquillement. De toute façon, Kanoptech est en pleine effervescence, y retourner maintenant ne nous mènera à rien.

    L’idée fut entendue. Felton, Lek et Derreck restèrent en planque dans leur voiture, à proximité de Kanoptech, observant ce qui allait se produire. Pendant ce temps, Rico, Lexxi et Poppy décidèrent de retourner au Reliquaire à bord du tout-terrain du chef de gare, toujours captif et bâillonné dans le coffre du véhicule. Sur place, Lexxi alla retrouver Elios Ordax-Kappa, le technoprêtre et lui exposa son plan, tandis que Poppy et Rico emmenaient le captif vers une salle s’interrogatoire malgré ses vaines protestations.

    L’adepte du Dieu-Machine se retourna de manière hiératique, fixant Lexxi de ses optiques oculaires.
    -Omniméssie ! Mais pourquoi diable, chercher à vouloir couper la sainte alimentation d’un bâtiment ?
    -Eh bien… Pour y entrer, tout simplement ? Lâcha la catachan avec une certaine simplicité.
    -Au risque de désactiver de nombreux systèmes ? Ce serait sacrilège… Vous n’y pensez pas ?
    -Si justement. On a besoin d’être discrets.
    -Je ne vois pas le rapport entre énergie et discrétion, pardonnez-moi. Entrez-y discrètement, cela devrait suffire.
    Lexxi leva les yeux au plafond, sur le point de perdre patience.
    -Parce qu’on veut y entrer sans se faire repérer, voilà tout.
    Les diodes optiques du technoprêtre se mirent à clignoter pendant quelques instants, en signe de totale incompréhension.
    Poppy entra dans l’atelier à ce moment-là. D’une main elle tapota l’épaule de Lexxi, effectuant un grand sourire vers le technoprêtre.
    -Nous souhaitons tout simplement désactiver les systèmes de sécurité du bâtiment avant d’y entrer. Le souci est que l’endroit est tenu par des criminels et nous comptons sur une certaine… discrétion. Voilà pourquoi il nous faut couper l’alimentation d’énergie afin de les surprendre.
    L’adepte mécanique poussa un petit son électronique, indiquant qu’il venait de saisir.
    -Oh… Voilà en effet qui est plus clair. Savez-vous si ce bâtiment dispose d’une génératorium de secours ?
    -Aucune idée.
    -Vous disposez d’un plan des lieux, sans doute ? Je pourrais alors vous l’indiquer.
    -Non, aucun plan…
    -Evidemment… Et son alimentation est de quelle nature ? Galvanique, plasmatique, alchomite ou ferratonique ? Savez-vous si un coupleur redondant est autoalimenté ou est-il juste phasé au génératorium principal ? C’est absolument indispensable, sinon votre plan court déjà à l’échec.
    Poppy et Lexxi se lancèrent un regard perplexe.
    -Ça, on n’en sait rien…
    -Hmmm… Voilà pourquoi les arcanes de la Machine ne peuvent être abordées par une approche profane, ma chère. Votre problème est donc d’une nature bien plus complexe qu’il n’y parait. Et vous qui pensiez que l’on pouvait couper une alimentation électrique aussi facilement. Que le Dieu-Machine nous en préserve ! Certes, cette énigme est parfaitement soluble si l’on se réfère au théorème des procédures aléatoires, mais en l’absence d’éléments tangibles, je crains de ne pouvoir vous donner une réponse mais plutôt cinq à la puissance quatre en vérité.
    -Et sur place, si je trouve l’alimentation… Un disjoncteur ? Je devrais pouvoir le couper par moi-même, non ? Enchérit Lexxi.
    Ordax-Kappa jeta un regard circonspect sur la lame tronçonneuse que Lexxi portait dans son dos.
    -Je ne doute aucunement que vous soyez capable de couper quelque chose, sergent Anderson. Quant à savoir si ce sera bien l’alimentation de votre alarme, cela reste encore un mystère auquel je n’aurais nulle réponse.
    Poppy attrapa Lexxi par le bras, lui faisant signe de ne pas insister. Les adeptes de la Machine étant souvent des plus retords quand il est question de vouloir désactiver un appareil.
    -Merci, adepte. Nous allons trouver une autre solution.
    Elle l’emmena vers la salle d’à-côté, là où Rico gardait Titus Vern le prisonnier. Il était entravé sur un fauteuil et n’en menait pas large. Visiblement lucide qu’il allait passer un sale quart d’heure. Poppy fut satisfaite de constater que la salle disposait d’une trousse d’excruciateur plutôt bien fournie. Elle entreprit d’enfiler calmement des gants en plastek tout en appréciant la gamme de scalpels, scies, fers à souder et tenailles qui s’alignaient devant elle. Rico était en train de réciter des prières depuis son grimoire écclésiarchique grand ouvert. Poppy fit un petit signe à Lexxi tandis qu’elle se préparait. Cette dernière entreprit alors à tourner autour du fauteuil, d’un air menaçant alors que le captif était en train de gémir et de se tortiller de terreur. Elle se pencha vers lui.
    -Je te conseille de passer à table et rapidement. Tu entends notre ami le prêtre ? Il récite juste une prière pour ton âme damnée.
    Elle dégaina lentement son long poignard monomoléculaire et laissa la lame scintiller dans la lumière, lui collant sous le nez.
    -Il vaudrait mieux que tu sois coopératif, crois-moi.
    Poppy lui signifia de lui laisser la place, un scalpel tranchant comme un, rasoir entre les mains.
    -Je veux tout savoir sur ce Gad Rasham. A quoi il ressemble. Où il vit, qui il connait. Je veux des noms et j’ai déjà consommé toute la dose de patience pour aujourd’hui.
    Vern se mit à glapir comme un animal traqué et donna tout ce qu’il savait au sujet de Rasham, à savoir peu de chose. Il le connaissait bien d’apparence lui et ses quelques adjoints, mais n’avait guère plus d’informations à fournir. Rico s’installa à une des tables afin d’y noter les noms ainsi que les signalements. Poppy en profita pour énonça les chefs d’inculpation au suspect puis une fois chose faire, elle lui planta son scalpel dans la gorge et le laissa agoniser en se vidant de son sang.
    Rico observa la scène, totalement interdit.
    -Mais… Il aurait pu…
    -Oui, il aurait pu. Mais il était coupable. Nous avons des informations et c’était cela l’objectif.
    Elle fit signe à Lexxi, tout en retirant ses gants avant de les jeter dans une corbeille.
    -Contacte Felton et les autres. Transmets-leur le signalement de Rasham.

    A quelques kilomètres de là, depuis le Hive Runner, Felton, Lek et Derreck suivaient à bonne distance un autre véhicule tandis que la nuit tombait dans les rues étroites de la capitale. A son bord se trouvait Gad Rasham qu’ils venaient d’identifier au moment où il quittât les locaux de Kanoptech. Avec lui se trouvait un solide gaillard, un certain Joach Vangritt, déjà croisé en plein combat à la Basilique. A l’aide d’une mouche-pix contrôlée par Felton, ils purent suivre le véhicule à distance sans se faire repérer. Finalement ils s’arrêtèrent dans le quartier est. La voiture était garée devant une belle demeure. Rasham et Vangritt en descendirent accompagnés d’un troisième individu armé qu’ils n’avaient pas encore repéré. Un quatrième resta dans le véhicule.
    Derreck arrêta la Hive Runner et coupa les phares. Il se tourna vers Felton.
    -On fait quoi ? On les suit ?
    Felton tapota l’écran de sa tablette, alors que le petit drone-pix continuait de lui renvoyer les images de la voiture garée plus loin.
    -Non, avant on va profiter d’avoir nos yeux qui trainent pour en savoir un peu plus…
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    Illuminati

    le 29/10/2022 à 17:37 Citer ce message

    Bastion de l’Arbites
    Tempus estimare 998.020M42– 20H18
    56ème jour sur Archaea. La veille du Nouvel An.

    Poppy avait profité que le reste de l’équipe passe la soirée en planque devant le domicile supposé de Gad Rasham pour aller faire un saut, accompagnée de Rico, au bastion de l’Arbites. Sur place, elle y croisa quelques camarades, comme Atermann, Waldorf avec qui elle échangea quelques poignées de mains et banalités de circonstance, contents de voir leur ancienne collègue.
    -Gaia est dans les parages ? leur demanda-t-elle.
    -Orlando ? On peut aller la chercher, elle est dans son bureau, lui répondit Atermann.
    -Non, laissez. Je connais les locaux. Elle leur fit un petit signe de tête et indiqua à Rico de la suivre. Ainsi habillé en prêtre, il passait inaperçu en un tel lieu. Une chance qu’il n’ait pas sa tenue de racaille de ruche habituelle, se dit-elle, cela aurait fait désordre.
    Elle et Gaia Orlando se connaissaient depuis quelques années. Depuis avant Archaea en fait. Elles avaient servi ensemble sur Rigeal et fort Godwinne notamment, avant d’intégrer les forces mobiles navales de l’Adeptus Arbites. Tout cela remontait bien à sept ou huit ans, à présent. Elles ne servaient pas dans la même unité mais se connaissaient bien. En général, les mortiurges comme Poppy avaient peu de lien avec les autres unités mais il y avait toujours une ou deux exception et Orlando en faisait partie.
    Elle lâcha un petit rire sarcastique, à la suite de cette remarque.
    -On parle bien de cette époque où on n’avait pas autant de cicatrices sur la face ?
    -Parle pour toi, répondit Poppy avec un sourire en coin. Je crois que moi et mon escouade tueuse, on t’a sauvé les fesses ce jour-là à toi et à tes gars sur Fort Godwinne.
    -Dans tes rêves, ma belle. C’est plutôt cette peau de grox de Sandovan qui t’avait sauvé les miches ce jour-là. C’était quoi ? Quand l’amiral Kolchack s’est fait assassiner, non ? Je me rappelle surtout qu’on a purgé des hérétiques à tour de bras, cette nuit-là.
    Une larme coula de l’œil de Poppy. Elle ne sut dire si cela était toujours ce souvenir post-traumatique qui la hantait depuis et préféra changer de sujet. Elle lui tapota ses épaulettes dorées avec un sourire.
    -Je vois que vous êtes passé Marshal… Félicitations.
    -T’es pas obligé de me vouvoyez, Pop. On est entre nous.
    Poppy se racla la gorge avant de poursuivre.
    -J’ai… le père Gallileus avec moi. Il… il m’accompagne pour mon enquête.
    Orlando effectua une petite moue tout en relevant un sourcil, voyant le jeune homme échevelé qui accompagnait Poppy. Elle le reconnut bien évidemment.
    -Pas de souci, du moment qu’il est sous ta responsabilité. A force, je crois que tout le monde ici, sait qui est le fameux « Père » Rico.
    -Oui, eh bien espérons que ça ne s’ébruite pas trop en ce moment.
    -Et vous êtes venus ici, chercher quoi, du coup ?
    -On cherche des infos, on pourrait jeter un coup d’œil sur certains dossiers ?
    -Quel sujet ?
    -Le Syndicat de l’ombre. Un certain Gad Rasham. On est sur sa piste. Et si tu as des informations sur Kanoptech, je suis preneuse aussi.

    A l’autre bout de la ville, Lexxi était resté à l’atelier du Reliquaire et comptait bien y passer la nuit à tenter de réparer un ancien servo-crâne. Celui-là même qu’ils avaient ramassé dans un des tunnels sous le manoir d’Andarion à Newburg. Malgré ses notions en électronique, la tâche s’avéra bien plus ardue qu’elle n’y parut de prime abord. Après plusieurs heures passées à tenter de reconnecter ou remplacer les différents composants grillés, elle préféra arrêter. Elle était morte de fatigue et ne parvenait plus à voir droit de toute façon. Une bonne partie de la nuit avait ainsi défilé sans même qu’elle ne s’en rende compte. Ce fut la voix d’Ordax-Kappa qui la réveilla soudain, en entrant dans l’atelier. Ses mécadentrites aux aguets, en train de la scanner.
    -Eh bien, sergent Anderson, je vois avec une joie tout à fait quantifiable, que vous passez cette nuit du Nouvel An à une tâche tout à fait digne de l’attention de l’Omnimessie.
    Elle releva la tête du plan de travail, n’ayant pas encore réalisé qu’elle s’était probablement endormie.
    -Quoi ?
    Il se pencha vers elle, scrutant de ses optiques grossissant, le travail sur lequel, elle avait passé ces dernières heures. Une de ses mécadendrites projeta au-dessus de lui, une petite image pix en trois dimensions qui ressemblait à une sorte de sourire.
    -Vous dormiez, n’est-pas ?
    -Moi ? Pas du tout ! Je…
    -La chair est faible ma chère amie, ne le niez pas. Cela n’est en rien de votre faute étant donné que votre… Hum… Votre fascinante anatomie… et quel métabolisme, par le Saint Engrenage… Bref, vous n’avez pas encore débuté votre augmentation, voilà qui explique bien des choses. A mon grand regret, croyez-le. Et donc qu’essayiez-vous de faire avec Artho-3-84 ? Le tuer une seconde fois ?
    -Artho-quoi ?
    -J’essayai juste de pratiquer une forme d’humour. C’est son nom. Ce servo-crâne. Parfois je me demande où avez-vous la tête, sergent Anderson. Promettez-moi qu’une fois votre cycle biologique terminé, je puisse récupérer la vôtre. J’adorerai la… La conserver. Vos pieds aussi.
    -La quoi ? La mienne ?
    -Oui, votre tête. Je gage qu’après votre mort, elle ne vous sera plus d’aucune utilité ?
    Elle se leva du tabouret où elle était assise, tout en se passant une main sur le visage et lui fit un signe de l’autre main, mettant un terme au débat. Elle se dirigea vers une des consoles encombrées de multiples appareils complexes. L’une d’elles contenait un cafféinarion fabriqué à partir de diverses pièces de moteurs et de recycleurs.
    -Laissez-moi d’abord me prendre un récaf, je crois que j’en ai bien besoin.
    La machine produisit des sons étranges puis délivra dans une tasse ébréchée, une sorte de liquide noir glougloutant et sirupeux qui sentait le brûlé. Elle s’en saisit et en avala une gorgée en fermant les yeux, revoyant défiler des souvenirs au sein de l’Astra Militarum. Elle les rouvrit soudain. Le technoprêtre était toujours là, à la fixer de tous ses détectaugures ondulants et rivés sur elle.
    -Le servo-crâne… Vous pourriez me le réparer ? Lui dit-elle.
    -Est-ce là une question rhétorique, sergent Anderson ? Un trait d’humour, peut-être ? J’ai parfois du mal à faire la différence, je l’avoue…
    -Non, évidemment que vous pouvez, mais… D’accord… Combien vous voulez pour me le réparer ?
    Les diodes du technopêtre s’illuminèrent soudain tel un arbre de Sanguinala.
    -Combien je veux ? Ma chère… Je peux avoir des idées très précises de ce que j’aimerais vous demander, savez-vous ?
    Lexxi se laissa le temps de réfléchir, en avalant une autre gorgée de son récaf. Elle pensa aux divers armes et équipements récupérés ces derniers temps et notamment ceux qu’ils avaient trouvé au manoir d’Andarion ou sur cet étrange bateau où ils avaient affronté des adorateurs des Sombres Puissances. De plus, elle avait eu l’occasion de travailler avec lui ces derniers temps, et elle commençait à bien le connaitre.
    -Un coffret Eternium, ça vous dirait ?
    De la vapeur s’échappa de la cyber-chappe du technopêtre alors que ces circuits céphaliques entraient en surchauffe.
    -Par le Saint Engrenage… Vous lisez dans mes diodes synaptiques, à ce que je vois ?
    -Je crois que ça vaut plus qu’un simple servo-crâne… Non ?
    Le technoprêtre reprit une attitude toute mécanique, purgée de toute émotion superflue. Ses implants optiques se rétrécirent au point de ne plus former que de simples fentes.
    -Eh bien… Cela dépend du coffret en question. Pourriez-vous au moins me le montrer ?

    Une demi-heure plus tard, Poppy et Rico étaient de retour au Reliquaire, comme cela avait été convenu avec Lexxi, car ils devaient la récupérer avant de retrouver Felton et les autres, restés en planque devant chez Rasham. Ils en avaient donc profité pour rapporter le lourd coffre Eternium qui devait peser dans les vingt kilos. Il s’agissait d’une petite malle métallique ouvragée et ancienne dont le mécanisme de fermeture contenait une technologie complexe et oubliée qui activait un champ de stase à l’intérieur du caisson. Ces objets étaient rares car anciens et certains pouvaient valoir une petite fortune. Ils le déposèrent sur un des plans de travail puis Rico en profita pour les laisser là, leur indiquant qu’il devait parler à Jézabel. Ordax-Kappa se mit aussitôt à inspecter le coffre sous toutes les coutures, durant d’interminables minutes et à grand renfort de mécadendrites.
    -Certaines pièces ne sont pas d’origine… Et le caisson comporte de nombreuses éraflures. Je l’imaginais en bien meilleur état que cela, dit-il.
    Lexxi leva les yeux au plafond, familière des numéros que pouvaient jouer les technoprêtres et leur sens des affaires si particulier.
    -Eh bien dans ce cas, nous allons repartir avec… Lâcha Poppy.
    -Je n’ai pas dit que cela ne m’intéressait pas.
    -Il était question d’un échange de service, non ? Dit-elle en questionnant Lexxi du regard. Cette dernière hocha la tête.
    -Ce coffre vaut quand même bien plus que ce servo-crâne. Commença Lexxi. Nous pourrions donc vous le laisser en échange… Disons du servo-crâne et d’autres choses.
    Il releva ses optiques clignotant vers elle.
    -Quel genre de choses ?
    -Je pourrais vous fournir une liste, répondit Lexxi.
    -Et je garde le coffret en échange ?
    -Une minute… On vous donnera le coffre une fois le servo-crâne réparé. Et il nous faudra certaines armes ou matériel dont nous avons besoin et que vous fournira Lexxi. Un fusil de précision, un brouilleur vox, des assourdisseurs, des bolts… Des choses comme ça. On peut se mettre d’accord ?
    -C’est peut-être bien dans mes cordes. C’est juste que là, je n’ai pas vraiment de temps à vous consacrer.
    -Comment cela ? Le questionna Poppy.
    -J’ai déjà un carnet de commande assez rempli.
    -Quel genre de commande ?
    -Jézabel m’a demandé de lui confectionner des fusils radiants, des bolters ainsi que des armures carapaces entièrement équipées d’auspex et de systèmes de protection avec vox cryptés. Entre autres choses.
    -Elle monte une escouade commando ? S’étonna Poppy.
    -En effet. Elle a les hommes mais souhaite améliorer leur équipement afin d’en faire de véritables troupes inquisitoriales.
    -C’est une bonne chose. D’accord dans ce cas, si on vous laisse le coffre maintenant, vous serait-il possible de prioriser certaines de nos demandes ?
    -Eh bien… Dans ce cas, oui. Le servo-crâne, pour commencer. Vous l’aurez dans la journée.
    -Bien. Et pour le reste de nos demandes ? Si nous repassons plus tard dans la journée avec une liste, vous pensez pouvoir nous en fournir une partie… Disons dans les prochains jours ?
    -En fonction de ce que vous demanderez, je vous dirais si cela rentre dans l’accord, ainsi que le temps qu’il me faudra.
    Poppy lança un regard entendu à Lexxi.
    -Parfait, alors faisons comme cela.
    Elles sortirent de l’atelier, au moment où un des gardes vint les trouver. Il portait un armure carapace noire avec l’insigne des Ordos et un pistolet radiant dans un holster. Il s’adressa à Poppy.
    -L’agent Callidia souhaite vous parler. Elle vous attend dans le strategium.
    Cette dernière se tourna vers Lexxi.
    -Attends-moi à l’atelier, je reviens.

    Quelques instants plus tard, elle frappa avant d’entrée. Elle y trouva Jézabel, en pleine conversation avec Rico, lui faisant tout de même signe d’entrer et de les rejoindre. Ils étaient debout, juste à côté de la table ovale de la salle de réunion. Poppy vint se tenir à côté de Rico, juste en face de Jézabel.
    -Savez-vous pourquoi je vous ai fait appeler, Sandwall ?
    -Non, Madame.
    -Ricardo Gallileus quitte son poste de primus. Mettons cela sur le compte de certains échecs successifs et d’une perte de confiance de la part de l’équipe, sans doute dû à des objectifs personnels trop chronophages et un peu trop visibles. Cependant, je suis parfaitement consciente que votre équipe n’est pas composée d’agents de terrain aguerris ou de professionnels de la prise de renseignements. Il n’y a encore que quelques mois de cela, certains d’entre vous n’étaient que des civils, ou des criminels, totalement ignorants des dangers qui rongent l’Imperium de l’intérieur. Un mal parfois bien pire que la menace visible d’un ennemi clairement identifié. Je le sais parfaitement. Mais servir les Ordos n’est pas un jeu. C’est un devoir et ce n’est pas une option. En travaillant pour les Ordos, vous disposez de certaines latitudes et plus vous obtiendrez de résultats, plus vous obtiendrez d’autonomie.
    Elle laissa passer quelques instants avant de poursuivre.
    -Mais pour l’heure, vous travaillez pour moi, pas pour vous. Je tiens à ce que cela soit bien clair entre nous.
    Poppy hocha la tête mais Rico n’était plus si sûr de lui. Cela se percevait.
    -Vos résultats ne sont pas encore des plus probants. Cela fait à présent trois mois que vous êtes sur le terrain et que votre objectif n’a pas changé. Et cet objectif était ? Elle se tourna vers Rico.
    -Localiser Haxt.
    -Localiser Haxt. Exactement. Cela fait donc trois mois que vous ignorez toujours où se trouve un des hommes les plus puissants de cet agrimonde. Je ne vous demande ni sa tête, ni de décimer tout son Syndicat. Juste de me le localiser. Je ne dis pas que c’est simple, mais en théorie, un groupe de personnes passées dans la clandestinité pourrait s’en charger au bout d’un certain temps. Notamment si ce groupe est composé en partie d’anciens membres de la pègre, ce qui devrait grandement simplifier l’équation. Vous ne pensez pas, agent Sandwall ?
    -Je pense que si, Madame.
    -Et vous, Gallileus, qu’en pensez-vous ?
    -Je pense que Poppy ferait un excellent primus, Madame.
    -Pour l’heure, ce n’est pas à vous de le décider. Je note cependant votre remarque. Ma question était plus en rapport avec notre affaire concernant Grendel Haxt. A plusieurs reprises, vous étiez pourtant à deux doigts de pouvoir l’approcher et pourtant… Vous n’en avez rien fait. Je m’interrogeais juste sur ces raisons.
    Elle saisit un dossier posé sur la table, l’ouvrit et en parcourut les quelques pages.
    -Monter des couvertures et approcher Bosinski à la Basilique était une excellente initiative qui aurait pu fonctionner. Vous savez ?
    -Nous avons juste joué de malchance… Bosinski a été méfiant et il a fait le lien entre nous et…
    -Et la plaque de Lorne Campbell. Je connais le dossier. Ce n’était pas de la malchance, c’était de l’imprudence. Cela devrait au moins vous apprendre à l’avenir à devenir tout autant prudent et méfiant que notre ami Bosinski. Au moins, il vous a informé des risques si vous vous loupez une deuxième fois avec lui… Mais peut-être aviez-vous visé trop haut et trop vite ? Dites-moi, Sandwall ? Savez-vous quel est le surnom de Wosley Bosinski ?
    -Je crois qu’il se fait appeler « la Tronche » dans le milieu.
    -C’est exact. Bosinski est censé être le cerveau des activités de Grendel Haxt. Il est donc logique qu’il ne tombe pas dans le premier panneau si facilement.
    Elle continuait de feuilleter le dossier puis s’arrêta sur un des documents, le tapota de son doigt et releva son regard intrigué vers Rico.
    -Un détail me chiffonne en y repensant. Vous avez un rapport plutôt trouble avec l’Ecclésiarchie, si je ne m’abuse, non ? Une enfance précaire au sein des gangs des bas-fonds, puis vous parvenez à attirer l’attention d’une noblesse dépravée et blasphématoire qui vous modèle à leur image. Vous n’avez jamais été écclésiaste mais cette… couverture… vous a juste permis de vous en sortir, de jouer un rôle. Pourquoi cette obsession de l’Ecclésiarchie alors que rien dans votre attitude de racaille de ruche ne semble embrasser cette vocation ? Pourquoi vous limiter autant alors que vous avez cette capacité à devenir n'importe qui ?
    -La chanson… C’est la chanson qui m’a tiré de là où j’étais.
    -Et cela vous passionne-t-il toujours ? La chanson ?
    -Absolument. J’ai toujours espoir de me servir de cette passion.
    -Voilà qui est intéressant. Savez-vous qui est Gloria Everdynn ?
    -Oui, c’est la femme de Grendel Haxt. Nous l’avons déjà croisé une fois ou deux.
    -Et c’est aussi une très grande chanteuse, tout aussi passionnée que vous. Voilà ce qu’on appelle rater une belle occasion quand on a eu la chance de croiser une telle personne et qu’on est le seul chanteur de cette équipe. Je vous laisse y réfléchir. Vous pouvez disposer, j’ai à parler avec l’agent Sandwall.

    Une fois qu’il eut quitté le strategium, Jézabel s’assit sur un coin de table où elle posa le dossier puis croisa les bras, dévisageant Poppy.
    -Quelle est votre analyse de la situation, vous qui êtes la dernière arrivée dans cette équipe ? Vous pensez suivre toujours les bonnes pistes ?
    -Nous avons deux pistes récentes. Dont une piste plutôt sérieuse.
    -Caleb Cox ?
    -Oui.
    -D’abord Sinclar, puis Cox. Je sais notamment que McLatchy travaille sur une infiltration à long terme – disons plutôt audacieuse – auprès de cette baronne de la Kasballica. C’est un projet extrêmement risqué mais non dénué d’intérêt. Ce type d’initiative est le genre de perspective qui attire mon attention, en général. En revanche, vous mettez les doigts et même toute la main dans un sacré engrenage, je tiens à vous le dire. J’espère juste que McLatchy sait exactement ce qu’il fait en s’en prenant à deux barons de la Kasballica en même temps… Et pour cette deuxième piste ?
    -Nous avons peut-être la possibilité d’approcher Wosley Bosinski, mais les risques sont bien trop grands selon moi.
    -Pourquoi cela ?
    -L’idée de l’appât, proposé par l’un d’entre nous, risque bien de fonctionner, mais peut-être trop bien justement et je doute que nous soyons de taille à nous sortir d’un tel piège.
    -Je vous laisse effectivement y méditer. La force de la cellule Obscurus doit être d’agir dans l’ombre, d’où son nom en haut Gothique. Les actions bravaches à coup de rafales et de grenades doivent être strictement réservées à des opérations commandos avec des gens du métier ou juste en dernier recours. Vous êtes une ancienne mortiurge, si je ne me trompe pas ?
    -En effet.
    -Tenter d’obtenir des renseignements en tuant tous les hommes du Syndicat ne vous a mené qu’à une chose jusque-là. N’est-ce pas ?
    -Oui, à l’échec. L’équipe doit changer de méthode, je l’ai bien compris…
    -Votre analyse est juste. Voilà pourquoi je tenais à vous en parler. Je vais être franche avec vous, Sandwall. Si cela ne tenait qu’à moi, ce serait McLatchy qui serait primus de cette équipe. Il a la tête froide, sait prendre des décisions, voit sur le long terme, est malin et prudent et pense avant tout aux objectifs de cette mission. Même son problème avec la loi et l’autorité peut être canalisés car il sait ce qui va dans son intérêt. En revanche il refuse ce poste et même si je le déplore, je respecte ce choix. Je veux quelqu’un de volontaire pour mener cette cellule ou bien je ne veux personne. Vous êtes l’autre possibilité, Sandwall, bien que récente dans l’équipe, vous disposez des mêmes qualités que lui, ce qui ferait de vous – à terme – un bon primus. Mais vous le comprendrez, vous n’êtes pas encore légitime pour occuper ce poste.
    -Je comprends, Madame. Qui d’autre, dans ce cas ?
    -Eh bien, personne. Cette cellule devra se passer de primus en attendant. En revanche, je compte sur vous et McLatchy pour être force de proposition et aider l’équipe à s’autogérer mais aussi à se recentrer sur ses objectifs. Certains d’entre vous sont doués en infiltration, d’autres dans le subterfuge et d’autres enfin dans la force de frappe. Quant à certains, ils sont clairement à surveiller dans certaines situations. Les psykers sont des créatures éminemment dangereuses comme vous le savez. La mauvaise personne au mauvais endroit et votre mission capote. Vous connaissez les qualités de chacun dans ce groupe, à vous de les mettre en avant. Voilà pourquoi vous ne serez pas trop de deux ou même trois pour vous en charger. Est-ce clair pour vous ?
    -Très clair, Madame. Et… Rico ? Je veux dire, il reste au sein de l’équipe ?
    -Non. Je le sors de la cellule Obsurus. Il est clair que sa présence sur le terrain a laissé trop de traces et vous met désormais tous en danger. Surtout depuis que cette affaire avec les Milagria n’est pas solutionnée. Une objection ?
    -Non, Madame.
    -Parfait, vous pouvez disposer. Tâchez de prendre un peu de repos, votre équipe a vraiment sale mine. Et joyeux Nouvel An à vous tous, vous allez en avoir besoin.
    Poppy réalisa alors avec stupeur qu’ils en avaient perdu le fil du temps depuis la Sanguinala et les évènements qui s’étaient enchainés. En ressortant du strategium, une idée lui vint soudain à l’esprit en croisant Rico qui attendait dans le couloir.
    -Otez-moi d’un doute… depuis tout le temps que vous l’avez, ce servo-crâne, vous avez pensé à le faire analyser au moins ?
    -Analyser ? Non…
    -Bordel de Trône mais ça ne vous serait pas venu à l’idée ? J’espère juste que le technoprêtre n’aura pas déjà effacé sa mémoire.
    Elle se précipita en courant dans le couloir en direction du laboratoire et trouva Ordax-Kappa installé à un de ses établis, occupé à travailler sur les connexions neurales d’une jeune femme au corps en partie cybernétique, d’une facture absolument prodigieuse. Elle ne sut dire si son épiderme qui couvrait ses micro-implants chromés était synthétique ou biologique.
    -Les données… Vous avez pu récupérer les données qu’il contient ? Lâcha Poppy en déboulant dans la pièce.
    Ordax-Kappa resta impassible, terminant ses microsoudures. Sa mécadendrite optique se tourna vers Poppy.
    -Vous parlez sans doute d’Artho 3-84 ? Je suis en effet en train de les purger. Je décèle au ton de votre voix, une certaine anxiété ? Votre cycle biologique est-il perturbé, agent Sandwall ? Respirer un peu d’encens au magnésium devrait vous faire le plus grand bien.
    Poppy jeta un regard alentours et vit avec stupeur que le servo-crâne en question était posé sur un des établis, relié à deux autres servo-crânes occupés à le démonter.
    -Trône, ne me dites pas que… que vous avez déjà tout effacé ?
    -Saint Engrenage, non. Nos procédures sont très strictes à ce sujet, agent Sandwall. Nous n’effaçons jamais rien, cela serait pur blasphème. Nous ne faisons que transférer les saintes écritures encodées.
    -Et contient-il des informations ? Pourrais-je les voir ?
    -Assurément. Mais je vais devoir entamer la litanie du déchiffrement pour cela. Ce qui devrait me prendre quelques bonnes dizaines de minutes.
    Poppy allait ajouter quelque chose au moment où la jeune femme cyborg tourna imperceptiblement son visage délicat vers elle, rivant son regard dans le sien en clignant plusieurs fois des yeux, comme cherchant à capter quelque chose. Des flux de données binaires passèrent dans son regard translucide et une larme synthétique se mit à couler sur sa joue tandis qu’elle fixait Poppy. Cette dernière resta un instant, captivée et interdite par une telle vision, se sentant presque mal à l’aise par l’image qu’elle lui renvoyait. Le technoprêtre s’en rendit compte. D’une main, il essuya la larme sur la joue de sa création.
    -Un bug mimétique qu’il va falloir que je corrige, rien de plus, rassurez-vous.
    -Bien... Une fois terminé avec le servo-crâne, transmettez le tout à l’agent Callidia. Et informez-moi du résultat, je dois rejoindre le reste de l’équipe.
    -Ce sera fait, agent Sandwall...
    Poppy s’en retourna, passablement remontée après Rico et son insouciance caractérisée. Elle espérait juste qu’elle et l’équipe ne soient pas passées à côté d’un détail important. Le repos et les questions allaient attendre, le jour était déjà en train de se lever de toute façon. Seule avec Lexxi, elles reprirent la route en direction du Quartier Est, là où Felton, Lek et Derreck avaient passé toute la nuit en planque. En chemin, elle échangea par vox avec Jézabel sur les dernières informations.
    Une fois arrivées, elles se garèrent à une centaine de mètres de la Hive Runner. Poppy demanda à Lexxi de l’attendre. Elle s’enveloppa dans son long manteau, à cause de l’air glacé, s’alluma un fin cigalho et remonta la rue en direction de leur véhicule, d’un pas tranquille. Avec le jour qui se levait, les citoyens reprenaient leur journée de travail et déjà du monde arpentait les rues, ainsi que son lot de véhicules utilitaires crachotant leur fumée grasse. Le Nouvel An n’était pas un jour de fête dans l’Imperium. Cela faisait maintenant des millénaires que la nouvelle année n’était rien d’autre qu’une année pire que la précédente. En marchant, elle activa son microvox, dissimulé par son haut col.
    -Felton, vous me recevez ?
    -On t’écoute.
    -Du nouveau dans la maison ?
    -Nan, ça n’a pas bougé de la nuit. On l’a surveillé avec la mouche-pix mais ça n’a pas donné grand-chose. On sait qu’ils sont au moins quatre à l’intérieur. En revanche j’ai eu un appel de Sinclar tout à l’heure pendant mon tour de garde.
    -Elle t’a appris quelque chose ?
    -Oui, peut-être bien. Cox va faire exfiltrer le Plasticien en fin de journée, en train et sous escorte, en direction de l’astroport d’Overpass, pour lui faire quitter Archaea. Cela signifie que Cox a dû changer de tête et que le Plasticien est le seul à connaitre sa nouvelle identité. Le seul souci est que l’on ignore encore de quelle ville le train partira. Mais en recoupant les informations d’après Lek et le tarot de Derreck, il pourrait bien s’agir de la gare de Bitter Bog.
    -Dommage qu’on n’a pas eu cette information plus tôt, le chef de gare aurait pu nous servir. On devra faire avec. Raison de plus pour mettre la main sur Rasham. Il doit forcément savoir où est Cox en ce moment.
    -Et toi, tu as eu du nouveau ?
    -Plusieurs choses, oui. Faudra qu’on parle de Rico quand on aura cinq minutes.
    -Quoi, il n’est pas avec vous ?
    -Il est au Reliquaire pour l’instant, je vous en parlerai plus tard. Sinon, le servo-crâne trouvé à Newburg a livré des informations mais ça faisait quatorze jours qu’on les avait sous le nez. Il est question d’un certain Magos heretek du nom de Kybernetès. Lexxi en avait déjà vaguement parlé apparemment. Et il est aussi question d’une base du nom d’Abraxas dont on a trouvé les plans. Le lien avec d’Andarion est évident et ça sent la techno-hérésie à plein nez. Bref, Jézabel va mettre Tenebrae sur le coup en attendant d’en savoir plus et de les localiser. En dehors de ça, j’ai pu obtenir un nom dans les dossiers au Bastion, plus tôt dans la nuit. Un ancien arbitrator en retraite qui sait peut-être des choses sur Kanoptech et Rasham. Un certain Orl Leonus, il serait dans une sorte d’hospice ou d’asile au quartier des temples. Il faudra qu’on l’interroge. En attendant, je vous rejoins. Le type dans la voiture est toujours devant ?
    -C’est le cas. Il a juste été relevé par un de ses collègues dans la maison, y a quelques heures.
    -On fait quoi ? On l’élimine ?
    -On va éviter. Si ça dérape, on perd l’effet de surprise. Et je sais pas si tu vois, mais y a des passants.
    -D’accord, on fait comment du coup ?
    -Attends… n’approche pas, on a du mouvement.
    Poppy resta sur le trottoir à observer ce qui se passait à moins de cent mètres de là. Un groupe d’individus venait de quitter la maison. Elle en comptait trois, sans compter le chauffeur.
    -Ce sont ceux d’hier ? Rasham est avec eux ?
    -Rasham oui, mais les types ne sont pas les mêmes que ceux d’hier, répondit Felton. Merde ! ils sont combien dans cette baraque ?
    Rasham et ses hommes se dirigèrent vers la voiture garée devant la maison, montèrent dedans avant qu’elle ne démarre.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 05/11/2022 à 18:28 Citer ce message

    Le tout-terrain freina juste à la hauteur de Poppy. La porte côté passager s’ouvrit.
    -Monte, on va le suivre ! Lui intima Lexxi qui était au volant.
    Poppy activa son microvox tout en s’installant à bord alors que le véhicule redémarrait.
    -On les suit, je veux savoir où se rend Rasham.
    -Ils vont surement à Kanoptech, lui répondit Lek.
    -Sans doute, mais je préfère m’en assurer. En attendant, tâchez de trouver ce qu’ils cachent dans cette maison. Terminé.

    Les deux heures qui suivirent, Felton les passa à diriger leur petit drone espion à l’intérieur de la riche demeure. Derreck, à l’aide de sa télékinésie, parvint à entrebâiller une des fenêtres du dernier étage et Felton parvint à y faire entrer la mouche-pix. Une fois à l’intérieur, les choses se compliquèrent un peu plus. Outre les hommes de mains qui s’y trouvaient, un grand nombre de couloirs, d’escaliers et de portes fermées ne facilitèrent pas sa progression. Malgré cela, il devint clair que six hommes en armes se trouvaient bien à l’intérieur, sans aucun doute pour y garder quelque chose ou quelqu’un selon l’analyse de Lek. D’ailleurs il reconnut un des hommes, une sorte de brute à la mine patibulaire qui ne donnait pas envie que l’on s’y frotte. Il savait que ce gros bras n’était pas un tendre, c’était le genre de type qui défonçait des crânes à coup de masses. Une présence particulièrement dissuasive.
    Pendant ce temps, Poppy et Lexxi avaient bien eu la confirmation que Rasham était retourné à Kanoptech et qu’il n’avait pas l’intention d’en sortir pour l’instant. Son véhicule était garé dans un des entrepôts, quant à lui et ses hommes ils semblaient affairés dans les locaux. Faute de moyens d’approcher sans se faire repérer, le temps se mit à défiler.
    -On fait quoi ? Lui demanda Lexxi. A coup sûr, il va rester là toute la journée.
    -C’est ce qu’on appelle être en planque, justement. Mais tu n’as pas tort. On doit surveiller l’heure.
    -C’est bien ce soir que le Plasticien part en train de je ne sais quelle gare ?
    -Oui, justement… D’après les autres, ce pourrait être de la gare de Bitter Bog.
    Lexxi réfléchit avant de poursuivre.
    -C’est à deux heures de route d’ici. Il faudrait qu’on parte en fin d’après-midi pour l’intercepter.
    -Ce qui nous laisse encore un peu de temps, renchérit Poppy. J’aimerai passer interroger cet Orl Leonus.
    -Qui ça ?
    -Un témoin. Démarre, on file au quartier des temple.

    Asile Sainte Josina, de l’Ordre de la Sérénité
    Quartier des temples
    Tempus estimare 001.021M42– 09H09
    57ème jour sur Archaea. Premier jour de la nouvelle année.

    Poppy et Lexxi passèrent la grille d’entrée en fer forgé noir, une fois que la preator eut montré sa carte de l’Arbites et donné la raison de sa visite. La sœur hospitalière qui les accueillit, leur demanda de bien vouloir la suivre à l’intérieur.
    -Je m’appelle sœur Lethia. Vous connaissiez bien Monsieur Leonus ?
    -Non, nous ne sommes ici que dans le cadre d’une enquête. Comme je vous l’ai indiqué, je cherche à recueillir un simple témoignage de sa part.
    La sœur s’arrêta et se tourna vers Poppy, les mains jointes sur ses robes noires et blanches immaculées.
    -Cela risque fort d’être difficile, ma fille. Je crains que vous ne puissiez rien tirer de bien cohérent de ses propos. Le pauvre homme a eu sa santé mentale altéré, au point de l’avoir fait sombrer dans la folie. Ce qui après tout, n’est qu’une miséricorde que l’Empereur lui a accordé dans sa plus grande clémence, car seul le fou, en ce bas-monde, sait ce qui est sain.
    -J’aimerai cependant avoir connaissance de son dossier. Peut-être pourriez-vous me l’apporter ?
    -Bien entendu, Preator.
    Elle les guida à travers un long corridor qui les mena vers un vaste cloitre entourant un jardin où se trouvait quelques patients visiblement maintenus sous drogues ou sous camisoles. Tous étaient cependant sous la surveillance des autres sœurs. L’endroit sentait la mort, le désespoir et les produits chimiques.
    -Cela fait longtemps qu’Orl Leonus est pensionnaire de cet établissement, ma sœur ? Lui demanda Poppy.
    -Depuis que nous avons réoccupé les lieux à la fin de la guerre, par la grâce du Trône et de la Sainte.
    -Et avant cela ?
    -Avant cela, il servait dans le magistratum durant sa longue carrière. Mais il était déjà à la retraite au moment de l’occupation. Le malheureux a survécu à de telles horreurs.
    Elle lui désigna un vieillard grabataire, assis et vouté dans un fauteuil roulant et connecté à un servo-medicae. L’homme était enveloppé dans une couverture et avait l’air d’être véritablement en fin de vie.
    -Je vous laisse en sa compagnie. Je resterai à proximité, si vous avez besoin de moi.
    Poppy hocha la tête et s’approcha du vieil homme. Elle sortit un cigalho mais vit le regard désapprobateur de sœur Lethia et n’insista pas. Elle rangea son paquet et attendit qu’elle reparte.
    -Enquêteur Leonus, je présume ? J’aurais quelques sujets à aborder avec vous.
    Elle resta à évoquer à voix basse des noms comme Haxt, Rasham ou Bosinski, ainsi que des lieux comme la Basilique ou encore d’autres sujets mais resta là, à ne parler qu’à un mur. Leonus semblait figé dans une sorte de mutisme. Elle ne savait guère si cela était dû à son grand âge, à un quelconque traumatisme ou juste s’il se jouait d’elle. Ses tentatives pour obtenir des réponses durèrent une bonne vingtaine de minutes mais sans le moindre succès. Leonus se contentait parfois de ricaner ou de cracher par terre à telle ou telle évocation. Puis dans son monologue, elle évoqua le nom de Kanoptech et de Rasham dans la même phrase et elle vit tout de suite une sorte de lueur poindre dans le regard éteint du vieil homme.
    -Ces noms vous évoquent quelque chose ? Avant la guerre, vous aviez enquêté sur eux, c’est bien cela ?
    Il eut une sorte de ricanement assorti d’une petite quinte de toux.
    -Kanoptech est à eux et Copak, c’était lui le vendeur, dit-il d’une voix éraillée. Oui, c’était lui. Il y avait un trois, mais trois fois. Oui, trois fois, ça je m’en rappelle bien.
    Il eut un nouveau petit ricanement et reprit.
    -Et l’acheteur, lui il se faisait appeler Sarx Aba, mais on savait que ce n’était pas son nom. Malifica. C’est ça qu’il cherchait, la Fraternité invisible et l’Hydre – nouveaux ricanements - l’Archange n’est pas le seul. Lui il est ici. Mais les autres…. Ho, non, non, non… Les autres… Ils sont trois autres et ils ne sont pas ici. Je ne sais pas leur nom – Il se mit à gémir en secouant la tête. Par Terra, leurs noms sont dans les ombres. Kanoptech est à eux, c’est leur réseau. La Malifica, c’est ça qu’ils font. Oui, Copak, c’était lui le vendeur. Il a toujours été le vendeur et il y avait un trois mais trois fois. Oh, ça oui je m’en rappelle bien et c’est Sarx Aba qui venait le voir pour acheter mais on sait que ce n’est pas son nom. C’est la Malifica qu’ils cherchent, vous savez ? Parce que l’Archange, lui il n’est pas seul en fait. On le croyait tous mais non… il n’est pas seul…
    Lexxi fit un signe à Poppy qui prenait des notes sur son carnet. Sœur Lethia était de retour.
    -Monsieur Leonus a besoin de se reposer à présent. Je pense que vous comprendrez.
    Poppy hocha la tête. Elle avait surtout compris qu’elle ne pourrait pas en tirer plus de toute façon car le vieil homme ressassait en boucle toujours ses mêmes phrases.
    -Avez-vous pu trouver son dossier, ma sœur ?
    Cette dernière lui tendit une pochette.
    -Voici son dossier médical.
    Poppy jeta un coup d’œil sur les différents rapports. Il était surtout question de termes médicaux et de dosages journaliers de certaines drogues.
    -Vous n’avez rien de plus complet ? Je veux dire… Ses états de services, ses enquêtes ? Peut-être auriez-vous cela dans vos archives ?
    La sœur hocha la tête.
    -Vous m’en voyez désolée. En vérité, nous n’en avons pas vraiment l’utilité. Ce que vous cherchez se trouve très certainement au bureau du Magistratum.
    -Très bien.
    -Souhaitez-vous que je vous raccompagne ?
    -Merci ma sœur, ce ne sera pas utile, nous connaissons déjà le chemin.
    Elle la salua et elles s’en retournèrent toutes deux avec Lexxi. Parvenues à la voiture, cette dernière l’interrogea du regard.
    -Le vieux, il a parlé d’Hydre, non ?
    -Ça t’évoque quelque chose ? Lui rétorqua Poppy.
    -Peut-être bien. J’ai déjà entendu ce nom en lien avec des hereteks. Le reste, j’ai rien saisi. Tu as compris quelque chose à son charabia, toi ?
    -Le nom de l’acheteur. Copak. J’ai déjà vu ce nom dans une affaire avant de travailler avec vous. Viens, on va retrouver les autres, peut-être que Lek saura nous démêler tout ça, il a travaillé avec le Syndicat, lui.
    Elles reprirent la voiture et en fin de matinée, se retrouvèrent de nouveau à proximité de chez Rasham. Poppy demanda à Lexxi de laisser leur véhicule non loin, dans une petite rue et finirent à pied. Ella activa son microvox.
    -Felton ? Vous pouvez me rejoindre ?
    Elle fit un petit signe à Lexxi, lui indiquant de la laisser quelques instants. Cette dernière alla retrouver le reste de l’équipe dans la Hive Runner tandis que Felton en ressortait. Il vint trouver Poppy qui faisait mine de flâner devant la petite boutique d’un marchand de livres anciens, non loin de là. Elle avait un cigalho au coin des lèvres.
    -Tu voulais me parler ? Lui dit-il.
    -C’est à propos de Rico.
    -Je t’écoute.
    -Jézabel l’a sorti de l’équipe.
    Felton laissa passer quelques instants. Il s’alluma un cigalho, lui aussi.
    -Elle ne nomme aucun primus mais elle voudrait qu’on reprenne l’équipe en main, lui dit-elle. De manière collective. Mais que toi et moi, on soit un peu force de proposition.
    -Donc Rico est dégagé ?
    -C’est ça. On va devoir revoir notre stratégie.
    -Je ne peux pas dire le contraire.
    -Alors retournons à la voiture, nous avons encore du pain sur la planche. On peut-être de nouvelles informations.

    Pendant leur visite à l’asile Sainte Josina, Felton, Lek et Derreck en avaient appris un peu plus sur ce que la demeure dissimulait.
    -Donc six hommes armés à l’intérieur et vous dites qu’ils détiennent trois filles captives ? Leur demanda Poppy. Captives comment ? Elle se tourna vers Derreck en se tapotant le crâne.
    -Vous avez pu ressentir des choses ? Une activité ou quelque chose d’anormal ?
    -Non, rien de psychique si c’est ça la question. Elles sont juste enchainées.
    -Et ils ne pourraient pas utiliser des entraves ou des sortes d’inhibiteurs ? Vous avez vérifié ?
    -On a regardé mais on n’est pas sûr. Répondit Felton.
    -Comment ça, pas sûr ?
    -On n’a rien vu de très clair, ajouta Derreck.
    -D’accord… Donc ils détiennent des filles… Ce ne sont pas celles que vous recherchez au moins ?
    -Non, on en est certains. On les aurait reconnus, clarifia Lek. Celles-ci sont plus jeunes, je dirais.
    -Bien, et vous en pensez quoi alors ? Ces filles sont là pour quoi ?
    -Aucune idée et on ne dispose pas encore d’assez d’éléments pour savoir si cela a un lien avec Quinston Grish ou même avec Cox. Donc à moins de mettre la main sur Rasham, on n’a pas grand-chose pour l’instant, lâcha Felton. Et alors, de votre côté, ça a donné quoi chez Kanoptech ?
    -On ne s’est pas trop attardé chez Kanoptech. Rasham était bien sur place, commença Lexxi.
    -On a donc décidé d’aller rendre visite à ce vieil enquêteur.
    Poppy sortit son calepin et partagea ses notes. A la première lecture, tous restèrent plutôt perdus, devant les indices plutôt cryptiques.
    -Je sais au moins qui est le vendeur dont il parle. Intios Copak. Ce nom ne vous parle sans doute pas.
    -Le nom me dit vaguement quelque chose, lâcha Derreck. On l’a entendu quelque part, non ?
    -Vous, je ne sais pas, mais moi oui. Il parle assurément d’un type qui tenait une échoppe de curiosités, au 333 avenue des Primarques dans le commercia. D’où l’allusion au trois, trois fois… Son corps avait été retrouvé au sous-sol de sa boutique avec deux autres corps non identifiés. La présence avérée d’usage de sorcellerie ainsi que d’artefacts impies avaient nécessité l’intervention de nos services. La boutique a été purgé par les flammes, nous n’avions voulu prendre aucun risque à l’époque. C’est mon équipe et moi qui avions fait le ménage.
    -On y était, lâcha Felton. Derreck et moi. Tsali aussi et Ezek, à l’époque.
    -Comment ça ? Vous y étiez ?
    -Avant ton… Ton intervention. C’est nous qui avions trouvé les corps et nos services ont prévenu l’Arbites. De la sorcellerie… Cette histoire nous dépassait totalement à ce moment-là. C’est l’équipe de notre inquisiteur qui avait pris le relai.
    -Trône, je n’avais pas eu cette information.
    -Et pour cause. Les ordos n’ont pas voulu laisser de traces.
    -Et ce Sarx Aba, l’acheteur ? ça vous parle aussi ?
    -Il pourrait s’agir d’Abraxas… si on mélange les lettres, non ? Ajouta Derreck.
    -Bien vu… ça pourrait coller, répondit Poppy. C’est un des noms tirés du servo-crâne au Reliquaire, non ? On ne l’avait pas déjà vu avant ?
    -Si, au manoir d’Andarion. C’était le nom codé dans les livres que recherchaient les hereteks qu’on a combattu, ajouta Derreck.
    -Trône, ça a l’air de se tenir… Donc ils auraient un lien avec cette Hydre et cette Fraternité invisible ? D’autres groupes hereteks ?
    -L’Hydre, oui, on sait déjà que c’est une organisation heretek à ne pas prendre à la légère, ajouta Lexxi. Sans doute ceux qu’on a accroché à Newburg. Mais l’autre, je ne la connais pas.
    -Tsali m’en a parlé, compléta Felton. La Fraternité invisible. Je crois qu’il s’agissait jadis d’une cabale hérétique liée à de la sorcellerie, censée avoir disparue de longue date et dont aurait fait partie la famille d’Andarion.
    -Et la Malifica ? C’est une autre organisation ?
    -Non… ça je crois qu’il s’agit d’une sorte de technohérésie. C’est le nom, il me semble, qui est donné à des artefacts impies qui permettent de transformer un humain normal en psyker.
    Certains se signèrent ou grimacèrent en entendant pareille abomination.
    -Trône… quelle horreur sommes-nous en train de dévoiler… Murmura Poppy. La Malifica, c’est ça qu’ils cherchent et c’est ça qu’ils font… Voilà ce qu’a dit Leonus.
    -Reste à savoir qui est cet Archange et les trois autres qui sont avec lui mais pas ici.
    -Ça, j’ai peut-être ma petite idée juste pour le premier, lâcha Lek. C’est comme ça que Grendel Haxt se fait appeler mais seulement au sein de certains cercles. Entre nous, on l’appelait tous Monsieur Haxt. Mais un jour, j’ai entendu quelque chose alors que je n’aurai pas dû entendre. Des personnes importantes – sans que je sache de qui il pouvait s’agir - l’ont appelé comme ça, l’Archange.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 08/11/2022 à 21:56 Citer ce message

    Après quelques discussions sur le plan à mener, l’équipe décida de laisser Lexxi sur place afin de maintenir une surveillance des lieux. Elle resta à bord du tout-terrain qu’ils avaient récupéré vers Kanoptech. L’idée était avant tout de surveiller si les filles captives allaient bouger ou non. Pendant ce temps, Poppy, Lek, Felton et Derreck se rendirent avec le Hive Runner en direction de Bitter Bog.
    -Tu es sûr qu’on peut mettre la main sur ce Plasticien ? Demanda Poppy.
    -Je l’espère, répondit Felton. C’est la seule piste intéressante que l’on ait pour l’instant, avec celle de Rasham.
    -On aurait aussi bien pu essayer d’attraper Rasham et le faire parler, ajouta Lek. Cela nous aurait évité d’aller aussi loin.
    -A la différence que Rasham n’est pas sur le point de quitter la planète, lui, renchérit Poppy. Je vous rappelle que le Plasticien risque bien de quitter Archaea cette nuit. Or, pour l’instant c’est notre seul suspect capable d’identifier Caleb Cox et donc de pouvoir remonter jusqu’à Grendel Haxt.
    -C’est pas faux…
    -On dispose de quel genre d’info ? Demanda Derreck qui était au volant. On sait qu’il va prendre un train dans ce patelin. Et c’est tout ?
    -Plus ou moins. Et qu’il sera sous escorte. Répondit Felton.
    -Voilà pourquoi on se rend sur place en avance, on repère les lieux et trouve un moyen de monter dans ce même train. Ensuite, on avisera.

    Suivre la route jusqu’à Bitter Bog ne fut pas le plus compliqué. Ils l’avaient déjà emprunté lorsqu’ils s’étaient rendus à Sandbarra quelques mois auparavant alors qu’ils étaient sur la piste d’Assumptia Isabal. Ils avaient déjà traversé cette région faite de marais, de rizières et de villages isolés sur pilotis. En quelques mois, des choses avaient changé. Le Mechanicus avait remis des ponts, des routes et des voies de chemin de fer en place, avec une prodigieuse rapidité. Ces axes étaient désormais empruntés par des files de camions tractant de multiples remorques chargées de denrées et appartenant aux Guildes marchandes ou à l’Administratum. Au loin, de chaque côté de la route, ils pouvaient voir des armés d’ouvriers dans les champs à perte de vue. Il s’agissait d’humains pour la plupart, pourtant le Mechanicus avait renforcé cette main d’œuvre par des servitors, toujours plus nombreux et efficaces, mais aussi par des agrifactoria, ces machines gargantuesques qui avalaient tout sur leur passage.

    Bitter Bog était une petite bourgade semblable à celles déjà croisées sur la route, si ce n’est qu’elle était un peu plus étendue et devait compter quelques centaines d’habitants. Elle se situait surtout à la jonction de deux lignes de chemin de fer. Une venant de Steel Hill, au sud et l’autre venant de Sandbarra, sur la côte ouest. Les voies remontaient au nord vers Overpass ou à l’est, vers la capitale. En dehors de cela, il ne s’agissait que d’un village maussade, pris dans les brumes saisonnières et peuplé d’une population que Felton pouvait aisément qualifier de culs-terreux, pas très différents de ceux croisés à Lynnbarra. La guerre avait laissé ses stigmates ici aussi et certains bâtiments n’avaient pas encore été reconstruits. En revanche, la gare de triage et sa zone de fret étaient pleinement opérationnelles, signe que la reconstruction avait priorisé l’activité économique de l’agrimonde.
    Derreck gara la voiture non loin de la gare, derrières des entrepôts et coupa le moteur. Etant donné qu’aucun d’entre eux ne faisait couleur locale, Felton préféra changer de tenue et conseilla à ses équipiers d’en faire de même. Il était encore tôt dans l’après-midi, aussi décidèrent-ils de se rendre à la gare pour y poser quelques questions sur les horaires de train et prendre des billets pour celui par lequel le Plasticien était supposer arriver. Poppy posa quelques questions et apprit, par le chef de gare, qu’il n’y avait qu’un train le soir et un autre le matin.
    -Il passe à 20h08, cela nous laisse quatre ou cinq heures devant nous.
    -Tu veux faire quoi d’autre en attendant ? S’étonna Felton.
    -On va se reposer. Je n’ai pas dormi la nuit dernière, comme certains d’entre nous et là, j’ai besoin de dormir.
    Après une sieste de quelques heures, ils laissèrent Derreck à la voiture et y allèrent à pied. L’idée était qu’il n’intervienne qu’en cas d’ennuis. En revanche, s’ils parvenaient à prendre le train sans encombre avec leur cible, il avait pour consigne de rejoindre Lexxi à la capitale.
    Parvenus sur le quai de la gare, ils purent constater que nombre de voyageurs se tenaient là. Il s’agissait en majorité de marchands avec leurs cargaisons ainsi que des employés de diverses compagnies. Quelques locaux faisaient aussi le trajet, sans doute pour des raisons familiales. Poppy et l’équipe se mêlèrent aux voyageurs afin de passer inaperçus mais sans pour autant rester ensemble.
    Au bout de quelques minutes, le chef de gare effectua une annonce et indiqua que le train allait avoir du retard, à la suite d’un problème de passager.
    Poppy, Felton et Lek s’échangèrent un regard méfiant, se demandant si cela aurait le moindre lien avec leur affaire. Ils restèrent à surveiller les passants qui semblaient plutôt agacés, guettant le moindre signe suspect. Au bout de quelques minutes qui parurent interminables, ce fut Poppy qui comprit que quelque chose ne paraissait pas normal. Le train était en vue et tout le monde avait l’air soulagé, ramassant ses affaires et s’approchant du quai. Pourtant, l’attitude du chef de gare confirma ses doutes. Il observait le train qui approchait puis se dirigea à la hâte en direction de son bureau. Elle chercha Felton du regard. Lui et Lek venaient de s’approcher. Ils virent tout de suite l’air inquiet de Poppy.
    -Il y a un problème ?
    -Le train… Il… Il ne va pas s’arrêter…
    -Quoi ? Comment cela ?
    -Il aura déjà du freiner… Il ne va pas s’arrêter !
    Elle joua des coudes et chercha à s’approcher du quai.
    -Tu vas faire quoi ?
    -Je vais sauter pour tenter d’attraper un des wagons en marche.
    -Tu es folle ? Tu vas te tuer !
    Déjà autour d’eux, les voyageurs commençaient à comprendre la même chose. Une clameur commença à s’élever sur le quai tandis qu’ils réalisaient que le train ne marquerait pas l’arrêt. Il approchait maintenant avec un fracas de machine lancée à pleine puissance. Poppy activa son microvox et s’élança vers le train.
    -Derreck, suis le train, maintenant ! On a besoin de la voiture !
    Lek et Felton se lancèrent un regard surpris et inquiet mais n’eurent d’autre alternative que de lui emboiter le pas.
    Les gens s’écartèrent alors que le souffle du train les força à reculer. Poppy, Lek et Felton en profitèrent et se mirent à courir sur le quai. Une chance pour eux, le train n’allait pas assez vite pour les happer, ce qui ne rendait pas leur action moins périlleuse. S’ils se loupaient vraiment, ils pouvaient finir sous les roues. Ils sautèrent. Lek et Felton réussirent à s’agripper comme ils purent au dernier wagon. Poppy eut un peu plus de mal mais s’accrocha in extremis à l’arrière du même wagon. Le train dépassa la gare et fila vers la campagne, laissant derrière lui les cris des gens sur le quai. Poppy parvint à se hisser sur la plateforme arrière, déverrouilla la porte et entra dans le wagon en reprenant son souffle. Dans le couloir qui longeait les compartiments voyageurs, elle vit Lek, à l’extérieur, qui luttait pour entrer par une des fenêtres coulissantes. Elle alla l’aider, sous le regard médusé des voyageurs.
    De l’autre côté, Felton avait fait le tour en s’agrippant sur le côté du wagon et se dirigeait à l’avant, vers le wagon précédent.
    Lek peinait terriblement à se hisser par la fenêtre. Il glissait et perdait prise à chaque tentative. Une chance, il restait accroché par son bras augmentique et Poppy ayant ouvert la fenêtre, faisait tout son possible pour le hisser à bord. Les passagers commencèrent à l’entourer et à l’invectiver.
    -Mais arrêtez ça tout de suite !
    -Ne faites pas monter cet homme à bord, vous voyez bien qu’il est dangereux !
    -Appelez les secours ! Allez chercher le chef de bord !
    -Refermez cette fenêtre, vous allez nous attirer des ennuis !
    Sentant la colère monter, Poppy était à deux doigts de lâcher sa prise et de dégainer son arme de poing. Lek finit par se hisser à bord, tant bien que mal, au moment où un des passagers se précipita dans le couloir en direction de la porte menant au wagon précédent. Lek se laissa glisser à l’intérieur, reprenant son souffle et ses esprits. Il activa son microvox.
    -Felt ! Un type se dirige vers l’avant, il va donner l’alerte !
    -Reçu, je vais l’intercepter.
    Les passagers continuaient de les invectiver vertement, se plaignant que le train avait déjà eu du retard à cause de ce genre d’évènement et qu’ils comptaient bien se plaindre.
    Poppy fit volteface, dégainant sa plaque et son arme.
    -Arbites ! C’est une opération de police ! Ecartez-vous citoyens, je ne le répèterai pas !
    Ils se reculèrent aussitôt.
    -Qui a dit qu’un évènement similaire s’était produit juste avant ? Qui ? Elle chercha du regard parmi les personnes qui continuaient de reculer. Lek en profita pour se relever et se dirigea à la poursuite de Felton.
    Un type corpulent lui lança un regard défiant.
    -Ce train a déjà été retardé, Madame, on est tous là pour un travail et on…
    Poppy rangea sa plaque et l’attrapa par le col, le plaquant contre une paroi. Les autres se précipitèrent dans leurs cabines en poussant des petits cris.
    -J’ai eu une sale journée, crois-moi et je suis en train de perdre mes nerfs ! Qui d’autre est monté dans ce putain de train, parle !
    -Des gens… Je n’en sais rien…
    -Tu sais que des gens sont montés mais tu ne sais rien ? Te fous pas moi. Qui est monté ? A quel endroit ils sont montés ?
    -A… En… En pleine voie…On était à quelques kilomètres de Bitter Bog je pense. Le train s’est arrêté sans prévenir… on n’a eu aucune explication et puis des gens sont montés.
    -Quelles gens ? Ils ressemblaient à quoi ?
    -Je ne sais pas… Je ne les ai pas vu…
    -Qui les a vu alors ?
    -D’autres personnes.
    Elle l’empoigna et le traina vers le compartiment.
    -Montre-moi qui les a vu.
    Il lui désigna un couple. Elle relâcha le type et désigna les deux personnes mentionnées.
    -Les types qui sont montés, ils ressemblaient à quoi ?
    Le couple se dévisagea avant que l’homme lui réponde.
    -Ils étaient vêtus un peu comme…
    -Comme quoi ?
    -Comme vous…
    Et combien ils étaient ?
    -Cinq, peut-être six…
    Elle activa son microvox.
    -Felt, Lek ? Vous en êtes où ?
    -On est dans le wagon juste devant… Y a personne.
    -Restez prudents, on a de la visite.
    -Le Plasticien et ses hommes, tu crois ?
    -Qui d’autre ? Ne bougez pas, je vous rejoins.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 17/11/2022 à 19:18 Citer ce message

    Cela faisait deux bonnes heures qu’elle surveillait la maison et commençait à trouver le temps long quand elle vit trois hommes en sortir. Vangritt, le gladiateur de la Basilique en faisait partie, avec deux autres gros bras qui portaient une malle. Ils traversèrent la rue et se dirigèrent vers une fourgonnette Cargo-8 garée là. Une fois la malle chargée, ils montèrent à bord et le véhicule démarra. Lexxi, analysa rapidement la situation. La malle pouvait contenir n’importe quoi en fait, des drogues, des armes, mais cela pouvait aussi bien être une des filles qu’ils retenaient captives. De plus, ils étaient trois à sortir, ce qui signifiait que les trois autres gardaient toujours la maison. Un dilemme se posait alors. Rester là en planque ? Tenter de rentrer dans la demeure ? Ou bien suivre ce véhicule ? De toute façon, le reste de l’équipe était à plus de cent cinquante kilomètres de là. Elle démarra et décida de les suivre en filature, mais à bonne distance. Cela l’intriguait de savoir ce qu’ils tramaient et s’ils transportaient bien une de ces filles. Mais leur destination pourrait être tout aussi intéressante. La filature ne dura guère plus de vingt minutes. Traverser la ville en pleine matinée était devenu compliqué ces temps-ci, à cause notamment des transports de marchandises, des marchés ambulants, des livreurs en tout genre et des nombreuses déviations causées par des travaux de restauration des infrastructures. Mais Lexxi avait l’œil et sut se fondre, même à bord de son tout-terrain, dans les rues encombrées. Cela la conduisit en plein dans le Scorbut, le quartier pauvre de la ville. Ils finirent par garer le Cargo-8 à l’entrée de Meat Market, le marché local.
    Elle s’arrêta à son tour et observa depuis l’habitacle de l’Armadillo. Deux des types descendirent du véhicule, traversèrent la rue bondée du marché et vinrent s’entretenir avec le patron d’un bâtiment. Le type était d’un âge mûr, il portait une barbe grise et des instruments sur lui qu’elle eut du mal à identifier de là où elle était. Ses vêtements de travail étaient tachés mais elle ne sut dire, à cette distance si c’était du sang, de l’huile ou tout autre chose. Elle sortit alors de son véhicule, ne gardant que son pistolet laser sous sa veste et fit mine de flâner entre les échoppes des vendeurs ambulants. Ici, tout se vendait ou s’échangeait dans un brouhaha de cris, d’invectives et de fumées de grillades douteuses. L’endroit puait la pisse, le crasse, le poisson pas frais, l’obscura et le tout mêlés à des relents d’abattoir et d’égouts. Elle se fondit dans la masse et amorça une approche afin de tenter de capter quelques bribes de conversation. Tandis qu’elle approchait, elle vit un des deux types retourner vers le camion, faire signe à son acolyte de l’aider et tous deux, allèrent décharger la malle située à l’arrière du fourgon puis la transportèrent vers la boutique où les attendait le type à la barbe, là où ils avaient discuté juste avant. Ils échangèrent quelques mots et elle ne sut s’ils étaient en train de parler de quelqu’un ou juste de la malle en question.
    Vangritt apparu alors dans son champ de vision, lui masquant totalement la scène de toute son imposante carrure. Il avait la main sur la crosse d’une arme de poing à sa ceinture.
    -Elle cherche quelque chose, la petite dame ?
    Lexxi fit mine de passer son chemin, comme si de rien n’était. Elle continua de flâner parmi les étals et prit un peu de distance avant de jeter un regard de nouveau dans leur direction. Les trois types remontaient dans leur camionnette qui redémarra. Elle nota tout de même le nom du bâtiment où il était écrit Mortis Mortuarium. Prenant soin de ne pas être suivie, elle retourna à son véhicule et reprit la route, mais préféra ne pas les suivre, sachant qu’elle avait peut-être été repérée. Elle emprunta d’ailleurs un autre itinéraire. Sur le chemin elle vérifia son vox, sans succès, le reste de la cellule Obscurus était le Trône sait où. Sans possibilité de les joindre, elle préféra retourner en planque devant chez Rasham. Mais là aussi, par mesure de précaution, elle décida de changer d’endroit afin de surveiller la maison en attendant leur retour.

    Ils se mirent à trois pour débloquer la porte du compartiment qui donnait sur une sorte de petite passerelle métallique suspendue entre les deux voitures et communiquant avec le wagon précédent. Sous leurs pieds, les voies défilaient à une vitesse qui ne laissait pas la place à la moindre erreur. Ils ne virent aucune trace de l’homme qu’ils suivaient mais avaient perdu de précieuses secondes de toute façon. Poppy avait son Carnodon à la main et leur fit signe de la suivre. Ils remontèrent ainsi les wagons qui ne semblaient contenir que des caisses de fret et se retrouvèrent de nouveau devant la porte de la voiture passagers suivante, qu’ils ouvrirent. Cette fois, Poppy identifia une silhouette, celle de l’homme qui s’était enfui quand ils avaient mis pied à bord. Il était à moins de dix mètres, dans l’angle d’un couloir qu’il lui était impossible de distinguer depuis sa position. Il lui faisait dos et effectuait de grands gestes, comme interpelant quelqu’un situé plus loin devant lui. Elle allait le surprendre, encore à quelques mètres de lui, lorsqu’elle le vit basculer en arrière, fauché par ce qui semblait être des tirs. L’homme s’écroula et resta là, affalé dans le couloir, alors qu’une flaque de sang commençait à se répandre sous lui.
    -On y va, leur dit-elle.
    Felton et Lek avaient dégainé aussi leurs armes de poing et s’apprêtaient à affronter une sévère résistance. Ils s’engouffrèrent dans le sas du wagon et perçurent clairement des tirs et des cris, sans doute ceux de passagers effrayés qui se terraient au fond de leurs compartiments, sous peine de se retrouver dans un tir croisé. Poppy osa jeter un regard, à l’angle du couloir. Des tirs venaient de l’autre bout du wagon. Elle activa son microvox.
    -Derreck, vous êtes toujours avec nous ? Quelle est votre position ?
    -Je suis en train de suivre ce maudit train… Vous voulez que je vous rejoigne à bord ?
    -Négatif. On aura besoin de la voiture de toute façon, je préfère qu’elle ne finisse pas dans le décor. Tâchez de rester à notre hauteur en cas de besoin. Si jamais du monde venait à quitter le train, il vous faudrait l’intercepter.
    -Bien noté.
    Elle posa un genou à terre tout en pointant son arme, tenue à deux mains, signifiant à ses équipiers de rester silencieux. Le long canon du Carnodon n’arrêtait pas de bouger à cause du roulis du train et elle prit quelques instants afin d’ajuster sa position de tir. A ses côtés, Lek et Felton pointaient leurs armes et en firent de même. Les types étaient à une quinzaine de mètres, à l’autre bout du wagon, ils étaient de dos, ne les ayant apparemment pas encore repérés et semblaient faire feu sur quelqu’un ou quelque chose en criant. Mais de leur position, Poppy et ses compagnons ne parvenaient pas à distinguer sur quoi.
    -Des hommes du Syndicat, vous pensez ? Murmura-t-elle.
    Lek confirma.
    -Oui, c’est le cas.
    -Reste à savoir s’ils protègent le Plasticien ou s’ils cherchent juste à le tuer, ajouta Felton.
    -On va vite le savoir, ils sont trois. Je prends celui de droite, lâcha Poppy. Elle fit feu et tira une courte rafale de balles tueuses. La précision de l’arme ainsi que sa puissance d’arrêt firent le reste. Sa cible vit son crâne traversé de part en part, ainsi que son torse dans une bruine d’hémoglobine. Il s’écroula sans même réaliser qu’il venait de se faire tuer de manière brutale et expéditive. A peine eut-elle ouvert le feu que Lek et Felton l’imitèrent et éliminèrent les deux autres tireurs de la même manière, en les criblant de balles et sans la moindre forme de cérémonie. Leurs corps désarticulés s’écroulèrent pêle-mêle. Ils s’avancèrent dans le couloir, prudemment, armes pointées devant eux. Ils les fouillèrent rapidement, récupérant deux ou trois chargeurs de balles éclatantes. Poppy en profita pour prélever sur un des corps, un fusil d’assaut modèle Courroux, variante du modèle Armageddon mais en plus compact. Un modèle fréquemment utilisé par les troupes de marine, une arme compacte particulièrement pratique pour le combat rapproché, notamment à cause de ses munitions à fragmentation, mais plus hasardeuse à longue portée. Ils traversèrent le wagon et arrivèrent ainsi sur le suivant mais Felton les arrêta.
    -Attendez…
    Il tenait en main un petit boitier qu’il avait à la ceinture et qui se mit à biper, laissant s’afficher sur son écran, des paramètres et autres types d’avertissements.
    -Qu’est-ce qu’il se passe ? Lui demanda Poppy.
    -Mon augure de sureté. C’est bien la première fois que je le vois s’affoler comme ça.
    -Il a détecté quelque chose ? Lui demanda Lek qui continuait de jeter un coup d’œil dans le couloir.
    -Présence de neurotoxique, c’est tout ce que j’arrive à comprendre de son charabia de machine.
    -Où ça ?
    Felton ajusta le curseur du petit boitier. Une aiguille marqua une intensité et une autre indiqua une direction avec une portée télémétrique.
    -Là… Juste dans le wagon de devant à une dizaine de mètres.
    Lek rebroussa chemin et retourna vers les trois corps qu’ils venaient de laisser. Les trois portaient un masque respirateur. Il les leur arracha et revint vers ses compagnons, leur en donnant un au passage. Ils ajustèrent leur masque et reprirent leur progression vers le wagon suivant, envahi par une sorte de brume verdâtre qui leur piqua les yeux. Par chance, le neurotoxique était déjà en train de se dissiper. Des corps gisaient au sol, morts étouffés dans leur propre vomi et ils durent les enjamber afin de continuer d’avancer. Poppy passa devant et arpenta le couloir au moment où elle vit une silhouette à l’autre bout. Elle lui cria de ne pas bouger mais n’eut pour autre effet que de se prendre une rafale qu’elle évita en se jetant de côté. Des balles explosives de gros calibre arrachèrent des fragments de tôle, juste derrière elle. Elle se baissa en pestant.
    Juste derrière, Felton allait pour riposter mais un objet siffla dans le couloir en tournoyant, le percuta et se planta dans sa veste pare-balle. Il sentit la brûlure et le mordant d’une lame qui lui entailla les chairs. Croyant s’être fait toucher par une balle, il réalisa qu’il s’agissait en réalité d’une sorte d’étoile de lancée plutôt sophistiquée. Un dispositif miniaturisé se trouvait en son centre et se mit à clignoter. Il comprit trop tard que ce n’était pas bon signe. L’étoile déchaina son générateur à décharges alors que son corps se retrouva parcouru d’arcs électriques. Il s’écroula, saisi de spasmes musculaires tandis que les décharges terminaient leur œuvre.
    Poppy et Lek ouvrirent le feu en rafale mais sans résultat. Poppy se rua à la poursuite du tireur mais se retrouva bloquée de nouveau par une porte que quelqu’un venait de refermer et de verrouiller juste devant elle. Comme pour la narguer, une main gantée lui fit un petit signe à travers le hublot en armaplex, comme signifiant un « au revoir ». Poppy chercha à la débloquer de toutes ses forces en pestant mais sans y parvenir. Elle rebroussa chemin vers Lek qui aidait Felton à se relever. Ce dernier étant encore un peu groggy mais reprenait ses esprits, voyant encore des lumières qui dansaient devant lui.
    -On est bloqués. Se mit-elle à pester.
    Elle observa autour d’elle et chercha à comprendre par où leur adversaire pouvait aller. Elle n’avait vu ni porte, ni couloir à travers le hublot. Juste une sorte de sas technique. De plus, le prochain wagon n’était autre que la motrice elle-même. Elle vit alors une trappe qui menait vers le toit du train.
    -Trône, ils vont sûrement passer par le toit !
    Elle activa son microvox.
    -Derreck, on va passer sur le toit, en direction de la motrice, tâchez de vous tenir à notre hauteur.
    -Un autre véhicule est en approche, je pense qu’ils ont eu la même idée.
    -Maintenez votre position, il ne doit surtout pas nous échapper !
    Sans attendre sa réponse, elle grimpa l’échelle métallique, brisa les scellés à l’aide de la crosse de son arme et d’une main, déverrouilla la trappe mécanique d’un geste sec. Un vent froid et violent s’engouffra aussitôt dans le sas. Elle continua de monter et se retrouva bientôt à l’extérieur, au-dessus du wagon, prenant bien garde à maintenir son équilibre et ne pas glisser à cause des bourrasques. La chute serait assurément fatale si elle venait à tomber. Lek et Felton la rejoignirent, prenant garde à ne pas subir le même sort. Poppy était déjà en train de s’élancer sur le toit du wagon et criait quelque chose que le vent emporta. Sur le toit de la motrice, se trouvaient deux personnages. L’un d’eux était un homme brun, grand et mince, portant des lunettes amplificatrices et un long et sombre manteau pare-balles. Il ne pouvait s’agir que du Plasticien. L’autre individu était une femme brune, aux cheveux courts, vêtue d’une tenue moulante furtive qui la fondait dans le paysage. Elle utilisa le Plasticien tel un bouclier humain voyant que Poppy approchait. Elle devait être à moins de trente mètres d’eux lorsqu’elle pointa vers elle une impressionnante arme de poing.
    -Je crois qu’on est dans le même camp, cria Poppy. Inutile d’en arriver là.
    La fille effectua un petit geste de la main. Soudain, une détonation sourde explosa entre la motrice et son wagon, faisait sauter les plots de connexion magnétique. Poppy avança mais une balle ricocha juste entre ses pieds, lui signifiant de ne surtout pas faire un pas de plus. Elle pointa alors son arme en retour et tira vers la fille mais manqua sa cible de peu. Felton qui avait repris ses esprits, en fit de même et tira lui aussi. Cette fois une des balles lui effleura la cuisse. Elle poussa un petit cri mais raffermit sa prise sur son prisonnier. Lek allait tirer à son tour mais manqua perdre l’équilibre et dû se rattraper in extremis. Felton s’apprêtait à ouvrir le feu de nouveau, voyant que la femme visait Poppy. Son microvox vibra alors. Il activa la connexion, pensant qu’il s’agissait de Derreck.
    -Je suis un peu occupé, là, mon grand !
    Il reconnut cependant le timbre légèrement métallique de sa voix synthétisée.
    -Ne me dites pas que c’est vous qui êtes sur ce train ?
    -Quoi… ? Mais comment vous faites pour… ?
    -Vous ne répondez pas à ma question, McLatchy.
    -Je suis en effet, un peu occupé là sur ce foutu train. Ma cible risque bien de nous filer entre les doigts. Vous savez ? Le Plasticien.
    Son interlocutrice poussa un soupir.
    -Vous m’étonnez parfois… Mais disons que c’est plutôt une bonne surprise. Que comptez-vous faire de lui à présent ?
    -Eh bien… ce qui avait été convenu. L’interroger.
    -Un instant, j’ai bien cru que vous cherchiez à l’abattre, d’où ma question.
    -La femme qui le retient… c’est un de vos agents, n’est-ce pas ? Si j’avais su, je ne lui aurais pas…
    -C’est tout ce que j’avais besoin de savoir, McLatchy. Mais je vous serais reconnaissante de ne pas l’abattre. J’ai encore besoin d’elle. Le Plasticien est à vous.
    -Je vous ferai part de ce que nous découvrirons lors de son interrogatoire.
    -Je n’en ai aucun doute.

    Le véhicule vint se tenir à la hauteur de la motrice qui continuait de filer sur les rails alors que le reste du convoi allait lentement ralentir maintenant qu’il n’était plus tracté. La fille frappa le Plasticien à la tête, le laissant tomber sur le toit de la motrice. Puis, s’accrochant au rebord, elle sauta sur l’habitacle du véhicule blindé qui s’était maintenu pile à sa hauteur. A peine était-elle sur le toit que leur engin s’écarta et commença à s’éloigner. Felton s’était déjà élancé et parvint à sauter in extremis sur la motrice, aussitôt suivi de Lek. Poppy n’y parvint pas, l’écart était maintenant trop grand et préféra voxer Derreck, lui demandant de les rejoindre. Au bout de quelques minutes, Lek parvint à entrer dans l’habitacle et finit par couper les turbines et à faire freiner la motrice dans un crissement strident de métal torturé.
    Derreck se gara à leur hauteur et vint les aider. Un peu plus loin, les wagons étaient en train de terminer leur course, mais tôt ou tard, les passagers ne tarderaient pas à en sortir. Ils allaient devoir filer avant. Lek et Felton avaient fait redescendre le Plasticien, toujours assommé et après l’avoir ligoté, le firent monter à bord de la Hive Runner. Ils allaient devoir filer en direction du Reliquaire et se charger de son interrogatoire.
    -On pourrait l’interroger dès maintenant, pendant le trajet, non ? Demanda Derreck.
    -Non, ajouta Poppy qui terminait de fouiller leur prisonnier. On ignore s’il n’a pas un moyen de transmettre ce qu’il voit ou entend. Je préfère qu’on ne dise rien en sa présence, avant d’en être absolument sûr. On voit qu’il a des implants. On va l’amener au technoprêtre du Reliquaire, je veux qu’il le sonde avant. Ensuite, on le fera parler.
    -Et Lexxi ?
    -Quoi, Lexxi ?
    -On passe la chercher ?
    -Négatif. Elle reste en planque. Les activités de Rasham sont tout aussi suspectes et prioritaires. On s’occupera de lui en temps et en heure. On la contactera une fois en ville, j’aimerai savoir si elle a du nouveau le concernant.
    Elle effectua un petit signe, indiquant à tout le monde de monter dans la voiture. Il était temps de partir car les wagons venaient de s’arrêter à moins de cent mètres de là. De toute façon, la nuit allait tomber. Elle attrapa Felton à part.
    -Qui vous a appelé, tout à l’heure sur le toit du train ?
    -Sinclar.
    -Cette baronne de la Kasballica ? Trône, elle voulait quoi ?
    -La même chose que nous.
    -Alors pourquoi nous l’avoir laissé dans ce cas ? C’est quoi son intérêt ?
    -Je te l’ai dit, elle veut la même chose que nous. Elle assurait juste ses arrières.
    -Ah oui ? Vous voulez dire qu’elle ne nous croyait pas capable de lui mettre la main dessus ? Elle n’a peut-être pas autant confiance que ça en vous ?
    -Je pense que si et j’y travaille justement. Elle reste prudente et elle a raison. Mais pour ta gouverne, elle a été agréablement surprise par notre prestation j’ai l’impression.
    -Si vous le dites… On ferait bien d’y aller, on a un interrogatoire à mener.
    Poppy monta dans le véhicule. Le Plasticien était à l’arrière, ligoté. Il avait repris ses esprits et lui lança un regard noir.
    -Savez-vous à qui vous avez affaire, au moins ? Lui dit-il avec un air de défi.
    -Absolument. Mais ça tombe bien que vous abordiez le sujet, parce que c’était justement la raison de ma question.
    -Sachez tout d’abord que je ne sais strictement rien. Vous faites fausse route avec moi.
    -Nous savons que vous êtes celui qui se fait appeler le Plasticien et nous savons pour qui vous travaillez. C’est surtout votre présence ici et votre dernier client qui nous intéressent. Pas vous.
    -Ce n’est pas dans mes habitudes de dévoiler des secrets professionnels, je vous le dis tout de suite. Vous perdez votre temps avec moi.
    Poppy partit d’un petit rire sincère. Elle fit signe à Lek de le bâillonner, il aurait été imprudent selon elle, de mener plus avant ce genre de conversation. Et puis l’entendre débiter de telles salades finirait par l’énerver. Elle n’avait pas l’intention de le frapper. Pas encore, du moins.
    -Je sens que la suite va être instructive et des plus passionnantes.
    Elle tapota l’épaule de Derreck.
    -En route.

    A la nuit tombée et après une heure et demie de route, elle demanda à Derreck de se garer dans le quartier des temples, en face du Reliquaire.
    -Attendez-moi là, j’ai à parler avec le technoprêtre, j’en ai pour cinq minutes.
    Le bâtiment en question ne payait pas mine et était un ancien cloitre vétuste qui abritait un librarium d’un ordre dialogus mineur dont elle avait oublié le nom. Tout l’intérêt du bâtiment n’était pas les sœurs qui y travaillaient en surface, mais bel et bien ses cryptes secrètes qui abritaient le complexe du Reliquaire, bâtis à l’abri des regards. L’endroit avait été choisi de manière toute symbolique par Jézabel Callidia, l’investigatrice des Ordos qui dirigeait ce sanctuaire. D’après ce que Poppy avait entendu dire, c’était ici-même, dans ce lieu, qu’Alicia Antiphonia, la Sainte Vivante s’était incarnée dans le corps d’une jeune sœur de bataille, juste à la fin de la guerre qui avait ravagé ce monde. Cette information n’avait jamais été rendu publique et seuls les Ordos et peut-être quelques sœurs de la Sororitas en avait eu connaissance. L’empreinte qu’elle y avait laissé avait rendu ce lieu sanctifié d’après les dires de Jézabel. Rien qu’en pénétrant de nouveau dans les bâtiments et en y ressentant son atmosphère empreinte de solennité, Poppy était prête à la croire sur parole.
    Elle montra sa plaque à l’entrée et se soumis sans poser de question aux auspex et aux contrôles des troupes de choc armées qui lui déverrouillèrent l’accès secret vers l’élévateur menant dans les niveaux inférieurs. Une fois parvenue à l’entrée du complexe, elle se soumit de nouveau au même cérémonial avant de pouvoir arpenter les couloirs sous l’œil scrutateur de suspicieux et inquiétants servo-crânes. Elle commençait à se familiariser avec cet endroit si mystérieux. Elle se dirigea vers l’atelier du technoprêtre et le trouva, comme à son habitude, pleinement affairé sur son établi à souder et connecter les pièces mécaniques d’un lourd bolter entre elle, à grand renfort de mécadendrites.
    -Adepte ? L’interpela-t-elle.
    Un de ses implants optiques se tourna vers elle.
    -Agent Sandwall ? Que puis-je pour vous ?
    -Pardonnez-moi… je viens de réaliser que je ne vous ai peut-être pas appelé selon votre propre rang…
    Il interrompit ce qu’il était en train d’entreprendre et logua quelques directives à l’attention de ses servo-crânes qui prirent aussitôt le relai sur l’établi, poursuivant son travail. Il vint se tenir devant elle, revêtu de ses longues robes rouges crénelées de blanc et l’observa à présent de toutes ses optiques.
    -Oh… Eh bien adepte est un terme tout à fait correct en réalité, bien que trop générique. Au sein même du Mechanicus, nous sommes tous des adeptes mécaniques… En vérité, il ne serait pas inapproprié de me qualifier de cyber-oracle ou de technodiacre, mais j’aime à me définir en temps qu’omniprophète.
    -Dans ce cas, omniprophète Ordax-Kappa, je souhaiterai solliciter votre concours.
    -Cela concerne-t-il notre accord relatif à cette liste de matériels ? Je suis justement en train de…
    -En réalité, non… C’est un service différent. Je suis venu avec un prisonnier et souhaite mener son interrogatoire. Or, avant cela, je voudrai… J’aimerai vraiment m’assurer qu’il ne cache pas sur lui quelques implants risquant de compromettre notre sécurité. Il dispose d’augmentiques que je n’ai pas su identifier.
    -Je vois et vous faite bien car là est la fonction première de certains implants. Vous-même, vous ne disposez d’aucune… Augmentation ?
    -Pas encore.
    -Loué soit le Grand Engrenage, voilà une réponse forte intéressante…. Sachez que cela me ravirait si vous acceptiez un jour de recevoir une telle bénédiction.
    -J’en prends bonne note, c’était justement dans mes intentions. Et sinon… Pour notre affaire ?
    -Notre affaire ?
    -Oui, le prisonnier et ses implants ? Vous pouvez m’accompagner jusqu’à lui ? Je ne tiens pas à ce qu’il entre ici avant d’avoir été scanné entièrement.
    -Malheureusement… Si vous ne pouvez me l’amener ici… Je ne vais pas pouvoir quitter mon atelier, moi non plus. En revanche, je peux vous adjoindre l’aide de mon assistante, si vous le souhaitez ?
    -Votre… Assistante ?
    -Sainte Huile, je ne vous ai pas présentées…
    Il se tourna et logua quelques injonctions binaires en direction du fond de son atelier d’où émergea un second technoprêtre. A bien y regarder, Poppy reconnut là une jeune femme qui paraissait tout à fait naturelle, à l’exception de quelques implants plutôt discrets. Son visage et même son corps avaient l’air parfaitement humains et non lourdement cybernétisé comme l’était celui d’Ordax-Kappa qui ressemblait plus à un robot humanoïde qu’à un homme augmentique. Ses yeux clairs, sa peau pâle et délicate, ainsi que ses cheveux blonds, rasés sur un côté, auraient même pu lui donner un air d’une jeune femme tout à fait normale. En revanche ses longues robes rouges crénelées de blanc, ses électrotatouages, son bâton ésotérique et le servo-crâne qui flottait à ses côtés, lui donnaient assurément des airs de jeunes novices du Culte de la Machine. Mais dans une tout autre tenue vestimentaire, elle aurait parfaitement pu passer pour une citoyenne tout à fait normale.
    -Je vous présente Pixi 3-Kappa, mon assistante.
    Poppy releva le nom mais préféra ne pas questionner le potentiel lien de filiation qu’elle pouvait avoir avec Ordax-Kappa. Ils n’avaient que le nom en commun. Après tout, les mystères du culte de la Machine pouvaient bien rester opaques, c’était parfois préférable. Poppy le prit à part, afin de lui poser une question qui l’intriguait.
    -Je ne compte pas remettre en doute ses aptitudes, mais dispose-t-elle des… De tout l’équipement adéquat ?
    -Oh… Ne vous laissez pas abuser par son apparence un peu trop… organique. Pixi est une factor, une émissaire parfaitement capable de s’intégrer aux autres adepta, c’était même sa fonction première avant que je ne réécrive ses circuits céphaliques et reformate ses processeurs corticaux. Son enveloppe silico-dermique de très haute qualité a été cultivé spécialement en cuve afin de remplir à la perfection les fonctions exactes de l’anatomie biologique d’une femelle humaine dont il ne reste que douze pourcents de ses organes d’origine. Mais ne vous y trompez pas, son endosquelette renforcé dispose de nombreux implants, tous parfaitement capable de remplir ses fonctions de prêtresse de la Machine. Mais vous en révéler plus à son sujet, serait une rupture de protocole de la quatorzième admonition des lois de la Machine. Vous le comprendrez bien, vous qui êtes une femme de loi…
    -Trône… !
    -Fascinante, n’est-ce pas ?
    -Je peux donc vous l’emprunter ? Je ne serais pas longue.
    -Faites donc, j’ai du travail qui m’attend.

    Poppy ressortit, accompagnée donc par Pixi 3-Kappa qui la suivit sans poser la moindre question. Approchant de la voiture, ce furent Lek, Derreck et Felton qui s’étonnèrent de trouver soudain un air plutôt familier chez la jeune technoprêtresse. Lek notamment avait passé quelque temps en sa compagnie sur l’ile de Folly Island, avec Tsali, des mois auparavant. Pour eux, Pixi avait été exécuté par les ordos pour avoir pratiqué de la technohérésie. La revoir à présent était assez troublant, d’autant plus qu’elle ne semblait éprouver aucune sorte d’émotion particulière en les voyant. Ils allaient interroger Poppy à ce sujet mais Derreck les interrompit avant.
    -Lexxi m’en a parlé. Ce n’est plus la Pixi que l’on a connu. Elle a eu la mémoire effacée ou réimplanté, ou quelque chose comme ça. Le technoprêtre en a fait quelqu’un d’autre.
    -Tu veux dire qu’elle ne sait plus qui on est ? Le questionna Lek.
    -C’est ce que j’ai cru comprendre.
    -Bin c’est pas plus mal, lâcha Felton. Cette fille était un vrai sac d’emmerdes, si vous voulez mon avis.
    Ils sortirent le Plasticien de la voiture et Pixi vint se tenir devant eux. Poppy leur indiqua qu’elle était là afin de les aider et la laissa faire. Elle leur demanda de le tenir fermement pendant que le servo-crâne qui l’accompagnait sonda le prisonnier.
    -Je veux savoir de quels implants il dispose, demanda Poppy.
    Au bout de quelques instants, Pixi lui répondit d’une voix posée et plutôt délicate.
    -Electro-implants, logis-implant, œil augmentique, ouïe augmentique avec implant microvox et enfin une interface UIC.
    -Vous pouvez désactiver son microvox ? Ou tout autre implant lui permettant de transmettre une information ou même sa propre localisation.
    Pixi hocha la tête et laissa son servo-crâne s’en charger. Il connecta un de ses câbles de connexion à un des implants crâniens du Plasticien malgré ses contestations.
    -C’est fait, se contenta de répondre Pixi après quelques instants.
    -Parfait.
    Poppy indiqua à Lek et Derreck de l’emmener vers le bâtiment.
    -Installez-le et une fois que c’est fait, que l’un de vous tâche de joindre Lexxi. On vous rejoint.
    Elle les laissa passer devant, suivis par Pixi puis elle se tourna vers Felton qui était adossé nonchalamment contre la Hive Runner. Il venait de s’allumer un cigalho et tendit le paquet à Poppy. Elle en prit une et il lui alluma.
    -Tu crois qu’il va parler ? Finit-il par lui demander.
    -Cela ne fait aucun doute. Vous voulez m’assister ?
    Il eut un petit rire nerveux. Mais sincère.
    -Merde. Si j’avais parié sur ça, y a encore quelques semaines.
    -Quoi donc ?
    -Nan… Toi, l’arbitrator, droit dans tes bottes, défenseuse de la Lex Imperialis… On a bien failli régler ça à coup de flingues, toi et moi, au début.
    -Et vous seriez mort. Vous, l’affreux criminel de la Kasballica.
    -Toi t’es une vraie botteuse de culs et ça me va. Tu m’étonnes que je vais t’assister. Le Plasticien va devoir cracher le morceau. Il sait forcément où est Cox.
    -Haxt reste notre véritable cible, ne l’oubliez pas.
    -Mouais. Mais Cox compte approcher Haxt. Si on le joue fine, on gagne sur les deux tableaux. Et va falloir que t’arrêtes de me vouvoyez, ma grande, j’ai l’impression que tu parles encore à ce m’as-tu-vu de Rico. Tu l’as croisé au fait au Reliquaire ?
    Elle eut un petit rire.
    -Qui Rico ? Jézabel a eu la sagesse de le mettre en cellule sous bonne garde sans quoi il serait déjà le Trône sait où, entre les mains des Milagria ou pire encore. Elle a bien fait de l’enfermer. Pour moi c’est de l’histoire ancienne.
    Elle termina son cigalho et jeta le mégot au loin.
    -Allons-y. La disparition du Plasticien doit déjà être signalée à l’heure qu’il est et j’ai plutôt hâte d’apprendre tout ce qu’il a à nous dire.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 22/11/2022 à 21:53 Citer ce message

    L’interrogatoire du Plasticien dura presque toute la nuit. Il faut dire que Poppy s’y attela de manière méthodique, assistée de Felton, d’une trousse d’excruciator et de toute la pugnacité qui la caractérisait. Les simples questions, puis les menaces verbales et physiques ne menèrent d’abord à rien. Elle dû passer aux étapes suivantes qui mêlent torture physique et mentale, mais même là, le captif trouva le moyen de résister bien plus que ne ferait un simple citoyen. Le visage tuméfié, les lèvres ouvertes, les arcades fendues et pissant le sang, il continuait de ricaner, se moquant éperdument du sort qui l’attendait, se sachant de toute façon perdu.

    Pendant ce temps, Lek et Derreck décidèrent de reprendre la voiture et d’aller finalement rechercher Lexxi qui avait passé le plus clair de sa journée en planque devant chez Rasham. Ils finirent par la retrouver – elle-même étant plutôt rassurée de les revoir. Elle leur raconta ce qu’elle avait vu : les trois types, la malle, le quartier du Scorbut et ce bâtiment des Mortis Mortuarium. Cela soulevait évidemment d’autres questions sur les activités de Rasham et ce trafic avec les filles qu’ils maintenait captives dans cette maison. Quant à cette malle, elle pouvait évidemment contenir tout et n’importe quoi, mais s’il s’agissait d’un corps, cela signifiait qu’ils s’en débarrassaient d’une manière ou d’une autre auprès de la guilde des recycleurs de chair. Cela pouvait paraitre morbide, mais la pratique était courante et parfaitement légale sur la plupart des mondes impériaux.
    Ils retournèrent finalement au Reliquaire et Felton les retrouva dans le couloir, s’essuyant le visage dégoulinant et maculée de sang avec une serviette.
    Lek et les autres l’interrogèrent du regard, se demandant à quel point, ils avaient dû y aller fort. Il posa la serviette.
    -Cet enfoiré m’a craché le verre d’eau que je lui avais donné, au visage.
    Poppy sortit à son tour de la salle d’interrogatoire. Elle était en chemise, les manches retroussées et essuyait ses poings encore maculés de sang. Les autres l’interrogèrent du regard.
    -Il commence à me fatiguer, il ne veut pas lâcher le morceau. Les seuls éléments dont il a parlé, à propos de Caleb Cox, c’est le fait qu’il avait effectivement fait de la chirurgie et que désormais sans son tatouage facial, il était bien plus séduisant et pourrait passer aisément pour un dandy même s’il pouvait aussi bien passer inaperçu, dans la rue. Il prétend ne même pas connaitre sa nouvelle identité. Il se fout vraiment de ma gueule…
    -Si Cox est malin, il ne lui a pas donné sa nouvelle identité, lâcha Lek. Ou peut-être une fausse.
    Elle se tourna vers Derreck, pas très convaincue.
    -On va devoir monter d’un cran. Torture psychique. Vous savez lire dans la tête des gens ou les contraindre à répondre, non ?
    -Lire dans sa mémoire, non… Mais le forcer à répondre, c’est pas impossible, oui.
    -Alors, venez avec moi…. On a assez perdu de temps.
    Elle se tourna aussi vers Lexxi et Lek.
    -Vous deux… Je vais aussi avoir besoin de vous pour me le secouer fortement. Il va falloir le faire craquer. Cognez-le, brisez-lui les os, ça m’est égal, il doit parler. On perd du temps, là.
    Elle désigna Felton.
    -Allez me chercher cette Pixi 3-Kappa, elle a des connaissances medicae. Je vais aussi avoir besoin d’elle pour le réanimer, au cas où.
    Son attention s’arrêta un instant sur la veste pare-balles de Felton où une marque de sang indiquait toujours l’endroit où il s’était fait touché dans le train.
    -Et demandez-lui aussi de regarder votre blessure.
    -Une égratignure, rien de plus.
    -Je suis sérieuse, McLatchy.

    Ils reprirent la suite de l’interrogatoire et cette fois-ci, Lexxi montra les muscles, étant à la limite de lui arracher les bras et de déboulonner la chaise sur laquelle il était sanglé. Pendant ce temps, Derreck employait ses techniques mentales de persuasion pour le forcer à répondre à leurs questions. L’air se chargea d’électricité statique tandis que les yeux du psyker se mirent à luire d’un éclat lumineux. Le captif s’en rendit compte et son nez, déjà en sang se mit à couler de plus belle, tout comme se yeux tuméfiés. Il hurla tandis qu’il dévoilait, bien malgré lui, des informations qu’il avait jusque-là, gardé enfouis dans son esprit hermétique. Ses défenses commencèrent à céder les unes après les autres. Il finit par avouer que Cox était toujours à Sandbarra et que c’est là-bas qu’il l’avait opéré pour lui modifier les traits. Il savait juste que c’était dans le sous-sol d’un bâtiment mais sans savoir où exactement car les hommes de Cox lui avaient entravé les sens lors du trajet afin qu’il ne sache pas où ils étaient exactement. Il jura ne pas savoir où Cox était exactement à présent ni qui il prétendait être.

    Derreck intensifia ses capacités psychiques et satura le cerveau de leur prisonnier d’ordres mentaux qui agirent telles des aiguilles chauffées à blanc. Le sang commençait aussi à couler par les oreilles du captif dont les globes oculaires étaient à présent injectés de sang, à la limite d’éclater hors de leurs orbites. Sans pouvoir se maitriser, il débita les réponses attendues alors que sa vessie se relâchait, l’inondant d’une flaque qui se répandit sous lui. Il parla d’une femme qui était là et qui l’assistait pour l’intervention. Elle se faisait appeler Shidia, elle-même medicae selon lui. Elle portait un masque, comme toutes les autres personnes qu’il avait croisé lors de l’opération, mais les autres devaient tous être des hommes de main. Quant au matériel médical utilisé, selon lui, il devait être local car ne pouvait provenir que d’un lieu assez proche…
    Les murs autour d’eux commencèrent à se gondoler, comme si des visages grimaçants et inhumains étaient derrière, déformant la peinture blanche qui se craquela sous leur terrible tentative d’intrusion. Leurs chuchotements malveillants résonnant tels des échos dans leur tête. Les sceaux de pureté prophylactiques qu’ils portaient sur eux et que Rico leur avait confectionné quelques jours auparavant, s’embrasèrent spontanément et tombèrent en cendres, mais cela les préserva en partie des effets pernicieux du warp. Ils se signèrent et reculèrent, horrifiés. Seul Felton n’en portait pas et il fut soudain prit de malaise tandis que du sang se mit à couler de son nez. Il se retint de ne pas vomir. Poppy foudroya Derreck du regard, lui hurlant d’arrêter tout de suite. Ce qu’il fit, sans discuter. Si elle ne mettait pas de limites, le moindre satané psyker serait parfaitement capable de créer une brèche warp, sans même le vouloir. Seul le Trône aurait pu savoir ce qui en serait sorti et si elle aurait eu le temps de lui coller une balle dans la tête juste avant que l’enfer ne s’abatte sur eux.
    Le Reliquaire était protégé de toute intrusion extérieure mais de l’intérieur, rien ne pouvait les prémunir des dangers du warp.
    -Sortez, tous les deux. Allez faire une pause, avant qu’il n’y ait un drame.

    Elle souffla et s’alluma un cigalho, une fois qu’ils furent dehors. Elle demanda à Pixi de réanimer le captif. Son cœur venait de lâcher. Elle la laissa intervenir et sortit à son tour. Elle attrapa Felton au détour d’un couloir. Il était occupé à reprendre ses esprits.
    -Vous avez déjà mis les pieds à Sandbarra, il me semble, non ? Il reprit son souffle avant de répondre.
    -Oui, peu après mon arrivée ici. C’était avec Derreck, Rico et Ezek, on était sur les traces de cette fille des ordos qui…
    -D’accord, peu importe. Il y a des hôpitaux, là-bas ?
    -Je crois bien que la ville en compte un, en effet.
    Lexxi et Lek vinrent les rejoindre. Elle poursuivit.
    -Donc si on va sur place et qu’on enquête sur ce matériel ou sur cette fille, cette… Shidia, on pourrait tenir une piste ? Continua Poppy.
    -Sans doute, oui.
    -On devrait y aller rapidement dans ce cas-là, ajouta Lexxi. Lek acquiesça à ses côtés.
    -Cox risque de ne pas y rester bien longtemps, à ce qu’il a dit, ajouta-t-il.
    -Y aller rapidement ? Leur répondit Felton. Ce serait une mauvaise idée, je pense.
    -Pourquoi cela ?
    -La dernière fois qu’on y était, on s’est fait tout de suite repérer par les types du coin. Si on y retourne maintenant, sans préparation, sans matériel, sans connaissance des lieux, on va à l’échec. Moi, je ne suis pas pour aller à Sandbarra. Pas maintenant en tout cas.
    -A l’époque vous n’étiez que des civils, répondit Poppy.
    -Eh bien, préparons un plan, du matériel… Je peux m’en charger avec Lek, ajouta Lexxi. Ordax-Kappa a certainement terminé notre servo-crâne et peut-être une partie de la liste qu’on lui a demandé.
    Poppy hocha la tête.
    -Tâchez de voir où il en est, ça nous servira forcément.
    Elle reporta son attention vers Felton.
    -Comment ça, ne pas aller à Sandbarra ? C’est pas vous qui vouliez absolument mettre la main sur Cox ?
    -Si, mais pas dans ces conditions. On se pointe là-bas, comme ça ? Les mains dans les poches ? Je suis déjà allé sur place, à l’époque où Haxt résidait encore dans cette ville. C’était réputé être la plaque tournante des narcotrafics, des fumeries d’obscura et des trafics d’esclaves. On est cinq. Ils tiennent une ville et vont pas nous accueillir avec des couronnes de fleurs, tu peux me croire.
    -Il n’est pas question d’y aller sans préparation de toute façon. Pourquoi ? Vous aviez une autre idée à proposer ?
    -Oui. On pourrait en profiter pour remonter la piste suivie par Lexxi, celle des filles chez Rasham et savoir ce qu’ils mijotent avec les Mortiuarium, notamment.
    Elle allait répondre quelque chose mais elle vit Jézabel lui faire signe de la rejoindre, depuis le bout du couloir. Elle hocha la tête.
    -D’accord, on en reparle. Je maintiens que Sandbarra reste ma priorité, mais si vous avez des arguments pertinents, je suis prête à changer d’avis. En attendant, voyez avec le reste de l’équipe pour commencer à élaborer un plan, je vous rejoins.

    Elle retrouva Jézabel au détour d’un couloir, en pleine conversation avec un astropathe, reconnaissable à ses yeux blancs et à sa robe verte de la Telepathica. L’investigatrice des Ordos tourna son regard vers elle.
    -Ah, Sandwall, je parlais justement de vous. Vous connaissez Ezek Thaddaeus, il me semble ?
    -On s’est croisé, en effet. L’affaire de l’astroport.
    -C’est bien ça… Vous avez cinq minutes à m’accorder ?
    -On est sur un interrogatoire, mais oui…
    -Parfait. Un lien avec Rasham et Caleb Cox ?
    -Oui, on a plusieurs pistes, dont une qui nous ramène à Sandbarra.
    -Vous envisagez d’y aller ?
    -Nous devons éclaircir deux ou trois points avant avec l’équipe.
    -Mais vous avez du concret au moins, ou juste des intuitions ?
    -Un témoin direct, oui. Quelque chose de sérieux. Disons que pour l’instant, McLatchy a encore quelques doutes.
    -A quel sujet ?
    -Des doutes sur Sandbarra. Le Syndicat tenait la ville il y a encore plusieurs mois et on ne sait pas à quoi s’attendre sans un minimum de préparation en amont.
    -Il n’a pas entièrement tort. On n’y a plus personne sur place, ces temps-ci, faute de personnel. Quoi qu’il en soit, Sandbarra reste un des objectifs que l’on a dans notre collimateur depuis un moment. Il va quand même me falloir une équipe sur place dans les meilleurs délais. Mais une équipe parfaitement préparée et avec des couvertures solides. Suivez-moi.

    Elle les conduisit jusqu’au strategium puis referma la porte une fois qu’ils furent entrés tous les trois.
    Une jeune femme à la peau hâlée et aux longues tresses sombres s’y trouvait déjà.
    -Je ne vous présente pas Elisha Ulth ? Elle et notre astropathe font partie de l’équipe Tenebrae.
    Elle et Poppy s’étaient déjà croisées aussi, au tout début et avant d’intégrer les Ordos, presqu’en même temps et pour des motifs différents. Elisha était la nièce de Réginas Ulth, le capitaine chartiste qui trempait dans toute une organisation liée au Commerce froid, entre Kasballica, Syndicat de l’ombre et Princes de l’Inéquité. Il en était mort d’ailleurs, de manière expéditive, assassiné dans les locaux-mêmes de l’Arbites par un tueur à gage nommé le Fossoyeur. Poppy était là, ce jour-là, elle s’en rappelait très bien. Elisha avait été arrêté peu de temps après par les hommes de Gaia Orlando et toute la petite bande qui gravitait autour de Ulth, à savoir Rico, Felton et leurs comparses, avaient tous finis par se faire avoir par les Ordos. Finalement, la plupart eurent comme seule alternative à une mort rapide et définitive, de servir pour l’Inquisition d’une manière ou d’une autre. Même Pixi, une fois reconditionnée, servait les Ordos finalement. Dans le cas de Poppy, c’était différent, c’est elle qui avait été recruté. Les Ordos et l’Arbites avaient besoin d’une meilleure coordination interservices et elle avait le profil parfait pour ce type de poste.
    Elle connaissait bien le dossier d’Elisha Ulth. Cette fille était faite du même bois qu’un Felton McLatchy. Leurs manières de criminels pouvaient bien l’exaspérer, elle savait que les Ordos avaient besoin de gens comme eux sur le terrain car le contact avec les bas-fonds et leurs méthodes pour passer un peu partout étaient essentiels dans leur enquête.
    Elle lui fit un petit signe de tête, mais sans plus. Jézabel leur demanda de s’assoir et demanda à Mazarin, son servo-crâne, de projeter une holocarte en trois dimensions montrant plusieurs zones de la région ainsi que des flux de données.
    -Comme vous le savez, Tenebrae est parvenu à obtenir des informations à Newburg concernant plusieurs cultes ou cabales en lien avec nos affaires. Des noms comme la Fraternité silencieuse, les Disciples d’Abraxas ou encore l’Ordo Hydra sont revenus en lumière, alors que leurs noms, pour certains semblaient éteints de longue date. En réalité, ces cultes sont toujours actifs bien que dormants et ils ont été récemment réactivés ici, sur Archaea et sans doute ailleurs. Pour l’heure, nous ignorons s’ils sont liés ou juste rivaux, quoi qu’il en soit, ils sont tous impliqués dans notre affaire avec des noms bien connus comme d’Andarion, Barthol Théodore, Grendel Haxt, Kybernetès et visiblement certains chartistes, comme Réginas Ulth. On sait que cela touche à un trafic de psykers au sein du commerce froid. Cela signifie aussi que leur champ d’action dépasse cette planète, mais ce qui est intéressant est le fait qu’Archaea semble jouer un rôle de plaque tournante à cause de guildes chartistes qui se croisent sur ce monde. Haxt et ses sbires sont à la tête de ce réseau local mais ils disposent bien évidemment d’appuis. Nous tenons des pistes et n’allons pas les lâcher. Kanoptech, Sandbarra, la base Abraxas. Sur tous ces points, je veux des résultats, du tangible, des noms, des lieux et une fois qu’on a du solide, on frappe un grand coup. Cette fois, vous allez vous coordonner. Obscurus et Tenebrae, vous allez travailler en équipe, me désigner une cible, la localiser, la débusquer, récolter les données qui nous intéressent puis la réduire au silence. Ensuite vous passerez à la suivante et encore à la suivante. La cellule Mortis du lieutenant Silon Tauros, composée de troupes de choc sera en appui et à vos ordres, comme force de frappe. Vos cellules désormais sont se coordonner sur le terrain, même si elles opèrent à distance, vos objectifs seront liés à présent.
    Nouvelle réunion ici, dans une heure. D’ici là, je veux un nouvel objectif pour trouver Haxt et l’approcher. Que ce soit par le biais de Cox, de Rasham ou de qui que ce soit. Il va falloir obtenir des résultats à présent. Vous pouvez disposer.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 30/11/2022 à 18:11 Citer ce message

    Poppy profita de la fin de cette réunion pour s’entretenir quelque peu avec Elisha. Elles se rendirent toutes deux dans la salle de repos pour y prendre un récaf. Elles se servirent à la machine en bronze en forme de flèche gothique, dont le bec verseur sortait d’un crâne grimaçant en acier brossé. La salle en question était équipée de bibliothèques et d’écrans holo malgré une décoration spartiate où seuls les emblèmes de l’Aquila et des Ordos étaient présents. Une fois servies, elles allèrent s’assoir dans des fauteuils en cuir de grox, dans un coin tranquille.
    -Vous êtes mobilisés sur quelle piste du coup avec Tenebrae ?
    -On va devoir découvrir ce qu’est cette base Abraxas. Jézabel a raison, je pense qu’on a affaire là à une autre pièce de ce puzzle. Des heteteks ont toujours été liés, de près ou de loin à toute cette histoire et ce depuis le début.
    Poppy nota que la mine d’Elisha s’assombrit soudain. Elle avait eu l’occasion de parcourir son dossier et savait qu’Elisha Ulth était la nièce de Réginas Ulth, le capitaine chartiste qui avait été assassiné au début de cette affaire, car soupçonné de trahison par la pègre locale. C’était lui qui faisait de la contrebande pour le Syndicat de l’ombre et qui avait fini par se faire trahir, très certainement par Caleb Cox à la suite de sa rencontre avec Taddeus Carno, aux Trois Chérubins. C’est à ce moment que Cox avait très certainement commencé à placer ses pions pour le compte de la Kasballica, à moins que ce ne soit pour des ambitions plus personnelles. Pixi, Felton, Rico, Elisha et les autres avaient alors été embarqué dans cette obscure affaire de commerce froid et d’armes xenos qui n’était en réalité que l’écume masquant une hérésie bien plus sordide qu’était le trafic de jeunes psykers émergents.
    -Toutes mes condoléances pour votre oncle au fait, lâcha Poppy qui chercha avant tout à analyser sa réaction, tout en sirotant son récaf.
    -Réginas avait fait ses propres choix.
    -Oh. J’admire un tel détachement.
    -Il était mo oncle, mais je savais que ses histoires le rattraperaient un jour.
    -Vous-même… Vous aviez fait certains choix…
    -Les fautes de nos pères ne doivent pas nécessairement être une malédiction à porter. Les ordos m’ont offert une seconde chance et je vois plutôt cela comme une sorte de rédemption. Disons qu’entre une mort brutale et une vie à racheter mes erreurs passées, je préfère la vie, agent Sandwall.
    -Cela ferait une bien belle épitaphe. A ce sujet, vous repartez quand sur le terrain ?
    -Hé bien, le temps de préparer l’équipe et nous coordonner avec la cellule Mortis… Jézabel aimerait que l’on parte dans les quarante-huit heures. Pourquoi ?
    -Comme vous avez dû l’apprendre, avec mon équipe, nous sommes sur la piste de Caleb Cox. Une des pistes nous mènent vers les activités de Kanoptech et de Gad Rasham que l’on soupçonne être derrière une partie de ce trafic de psykers émergents. De l’autre, nous allons suivre la piste de Caleb Cox qui est lié aussi à ce trafic mais qui pourrait bien nous rapprocher de Grendel Haxt. Or, sa piste nous conduit droit à Sandbarra et… Je vais manquer un peu de bras.
    -Vous voulez un coup de main pour une de ces pistes ?
    -Oui, pour surveiller Gad Rasham de Kanoptech en fait.
    -Observation, filature, ce genre de chose ?
    -Observer sa demeure et surtout, le suivre lui. Je veux savoir qui il voit et ce qu’il trame. Si quelqu’un de votre équipe pouvait prendre le relai ?
    Elisha se mit à réfléchir quelques instants.
    -Cela devrait être possible, disons si ça ne dépasse pas les quarante-huit heures. Je peux y affecter deux membres de mon équipe.
    -Et si cela devait dépasser ?
    -Hé bien… Je devrais trouver des gens compétents. Nous avons quelques contacts qui devraient faire l’affaire.
    Derreck, Lek, Felton et Lexxi entrèrent alors dans la salle de repos, venant aussi se servir un récaf. Elisha se leva en reconnaissant Derreck, elle vint le voir et tous deux se saluèrent chaleureusement, heureux de se revoir. Elle salua les autres et notamment Lexxi car elles ses connaissaient depuis qu’elles travaillaient toutes deux pour le Reliquaire. Ils échangèrent quelques banalités avant de faire un dernier point avec Jézabel puis se préparèrent à prendre la route au petit matin, avant le lever du soleil.

    Abords de Sandbarra,
    Région des Basses terres.
    Tempus estimare 003.021M42– 11h37

    En fin de matinée, ils étaient enfin en vue de la ville côtière de Sandbarra. Ils laissèrent la voiture dans une ferme isolée et abandonnée, le long d’une petite route perdue dans une végétation sauvage, à deux kilomètres de la ville, là où s’étendait des cultures principalement de lho. Lexxi finit par trouver un endroit où la dissimiler totalement à l’abri des regards puis ils firent le reste du chemin à pied, non sans avoir au préalable laissé une partie de leurs armes dans le coffre. La route principale qu’ils avaient suivie n’était presque exclusivement empruntée que par des poids-lourds tractant des convois de porte-containers. Sandbarra avait longtemps été un port de pêche réputé en son temps. Les années de guerre avaient quelque peu réduit cette activité à la seule pêche au gros mais le port du quartier des docks voyait encore régulièrement ces énormes chalutiers qui ramenaient du large d’impressionnants poissons-mondes. Ce n’était pourtant pas son huile ou ses conserves de poisson qui avait fait la réputation de Sandbarra mais surtout sa production d’opiacées. En vieux gothique, son nom signifiait village des sables. Même de nos jours, les universitaires ne parvenaient à se mettre d’accord. Sandbarra était entouré de sable, c’était un fait, mais cela n’avait pas toujours été le cas dans son histoire passée. En revanche, cette petite ville avait toujours été une plaque tournante de certaines épices rares cultivées sur les plaines avoisinantes. La déforestation et la culture intensive avaient par la suite causé sa désertification. Mais le terme sable en lui-même, référait très certainement à certaines drogues produites localement et pendant des générations. Autour de la ville et sur plusieurs kilomètres, se cultivaient même encore, des champs à perte de vue, comme ils purent le constater. Les graines de lho noir étaient réputées de longue date comme un produit narcotique d’exportation dont la légalité fluctuait d’un monde à l’autre. A faible dose et détoxifiées, elles entraient même dans les préparations de certains plats, comme d’autres épices rares. Mais chauffées, distillées et mélangées à de l’ammoniac et à de l’essence de néphium, un extrait de prométhéum, elles servaient à produire de l’obscura, un psychotrope parfaitement illégal et pourtant diffusé dans tout l’Imperium. Les feuilles de lho, moins toxiques, entraient, elles dans la composition des cigalhos des plus grandes marques connues. Sandbarra avait toujours été une plaque tournante des narcotrafics et même si en son temps, Oberon Jestilla, le père de l’actuelle gouverneure avait tenté de l’endiguer, certains septiques se demandaient s’il avait fait tout ce qui était en son pouvoir ou si, lui aussi, n’avait pas juste fermé les yeux sur une économie parallèle qui rapportait mille fois plus que la pêche au gros.

    Lek connaissait quelque peu la ville pour y avoir séjourné moins d’un an auparavant, ce qui faisait de lui, une source d’informations plutôt fiable. Felton et Derreck n’y étaient passé que brièvement, trois mois plus tôt, mais cela leur laissa malgré tout un certain sentiment de dangerosité sur cette ville bien particulière. Poppy n’y avait pas encore mis les pieds, pourtant elle en avait lu quelques rapports et savait déjà à quoi s’en tenir. La pègre tenait l’économie souterraine de la ville et il était clair que cela impliquait forcément une partie de ses citoyens. Il n’y avait pas qu’un parfum d’obscura qui flottait sur Sandbarra, celui du crime organisé y planait de manière bien plus insidieuse.
    Sur le trajet, Lek leur expliqua que la ville possédait ses propres forces de l’ordre que les locaux appelaient les Cent Yeux.
    -Une milice privée du Syndicat, en quelque sorte. Et leur autorité, on sait de qui il s’agit ? Lui demanda Poppy à voix basse. Aux dernières nouvelles c’était Haxt qui tenait la ville, non ?
    -Sauf que Haxt se fait passer pour mort, en ce moment, compléta Felton.
    -Justement, ça pourrait nous intéresser de savoir qui aurait pris le relai dans ce cas.
    -Même quand il était là, ce n’est pas lui qui gérait la ville, ajouta Lek. Elle est dirigée par un système de castes.
    -Développe ?
    -Hé bien… Il y a quelques mois, j’ai bossé ici pendant quelques semaines, chargé de la protection rapprochée de quelques caïds et disons que j’ai… appris quelques détails. Si je me rappelle bien, ce sont ces castes qui dirigent la ville. Trois dirigeants des principales organisations sont à sa tête en tout cas.
    -Toutes liées au Syndicat de l’ombre ou indépendantes ?
    -Non, elles lui sont liées… Mais c’est pas si simple. Haxt est un malin, il a divisé les activités, les rôles et les responsabilités, de sorte que les castes soient concurrentes et en même temps interdépendantes, ce qui crée parfois des conflits entre elles. Des guerres de territoires, des luttes d’influences, des choses comme ça…
    -La division pour s’assurer le pouvoir. C’est un vieux principe qui fonctionne toujours, on dirait.
    -C’est ça. Pendant qu’elles sont occupées à gérer leurs affaires et leurs propres conflits, elles ne s’allient pas et ne se retournent pas contre leur autorité, trop occupées dans leurs luttes intestines et leurs propres objectifs.
    -Et ces castes s’occupent de quoi, le reste du temps ? Ce sont des organisations criminelles ?
    -Elles ont toutes une façade légale en réalité. L’une d’elle s’occupe du commerce de la ville et donc du gros de son activité parfaitement autorisée. C’est le bureau du Mercator, ou quelque chose comme ça. Cela va de la production agricole, la pêche au commerce en tout genre dans la ville. Mais c’est elle qui gère aussi la dîme pour le gouvernement. La seconde gère toute la sécurité et la police. Ce sont les types qu’on a croisé, les Cent Yeux. Une blague circule d’ailleurs sur leur compte, une sorte de jeu de mots. On les appelle aussi les Sans Yeux parce qu’ils sont censés les fermer et ne rien voir sur certaines activités.
    -Il n’empêche qu’ils ne ferment pas les yeux sur tout ni sur tout le monde, lâcha Felton.
    -Et la troisième caste ? Poursuivit Poppy.
    -Il s’agit de celle qui a la charge des laboratoires de la ville. Ce sont des chimistes, des trucs comme ça. Je crois qu’ils l’appellent la guilde Medika, ou quelque chose dans ce goût-là.
    -Donc ce sont eux qui gèrent les narcotrafics, leur activité est bien illégale ?
    -La partie visible est parfaitement légale en fait. La production de lho est autorisée. De plus ce sont eux qui s’occupent de l’activité medicae en ville.
    -Et ils gèrent comment leur activité illégale ?
    -Ils sous-traite cette partie à des laboratoires clandestins. Ainsi, il n’y a aucun lien officiel entre eux. C’est pareil avec les autres castes. Les Cent Yeux disposent d’un réseau d’informateurs… Et celle du commerce sous-traite une partie de ses activités à diverses sociétés privés, indépendantes les unes des autres. Ainsi les drogues transitent par camion, par bateau et passent dans le flux continu des containers chargés de denrées. Le gros de la production part pour l’exportation notamment.
    -Comme Kanoptech… C’est malin, en effet. Si l’une tombe, tout le système peut s’en remettre sans trop d’impact. Voilà pourquoi il va nous falloir couper la tête de cette organisation criminelle. Une fois Haxt et ses lieutenants éliminés, leur château de cartes s’écroulera. Pourtant Haxt s’est fait passer pour mort et son organisation semble survivre…
    -Il s’est juste fait passer pour mort aux yeux de la loi. Je pense qu’il cherche juste à passer sous les auspex. Mais dans le Syndicat, les têtes doivent bien savoir qu’il est toujours là, quelque part, à tirer les ficelles et attendre que les autorités relâchent la pression.
    -Mmmh… Sans doute est-ce aussi la raison qui pousse Caleb Cox à faire son apparition. Mais dis-moi… Tu as parlé de trois principales castes. Cela sous-entend qu’il y en a d’autres ?
    -Oui, même si elles restent mineures. Par exemple toute l’activité nocturne est gérée par une autre guilde. Elle s’occupe des bars, des tripots, des bordels ou des établissements de jeu comme le carnivora. En réalité, elle affiche une façade totalement indépendante pour des raisons purement légales mais en sous-main elle est rattachée à la guilde Mercator qui s’occupe de tout le commerce de la ville.
    -Une ombre qui en cache une autre… Et les autres organisations ?
    -Il y a aussi l’Aube écarlate.
    -La guilde des mercenaires assassins ? Quels liens ont-ils avec le Syndicat ? Je les croyais indépendants ?
    -C’est le cas. Comme la guilde des murmures. Il en va de leurs propres codes. Enfin, si on en croit ce qu’ils prétendent. Ils se font discrets, mais sont pourtant en ville. D’après ce que j’ai entendu, ils sont là sur les conseils de Bosinski donnés à Haxt. Leur simple présence sert de menace pour chaque caste en réalité.
    -Voilà qui est intéressant… D’autres groupes ?
    -Les seuls autres dont j’ai entendu parler sont les Maledictus.
    -Les mendiants ?
    -Là aussi, il s’agit d’une façade. Ils sont bien plus que cela. Si j’en crois une rumeur, les Maledictus abritent des mutants.
    -Ils sont tolérés en ville ?
    -Disons qu’on ne les voit jamais au grand jour, mais à en croire certains bruits, certaines guildes en emploieraient, surtout la nuit.
    Poppy ne put s’empêcher de se signer, effectuant un rictus de dégout, par pure réflexe.
    -Trône… Employés pour faire quoi ?
    -Ça je l’ignore.
    -Bordel, c’est encore pire que ce que je croyais, lâcha Felton. Qu’est-ce qu’on vient foutre ici ?
    -C’est sûr que nous allons devoir passer le plus inaperçus possible, une fois en ville, lâcha Poppy. Ici, il n’est pas question que je sorte ma plaque de l’Arbites et aucun d’entre nous ne devra parler des ordos.
    Ils hochèrent la tête.
    -Et si on se fait repérer quand même ? Répondit Felton. La dernière fois qu’on est venu, on a tout de suite été repéré par les autres là, avec leurs yeux qui trainent partout.
    -La dernière fois, on est entré dans le centre-ville en voiture, aussi. Rétorqua Derreck. Et on était les seuls à en avoir une. Sans oublier de mentionner Rico qui se faisait repérer à dix kilomètres. C’est surtout ça qui nous a foutu dedans. C’est sûr qu’on a attiré l’attention.
    -Justement, il n’y a pas de raison qu’on se fasse repérer si on fait attention, leur dit Poppy. Elle désigna des vendeurs ambulants à l’entrée de la ville. Certains vendaient de la nourriture, de l’eau, de babioles et d’autres vendaient des vêtements de protection contre le sable ou les éléments. Ils virent d’ailleurs que les locaux avaient plutôt tendance à porter ce genre de tenues, dans des couleurs beiges, grises, crèmes ou blanches mais rien de bien coloré.
    -Voilà, ce sera parfait, nous allons acheter quelques tenues un peu passe-partout, comme ces grands chapeaux et ces sortes de ponchos.
    Ils s’approchèrent de l’étal et achetèrent les vêtements souhaités puis une fois les tenues locales revêtues, ils reprirent leur chemin et entrèrent en ville.
    -On va se séparer en deux groupes, continua Poppy. On observe et on tâche de ne pas attirer l’attention sur nous. Notre première piste est cette fille, cette medicae du nom de Shidia. On n’a rien sur elle pour l’instant, on va donc commencer par enquêter au sanitorum.
    Elle interrogea Felton et Derreck du regard.
    -Vous êtes sûr qu’il n’y a qu’un seul hôpital dans cette ville ?
    -Pas sûr, mais on en a vu qu’un la dernière fois, répondit Derreck.
    -Bien, on va commencer par là, dans ce cas.

    L’hôpital en question, ou Sanitorum Sancta Mater se situait en plein centre-ville, à un bon kilomètre à pied. Il était non loin du grand templum et de la grande place transformée en marché. A parcourir les rues animées et bondées, emplies d’étals et de vendeurs en tout genre, ils réalisèrent que cette ville ressemblait finalement à bien d’autres, tout aussi similaires et pourtant uniques à la fois. Unique par son architecture, ses odeurs, ses couleurs et ses mystères, mais similaire par sa population, sa langue, sa misère et son crime organisé. Finalement, tout ce que l’on retrouvait dans une ville impériale de n’importe quel segmentum. De fait, il ne leur était pas très compliqué de se mêler à ses citoyens car personne n’avait l’air de se soucier d’eux. Pourtant ils restèrent prudents et aux aguets, identifiant sans peine ces hommes armés qui semblaient surveiller les rues, à l’ombre de leurs larges chapeaux et de leurs longs cache-poussières. Les Cent Yeux. Felton et Derreck ne s’en rappelaient que trop bien d’avoir eu à jouer au félide et à la souris avec eux, la dernière fois.
    Sur la place du marché, Lexxi en profita pour acheter un bouquet de fleurs idée de faire illusion à l’hôpital. Elle et Felton se dirigèrent ensuite vers l’entrée du Sanitorum. Contrairement à celui de la capitale, l’établissement n’était pas tenu par des sœurs, mais par des medicae civils. Ils se présentèrent à l’accueil. Poppy entra à son tour, mais fit mine de ne pas être avec eux et d’attendre quelqu’un. Lek et Derreck restèrent dans la rue, faisant mine de discuter mais restèrent aux aguets.
    Felton s’entretint avec une des aides-soignantes à l’accueil, évoquant une certaine infirmière du nom de Shidia qu’il souhaitait remercier, car elle aurait sans doute soigné sa mère, alors récemment opérée.
    Un peu décontenancée, la femme parut quelque peu gênée.
    -Vous m’en voyez navrée, mais je ne connais pas d’infirmière de ce nom. Vous êtes sûr qu’elle travaille bien ici ?
    -A vrai dire non… Il y a un autre hôpital en ville ? Une clinique privée, peut-être ?
    -Je l’ignore… Nous sommes le seul hôpital. Vous n’êtes pas d’ici, en fait ?
    -Non, nous venons de la capitale.
    -Ha, je me disais aussi… Mais vous n’auriez pas plutôt son nom à cette infirmière ? Je pourrais tout de suite vous dire si elle travaille bien ici.
    -Non, malheureusement, je n’ai que son prénom. D’autres personnes ici sauraient me renseigner ?
    -Il faudrait voir avec le chef medicae, Je pense qu’il saurait vous renseigner, mais il doit être occupé en ce moment.
    Elle se tourna vers sa collègue située à l’accueil elle aussi et échangea quelques mots avec elle puis revint vers Felton et Lexxi.
    -Désolée, nous n’avons pas de Shidia ici.
    -Bien… Je pense que nous allons devoir faire autrement… Et à tout hasard, nous avons du matériel médical à restituer. Comment faut-il procéder ?
    -Ha ça, par contre, rien de plus simple, lui dit-elle avec un franc sourire.
    Elle préleva un formulaire et lui tendit avec un stylus.
    -Vous remplissez cette fiche et une fois fait, vous me la remettez. Je la ferai valider par le médecin chef. Toute la marche à suivre est alors indiquée.
    Felton fit mine de prendre la feuille et le stylus, les remercia puis fit mine de ressortir avec Lexxi. En sortant, il croisa le regard de Poppy, plutôt dépité d’avoir fait chou blanc. Il resta quelques instants à l’entrée, faisant mine de discuter avec Lexxi. Il observa discrètement l’attitude des deux femmes mais ne décela rien d’étrange. Il décida de ressortir.
    Poppy laissa passer quelques minutes puis se dirigea vers l’accueil et y trouva les deux mêmes jeunes femmes. Lexxi resta à l’entrée, faisant mine d’attendre, elle observa la scène.
    -Je voudrais parler avec le docteur Shidia, demanda Poppy.
    L’aide-soignante la dévisagea, étonnée.
    -C’est étrange… Un monsieur vient justement de me demander ce nom… Vous n’étiez pas avec lui ?
    -Quel monsieur ? Non, je viens juste pour le docteur Shidia. Vous pouvez l’appeler ?
    -C’est que… Voilà qui est très inattendu… Mais il n’y a pas de docteur Shidia ici…
    -Vous pouvez vous renseignez, s’il vous plait ?
    La femme parut quelque peu embarrassée mais hocha la tête et se dirigea vers un bureau un peu plus loin. Poppy se pencha vers sa collègue, la seconde aide-soignante et échangea quelques mots avec elle mais sans plus de succès. Sa collègue finit par revenir, lui indiquant qu’elle n’avait pas plus d’informations.
    Poppy les remercia et s’en retourna vers le hall et la sortie. Avant de passer la porte, elle croisa Lexxi qui lui désigna quelque chose du regard. Poppy se retourna discrètement et observa la scène. Celle à qui elle venait de parler venait d’attraper sa collègue et semblait lui reprocher quelque chose mais à cette distance, elle ne parvint pas à entendre le moindre mot.
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  • Illuminati
    Illuminati

    le 07/12/2022 à 15:18 Citer ce message

    L’hôtesse qui venait de rabrouer sa collègue quitta soudain son poste à l’accueil et se dirigera vers un des couloirs de l’hôpital. Lexxi et Poppy n’avaient rien raté de la scène mais préférèrent jouer la prudence et laisser leurs équipiers prendre le relai, afin de ne pas se faire repérer. Lek et Derreck entrèrent à leur tour et firent mine d’emprunter le même couloir que la jeune femme qu’elles venaient de leur décrire. Blonde, taille moyenne et portant une robe longue de couleur rose pastel. Au même moment, ce fut Felton qui revint vers l’accueil, profitant du formulaire à remplir pour créer une diversion auprès de la première hôtesse, celle qui l’avait renseigné juste avant. Ainsi pendant qu’il l’occupait, elle n’allait pas prendre garde à ses compagnons. Lek et Derreck en profitèrent pour suivre leur cible, croisant au passage des patients, des visiteurs, du personnel médical et d’entretien, sans que personne ne s’intéresse à eux particulièrement. La jeune femme entra alors dans un bureau, celui d’un medicae à en juger par son apparence et ses implants. Ce dernier poussa la porte derrière lui mais sans la fermer totalement. Depuis le couloir où ils se trouvaient, ils ne purent rien entendre de la conversation, aussi Lek fit mine de s’appuyer contre le mur, donnant l’impression de patienter, tout en cherchant à capter des échos de conversation à travers la porte entr’ouverte. De son côté, Derreck entra dans le bureau adjacent, voyant qu’il était vide, il referma la porte et chercha un moment d’écouter à la cloison. Il dénicha un stéthoscope posé sur le bureau, s’en saisit, le colla à son oreille et plaqua l’autre extrémité, celle qui amplifiait les sons, contre le mur. Il perçut quelques bribes de phrases même si elles étaient étouffées. Il comprit, tout comme Lek à l’extérieur, qu’ils parlaient bien de cette Shidia et que du monde était à sa recherche, ce qui inquiéta le médecin qui annonça qu’il allait devoir en informer la sécurité.
    Derreck reposa l’appareil et ressortit du bureau tout en voxant l’équipe.
    -On va avoir des problèmes, ils savent que des gens la cherche. On décroche.
    Il retourna vers l’accueil, rejoint par Felton. Tous deux ressortirent. Pour l’instant, Felton, Lexxi et Poppy pouvaient être identifiés puisqu’ils avaient posé des questions sur cette Shidia. Cela les mettait de fait, en danger immédiat. De son côté, Lek alla s’assoir dans le couloir sur un des fauteuils, là où discutaient des visiteurs. N’ayant pas été repéré, il préféra tabler sur sa discrétion et le fait de ne pas avoir été identifié. Le médecin passa devant lui d’ailleurs, sans même faire attention à sa présence. Quelques instants plus tard, ce fut l’hôtesse qui sortit à son tour du bureau et qui partit dans le couloir opposé. Il décida alors de la suivre. Elle se dirigeait vers une autre sortie qu’il n’avait pas encore repéré. Cela menait vers un jardin intérieur où se trouvaient quelques patients sur des bancs au milieu de bosquets de fleurs tropicales et de petits bassins. Elle arpenta le petit parc tout en s’allumant une barrette de lho qu’elle sortit d’un paquet de sa poche. Elle croisa un des gardes de l’hôpital qu’elle salua et que Lek identifia à sa tenue. Ce dernier était accompagné d’un cyber-mastiff. Tous deux échangèrent quelques mots. Lek fit mine de s’assoir sur un banc à une dizaine de mètres d’eux et chercha à suivre leur conversation. Il ne captait pas tous les mots mais parvint tout de même à lire en partie sur les lèvres. Il comprit notamment que tous deux parlaient aussi de la même chose. Cette affaire avec Shidia avait l’air de les inquiéter. De ce que Lek comprit, elle avait bien dû être une des medicae de cet établissement mais pour une raison qu’il ignorait, elle n’y travaillait plus et cela les étonnait que ce nom remonte à présent jusqu’à eux, alors qu’elle avait l’air d’avoir changé de vie à présent, travaillant pour d’autres employeurs qu’il ne put identifier.
    L’échange dura ainsi quelques minutes à la suite de quoi, elle retourna à l’intérieur du bâtiment. Lek la laissa passer puis la suivit de nouveau. Une fois à l’intérieur, alors qu’elle semblait retourner à l’accueil, il la perdit de vue. Il pesta et décida malgré tout de faire un point avec l’équipe. Il trouva l’ablutorium et s’y enferma, activant son microvox une fois assuré qu’il était bien seul. Il appela le reste de l’équipe et leur fit part de ce dont il venait d’apprendre.
    -Parfait, répondit Poppy. Ils sont au moins trois à savoir qui est cette Shidia et où elle se trouve. Le garde et son cyber-molosse, on les écarte, ce sera trop compliqué de les neutraliser tous les deux. La fille blonde de l’accueil et le médecin seront donc nos cibles.
    -On attend qu’ils finissent leur service, dans ce cas, annonça Felton.
    -Vous avez raison. On va se diviser. Felton et moi allons surveiller l’entrée principale. Lek reste en position vers la sortie de derrière, avec Derreck. Lexxi avec le servo-crâne restera en soutien non loin d’eux derrière le parc. Si l’un d’eux sort de l’hôpital, on le prend en filature et on tâche de l’intercepter un peu plus loin, à l’écart. L’objectif est de savoir où trouver cette Shidia, c’est notre seule piste pour trouver ce fils de grox de Caleb Cox. En position !
    Presque cinq heures interminables passèrent avant qu’une de leur cible se mette en mouvement. Ce fut l’hôtesse. Elle passa de nouveau par l’accès menant au parc extérieur, échangea de nouveau avec le maitre-chien posté en faction puis se dirigea vers la rue principale. Aussitôt alertés par Lek et Derreck, Lexxi la prit en filature, suivie à quelques dizaines de mètres derrière par Felton et Poppy. Cette dernière voxa Lek et Derreck.
    -Que l’un de vous deux reste en position. Le deuxième vient surveiller l’entrée principale. On décroche et on amorce la filature. Terminé.
    Lexxi continuait de suivre la jeune femme dans le quartier, traversant des rues animées et jalonnées d’échoppes ambulantes. D’un simple ordre vocal, elle avait demandé à Artho, le servo-crâne, de prendre un peu de hauteur et de suivre la cible à distance. Au bout de quelques centaines de mètres, elle la vit emprunter des petites ruelles étroites d’un quartier d’habitations et le signifia aussitôt par vox à Felton et Poppy.
    -Bien reçu. Rattrape-là et neutralise-la. On va lui couper la route et l’empêcher de t’échapper.
    Poppy fit signe à Felton de la suivre alors qu’elle observait la configuration des rues. Elle lui indiqua de la suivre et se mit à courir, aussitôt suivie par Felton. Poppy s’élançait à grandes enjambées dans le dédale de ruelles, évitant les obstacles sans peine, ce qui ne fut pas le cas de Felton qui trébucha sur une charrette de marchandise, répandant sa cargaison de ploins au sol, sous les invectives de son propriétaire. Poppy le laissa et le distança. Elle déboucha sur une petite place, en dérapant, au moment pile où Lexxi venait tout juste de rattraper leur cible. D’un coup de crosse bien placé, elle l’assomma net et la rattrapa d’une main, l’empêchant de tomber au sol. Poppy lui signifia de la suivre dans une petite entrée sombre d’un bâtiment d’habitations. Du monde approchait depuis le coin de la rue, mais personne ne les avait encore repérés. Felton finit par les rejoindre de l’autre côté de la ruelle. Elle lui indiqua de vite les rejoindre. Lexxi venait de trouver une petite cour intérieure et posa la fille au sol, contre un muret, au pied d’une petite fontaine, s’assurant que personne ne puisse les voir. Poppy avait sorti ses menottes et était en train d’attacher les mains de la fille dans son dos. Elle fit signe à Felton d’aller surveiller l’entrée, ce qu’il fit. Elle se tourna vers Lexxi.
    -Réveillez-la mais prenez garde, elle va surement se mettre à crier. Empêchez-là, je ne veux surtout pas qu’elle rameute tout le quartier.
    -Vous voulez que je la secoue un peu pour la forcer à parler ?
    Poppy réfléchit, un instant.
    -Oui, faites ça. Mais pas trop fort. Suffisamment pour qu’elle parle mais je ne veux pas non plus la tuer.
    Lexxi flanqua une gifle à la femme qui reprit ses esprits en poussant un petit cri. Aussitôt, elle lui plaqua son autre main sur la bouche et de l’autre la souleva du sol et la plaqua fermement contre le mur. Poppy s’approcha d’elle.
    -Je n’ai pas l’intention de vous faire du mal, mais il est tout à fait possible que ma collègue devienne très violente, auquel cas il me sera difficile de l’arrêter. Shidia. Il va falloir tout me dire sur elle. Et rapidement.
    Prise de panique, la jeune femme se mit à pleurer, gémissant qu’elle ne savait rien, ce qui énerva passablement Lexxi qui se mit à la secouer de plus belle, la frappa contre le mur. Poppy réitéra ses questions avec un ton calme mais montrant tout de même qu’elle n’avait pas l’intention de plaisanter.

    Au bout de la ruelle, Felton continuait de monter la garde, surveillant les allers et venues des passants. À tout moment, quelqu’un pouvait venir dans l’allée et risquait bien d’être témoin de leur manège, alors les choses se compliqueraient sévèrement.
    Lexxi commençait à montrer son impatience et devenait de plus en plus menaçante. La fille finie par craquer et entre deux sanglots, lâcha quelques mots saccadés que Poppy finit par comprendre, la forçant à répéter en articulant. Shidia était une medicae qui avait bien travaillé au Sanitorum Sancta Mater. Pourtant quelques mois plus tôt, elle avait été renvoyée car suspectée d’avoir participé à un trafic d’organes ou quelque chose comme ça. Depuis, elle cumulait plusieurs petits boulots, toujours en lien avec la médecine. La fille n’en savait pas vraiment plus sur le sujet et c’était sans doute vrai car Poppy observait attentivement son langage corporel. Elle avait très peur pour sa vie, cela se voyait clairement. Enfin, à force d’insister, Poppy obtint le nom d’un lieu. Un bar branché dans la Vieille ville. Le Double Vortex. C’était tout ce dont elle avait besoin. Elle fit signe à Lexxi de la relâcher mais cette dernière lui retourna un regard étonné.
    -On ne peut pas… Elle sait maintenant qui on est… On doit la…
    Poppy leva son index pour lui indiquer de ne rien ajouter. Elle sortit sa plaque d’arbitrator et la montrer à la jeune femme, malgré le risque que cela impliquait. Pourtant Poppy était prête à prendre ce risque calculé, justement.
    -Je pense que vous savez forcément ce que signifie cet insigne. Sachez que d’ores et déjà, nous vous connaissons. Nous savons où vous travaillez et où vous vivez. Il nous est désormais tout à fait possible de vous faire arrêter, torturer et exécuter à tout moment. Pourtant…
    Pourtant, vous avez su vous montrer coopérative et avez fait le choix qui s’imposait au nom du Trône de Terra. Vous croyez en l’Empereur, citoyenne ?
    La jeune femme acquiesça de la tête. Poppy rangea son badge.
    -Bien. Voilà pourquoi, dans très Sa grande miséricorde, l’Empereur, dont je suis le bras armé de Son juste courroux, vous accorde une seconde chance. Rentrez chez vous, retournez auprès de votre famille et sachez que nous vous observons. Le moindre faux pas et cette clémence serait alors aussitôt remise en question.
    Lexxi desserra sa prise et la jeune femme glissa au sol, le long du mur, telle une poupée de chiffons, prises de sanglots. Poppy lui défit les menottes puis claqua dans ses doigts, signalant à Lexxi et Felton de décrocher.
    Lexxi la rattrapa.
    -On aurait dû l’éliminer… C’était une imprudence de dévoiler votre identité…
    -C’est un risque calculé, c’est vrai. Mais je fais confiance en mon instinct.
    Elle sortit son paquet de lho avant de poursuivre.
    -Retrouvez notre servo-crâne. Qu’il reste en couverture, à bonne distance.
    Elle se tourna vers Felton tout en s’allumant sa barrette et lui en proposant une qu’elle alluma avec sa propre barrette.
    -Vous avez assuré, finit-il par lui dire.
    Elle ne put s’empêcher de lâcher un sourire, son cigalho entre les dents. Cela l’amusait presque de voir à quel point cela pouvait en coûter à Felton d’admettre qu’il l’appréciait finalement.
    -Je vais faire quelque chose qui n’est pas dans mes habitudes, finit-elle par lui dire.
    Il allait répondre un truc sarcastique et préféra se retenir. Ce qui n’était pas non plus dans ses habitudes. Il se ravisa.
    -Quoi donc ?
    -Te tutoyer… Je peux ?
    Il faillit s’étrangler avec sa fumée, juste en pensant lui lancer une mauvaise blague sur le fait qu’ils n’avaient pas gardé les grox ensemble. Il reprit ses esprits. Bordel… La grande Poppy Sandwall venait peut-être enfin de retirer la matraque énergétique qu’elle avait dans le cul.
    -Ouais, un peu que tu peux… Tu as mis le temps, dis-moi…
    -Je t’ai peut-être mal jugé, au début. L’habitude, sans doute. Mais maintenant je comprends Tsali.
    -A quel sujet ?
    -Laisse tomber. On doit retrouver les autres.
    De retour dans le quartier du temple, en face de l’hôpital, Felton voxa Lek et Derreck.
    -Vous en êtes où sur la surveillance du medicae ?
    -On l’a perdu, répondit Derreck. Lek l’a vu partir à bord d’une ambulance, on n’a pas réussi à la suivre. Et vous, ça a donné quelque chose avec cette fille ?
    -Retrouvez-nous devant le grand bassin, sur la place. Oui, on a peut-être quelque chose. Un bar, le Double Vortex.
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  • Illuminati
    Illuminati

    le 17/12/2022 à 23:52 Citer ce message

    Si Archaea avait assez peu souffert lors de la Guerre de Badab un siècle plus tôt, la récente occupation des troupes du Chaos l’an dernier avait laissé de profonds stigmates dans certaines villes. Infrastructures détruites, temples désacralisés, ressources pillées et population asservie ou massacrée. Plusieurs villages et cités furent cependant moins touchés que d’autres, par pur pragmatisme ou pour des raisons inconnues de la part de l’ennemi. Ce fut le cas de Sandbarra. Seuls les bâtiments des adepta ou édifices religieux furent détruits ou vandalisés et leurs occupants furent tous exécutés. En revanche, la majeure partie de la population fut épargnée et placée sous le joug des forces d’occupation, contrainte de lui fournir ce dont elles avaient besoin.
    Après la libération par les forces impériales, des purges eurent lieu et Sandbarra ne fut pas épargnée même si l’ennemi avait vite abandonné les lieux, laissant la ville entre les mains d’anciens barons de la pègre, les seuls qui furent en capacité à tenir la population et réinstaurer au plus vite, un semblant d’ordre. Loin de se mettre à dos les institutions impériales, ils surent même travailler en bonne intelligence avec eux. Haxt était un de ces barons. Pourtant depuis sa pseudo disparition, la ville était dirigée par ce que les locaux appelaient le Triumvirat. Un trio qui savait habillement se partager l’Officio Mercator, la Guilde Pharmatika et les Cent Yeux. A savoir, le commerce, les fumeries et la sécurité de la ville, raison pour lesquelles le Triumvirat était devenu intouchable.

    Ils venaient de pénétrer dans la Vieille Ville en cette fin d’après-midi. La Vieille Ville était ce quartier situé tout à l’est de Sandbarra, ceint par d’antiques murailles qui tenaient plus lieu de vestiges de nos jours, que de véritables défenses. Ces murs avaient érigé un ou deux millénaires auparavant afin de protéger l’ancienne ville des pillards de la Fraternité Invisible de l’époque. Mais cette période était révolue depuis bien longtemps. Ce quartier jouxtait au nord, les docks, le port et le marché flottant qui étaient le cœur de l’activité commerciale de la ville. Mais la véritable spécificité de ce quartier était ses fumeries, appelées pharasma dans le dialecte local, elles étaient le cœur économique de la Guilde Pharmatika qui se partageait ce quartier avec une autre organisation appelée le Mercator Volubilis, la guilde des établissements de divertissements, ce qui incluaient les bars, les bordels, l’aleatorium mais aussi le Carnivora, les arènes de combat.
    Ils surent se mêler à la foule et passèrent totalement inaperçus. A l’aide d’un plan de la ville, ils trouvèrent le Double Vortex sans peine. C’était un de ces nombreux établissements de la rue des Anges qui donnait sur la Place des Pénitents, vers le marché aux bestiaux. Ils y entrèrent en deux groupes, à quelques minutes d’intervalle. Poppy et Lek s’installèrent au comptoir et commandèrent un verre de chanalain local, rouge et fruité. Felton, Derreck et Lexxi prirent une table dans la salle et commandèrent du raenka et un plat du jour, du steak de grox servi avec des cassams frits, arrosés d’une sauce noire aux truffes birri. Lek et Poppy prirent la même chose au comptoir.
    L’établissement était aux trois quarts pleins, avec une clientèle composée en majeure partie de citoyens issus de la classe moyenne, voire supérieure. Ce n’étaient pas des ouvriers ni des marins ou dockers, cela se voyait tout de suite à leurs vêtements de bonne qualité. Il devait s’agir de scribes, de savants, d’artisans, de marchands ou de scientistes.
    Faisant mine de se mêler à la clientèle, ils étudièrent les lieux ainsi que ses occupants, restant attentifs quant à la description de leur cible, cette medicae du nom de Shidia. L’hôtesse leur avait dit qu’elle était brune, avec un bras gauche augmentique et des tatouages. Personne ne semblait correspondre à la description aussi décidèrent-ils d’aller poser quelques questions. Lexxi et Poppy trouvèrent des joueurs dans un petit salon privé et proposèrent de les rejoindre pour quelques parties de cartes des Rois du Suicide. Après avoir perdus plusieurs mises, elles finirent par regagner leurs gains avec même un petit extra. En revanche, elles n’apprirent pas grand-chose, car ici, pas de medic en dehors du fait que le Carnivora offrait de superbes combats de gladiateurs contre des créatures exotiques. Elles notèrent l’idée pour plus tard, se demandant si cette Shidia pouvait aussi s’y trouver pour y exercer ses talents medicae. La piste méritait alors de s’y intéresser.
    De retour au comptoir, Poppy y retrouva Lek alors en pleine conversation avec le barman, un certain Roberto. Lek était en train de lui parler de cette Shidia, prétendant qu’il avait rendez-vous avec elle et qu’il l’attendait depuis un moment. Le barman n’avait pas l’air d’en savoir plus et semblait tout ignorer de cette fille, pourtant lorsque Poppy vint se mêler de la conversation et qu’elle lui joua un petit numéro de charme, son attitude changea quelque peu. Ses années d’expérience d’enquêtrice éveillèrent en elle son sixième sens. Avec Lek, Roberto avait juste l’air de répondre avec un certain détachement, avec tact et politesse mais tout en l’écoutant d’une oreille distraite sans chercher à même retenir les questions. Poppy sût tout de suite capter son attention avec quelques sourires, un rire et un regard qui se voulait captivant au point d’en éclipser Lek de la conversation. Poppy n’avait pas dans ses habitudes de charmer les suspects qu’elle comptait interroger, pourtant depuis qu’elle avait rejoint les Ordos – depuis peu en réalité – elle comptait bien employer cette nouvelle arme qu’elle n’avait même jamais employé au sein de l’Arbites. Certes, elle s’était loupée avec Quinston Grish, cherchant à y aller un peu trop fort avec lui. De vieux réflexes issus d’un conditionnement plutôt viril et aussi un manque de pratique, mais rien de plus. Roberto était sur le point de céder pourtant, elle sentait bien que quelque chose en lui le trahissait. Il en savait plus qu’il ne voulait bien le dire et il était mal à l’aise ou peut-être juste surpris. A l’évocation du nom de Shidia, son œil droit se mettait à légèrement cligner et son sourire devenait alors figé. Il savait qui elle était mais prétendait pourtant tout le contraire, sans doute par peur. Ses doutes se confirmèrent lorsqu’un gaillard solidement bâti, sorte de videur, portant une caisse de bouteilles à Roberto, vint lui glisser quelques mots discrètement. Poppy ne sut dire de quoi ils parlaient, pourtant elle était sûre que c’était en rapport avec ses questions et celles de Lek. Voyant qu’elle risquait d’attirer un peu plus l’attention à cause du regard appuyé lancé par le nouveau venu, elle préféra sortir du bar prendre l’air. Lek était dehors aussi. Ils avaient laissé Artho, leur servo-crâne, en surveillance juste au-dessus des bâtiments.
    A l’intérieur, Felton et Lexxi jouaient aux dés tous les deux après leur repas, tout en cherchant à écouter les conversations des autres tables. Pourtant ils n’apprirent rien de bien intéressant. Derreck s’était assoupi, ou bien méditait. Felton activa son microvox.
    -Vous êtes où ? Vous avez obtenu quelque chose ?
    -Le barman. Il sait quelque chose, répondit Poppy.
    -Tu proposes quoi ? On l’attend après son service lui aussi ?
    -Peut-être bien. Mais restons prudent, un autre type qui est sorti d’une pièce de derrière le bar est venu nous interrompre. Il ne me disait rien qui vaille.
    -C’est quoi cette pièce derrière ? Les cuisines ?
    -C’est une autre pièce, apparemment. Les cuisines sont de l’autre côté, de là où venaient les serveuses.
    -On peut demander à Artho de scanner la zone ? Demanda Lexxi.
    -Bien vu. Je m’en occupe, coupa Poppy.
    Elle voxa le petit servo-crâne augure et lui commanda de se rapprocher. La pièce qui l’intéressait donnait côté rue et aucune porte ni fenêtre ne permettait de voir de quoi il s’agissait. Elle lui demanda de sonder derrière le mur et de lui décrire toute forme de vie mais aussi toute forme de trace d’énergie, telles que des augmentiques. Le servo-crâne s’exécuta et entreprit de sonder le mur en question.
    ++Aucune… trace de vie… détectée++
    -Peux-tu vérifier s’il y a un sous-sol ? Même requête.
    ++Analyse en cours…++
    ++Analyse terminée++
    ++Sous-sol confirmé… Traces de vie confirmée… Augmentiques confirmés++
    -Combien de vie ?
    ++Six vies. Deux en phase terminale++
    Perplexe, Poppy relaya l’information par vox à ses équipiers.
    -Merde, c’est quoi ce bordel encore dans ce sous-sol ? Lâcha Felton.
    -Ce ne pourrait pas être une réserve ? Des cuisiniers, des animaux que l’on abat ? Demanda Lexxi.
    Poppy interrogea de nouveau Artho.
    -Précision sur les races des types de vie ?
    ++Race humaine confirmée++
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  • Illuminati
    Illuminati

    le 04/01/2023 à 13:37 Citer ce message

    Poppy, depuis la rue où elle attendait, activa son microvox.
    -Felt, tu me reçois ?
    -Oui ?
    -Tu as toujours la mouche-pix avec toi ?
    -Je l’ai, pourquoi ?
    -Tâche de l’envoyer voir ce qu’ils trament dans la cave. Des fois que cette Shidia soit là, notamment.
    -Ok… Va surtout falloir que je la fasse entrer. Ils ont des portes et je ne sais pas quelle est celle qui mène au sous-sol.
    -On va tenter une diversion, lâcha Lexxi à son tour. Ça devrait laisser le champ libre à Felton. Poppy ? Surveille l’entrée et la rue avec Artho, si du monde approche, tu nous préviens.
    -D’accord… Mais pas de bêtises. Vous y allez en douceur et en discrétion.
    -T’inquiète, on gère.

    Lexxi et Derreck se levèrent de leur table et vinrent proposer une partie de cartes à la table située derrière eux où étaient attablés deux clients déjà passablement éméchés. Felton resta à sa place et commença à observer les alentours, notamment la porte menant aux cuisines, guettant une occasion. De son côté, Lek qui était sorti quelques minutes, resta non loin d’une des fenêtres et surveillait ainsi le comptoir.
    Comme l’avait prévu Lexxi, la partie de cartes dégénéra volontairement alors qu’elle accusa ouvertement les deux autres de tricher. Le ton monta, les cartes volèrent et l’un d’eux chercha à empoigner la Catachan, ce qu’elle attendait justement. Elle le souleva et l’envoya voler sur la table voisine qu’il écroula, brisant les verres et bouteilles et renversa les clients installés là. Son collègue se jeta sur elle et une bagarre se déclencha aussitôt, impliquant rapidement trois tablées de clients. Derreck si faufila dans la bagarre, générant un champ télékinétique autour de lui et en profita pour bousculer un peu plus de monde au passage. Les serveuses tentèrent de s’interposer mais en vain, la pagaille était totale. Le barman se précipita dans la réserve pour aller chercher de l’aide. Voyant la confusion et le personnel complètement débordé, Felton en profita pour se diriger vers la porte menant aux cuisines, se tenant prêt à utiliser la mouche-pix. Ce fut le moment où Lek décida d’intervenir. Il entra de nouveau dans le bar, sauta avec souplesse par-dessus le comptoir et entra dans la réserve, espérant ainsi neutraliser le barman. Il se trouva malheureusement nez-à-nez avec le gros bras de tout à l’heure, celui qui était venu parler avec le barman justement. A la différence qu’à présent, il était armé d’un fusil à pompe et comptait bien s’en servir. Lek ne lui en laissa pas le temps. Il dégaina un de ses Carnodons et lui flanqua un coup de poing en plein visage avec son bras augmentique. Le type était costaud et tituba. Une marque sur le visage, il encaissa le coup et chercha à frapper Lek en retour avec la crosse de son arme. Ce fut le moment où le barman jaillit de la cuisine juste à côté, une bouteille de Dammassine à la main, la fracassant sur le crâne de Lek. La bouteille éclata et il resta sonné, le visage dégoulinant et le cuir chevelu entaillé.
    Depuis la porte des cuisines qui donnait dans la salle, Felton vit surgir deux autres gros bras tatoués, avec des têtes de brutes. Le premier portait un fusil à pompe et le second avait un bras augmentique et une barre de fer. Ils se mirent à crier en direction de la bagarre, bien décidés à séparer les clients. Felton, resté dans un coin, profita qu’ils passent à côté de lui sans faire attention à sa présence pour se faufiler dans leur dos et entra en cuisine.
    Dans la réserve, le gros costaud se jeta alors sur Lek pour le désarmer mais il lui flanqua de nouveau son poing augmentique en pleine face et l’envoya s’étaler au sol. Le barman allait ramasser le fusil au moment où Felton fit irruption, son Tronsvasse à la main, le type lâcha le fusil et Felton l’assomma d’un coup de crosse mais un des cuistos, un gros gaillard, venait de les voir depuis les cuisines. Il s’enfuit en courant et en appelant de l’aide, aussitôt poursuivit par Felton qui ouvrit le feu et le faucha net. Le type s’effondra au sol. Une autre porte au fond de la cuisine s’ouvrit dans un grand fracas, laissant apparaitre une matrone avec des bras épais comme le torse de Felton. Elle brandit une masse d’arme, bien décidée à lui fracasser le crâne avec. Voyant qu’elle se ruait vers lui, il ouvrit les pans de son manteau et tira son sabre énergétique.
    Dans la salle, Lexxi continuait d’alimenter la bagarre mais Derreck vit la menace que représentaient les deux nouveaux venus. Il lança un de ses pouvoirs sur celui au fusil qui s’en prenait à Lexxi. Ce dernier allait se jeter sur elle mais trébucha et s’étala de tout son long. L’onde de choc télékinétique de Derreck fut telle qu’elle déclencha un son subsonique qui frappa tout le monde. Les murs tremblèrent et les vitres volèrent en éclat dans tout le quartier tandis que les clients et les gros bras furent sonnés, rendus sourds à cause d’acouphènes qui leur vrillaient les tympans. Derreck ne fut pas affecté et Lexxi parvint à encaisser mais ce ne fut pas le cas de Felton qui tomba à genoux, sonné et sourd. Ce fut le cas aussi de Poppy, bien que dans la rue, le choc la frappa de plein fouet et elle resta sonné au sol, incapable de réagir pendant plusieurs dizaines de secondes. Tandis que tout le monde était sonné dans la salle, Lexxi fit signe à Derreck d’aller prêter main forte à Lek dans la réserve. Elle se dirigea vers la porte menant aux cuisines, l’ouvrit d’un coup d’épaule tout en dégainant son long poignard de Catachan. La matrone était juste là, en train d’asséner des coups de barres à Felton qui, bien que sonné, parvint à dévier les coups et sectionna même la masse d’arme en deux à l’aide de son sabre énergétique. Lexxi s’interposa et plongea les trente centimètres de sa lame dans le double menton de la furie. Le sang coula comme une fontaine. Ses yeux se révulsèrent et elle s’effondra dans un fracas de vaisselle qu’elle emporta avec elle. Toujours un peu sonné et sourd, Felton avait du mal à reprendre ses esprits mais Lexxi lui fit signe de la suivre.
    Lek et Derreck venaient de descendre au sous-sol et ils avaient trouvé quelque chose. Ils décidèrent de les rejoindre. Du monde s’activait dans une sorte de laboratoire de savant fou. Quelqu’un se servait d’une scie circulaire industrielle pour y découper des corps humains, de sorte que le bruit semblait couvrir ce qui se passait juste au-dessus. De plus, les types en question étaient de dos et ne prêtaient pas vraiment attention aux escaliers, surement confiants du fait que du monde était là pour les surveiller. Cela leur laissa un élément de surprise. Lek, tapis dans l’ombre des escaliers tenait en joue deux des types. Il avait dans sa ligne de mire une sorte de medicae heretek assisté de quatre servitors bardés d’aumentiques dont deux plutôt menaçants. Ils étaient affairés à faire le Trône sait quoi sur des captifs qu’ils dépeçaient. Deux prisonniers encore en vie, un homme et une femme, étaient enchainés dans un coin de la pièce, visiblement terrorisés et en état de choc, bien conscients d’être les prochains à finir découpés comme du bétail. Il allait ouvrir le feu, lorsque les autres vinrent les rejoindre. Lexxi lui tapota l’épaule tout en se saisissant que l’épée tronçonneuse qu’elle portait dans le dos. Elle lui fit signe de la couvrir tandis qu’elle se faufila dans la pièce vers le servitor le plus proche. Elle activa sa lame et l’ouvrit en deux sans même qu’il eut le temps de s’en rendre compte. Le sang gicla. Les autres réagirent alors aussitôt, notamment le medicae qui vif comme l’éclair, déploya toute une panoplie de mécadendrites composées de lames tranchantes et de scies circulaires ou tronçonneuses. Il se rua vers Lexxi au moment où Lek ouvrit le feu, blessant un des servitors. Felton, sa lame à la main, vint prêter main forte à Lexxi voyant que cette dernière était en fâcheuse posture. L’heretek venait de la toucher et elle ne pourrait jamais parer toutes ses attaques. Derreck tenta d’utiliser un de ses pouvoirs sur lui mais sans succès. De son côté, Lek continuait de faire feu sur les servitors, les mettant hors d’état de nuire les uns après les autres, avant qu’ils ne chargent ses compagnons.
    Un coup de scie circulaire ouvrit le crâne de Lexxi et un autre faillit bien l’éviscérer totalement. En sang, elle finit par s’effondrer alors que Derreck saisi d’effroi en la voyant tomber, était touché à son tour, mais sauvé en partie grâce à son aura télékinétique. Même Felton se prit des coups de lames qui lui entaillèrent le bras profondément bien qu’il parvienne à toucher sérieusement leur adversaire. Cela laissa une occasion à Derreck qui se ressaisit, prit de douleur, il dégaina son épée de force et transperça l’heretek avec, mettant ainsi fin au combat. Il le laissa au sol et se précipita vers Lexxi plutôt mal en point pour tenter de la sauver. Felton en profita pour fouiller rapidement les lieux alors que Lek arrachait les mécadendrites de l’heretek. Ils mirent la main sur un medikit et des stimms, ce qui permit d’en injecter un à Lexxi. Elle était consciente mais mal en point. Derreck usa de ses pouvoirs de guérison sur elle, effectua quelques bandages de fortune et l’aida à se remettre debout. Malgré cela, elle était au plus mal.
    Tandis que Lek terminait de neutraliser l’heretek, en vue de le faire parler, Felton cherchaient à comprendre à quoi servait ce laboratoire. Il trouva un carnet avec des formules et des notes.
    -De quoi ça parle ? Lui demanda Derreck pendant qu’il aidait Lexxi.
    -Ils fabriquent une sorte de drogue apparemment, à partir des captifs… Ils appellent ça du ghast. Je ne sais pas ce que c’est mais ça pue l’hérésie.
    -C’est une drogue illégale, souffla Lexxi. C’est synthétisé à partir de tissus cérébraux de psykers émergents…
    -Merde…
    Derreck hocha la tête, tandis qu’il venait de réaliser que les deux captifs, terrorisés dans un coin, étaient bel et bien des psykers émergents. Les autres corps, dépecés sur les tables en étaient aussi.
    -Ils leur prélevaient le cerveau pour en extraire certaines glandes afin d’en distiller une hormone… Le reste des corps étaient alors découpés et…
    -Et me dit pas que le steak de grox qu’on a mangé tout à l’heure, dans la salle, c’était du… ? C’est dégueulasse ! Lâcha Felton qui se retint de ne pas vomir.
    Derreck lui lança un regard noir.
    -Remontez avec Lexxi et contactez Poppy pour qu’elle nous sorte de là.
    -Et toi ?
    Derreck laissa luire la lame de son épée de force.
    -Je vais faire le ménage. Je vous rejoins dans une minute.

    Felton passa devant, laissant Lek aider Lexxi à monter. Il voxa Poppy.
    -On sort, tu es où ?
    -J’ai décroché, c’est la confusion dans le quartier. Vous deviez faire ça discrètement, bordel ! Vous avez déclenché une guerre ou quoi ?
    -Oui, bin on a dû improviser…
    -Improviser ? Avec Lexxi aux commandes, j’imagine ? Tu plaisantes ou quoi ? A quoi ça sert que je me casse le cul à monter un plan pour qu’on gère les missions toi et moi ? Va falloir vous dépêcher et rapidement parce que ça grouille de monde maintenant et j’imagine que tout le bar a vu vos têtes à présent. Y a une diversion qui va vous donner moins d’une minute pour sortir de là. Je suis rue Poissonnière, au 55. Terminé.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 10/01/2023 à 22:31 Citer ce message

    Sandbarra
    Quartier du port
    Tempus estimare 005.021M42– 20h05

    Profitant de la confusion totale qui régnait aux abords du Double Vortex, ils se faufilèrent parmi les clients hagards et les badauds qui venaient prêter main forte aux blessés à évacuer. Parvenus au bout de la rue, ils se hâtèrent de décamper, voyant que les gardes des Cent Yeux et les secours arrivaient de partout. Ils reprirent leur souffle dans une ruelle tandis que Lek et Felton cherchaient l’adresse communiquée juste avant par Poppy. Lexxi continuait de saigner comme un grox malgré ses bandages de fortune. Elle avait du mal à les suivre, aussi Derreck l’aidait en la soutenant. Felton et Lek trainaient, pour leur part, le medic heretek inconscient et grièvement blessé qu’ils avaient capturé.
    -C’est vers le port, à quelques centaines de mètres. Ne trainons pas, lâcha Felton.
    Ils se faufilèrent par des petites rues, évitant le plus possible les regards puis finirent par trouver l’adresse. Il s’agissait d’un petit immeuble à la façade blanche défraichie, de six étages et comptant plusieurs dizaines de habs.
    -Tu es sûr que c’est bien là ? Lui demanda Lek.
    -Ouais, l’adresse correspond. Je vais voxer Poppy, pendant ce temps, va jeter un coup d’œil, idée qu’il n’y ait pas de coup tordu.
    Lek se contenta de hocher la tête puis se dirigea vers l’entrée du bâtiment. Après avoir vérifié les étages, il ne nota rien de bien inhabituel. Comme dans tous les habs, des jeunes trainaient dans les escaliers, des enfants jouaient et quelques citoyens allaient et venaient. Des mères de famille pour la plupart et des vieux. Faisant mine de passer le plus discret possible, ils gravirent les étages en se séparant en petits groupes. Lek avait trouvé l’appartement et Felton venait d’avoir la confirmation que c’était bien là. Il toqua à la porte et Poppy leur ouvrit.
    -Vous avez été suivis ? Se contenta-t-elle de leur demander.
    -Je ne pense pas, répondit Lek.
    Elle lui lança un regard noir et insistant.
    Felton attrapa Lek par la manche.
    -On a pris nos précautions, mais elle a raison, on ferait bien de nous en assurer. On va aller voir.
    Voyant les blessés, Poppy leur fit signe de les installer dans le salon. Elle leur désigna le corps qu’ils trainaient avec eux.
    -Qu’est-ce que c’est que ça ?
    -C’est le medic heretek qui découpait des psykers à la cave du Double Vortex, lâcha Lek.
    -Et vous trouvez ça malin de l’amener ici ?
    -On va le faire parler, figure-toi, ajouta Felton.
    -Je suis prête à parier que ses petits camarades vont être enchantés de le savoir. Bien, je vous laisse cinq minutes, j’ai un appel vox à passer.
    Une fois Lek et Felton redescendus et assurés que la situation était calme en bas de l’immeuble, ils remontèrent jusqu’à l’appartement.
    Poppy vint les retrouver dans le salon et leur passa aussitôt un savon à cause du pétrin dans lequel ils venaient de tous se fourrer.
    -A quoi ça sert que je monte un plan pour que tout dégénère juste après ? Entre une bagarre générale, des tirs dans tous les sens, Lexxi qui a bien failli y passer et Derreck qui nous fait un festival warp, tout va bien… Je ne vais même pas parler du fait que les propriétaires de ce laboratoire de… De drogues interdites vont évidemment passer l’éponge. Et vous me ramenez ce… Trône, je ne sais même pas qui est ce type à moitié mort, dans la pièce à côté… Sans compter que la plupart des gens dans ce bar ont vu vos têtes, vous saisissez ?
    -On est tombé sur un laboratoire clandestin avec des psykers émergents… On ne pouvait pas laisser passer ça, lâcha Lexxi.
    -Et ces psykers, vous en avez fait quoi, en parlant de ça ?
    -Derreck les a tués.
    -Je leur ai planté ma dague psykana en plein cœur, leur dit-il.
    Elle jeta un coup d’œil au psyker qui donnait l’impression d’être renfermé ou mal à l’aise. Tuer ses semblables avait dû lui couter, quoi qu’il en soit sur cette décision, il avait fait le bon choix.
    -Ça va, on a capturé leur savant fou, on a détruit leur labo et on a récupéré un carnet avec des informations. C’est pas si mal, non ? Et puis des gens ont vu ta tête aussi, lâcha Felton à Poppy en levant les yeux au plafond.
    -A la différence que moi j’étais dehors au moment de tout votre foutoir.
    -Tu as bien parlé au barman, avec ton numéro de charme. Tu lui as posé des questions sur Shidia, non ? Donc il t’a vu.
    -Non. Ça c’est Lek. Je me suis juste contenté de me mêler de leur conversation. Bref… Je ne sais pas si vous réalisez mais ce genre d’initiative à tirer dans le tas, risque bien de foutre en l’air toute notre opération. C’était exactement ce qu’on reprochait à Rico, en plus. On est à Sandbarra depuis quelques heures et déjà, vous tirez dans le tas dans un bar de la pègre… Si nous sommes grillés, nous aurons de la chance de pouvoir quitter la ville en un seul morceau.
    Elle laissa passer quelques secondes avant de poursuivre. Elle adoucit son ton au passage.
    -Mais bon, je ne suis pas primus de cette équipe, je m’emporte un peu, mais je me contente d’exposer mon point de vue. Ce que je veux dire c’est que ce genre de situation peut rapidement nous échapper. Les prochaines heures seront d’ailleurs déterminantes pour savoir si notre couverture est compromise.
    Felton et les autres finirent par acquiescer.
    -D’ailleurs en parlant de couverture… Comment tu as eu connaissance de cette planque ? Lui demanda Felton. Elle est superbe. Y a combien de pièces ? Cinq, six ?
    -C’est Tsali qui nous l’a communiqué pendant que vous étiez en plein combat. Elle a organisé ça pour qu’on ait un point de chute. J’ai été contacté par Iceman de l’équipe Tenebrae. Au moins deux des leurs sont ici justement à Sandbarra. Ils devraient prendre contact avec nous en cas de problème, c’est pour ça que j’ai dû…
    Lek l’interrompit soudain, leur montrant une des plantes vertes dans le salon, qui était en train de faner tandis que se répandait une odeur de soufre. Ils se tournèrent soudain vers Derreck, l’interrogeant du regard et redoutant qu’il soit en train d’utiliser le Trône savait quel genre de satané pouvoir. Il secoua la tête par la négative tandis qu’ils eurent cette désagréable impression de sortir d’une sorte de torpeur, comme émergeant d’une sieste profonde avec cette désagréable odeur qui flottait dans l’air. Lek et Felton furent les premiers à réagir, dégainant leurs armes et se précipitant dans la chambre à côté, là où ils avaient laissé l’heretek inconscient. Comme ils pouvaient s’y attendre, il ne se trouvait plus là. Felton fit signe à tout le monde de se déployer dans l’appartement afin de le trouver. Lek essayait de suivre des traces au sol, qu’il prit tout d’abord pour du sang mais en le touchant du doigt, le liquide était sombre, presque noir.
    -De l’huile ? Lui demanda Felton.
    -Non, lâcha Lexxi qui venait de reconnaitre de quoi il s’agissait. En tant qu’agent du Reliquaire, elle avait eu l’occasion de travailler un peu avec Ordax-Kappa, le technoprêtre et elle reconnut la substance qui l’avait justement fasciné dans son laboratoire.
    -C’est du sang noir. Des nanotechs utilisés par des implants autosanguins.
    -Des quoi ? Lui demanda Felton.
    -Ce fils de grox se régénère grâce à des implants augmentiques.
    -Trouvez-le ! cria Poppy, s’il nous échappe, on pourra tirer un trait sur cette planque et sur notre seule chance de trouver Cox.
    Tandis qu’ils fouillaient chaque pièce, Poppy ouvrit la fenêtre qui menait vers un escalier métallique de secours donnant sur une arrière-cour. Elle se pencha et vit leur homme en bas de la rue, trottinant en boitant et s’engageant vers une artère à une quarantaine de mètres de là.
    -Par ici ! Se mit-elle à crier vers ses compagnons. Trône, mais comment il a fait pour nous fausser compagnie aussi vite ?
    -Il a fait usage d’un pouvoir psychique, répondit Derreck. Sans doute suite à ses expériences…
    -Je préfère ne même pas savoir comment c’est possible, répondit-elle en enjambant la fenêtre et en sautant vers les escaliers. Felton et Lek la suivirent. Malgré les mises en garde et ses blessures graves, Lexxi décida de les suivre avec Derreck. Son état ne lui permit cependant pas de les rattraper. En quelques secondes, Poppy, Felton et Lek avaient dévalé les escaliers quatre à quatre, avaient sauté les derniers mètres et étaient déjà dans la rue à courir. Poppy retrouva les traces sans peine et finit par le voir à plus de cinquante mètres de là. Elle dégaina son arme, malgré les badauds mais resta prudente. L’hetetek venait de se retourner. Ses yeux se mirent à luire d’une aura inquiétante et elle sentit aussitôt comme des doigts qui cherchaient à pénétrer dans ses tempes. Loué soit le Trône, un conditionnement passé avait fait d’elle un esprit purifié, effaçant les souvenirs d’une ancienne vie sans doute à cause d’évènements dont elle n’aurait jamais dû être témoin. Cette mémoire effacée lui avait laissé des verrous engrammatiques dont les fonctions étaient justement de protéger en partie son esprit de toute tentative d’intrusion. L’heretek trébucha puis repartit en courant, voyant que son plan ne menait à rien, en revanche, Poppy resta quelques secondes, déstabilisée, à entendre des échos de voix qui résonnaient dans sa tête. Perturbée, elle ferma les yeux et serra les dents, cherchant à se protéger d’une telle malédiction. Felton la doubla en courant et prit aussitôt l’heretek en chasse, suivit de Lek. Leur cible se dirigeait dans une petite rue marchande. Il pénétra en trombe dans une boutique, renversa des étals et des paniers de fruits et légumes dans la foulée, sous les cris des marchands affolés. Felton sauta par-dessus les obstacles et continua sa course mais Lek se prit les pieds dans un panier et chuta dans la boutique. Le laissant derrière lui, Felton finit par rattraper l’heretek dans une cour, à quelques ruelles de là. Voyant qu’il n’y avait pas de passants, il dégaina son Tronsvasse à silencieux, dérapa au sol et ouvrit le feu en rafale, au juger. Une seule balle le toucha à la jambe. La balle éclatante, lui arracha le muscle de la cuisse dans une bruine sombre. L’heretek, déjà blessé, fut projeté en avant et s’écroula au sol d’où il ne bougea plus. Poppy vint le rejoindre en reprenant son souffle, juste au moment où Felton était agenouillé en train de le fouiller. Il venait de ramasser trois fioles qu’il lui montra avant de les fourrer dans sa poche.
    -Joli tir, lui dit-elle.
    -On fait quoi de lui ?
    Pour toute réponse, Poppy pointa son Carnodon vers la tête de l’heretek et tira à bout portant, lui explosant la boite crânienne dans une giclée épaisse.
    -Voilà ce qu’on fait avec un hérétique. On doit filer. Ça va attirer du monde.
    Elle observait la dépouille et nota son bras augmentique qui dissimulait une arme. Sans doute un radiant. Elle se saisit du bras et se mit à tirer dessus de toutes ses forces, tout en plaquant son pied sur son épaule. Elle espérait ainsi que l’augmentique apporte des réponses ou serve tout simplement de monnaie d’échange avec Ordax-Kappa au Reliquaire.
    -Aide-moi…
    Felton tira avec elle et ils finirent par lui arracher la prothèse augmentique dans un craquement sinistre. Quelques secondes plus tard, ils s’éclipsaient vers les autres rues et finirent par retrouver les autres à la plaque. Poppy posa le bras augmentique dans la cuisine, ainsi que les fioles puis attrapa un pack de bières dans le frigo. Elle en distribua à tous. Pendant ce temps, Lexxi s’était allongée dans une des chambres et venait de s’endormir. Ils se posèrent tous dans les canapés du salon pour faire le point et souffler un peu. Au bout d’un moment, Poppy interrogea Felton du regard.
    -Tu avais parlé d’un carnet retrouvé sur l’heretek, non ?
    Il lui fit signe que oui, tout en fouillant dans ses poches. Il en ressortit un calepin en entreprit de la parcourir.
    -Ça parle de quoi ? lui demanda-t-elle.
    -Du ghast et de comment ils synthétisent leur merde psychique à partir de cerveaux de psykers.
    -Charmant… On a le nom de cet heretek, au fait ?
    -Attends… Je crois l’avoir vu à un moment…
    Il tourna les pages et finit par trouver.
    -Il s’appelle… Enfin, s’appelait Walder Gorimov.
    -Parfait… Le nom doit bien être connu et devrait nous fournir une piste.
    Elle lui demanda le carnet qu’elle parcourut à son tour avec attention, tombant à un moment sur un des marque-pages. Un simple morceau de papier déchiré sur lequel était inscrit en lettres manuscrites « Appeler Shidia – 525-578-687 ». Elle leur montra le papier.
    -C’est quoi ces numéros ? Demanda Derreck.
    -Ça, c’est un numéro vox. Notre Shidia a l’air bien plus impliquée dans cette histoire de psykers qu’on ne le pensait… On a donc son numéro, reste à savoir si on l’appelle maintenant.
    -Et pourquoi pas ? Lâcha Lek.
    -Le truc c’est de savoir pour qui on se fait passer si on l’appelle et pourquoi, répondit Felton en terminant sa bière. Mais j’ai ma petite idée…
    -Développe ?
    -On peut déjà oublier l’idée de se faire passer pour ce… Walder Gorimov. Si jamais ils se connaissent bien, ça tombera à l’eau. En revanche, on peut se faire passer pour un type qui bosse pour lui. Si elle est impliquée, elle va savoir rapidement ce qui s’est passé au Double Vortex, elle va donc réaliser que ça barde en ce moment mais si on attend trop, on perdra l’effet de surprise.
    -Et donc ?
    -Et donc, on l’appelle. On se fait passer pour un des hommes de Gorimov et on lui dit qu’elle est en danger et qu’on doit la retrouver… je ne sais pas où, on lui donne une adresse.
    -Ou on la laisse plutôt choisir une adresse, non ? Elle sera ainsi plus en confiance.
    -Et si elle nous dit « l’endroit habituel » ? On aura l’air malin, tiens.
    -Non, on lui répondra que l’endroit habituel est compromis et c’est là qu’on proposera une autre adresse. Un bar, je sais pas ?
    Ils sortirent la carte et finirent par trouver une adresse. Poppy fit un signe à Felton.
    -Vas-y, appelle-là et fait comme on a dit.
    Il composa la fréquence depuis son vox et laissa sonner, activant le haut-parleur. Une femme finit par décrocher.
    -Accueil du Mortifex, bonsoir ?
    -Oui… Heu, bonsoir… Je souhaiterai parler à Shidia, s’il vous plait.
    -Désolé, mais le docteur Coppertown est actuellement occupé. Souhaitez-vous que je lui laisse un message ?
    -Heu… Non… Je vous remercie. Au-revoir.
    Felton raccrocha et lança un sourire à ses compagnons.
    -On a son nom et on sait maintenant où elle bosse.
    -A la morgue, compléta Lek.
    -Et elle y travaille justement en ce moment, ajouta Poppy.
    -Vous aviez quelque chose à faire de votre soirée ? Lâcha Felton.
    -Prend la carte et regarde où c’est, on va y aller tout de suite.
    -Qu’est-ce qu’on fait de Lexxi ? Leur demanda Derreck. On ne va pas la laisser là, toute seule ?
    -En temps normal, ce serait imprudent, en effet, mais vu son état, elle ne pourra pas nous accompagner. On n’a pas le choix de la laisser là. Je vais laisser Artho en surveillance.
    -Je pourrais rester avec elle ? Demanda Derreck.
    -Ce serait plus prudent, mais on risque d’avoir besoin de toi là-bas… Je vais laisser un message aux gars de Tenebrae, idée de voir s’ils peuvent nous filer un coup de main ou laisser quelqu’un en couverture. On décolle dans cinq minutes.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 20/01/2023 à 21:39 Citer ce message

    Sandbarra
    Vieille Ville, quartier des Pharmatikas.
    Aux abords de l’Officio Mortifex.
    Tempus estimare 005.021M42– 22h13

    Il gara sa moto dans la rue juste en face, traversa et vint trouver Poppy. La nuit était tombée et un vent chaud du large amenait une certaine douceur. Ils s’étaient déjà rencontrés, quelques mois auparavant au Reliquaire par l’intermédiaire de Jézabel. Iceman n’était pas son véritable nom, mais plutôt un alias ce qui était la norme dans l’Aeronautica, à ce qu’on disait. Poppy avait eu l’impression qu’il était plutôt un type carré. Bien bâti, il affichait un solide bras augmentique et un blouson de pilote décoré d’écussons de la navale. Ancien officier, ancien pilote de Thunderbolt et de Valkyrie, même s’il trimballait une sale réputation de tête brûlée comme tous les pilotes de l’Aeronautica et une sale réputation comme tous les hors mondes de toute façon, il avait surtout quelques solides atouts dans sa manche.
    -On a failli vous attendre, Iceman, lâcha Poppy tout en jetant le mégot de son cigalho d’une pichenette.
    -Je suis repassé à la planque, pensant vous y trouver. C’est la catachan que vous avez laissez qui m’a dit où vous trouver. Un de nos gars est resté sur place, au cas où. Donc on a quoi, là ? Une personne à exfiltrer ?
    -Pas nécessairement. Notre cible est une medic. On doit s’assurer qu’elle est déjà sur place.
    -Et si c’est le cas ?
    -On doit surtout récupérer des informations qu’elle pourrait avoir sur Caleb Cox. Notre priorité est donc de l’interroger.
    -D’accord… On procède comment ?
    -Venez, je vous présente le reste de l’équipe.
    Elle le conduisit vers une ruelle juste à côté où les attendait le reste de l’équipe, resté en surveillance juste en face de la morgue. Iceman les avait déjà croisés aussi au Reliquaire. Il salua tout le monde.
    -On dispose d’un servo-crâne augure et d’une mouche-pix que l’on compte envoyer pour de la prise d’information, lâcha Felton.
    Iceman émit un petit sifflement.
    -C’est bien, vous êtes équipés… Je pense qu’il faudrait déjà identifier les différents accès ou sorties, non ? Des fois que la cible nous file entre les doigts.
    -C’est ce qu’on pensait faire, répondit Felton. Dès qu’elle sort, on la suit et on la cueille.
    -Et si elle ne sort pas avant demain ?
    -On va déjà faire un repérage des lieus, on avisera ensuite, lâcha Poppy.
    Elle désigna Felton.
    -Trouve un moyen de faire entrer ta bestiole dans le bâtiment. On doit savoir si la cible est là et ce qu’elle fait.
    -Et si elle a du soutien ? Des gardes du corps, des hommes de mains ? On gère ça comment ? Lâcha Lek, tout en effleurant les crosses de ses Carnodons de ses doigts gantés.
    -Je vais envoyer Artho en reconnaissance du bâtiment. Ses augures devraient nous signaler toute menace potentielle.
    Elle voxa le servo-crâne qui flottait à quelques mètres, au-dessus d’eux et lui commanda de survoler le bâtiment et de lui communiquer le nombre de personnes s’y trouvant, ainsi que celles disposant d’augmentiques ou d’armes à feu. Le servo-crâne émit une série de petits sifflements électroniques avant de partir accomplir sa mission. Il lui fallut quelques minutes pour analyser la zone puis lui renvoyer les informations.
    -Treize personnes dont huit armées… Commenta Poppy.
    -C’est beaucoup, je trouve, ajouta Lek.
    -Trop de gens armés, c’est pas normal, répliqua Felton.
    -Ce pourrait être des gardes ? Des forces de l’ordre, non ? C’est une morgue.
    Poppy hocha la tête par la négative.
    -Je connais ce genre d’endroit. Là, ils sont bien trop nombreux à être armés. Soit ce sont ses hommes de main, soit ils sont là pour la même raison que nous.
    Elle reporta son attention vers Felton occupé à diriger la mouche pix depuis une petite console sur une tablette.
    -Tu en es où ?
    -Elle est entrée mais se retrouve bloquée dans le hall. Je vois un adepte et un vigile armé.
    -Ils font quoi ?
    -Rien de bien spécial. Ça a l’air calme. Un peu trop, peut-être.
    -Vu l’heure, ça n’a rien d’étonnant. Tâche quand même de trouver un accès. On va se diviser. Artho m’a signalé trois accès, dont l’entrée principale. Les deux autres doivent être l’issue de secours et un accès technique. Je m’occupe de l’issue le long de la façade nord, avec Artho. Je vous laisse vous répartir les autres. On se bouge.
    Felton et Iceman s’occupèrent de surveiller l’entrée principale tandis que Derreck et Lek allèrent surveiller la troisième, le long de la façade sud. Ils se dissimulèrent derrière des bosquets et profitèrent que la nuit était tombée pour se faire discret. Derreck repéra quelque chose et fit signe à Lek de rester caché derrière des fourrés. Un peu plus loin, deux voitures étaient garées, plutôt mal d’ailleurs sur une aire de stationnement. Il les repéra car l’une d’elles était une City Shark de couleur claire. Un long coupé de luxe très rare sur Archaea avec son puissant moteur Angstrom V12, un modèle sport, loin des gros tout-terrain plus courants dans la région. L’autre était une Standard MkV, plus classique mais modifiée, avec un châssis renforcé bien qu’ancien. Ce qui attira son attention fut surtout la présence d’un type armé d’un court fusil d’assaut, dissimulé derrière des containers, à surveiller les environs. Derreck voxa le reste de l’équipe.
    -On a un hostile armé au coin sud-est du bâtiment.
    -Un vigile ?
    -Je ne pense pas.
    -On doit en être sûr.
    Lek approcha et observa à son tour, restant parfaitement furtif.
    -C’est un homme de main. Un type de la pègre local peut-être.
    -Il ressemble à ceux déjà croisés ?
    -Oui… Ceux du train à Bitter Bog. C’est le même genre de type.
    -Tu es sûr ? Parce que si c’est un homme de Caleb Cox, ça change tout, là. Ça pourrait même dire…
    -Que Cox serait sur place ?
    -On n’en sait rien, mais ce n’est pas impossible. Je vais demander à Artho de surveiller les abords. Qu’il n’y ait pas d’autres surprises.
    Au bout de quelques minutes, le servo-crâne confirma la présence de deux autres personnes à l’extérieur, deux chauffeurs ou livreurs à côté de leur fourgon. Iceman avait d’ailleurs un œil sur eux, de là où il se trouvait, mais il était prêt à parier qu’il s’agissait là de simples chauffeurs.
    -Felt ? Où tu en es avec ton drone ?
    -Bloqué dans le hall. Je vais tenter de passer par un autre accès.
    -D’accord. Derreck, Lek, ça donne quoi avec votre homme ?
    -Il contourne le bâtiment et vient de se diriger vers la façade est, répondit Derreck. Tu vas peut-être le voir arriver vers toi.
    -Je vais envoyer Artho pour le surveiller. Tâchez de le suivre, je veux savoir ce qu’il fait.
    -Bien reçu.
    Derreck activa son assourdisseur, un petit boitier capable d’étouffer les sons autour de lui. Il se faufila à travers les buissons et suivit le suspect furtivement. Ce dernier se tenait à une dizaine de mètres de là, occupé à parler par une des fenêtres du bâtiment. Il ne comprit pas tout ce qu’il disait sinon qu’il demandait à quelqu’un de se dépêcher et que ça aurait déjà dû être fait. Il resta dissimulé et recula afin de voxer ses camarades pour leur en faire part.
    -Je ne sais pas de quoi il parlait mais…
    -Ils vont la tuer, lâcha Poppy. Si ce sont bien les hommes de Cox, ils vont la tuer !
    -On intervient ? Demanda Lek.
    -On intervient. Maintenant. Neutralisez le garde, on arrive. Felt, Iceman, on fonce !
    L’homme de main revint soudain sur ses pas, retournant rapidement à sa position initiale de surveillance. Derreck l’avait suivi, tout en dégainant son épée de force qui s’auréola d’une lueur d’un bleu électrique scintillant. Il se positionna juste derrière le type avant que celui-ci ne l’entende, lui plaqua sa main gauche sur la bouche tout en le tirant en arrière et de son autre main, laissa sa lame pénétrer dans son dos, juste au-dessus des reins, la laissant ressortir en crépitant au niveau du sternum avec un sinistre déchirement humide. S’étranglant en gargouillant, le type s’écroula au sol, mourant en se vidant de son sang. Derreck s’empressa de l’attrapa par les pieds et le tira vers les fourrés afin de l’y dissimuler. Lek profita du champ libre pour se diriger vers l’endroit où le type parlait juste avant. Poppy venait de le rejoindre, ayant fait le tour par l’autre côté. Ils se plaquèrent contre le mur, ayant dégainé leurs armes. Ils jetèrent un coup d’œil et virent un autre homme de main à l’intérieur, occupé à fouiller dans un bureau, le mettant en désordre.
    -Il cherche quelque chose ? Souffla Poppy à Lek.
    -Je ne crois pas… Il met juste le bazar, comme s’il cherchait à…
    -A maquiller une scène de…
    Poppy n’eut pas le temps de finir sa phrase, le type à l’intérieur de la pièce, finit par les voir ou les entendre. D’un geste fluide et rapide, il dégaina deux armes de poing, bien décidé à faire feu vers la fenêtre mais Lek fut plus rapide avec son pistolet à silencieux. Il le tenait déjà dans sa ligne de mire et lui colla deux balles à décharge en plein cœur, le tuant sur le coup, l’envoyant s’écrouler au sol. Poppy lui fit signe de la suivre. Ils ouvrirent la fenêtre et entrèrent.
    -Il est mort ?
    -Apparemment.
    -Il faut qu’on en trouve un pour l’interroger.
    Derreck vint les rejoindre, suivi de Felton. Iceman était juste derrière, en couverture, ayant récupéré le fusil d’assaut du garde tué à l’extérieur.
    -Je passe devant, leur dit Lek.
    Il sortit du bureau en ouvrant une porte donnant dans un hall éclairé. Depuis des portes latérales closes, il perçut du bruit, comme si quelqu’un était en pleine souffrance. Il faillit ne pas faire attention à une autre porte qui venait tout juste de s’ouvrir depuis le couloir. Le canon d’une arme à silencieux le prit pour cible alors qu’il évita la rafale qui le frôla de justesse, éclatant une porte vitrée juste derrière lui en une pluie d’éclats. Lek eut juste le temps de se jeter de côté dans le couloir et eut le temps de voir Felton ouvrir le feu sur le tireur, le forçant à reculer, peut-être même en le touchant. Il allait se relever pour lui prêter main forte mais une silhouette émergea en trombe de la porte vitrée éclatée et se jeta sur lui, le frappant avec un sabre mais Derreck s’interposa et para le coup avec son épée de force, sectionnant la lame et le bras de celle qui la tenait. Son assaillante, le bras sectionné au niveau du coude, se mit à pousser un petit cri puis ses yeux se révulsèrent et elle perdit connaissance en se vidant de son sang.

    Au même moment, deux autres hommes de main surgirent dans le couloir. Armes laser à la main, ils ouvrirent le feu en rafale, fauchant Derreck qui n’eut pas le temps de réagir, se prenant un tir en pleine tête et deux dans le torse, il bascula en arrière et s’effondra dans le bureau alors que Poppy et Iceman ripostaient. Leurs tirs combinés, fauchèrent les deux hommes alors que Lek appelait à l’aide. Il venait de s’abriter des tirs dans un autre bureau, celui depuis lequel il avait entendu des cris mais se trouvait désormais aux prises avec une sorte de psyker qui tentait de pénétrer dans son esprit à grand renfort d’éclairs psychiques. Lek ressortit de la pièce en reculant, tout en rechargeant son arme. Poppy se rua droit vers lui, s’interposant entre Lek et le psyker, un type au crâne bardé d’implants crépitant d’énergie, comme ses yeux révulsés et portant une longue robe brune. Elle pointa son arme vers lui alors que des éclairs crépitaient dans la pièce et lui colla deux balles en pleine tête, lui faisant éclater le crâne. Le sorcier s’effondra au sol, le corps parcouru d’éclairs psychiques tandis que des spectres fantomatiques se mirent à ricaner dans la pièce. Poppy se recula en les maudissant d’une prière tout en crachant sur le corps du psyker, face à cette vision de cauchemar. Elle allait se tourner vers Lek, au moment où il se prit une lame qui lui traversa le dos et ressortit par son torse. Un des assaillants qui était passé pour mort, mais qui n’était que blessé, venait de se relever et en avait profiter pour attaquer Lek par derrière. Ce dernier s’écroula au sol en crachant du sang. Un rictus mauvais sur les lèvres, Poppy dégaina sa matraque et asséna un coup dans la rotule de l’homme au couteau, puis elle lui remonta d’un coup sec sa matraque en les jambes et actionna la décharge électrique. Soulevé de terre, le souffle coupé, il n’eut même pas l’occasion de crier. Le choc le foudroya net et il tomba au sol. Elle désactiva sa matraque et s’empressa de lui mettre les mains dans le dos et lui passer les menottes. Elle vit en même temps que Felton s’était débarrassé du dernier homme de main, d’un coup de sa lame énergétique. Iceman était en train de vérifier l’état des blessés lorsqu’à une trentaine de mètres de là, les portes du couloir s’ouvrirent en trombe. Deux vigiles, armés de pistolets automatiques firent leur irruption en criant.
    -Lâchez vos armes immédiatement !
    Poppy ne se démonta pas. Elle se tourna vers eux, son Carnodon fumant toujours en main. De son autre main, elle sortit son badge et le pointa vers eux.
    -Arbites. Opération spéciale. Le Trône a besoin de votre collaboration, citoyens.
    Les deux hommes se regardèrent, soudain interloqués puis baissèrent leurs armes.
    -Désolés, Madame… Nous n’avions pas été informés de votre… intervention.
    -En effet. Cette opération requière la plus grande discrétion et je compte sur vous. Nous venons d’éliminer un sorcier et ses séides. Mes hommes ont besoin d’un médecin de toute urgence et quelqu’un pour me nettoyer… tout ça.
    L’un d’eux retourna sur ses pas et revint accompagné d’un chirurgien aux nombreux implants et d’un homme chargé de l’entretien pour leur prêter main forte. Elle leur désigna Lek et Derreck, qu’ils devaient sauver en urgence. Le medic se tourna vers elle.
    -Je devrais appeler l’hôpital et les Cent yeux, ne croyez-vous pas, Madame ?
    Elle vint se camper devant lui.
    -C’est quoi votre nom ?
    -Je suis le docteur Henson.
    -Non, vous n’allez certainement pas les appeler.
    -Mais pourq…
    -C’est un ordre, Henson. La nouvelle ne doit pas s’ébruiter. Bouclez le bâtiment et remettez déjà mes hommes sur pieds, je me charge du reste.
    -Mais et les corps ?
    -Eh bien, c’est une morgue ici, non ? Vous avez donc ce qu’il faut pour gérer cela.
    Elle alla retrouver Felton et Iceman.
    -Comment vont Derreck et Lek ?
    -Ils vont s’en remettre mais là, ils ne sont pas en état. Lek a été touché sérieusement. Le médecin va devoir s’occuper d’eux.
    Il leur fit signe de le suivre vers le bureau où Lek avait entendu du bruit, là où elle avait abattu le psyker.
    -Faut que vous voyez ça.
    -Quoi donc ?
    Il leur désigna le corps d’une jeune femme au sol. C’est elle que le psyker malmenait quand elle était intervenue. Elle l’avait vu mais l’urgence avait fait qu’elle n’y avait pas plus prêté attention sur le moment. La fille portait une tenue medicae en plastek mais surtout elle avait un bras gauche augmentique et des électrotatouages. Poppy s’accroupit et réalisa qu’elle était inconsciente et ne semblait pas présenter de blessures particulières.
    -C’est bien cette Shidia, celle que l’on cherche ?
    -Je pense que c’est elle, oui.
    -Ok, on doit la réveiller, je dois l’interroger.
    Elle regarda autour d’elle. La pièce était une sorte de laboratoire en fait.
    -Tâchez de me trouver quelque chose, des stimms ou un medikit et s’il y a un vox dans la pièce, vous me le neutralisez.
    Ils fouillèrent la pièce et finirent par trouver un pistolet laser un pistolet hypodermique en plus d’un peu de matériel medicae, mais aucun microvox, ni sur elle, ni dans la pièce. Iceman trouva un injecteur et le lui apporta. Poppy lui demanda d’aller surveiller le type menotté, pendant ce temps, elle injecta un des stimms à la fille qui reprit soudain ses esprits. Prise de panique, ses derniers souvenirs refluèrent. Elle se mit à crier mais Poppy la maitrisa, la maintenant assise par terre.
    -Du calme ! Vous êtes saine et sauve désormais.
    La fille avait ses yeux exorbités et son rythme cardiaque s’emballait. Les stimulants n’aidaient pas en réalité, d’autant plus que Poppy se disait qu’ils n’avaient peu de temps devant eux.
    -Vous êtes qui ? Vous me voulez quoi ?
    -On vient de vous sauver d’un sorcier mais il n’y a plus de danger. Ces hommes ont tenté de vous tuer, vous savez qui ils sont ? Qui les a envoyés ?
    -Non… Bien sûr que non… Je ne comprends pas… Je…
    Poppy sortit de nouveau sa plaque et la lui montra.
    -On cherche un dénommé Cox, un homme extrêmement dangereux. On a de fortes chances de croire que c’est lui qui a envoyé ses sbires pour tenter de vous éliminer.
    La fille déglutit, réalisant alors avec effroi que tout ceci était non seulement réel mais dépassait totalement ce qu’elle pouvait imaginer.
    -Je ne connais personne de ce nom…
    -Vous avez récemment participé à une greffe de visage, un homme, la trentaine, cela vous revient ?
    Elle secoue la tête…
    -Non… enfin… vous voulez dire que l’homme qui a été opéré… c’est lui qui a envoyé ces… Je ne comprends pas, il m’a payé… Pourquoi ferait-il cela ? Il a eu besoin de moi…
    - On doit tout savoir sur cet homme. Vous ne reconnaissez pas ces assassins ?
    -Pas du tout… Je ne comprends pas…
    -Disons que vous êtes dorénavant la seule personne en liberté qui connaît son identité précédente et son apparence actuelle. Et comme c'est un homme extrêmement prudent...
    -Il a dit s’appeler Mr Zacharie, et qu’il cherche à rester discret, c’est tout ce que je sais de lui.
    -Bien. Vous avez également travaillé avec un chirurgien ? Une sorte d'expert dans son domaine. Qu'est-ce que vous pouvez nous dire sur lui ?
    -Le chirurgien dont vous parlez... Oui, il m'a dit qu'il se faisait appeler le Plasticien. Je ne le connaissais pas, il n'était pas d'ici. C'était la première fois que je travaillais avec cet homme.
    -Et il ressemble à quoi, ce Zacharie à présent ?
    -Grand, brun… la trentaine, plutôt séduisant. Mais ça, ce sera une fois les cicatrices de l’opération parties.
    -Son opération justement, ça s’est passé où ?
    -Au sous-sol d’un bar appelé le Double Vortex dans le quartier du…
    -On connait. Vous l’avez revu depuis ? Vous connaissez son adresse ?
    -Non aucune idée… Mais sinon oui, je l’ai revu une fois. Il est venu ici il y a cinq ou six jours. Il doit lui rester encore une semaine complète au repos avant de devoir retirer ses bandages et que son visage prenne sa forme définitive. Mais là, j’ignore où il est car il m’a dit préféré venir me voir. Il va donc devoir garder ses bandages sur son visage pendant une semaine, raison pour laquelle il préfère ne pas sortir… En vrai, ça me choque toujours de réaliser qu’il a voulu me tuer.
    Elle sortit alors une fiole de son bras augmentique.
    -J’avais gardé cet échantillon de son sang pour des analyses, si ça peut vous aider ?
    Poppy se saisit de la fiole en la remerciant.
    -Est-ce qu'il y a une raison particulière pour laquelle il vous a choisi pour assister le Plasticien ? Demanda Felton.
    -Aucune idée. J’ai été contacté par un certain Gorimov pour ce job. Il a dit que j’étais qualifiée et que vu que j’avais quelques soucis financiers…
    - Des soucis dus à quoi ? L’interrogea Poppy.
    -La perte de mon ancien boulot.
    -D’accord, vous allez venir avec nous. Nous allons vous mettre sous protection.
    Elle se releva et indiqua à Iceman de la prendre en charge. Elle tapa sur l’épaule de Felton et lui demanda de venir avec elle dans la pièce à côté. Au passage, elle préleva des instruments chirurgicaux.
    -Je vais interroger ce type, j’ai besoin que tu sois là, au cas où.
    Iceman les prit un peu à part et leur parla à voix basse. Depuis la pièce d’à côté, le type menotté les regardait avec un air mauvais. Iceman le désigna.
    -On a un souci, il porte un collier explosif.
    -Activé ?
    -Oui, activé.
    -Et tu saurais gérer ça ?
    -Tu veux prendre le risque que sa tête nous pète en pleine figure ?
    -Les autres en ont un, aussi ?
    -Non, c’est le seul.
    Elle se tourna vers Felton.
    -Il nous reste des drogues anesthésiantes ou quelque chose comme ça ?
    -Peut-être bien, mais c’est soit à la planque à la capitale, soit dans la voiture qui est à deux bornes d’ici. A mon avis, on perd notre temps. Avec un collier explosif, sa tête va partir quand son patron ne le verra pas revenir. Il ne prendra pas de risque. On ne sait pas le temps qu'il nous reste et clairement, avec Derreck dans les vapes, on va perdre du temps à lui faire cracher quoi que ce soit.
    -Je veux quand même essayer de lui faire cracher le morceau avant qu’ils ne s’en rendent compte. On a peu de temps justement.
    Elle leur demanda d’aller surveiller la fille et les blessés puis s’approcha du prisonnier, toujours assis contre un mur. Elle s’accroupit devant lui. Il la dévisagea en souriant de ses dents en métal tâchées de sang.
    -A partir de maintenant, comme moi et mes potes on ne va pas rentrer, ça veut dire que vous êtes morts, bande de sales cons.
    Elle lui planta un des scalpels dans sa rotule déjà meurtrie et appuya dessus de toutes ses forces. Le type se mit à hurler. Elle sortit un second scalpel.
    -On verra si tu feras autant le malin quand j'en aurai fini avec toi.

    Au bout d’un quart d’heure, elle le laissa se vider de son sang et prit Felton et Iceman à part dans la pièce d’à-côté. Elle attrapa un torchon avec lequel elle s’essuya les mains.
    -Comme on s’en doutait, c'est bien ce Mr Zacharie qui les a envoyés pour faire taire la medic. Ils devaient s’assurer avant qu’elle ne parle à personne d'autre.
    -Et il a dit où on peut le trouver ce Zacharie ? Lâcha Felton.
    -Oui, une demeure dans le Quartier Solaire. La Villa d’Emeraude. Ce sale fils de grox a ajouté que de toute façon, ne les voyant pas revenir, Zacharie n'y sera plus quand on arrivera.
    -Il dit surement vrai, mais on devrait y aller quand même.
    -J’aimerai que tu contactes Tsali. Vois si elle peut nous envoyer du monde rapidement sur place, des experts en explosifs notamment. Je crois que Jézabel a parlé d’une équipe de commandos, non ?
    -Oui, la cellule Mortis du lieutenant Tauros, ajouta Iceman. Lexxi et moi on connait ces gars, c’est des pros.
    -Voilà, parfait. Si elle peut les envoyer sur place, qu’ils nous passent les lieux au peigne fin. Je veux qu’ils collectent le moindre indice et nous en rende compte.
    -Et nous, on fait quoi en attendant ? Lui demanda Felton.
    -On récupère la fille et nos blessés et on retourne à la planque. Elle va rester sous notre protection en attendant. On verra alors comment se coordonner avec le Reliquaire et les gars de la cellule Mortis.
    -Et lui, on en fait quoi ? Lui demanda Felton en désignant le prisonnier, toujours en vie, malgré les cinq ou six scalpels plantés dans le corps.
    Poppy se saisit du pistolet laser posé sur un plan de travail, régla le sélecteur sur pleine puissance et tira une courte rafale dans le torse du captif avant de balancer l’arme là où elle l’avait prise. Il s’affaissa au sol, une fumée âcre s’échappant lentement de sa poitrine. Son collier explosif se désactiva aussitôt.
    -On n’en fait rien du tout. Cox a beau avoir de la ressource, je tiens à ce qu’il ait ce message.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 26/01/2023 à 18:02 Citer ce message

    Sandbarra
    Planque de la rue Poissonnière de le cellule Obscurus
    Tempus estimare 024.021M42– 22h13
    Veille du jour de la Crémation des Péchés.

    Une semaine venait de s’écouler depuis l’incident du mortifex à Sandbarra. La cellule Obscurus avait passé presqu’entièrement cette semaine au Reliquaire à la capitale. D’une part pour y soigner leurs blessés, étant donné que Lek, Lexxi et Derreck s’en étaient sortis tous les trois avec de graves blessures, mais aussi pour répondre à la proposition du technoprêtre Ordax-Kappa. Ce dernier avait proposé de poser des implants augmentiques sur certains d’entre eux. Ainsi, Poppy se fit installer un révélateur de phéromones dans un de ses yeux pour traquer ses cibles. Lek se fit modifier son bras bionique afin d’y faire implanter un pistolet laser radiant compact, Lexxi se fit câbler une unité d’interface cérébrale et Felton préféra un discret diffuseur de phéromones. Quant à Derreck, il opta pour un implant vox et décida de passer les jours restant sur la station orbitale de l’Astra Telepathica pour continuer sa formation.

    Le reste de l’équipe en profita pour récupérer un peu de matériel et munitions, pour parfaire leur entrainement et interroger la docteur Shidia Coppertown, dernière témoin supposée à avoir vu Caleb Cox. Sa déposition fut d’une importance capitale aussi Jézabel demanda à la cellule Obscurus de la garder sous surveillance tant que Cox n’avait pas été retrouvé. Son cas serait alors statué plus tard.
    La cellule Mortis avait d’ailleurs pris le relai à Sandbarra et avait fouillé la dernière demeure de Cox, connu actuellement sous le nom de Mr Corben Zacharie. La villa en question était vide à leur arrivée mais tout semblait indiquer qu’elle avait été occupée très certainement par les hommes de main rencontrés au mortifex. Des effets personnels sans valeur tels que des vêtements, pipe à obscura, feuilles de lho à rouler, pornopix et quelques liasses de billets furent retrouvés sur place ainsi qu’un bandage tâché de sang. Après analyse, il s’avéra que c’était bien le même que celui de la fiole fournie par Shidia, signe que ce Zacharie était bien là il y avait moins de vingt-quatre heures. Le bâtiment avait été entièrement piégé avec des explosifs inferno mais les gars de Mortis les désamorcèrent. La villa était actuellement enregistrée au nom de la Domus Aurea, une filiale immobilière de la Guilde Aureus qui selon le docteur Coppertown était la bourse du commerce de Sandbarra, bien qu’étant officieusement affiliée à la Guilde Mercator, elle-même dirigée par ce fameux Triumvirat qui semblait diriger la ville. Cette ville semblait être dirigée par un vrai panier de crabes, raison pour laquelle il était vital que Shidia leur serve d’informatrice locale sous peine d’être perdus. Des noms et des connexions devaient forcément se trouver derrière des organisations telles que les Cent Yeux, la Guilde Pharmatika, l’Officio Mercator, le Mercator Volubilis, la Guilde Aureus ou encore ce fameux Triumvirat. Qu’en était-il aussi de cette rumeur concernant les Maledictus, cette caste mutante que redoutait les citoyens ? Enfin, un medic heretek avait été neutralisé en pleine ville et il était inquiétant de voir qu’il opérait ainsi en plein jour.
    A propos de ce Walder Gorimov, au Double Vortex, ils n’apprirent que peu de chose. Il n’avait pas l’air d’avoir de lien direct avec la pègre locale mais plutôt des connexions avec les hereteks déjà croisés à Newburg et donc en lien avec l’histoire de Lexxi s’étant déroulés à des centaines de kilomètres de là. Cela leur rappela que la piste du complexe d’Abraxas était toujours sur leur liste. Après en avoir discuté avec Jézabel, elle leur confirma qu’elle allait devoir être suivie en priorité, aussi elle décida de positionner les cellules Tenebrae et Mortis sur cette intervention. Obscurus allait donc devoir se débrouiller seule et sans appui à Sandbarra, du moins pour les deux ou trois jours suivants.
    Ils profitèrent de leur retour au Reliquaire pour traiter plusieurs autres sujets, notamment reprendre contact avec la cellule Tenebrae qui avait pris le relai sur la surveillance de la guilde Kanoptech. Poppy avait revu Elisha et cette dernière lui avait appris que Gad Rasham avait effectué plusieurs allers-retours réguliers entre son domicile et les entrepôts de Kanoptech. Dès le premier jour, il avait donné rendez-vous dans un bar des docks à un type qui correspondait à la description de Quinston Grish. Elle leur précisa que Grish était reparti mécontent et sous bonne garde. La nature de leur échange n’avait pu être entièrement restituée en dehors d’une demande de Rasham d’arrêter tout de suite toutes les commandes. Vu le contexte, il était fort probable qu’il soit question de psykers émergents et non de simples caisses de noix de cassam. Quoi qu’il en soit, lui et Grish allaient devoir être placés sous surveillance, car il était évident qu’ils faisaient partie de ce réseau hérétique, encore allait-il falloir trouver du concret et ne pas alerter trop tôt des gens comme Bosinski ou Haxt, raison pour laquelle ils étaient à présent sous les auspex. Poppy apprit aussi que Jézabel avait fait placer la Basilique sous surveillance avec une taupe sur place, ce qu’elle approuvait. Les Trois Chérubins, le Crazy Grox et le Jardin d’Eden étaient aussi surveillés par le Magistratum. Le trafic de drogues illégales était désormais dans le collimateur avec le trafic de psykers comme véritable objectif en toile de fond. D’ailleurs, Jézabel insista sur ce point car selon elle, la cellule Obscurus allait devoir prendre ce sujet très au sérieux et obtenir des indices au plus vite.
    Concernant Corben Zacharie, ils ne trouvèrent que peu d’informations sur lui, puisque cette fausse identité avait permis à Caleb Cox de passer relativement inaperçu. D’ailleurs, Poppy était prête à parier qu’il allait une fois de plus changer d’identité, étant donné qu’il savait à présent que Shidia était en vie et pourrait l’identifier. Felton, une fois de plus, dû bien admettre que l’ex-arbitrator avait parfaitement raison sur ce point. Ce qui les faisait repartir à zéro, mais pas tout à fait. Le docteur Coppertown leur avait remis une fiole contenant le sang de Cox, or c’était exactement l’élément qui pouvait les remettre sur les rails de leur enquête et notamment grâce au nouvel implant traqueur de Poppy.

    La veille de leur départ, l’investigatrice Jézabel Callidia ordonna à Mazarin, son servo-crâne de verrouiller la porte de son bureau au Reliquaire, de baisser les lumens et d’activer les brouilleurs. Ainsi, seule dans la pièce, elle se repassa la séquence pix sur son écran cogitateur. Les images étaient de piètre qualité mais elles ne laissaient aucune place au doute. Ce n’était pas un accident comme ils l’avaient d’abord pensé. Elle laissa défiler les images au ralenti, puis revint sur une séquence furtive, saisie par un des servo-pix de la station orbitale. Là, se dit-elle. Elle magnifia l’image, sélectionna un meilleur angle puis amplifia la résolution. Même ainsi l’image n’était pas très nette et les deux individus qui arpentaient les couloirs en flammes auraient pu être n’importe quels psykers de la station. Un homme au crâne rasé et une femme aux cheveux blancs. Qui aurait pu les identifier ?
    Elle s’assit à son bureau et composa le code d’appel crypté de Justine, en poste au palais gouvernemental, à moins d’un kilomètre de là.
    -Tu l’as reçu, toi aussi ?
    -Oui, attends, c’est bien ce que je crois ? Trône… Elle est donc bien en vie.
    -Comme on s’en doutait.
    -Tu comptes en informer notre Inquisiteur ?
    -Je viens de lui faire envoyer une missive astropathique en urgence, tu penses bien.
    -En attendant, on… ?
    -J’attends une confirmation de Surngraad et les ordres de l’Inquisiteur. On reste juste vigilants en attendant.
    -Et l’Astra Telepathica t’a confirmé quelque chose à son sujet ?
    -Pour l’instant, non. Vu le nombre de victimes qu’ils viennent de subir, l’Arbites va envoyer une équipe pour mener une enquête sur place. C’est le protocole entre adepta. La thèse de l’attentat perpétré par des psykers renégats ne tiendra pas longtemps sinon, mais c’est pourtant celle que l’on va devoir maintenir officiellement. Je t’envoie la version que je vais soumettre à l’Arbites. Tu en feras de même auprès du gouvernement au palais.
    -C’est noté. En plus, cette version n’est peut-être pas si fausse, au final.
    -Si un doute venait à fuiter sur ce qui s’est réellement passé, tu sais quelles en seraient les conséquences ?
    -On appliquera le protocole Malleus. Inutile de me le rappeler… Et… A ce sujet… ?
    -Oui ?
    -Tu as… Perdu un de tes acolytes sur place, c’est bien ça ? Ton templier psykana ? Je suis désolée de l’apprendre.
    -Perdu est peut-être le mot exact, en effet.
    -C’est-à-dire ? Il n’est pas au nombre des victimes ?
    Jézabel marqua quelques secondes avant de répondre, tout en se callant dans son fauteuil.
    -Je suis prête à parier que non. On voit deux personnes entrer sur cette station… Et trois en ressortir. Et quelque chose me dit que ça ne peut être que lui…
    -Trône… Mais… Me dis pas que…
    -La Psykana va envoyer un émissaire pour enquêter sur cet incident. Evidemment, cette affaire doit passer sous silence, surtout pour l’Astra Telepathica en qui je n’ai aucune confiance.
    -Tu comptes en faire quoi ?
    -L’envoyer justement sur une piste. Sandbarra aura largement de quoi l’occuper, le temps que cette affaire soit réglée, crois-moi.

    Le soir même, la cellule Obscurus était de retour à Sandbarra à l’exception de Derreck qui manquait à l’appel. Jézabel leur avait appris avant leur départ qu’il y avait eu un incident sur la station orbitale où il s’était rendu et que tous les psykers et astropathes avaient péris. Quant au corps de Derreck, il n’avait pas été retrouvé. Emporté par le vide ou par des hérétiques, son sort était pour l’heure, inconnu. L’équipe accusa le choc, ce qui leur mit un sacré coup au moral, ne sachant bien comment réagir sur le moment. Elle ajouta que le lendemain matin, un émissaire de la Psykana devrait les rejoindre. Officiellement, ils travaillaient pour l’Arbites et les Ordos, sous couverture et l’émissaire n’avait pas besoin d’en savoir plus dans l’immédiat. Elle leur demanda cependant de l’intégrer à leur propre enquête, leur indiquant que Cox ou les hereteks en lien avec le trafic de psykers émergents étaient la piste sur laquelle ils allaient devoir le conduire en attendant. Jézabel leur confia qu’elle avait juste besoin de gagner du temps avec la Psykana et puis ses talents pourraient toujours s’avérer des plus utiles pour Obscurus.

    En attendant, ils s’installèrent de nouveau dans la planque de la rue Poissonnière, cet appartement au troisième étage d’un immeuble habs dans le quartier du port. Shidia était toujours sous leur protection et son apparence avait été modifiée de sorte que personne ne la reconnaisse. Nouvelle coupe de cheveux, nouveaux vêtements, elle devait elle aussi passer inaperçu. D’ailleurs, toute l’équipe en profita pour modifier son apparence et endosser de nouvelles identités.
    -Cox peut bien changer de nom ou de visage autant qu’il ne souhaite, mais son empreinte génétique, il ne risque pas de pouvoir la modifier si facilement, leur avait dit Shidia avant leur départ du Reliquaire. Poppy avait rebondi sur cette allusion lors de la pose de son implant et en avait profité pour enregistrer la signature génétique de Caleb Cox. Désormais, elle savait qu’elle pourrait l’identifier avec certitude, quelle que soit l’apparence qu’il aurait.
    Shidia fut installée dans une chambre quelque peu spartiate mais parfaitement sécurisée et ne disposant pas de fenêtres. Elle serait sous leur surveillance constante. Lek et Lexxi se réunirent avec elle dans le salon avec quelques bières. Ils portaient tous les deux des bandages sur leurs récentes cicatrices et seraient sous antiseptiques pour quelques jours encore. Le sujet tournait autour de Derreck et de l’incident de la station, évidemment, même si Shidia ne le connaissait même pas.
    Poppy préféra les laisser et alla retrouver Felton, profitant qu’il était seul dans une des chambres. Elle ferma la porte derrière elle.
    -Incroyable cette histoire, non ? Tu le connaissais depuis le début, je crois ?
    -Derreck ? Oui, plus ou moins. Toi, ça doit pas trop te déranger, tu l’aimais pas…
    -C’est pas que je l’aimais pas. Mais bon, les psykers…
    -Et donc, cet autre type qui va nous rejoindre. On en parle ?
    -L’émissaire de la Psykana ? Je ne sais pas… Jézabel pense qu’il pourrait surtout nous aider pour trouver Cox. Alors pourquoi pas ?
    -Un autre psyker ? On verra bien…
    -C’est une bonne chose en tout cas que l’on travaille ensemble, toi et moi, tu crois pas ?
    Il rangea ses armes sur une commode, se retourna et l’observa d’un air intrigué, voire dubitatif.
    -Une bonne chose ?
    -Oui, toi et moi.
    Il leva une main devant lui, comme pour arrêter ses propos en même temps qu’il l’arrêta alors qu’elle avançait vers lui.
    -Que les choses soient claires. Toi et moi, on travaille ensemble mais ne vas pas t’imaginer quoi que ce soit.
    Poppy s’étonna de sa réponse qu’elle trouva bien trop sur la défensive. Elle eut un léger mouvement de recul.
    -Je n’imagine rien… Je trouvais juste, vu ce qu’on avait traversé, qu’on était parvenus à dépasser nos différences, que… Je ne sais pas… ?
    Il eut un petit rictus amer sur les lèvres et reprit le rangement de ses affaires.
    -Nos différences ? Toi et moi on n’a rien en commun, que ce soit bien clair.
    Elle resta clairement abasourdie par ses propos.
    -Comment ça ?
    -Moi, contrairement à d’autres, je ne suis pas là par choix ni par envie, tu vois ? Je te rappelle que ton pote, le juge Vorgen m’a un peu obligé à bosser pour les ordos. Sinon tu penses bien que je serais bien content de me la couler douce à siroter un amasec au sommet d’une spire, plutôt que d’être ici.
    -Après tout ce qu’on a combattu, comment tu peux tenir un tel discours ? Tu ne peux pas cracher comme ça sur ce que l’Imperium fait pour toi ? Tu plaisantes ?
    -Mais quelle naïve tu fais ! L’Imperium n’a jamais rien fait pour les gens comme moi. Je suis quoi ? Un rebus à vos yeux, rappelle-toi.
    -Tu n’es pas sérieux ?
    -Et comment ! Bon évidemment, je suis bien conscient de ce que l’on combat et du danger que représentent le warp et ses adorateurs. La preuve avec Derreck, non ? Donc je me dis que c’est peut-être bien la solution la moins pire, mais ne t’attends pas à ce que j’embrasse ton Credo comme tous les bigots que vous êtes.
    -Felton… Tu blasphèmes, là ! On a quand même traversé des épreuves, comment tu peux dire ça ? C’est même vexant !
    -Tu sais rien de moi. On se connait depuis quoi ? Un mois maintenant. Donc ne va pas t’imaginer qu’on est intime ou quoi que ce soit, parce qu’on travaille ensemble. Mais bon, si je t’ai vexé, j’en suis désolé. Juste que je compte faire ma part du boulot pour l’Inquisition mais c’est pas pour ça qu’on sera pareil. Ma vie est hors la loi, la tienne est d’être justement tout le contraire.

    Poppy le regarda avec un air presque peiné. Elle s’attendait à tellement mieux de la part de Felton. En intégrant les Ordos, elle avait même fermé les yeux sur son passé de criminel de la Kasballica, lui qui avait fait du trafic d’êtres humains, elle avait fermé les yeux aussi quand il avait abattu ces deux agents du magistratum et pourtant elle n’oubliait pas non plus la fois où il l’avait sorti de chez cette ordure de Quinston Grish. Mais s’il devait être logique, pourquoi avait-il fait cela d’ailleurs ? Il l’avait aidé mais il détestait tout ce qu’elle était ? Pourquoi avoir un comportement aussi étrange, aussi incohérent… Felton était une racaille, un véritable salopard, un rebelle et à bien des égards un criminel aux pensées subversives qui devraient lui valoir de lourdes sanctions selon la Lex Imperialis. La mort ou même les légions pénales. Elle avait fait exécuter des citoyens pour moins que ça par le passé. Alors pourquoi cherchait-il à tout gâcher maintenant ? Son passé lui collait-il à ce point à la peau ? Au point qu’il risquait tout désormais ? Il cherchait quoi avec ce genre de confession, à la retourner contre lui ? à créer une sédition au sein de cette équipe ? à fuir l’Inquisition ? Retourner vers un passé qui ne voulait même plus de lui puisque la Kasballica l’avait trahi… Il savait bien qu’à présent il ne pourrait plus jamais retourner à une autre vie. Plus maintenant. Elle devrait même s’en assurer. Felton était amer en réalité, voilà ce qu’elle se dit.
    -J’espère juste que tu changeras d’avis, voilà tout.
    -Peut-être. Il faudra me laisser le temps, c’est tout.
    Elle hocha la tête et ressortit de sa chambre, décontenancée. Elle allait avoir besoin d’un amasec avant de leur parler à tous, de nouveau. Se faire traiter ainsi de bigote lui rappelait soudain quel jour ils étaient. Demain était un jour saint dans le calendrier impérial. Le jour de la Crémation des Péchés. Une fois par an, dans tout l’Imperium, les citoyens étaient encouragés par le Ministorum à se laver de leurs péchés. Des feux allaient être allumés, chacun devrait alors écrire la liste de ses péchés sans mentir, les lire à ses proches puis jeter la liste dans le feu dans l’espoir que l’Empereur leur pardonne en les encourageant à faire acte de pénitence en fonction de la gravité des actes passés.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 01/02/2023 à 18:22 Citer ce message

    Le rendez-vous avait été fixé le lendemain en fin de matinée sur la place des Oliphants, juste en face de la Guilde Aureus. Ils se dispersèrent parmi les échoppes, boutiques et cafés qui jalonnaient les allées, afin de localiser leur cible ainsi que tout éventuelle menace. Tous avaient activés leur microvox.
    -Quelqu’un a un visuel ? Leur demanda Poppy.
    -Je vois un type avec un bâton terminé par une tête de mort, ça doit être lui, répondit Lek. Ça correspond à sa description en tout cas.
    -Où ça ? Demanda Felton.
    -Assit à la terrasse de café qui fait l’angle au sud-est de la place.
    -Je le vois, ajouta Poppy. Il y a du monde avec lui ?
    -Négatif. Il est seul.
    -Je vais aller lui parler. Restez en surveillance.
    -Je t’accompagne, répondit Felton.
    -D’accord, surveille juste nos arrières. Lek et Lexxi, gardez un œil sur les abords et surtout sur les Cent Yeux qui patrouillent. Et tâchez justement de nous trouver un endroit où on pourrait discuter à l’abri.
    Ils se répartirent et Poppy décida donc d’aller à sa rencontre tout en observant les alentours avec attention. Felton la suivait quelques pas derrière elle. Elle repensa soudain à la veille. La perte de Derreck leur avait tous mis un sérieux coup au moral et elle dût reconnaitre que leur soirée avait même été des plus moroses. Et encore, le terme était un euphémisme pour ne pas dire catastrophique. Lexxi s’était isolée toute la soirée dans une des chambres et Lek en avait fait de même mais avec une bouteille d’Amasec. Elle et Felton s’étaient fait la gueule même si ça avait l’air d’aller mieux depuis ce matin. Ils perdaient un membre de leur équipe dans des circonstances plus que suspectes, voire même inquiétantes, ce qui avait eu un certain impact sur leur moral qui était plutôt en berne. Peut-être était-ce à cause de cet évènement, en tout cas, Felton avait cru bon lui faire des révélations sur ses états d’âmes et cela la rassura encore moins de réaliser que même lui, risquait de les lâcher du jour au lendemain.
    Elle avait comme un mauvais présentiment de toute façon, cette journée était celle de la crémation des péchés et tant qu’ils n’auraient pas tous abjurés leurs fautes, ils continueraient de porter ce fardeau de culpabilité comme un poids. Elle s’étonna d’ailleurs depuis la matinée de voir si peu de bûcher en ville. L’ex-arbitrator restait attentive à ces signaux faibles. Elle gardait ses vieux réflexes de traqueuse d’hérésie et bien que la ferveur ne soit pas aussi exaltée ici, qu’en d’autres endroits, les habitants affichaient l’Aquila ou d’autres symboles comme le crâne ou des parchemins consacrés. Il y avait bien quelques braseros, des feux allumés sur les places autour desquels des citoyens dansaient et s’amusaient devant quelques spectacles de rue. Certains jetaient dans ces feux, des papiers colorés portant des messages tout fait ou des effigies en carton-pâte à leur image, achetés sur les étals de ces camelots, de ces forains et autres colporteurs qui peuplaient la place. Ici, nul zélotes ou prédicateur pour exhorter le citoyen à faire acte de contrition comme cela se voulait ailleurs, pourtant elle avait bien repéré quelques prêtres trop gras, exhibant sans vergogne une bijouterie des plus ostentatoires sur leurs robes en soieries d’importation. Elle n’avait pourtant pas noté une hérésie flagrante dans la ville. Il était clair qu’ici, Credo et commerce ne faisaient qu’un.

    Elle vint s’assoir à la table juste à côté de l’individu au bâton. Il sirotait une tasse de tana tout en lisant les nouvelles de la gazette locale. Il se rendit compte de leur arrivée, aussi referma-t-il les pages du journal avant de le déposer sur la petite table ronde.
    -C’est une bien belle matinée, pourtant le chemin vers la lumière est parsemé d’ombres, lâcha Poppy en s’asaillant.
    -Et pourtant, des ombres, naissent nos pires cauchemars, lui répondit-il, selon le code établit à l’avance. Il retira ses petites lunettes et lui fit un signe de tête. Il devait avoir moins de quarante ans, se dit-elle. Il aurait pu passer pour un de ces innombrables adeptes, avec sa tête de savant à la peau grise et son long manteau cintré.
    -Je suis Poppy et voici Felton. Ce dernier venait de s’assoir à côté d’elle.
    -Viggo Von Viarden.
    -Vous êtes donc ici pour une collaboration inter-adepta ?
    Il observa autour de lui et baissa le ton.
    -En vérité, j’ai été mandaté pour enquêter sur l’incident du relai astropathique. N’y voyez nulle offense, mais je m’étonne juste de me trouver ici dans cette… Ville provinciale et perdue au bout du continent. Je m’attendais juste à devoir enfiler une combinaison pressurisée et partir en orbite. J’avoue ne pas avoir bien saisi ce sur quoi nos enquêtes convergent.
    Poppy baissa le ton aussi pour lui répondre, alors que Felton en profitait pour leur commander une tasse de café.
    -Il se trouve, Monsieur… Von Ver… Monsieur Viggo, que notre enquête actuelle nous dirige droit vers une affaire impliquant le commerce froid dans un trafic de psykers émergents et de drogues ou substances illicites en rapport avec ces mêmes psykers. Nous savons de plus, qu’une cabale heretek est liée à ce trafic. Cela fait-il le lien avec votre affaire ?
    Il eut une petite moue avant de répondre.
    -Il se pourrait que l’incident de la station orbitale ait un lien avec de telles organisations ou du moins avec ce trafic. Du moins, je dois m’en assurer avant d’en référer à mes supérieurs.
    Une serveuse vint leur apporter leurs cafés. Poppy attendit qu’elle reparte pour poursuivre.
    -A ce sujet... Qui vous envoie ?
    -Je travaille pour l’Astra Telepathica.
    -Mais encore ?
    -Cela suffit amplement pour valider ma présence. Il me semble que votre hiérarchie a déjà confirmé ce point ?
    Poppy avala une gorgée de son café avant de poursuivre.
    -Vous avez travaillé où avant cela ? Je veux dire… Avez-vous une certaine expérience du terrain ?
    -Sur Eshunna et sur Isin, principalement. Je suis un théoricien de l’Immaterium, donc plutôt un chercheur, un universitaire en quelque sorte. Je sors assez peu. Le terrain est assez nouveau pour moi, je dois bien l’avouer.
    Felton eut alors un petit sourire à cette allusion. Poppy en profita pour lui glisser discrètement de voir où en étaient les deux autres, ce qu’il fit en activant son microvox. Elle reporta son attention vers Viggo.
    -Vous sauriez me dire quoi de cette ville justement ? Vous y ressentez quelle atmosphère ?
    -Une atmosphère… Un peu trop éthérique, si vous voyez ce que je veux dire. Je savais que la ville abritait des émergents mais il n’y a pas que ça. Une substance… ou quelque chose comme ça.
    Elle hocha la tête.
    -Le terrain est justement notre environnement de travail. Si nous sommes amenés à faire équipe, vous devrez alors suivre nos ordres à la lettre.
    -C’est vous la primus, c’est bien ça ?
    -Pas vraiment. Disons que je suis plutôt la… porte-parole de cette cellule. Nous avons tous une fonction bien précise en réalité.
    Felton lui fit un petit signe de tête. Poppy déposa quelques pièces sur la table, et se leva.
    -Je vais d’ailleurs vous les présenter.

    A trois rues de là, ils retrouvèrent Lek et Lexxi qui avaient pris une table dans le salon privé d’un autre établissement. L’heure de la pause déjeuner approchait aussi du monde commençait à affluer sur la place et dans les cafés. En entrant, Felton se fit bousculer par un garde des Cent Yeux ce qui fit tomber au sol son pistolet bolter. Felton allait se baisser pour le ramasser mais le garde l’arrêta d’un geste, réalisant que l’arme, d’une qualité supérieure, paraissait de bien trop belle facture pour un type à l’apparence si ordinaire.
    -Il va falloir m’expliquer ceci, lâcha-t-il, sous son chapeau à large bord, une main posée sur la crosse de son canon de poing.
    Avant même que la situation ne dérape, Poppy qui avait vu la scène, décida d’intervenir.
    -Ah, Monseigneur, vous voilà ! Je vous en prie, votre table vous attend.
    Elle s’interposa entre lui et le garde, avec un large sourire.
    -Puis-je vous renseigner, sergent ?
    Le garde les dévisagea puis toucha le bord de son chapeau, en effectuant un petit signe de salut.
    -La bonne journée à vous, citoyens. Et pensez à ramasser vos armes avant que cela ne fasse désordre en un tel lieu.
    Felton en profita pour ramasser son arme et la ranger sous son manteau, non sans que le Cent Yeux continue de l’observer, notant bien que l’arme était parfaitement inhabituelle. Une fois qu’il eut débarrassé le plancher, Felton reprit alors sa respiration.
    -Merci de m’avoir tiré de ce mauvais pas. Je voyais le coup où ça allait dégénérer en bain de sang.
    -Je t’en devais une de toute façon. Tâche juste d’ouvrir l’œil, on est en territoire hostile, ici, rappelle-toi.
    Au moins, là où ils s’étaient installés, avec le bruit de la salle, ils étaient à l’abri des oreilles indiscrètes. Poppy présenta l’équipe à Viggo une fois qu’ils eurent commandé à déjeuner puis établirent la liste des pistes qu’ils allaient devoir étudier. Viggo n’était pas venu les mains vides, il avait débuté son enquête avant de se rendre à Sandbarra et avait établi une connexion avec un certain Walder Gorimov, le fameux medic heretek du Double Vortex. Il avait appris notamment qu’il avait été abattu et que son corps avait été récupéré, selon lui, par un groupe d’individus qui pourraient bien être ses complices. Ce qu’il savait aussi au sujet de cet heretek, était qu’il était sur le point de rencontrer quelqu’un ici, à Sandbarra. Une personne à la tête d’une des guildes de la ville et en lien avec un réseau secret d’informateurs. Cela ne leur évoqua rien mais Poppy suggéra de poser la question à Shidia, une fois de retour à la planque. Ces questions sur Gorimov étaient intéressantes mais selon elle, leur piste prioritaire restait évidemment Caleb Cox. La cellule Mortis avait ratissé la dernière adresse connue qu’il avait récemment occupé et déjà une semaine venait de s’écouler. Elle évoqua son implant lui permettant de suivre la trace d’une personne, et c’était exactement ce qu’elle comptait faire avec Cox.
    -Selon moi, c’est cette piste que l’on doit suivre en urgence. Cox est à l’origine de cette affaire de psykers émergents. On va devoir tout d’abord remonter sa trace. On s’occupera de Gorimov juste après. Après avoir réglés quelques détails, ils tombèrent d’accord pour trouver cette fameuse adresse.
    Chemin faisant, Poppy s’intéressa aux capacités psychiques de l’émissaire de la Psykana. Il lui apprit notamment qu’il avait lui aussi, la possibilité de retrouver des objets ou personnes grâce à la divination. Il savait aussi lire les pensées ou déceler la véritable aura des personnes, ce qui fit froid dans le dos de Poppy qui lui rappela de la prudence à user de tels pouvoirs. Surtout en public.

    Ils trouvèrent l’adresse dans le Quartier Solaire, le quartier résidentiel de Sandbarra, là où se situaient de riches demeures derrière de hauts murs gardés par des vigiles armés. Le manoir en question comptait plusieurs étages et semblait vide de tout occupant. Les vigiles, au nombre de quatre, patrouillaient eux, un peu plus loin, tenant un cyber-molosse au bout d’une chaine, mais ne semblaient pas les avoir repérés. Un mur haut de quatre mètres entourait un petit jardinet au milieu duquel se trouvait la vaste bâtisse d’un style gothique colonial ancien, avec ses murs blancs et ses tours flanquées de chaque côté. Ils en firent le tour et ne trouvèrent que l’entrée principale, fermée par une lourde double-porte en plastacier renforcée et décorée d’arabesques.
    -Allons-y, lâcha Poppy qui sortit sa multiclé tout en se dirigeant vers la porte.
    Elle s’attendait à ce que la serrure cède bien plus facilement mais ce ne fut pas le cas, malgré l’aide de Lek. Les minutes défilaient telles des secondes, aussi Felton et Lexxi se postèrent un peu plus loin pour surveiller le retour des gardes. Manque de chance, la patrouille avait eu le temps de contourner le pâté de maison et approchait désormais par une autre rue à une quarantaine de mètres de là. Les gardes repérèrent tout de suite les deux personnes occupées à tenter d’ouvrir la grande porte de la demeure. Ils se mirent à courir soudain vers eux en criant, lâchant la chaine du cyber molosse.
    -Vous, là-bas, arrêtez-vous tout de suite !
    Felton se retourna et crut revivre une scène déjà vécue. Il avait toujours eu la poisse avec ces saloperies de canides, à croire qu’ils lui en voulaient personnellement. Il activa son microvox, voyant que Lek et Poppy continuaient de s’acharner en vain sur la porte.
    -On décroche ! Vite, on se disperse et on se retrouve à la planque.
    Poppy se retourna alors que Lek partait dans une tout autre direction. Elle attrapa Viggo par le bras et l’embarqua avec elle, avant qu’il ne reste planté là dans la rue. Le molosse avait pris Lexxi en chasse alors que tous se dispersaient dans un dédale de petites ruelles. Ils finirent par semer les vigiles au bout de quelques minutes et Lexxi parvint enfin à se débarrasser de cyber-molosse en escaladant une grille et en passant par-dessus. Ils finirent par tous se retrouver vingt minutes plus tard. Poppy les voxa, les informant qu’elle allait les rejoindre avec Viggo mais qu’ils pouvaient déjà se rendre sur place.
    -On retournera dans le Quartier Solaire de nuit, annonça Felton, ce sera plus prudent.
    -Oui, je devrais pouvoir entrer mais faudra surveiller un peu mieux la rue la prochaine fois, ajouta Lek.
    -En attendant, on ferait bien d’aller jeter un coup d’œil dans la ruelle où était le corps de Gorimov, c’est à deux pas d’ici.
    -D’accord, allons-y.
    Ils retrouvèrent les lieux sans peine. Il s’agissait d’une de ces ruelles donnant sur des cours, entourées d’anciennes habs de quatre ou cinq étages. Felton reconnut l’endroit mais Lek et Lexxi lui signalèrent la présence de trois gamins en train de jouer au ballon un peu plus loin mais aussi de la présence d’une femme occupée à accrocher son linge à une fenêtre du deuxième étage.
    -On se déploie. Je veux une surveillance de tous les accès, leur dit-il.
    Il se déployèrent dans les cours adjacentes alors que Felton se dirigeait vers le groupe d’enfants. La plus grande des trois ne devaient pas avoir plus de dix ans. Les deux garçons, avaient sans doute un ou deux ans de moins. Le ballon roula dans sa direction. Il le stoppa du pied puis le ramassa en approchant vers eux.
    -Vous nous rendez notre ballon, Monsieur ? Dit l’un des enfants.
    Il vint s’accroupir devant eux, leur rendant la balle.
    -J’aurais quelques questions à vous poser, vous voulez bien ?
    La fille vint s’interposer entre lui et les plus petits, ramassant la balle, au passage.
    -Notre maman, elle a dit qu’on doit pas parler aux étrangers !
    -Et elle a parfaitement raison, répondit-il avec un grand sourire tout en sortant un billet de dix de sa poche. Il le tendit vers la fillette dont les yeux s’illuminèrent.
    -Alors, on tombe d’accord ?
    -C’est quoi votre question ?
    -J’en ai plusieurs. Vous étiez peut-être là, il y a, disons… Une semaine de ça. Peut-être avez-vous vu quelque chose d’inhabituel, ici dans la cour ?
    -Vous voulez parler du monsieur mort ?
    -Vous savez de qui il s’agissait ?
    La fille hocha la tête par la négative.
    -Et… Vous avez peut-être vu des gens, juste après ?
    Elle hocha de nouveau la tête par la négative, faisant signe aux petits d’en faire de même. Il reporta alors son attention vers eux, tout en sortant un second billet.
    -Et vous, vous avez peut-être vu quelque chose ? Les Cent Yeux sont venus ? Quelqu’un d’autre ?
    Il entendit la voix de Poppy grésiller dans son vox.
    -Je suis en approche avec Viggo. Je ne sais pas ce que tu fais, mais y a une femme à une fenêtre en train de regarder ce que tu mijotes.
    Felton se recula un peu et lui répondit.
    -Occupe-toi d’elle, avant qu’elle nous fasse chier !
    La femme se mit justement à crier depuis sa fenêtre, en direction de Felton.
    -Hey, vous ! Laissez mes enfants tranquilles tout de suite, où j’appelle les Cent Yeux !
    Poppy laissa Viggo dans la ruelle et se précipita vers l’hab en question. Elle entra dans les parties communes, gravit l’escalier et déboucha au second, tout en écoutant les cris de la femme, elle finit par trouver la porte de l’appartement. Elle sortit sa multiclé et commença à crocheter la porte mais en s’empressant, elle coinça l’outil dans la serrure et se mit à forcer un peu trop. C’est là que son sixième sens d’arbitrator lui indiqua le danger. Le bruit caractéristique de la culasse d’un fusil à pompe en train d’être armé. Elle n’eut que le temps de se plaquer de côté contre le mur, qu’une décharge de chevrotine traversa la porte, là où se trouvait son visage. Dans sa précipitation, elle venait de casser la multiclé, dont une partie resta coincée dans la serrure. La culasse s’arma de nouveau et une deuxième décharge traversa la porte alors qu’un type était en train de vociférer des menaces depuis l’intérieur. Poppy dégaina son arme, bien décidée à lui faire ravaler ses menaces à coup de bolts. Cette fois-ci c’est Felton qui l’appela dans le vox, depuis la cour.
    -Décroche, bordel, ça ameute tout le quartier !
    Avec les détonations, les enfants étaient sur le point de fuir. Les voisins sortirent de chez eux. Il savait que la situation leur échappait et il allait devoir agir très vite. La fillette le regardait en même temps que les billets.
    -C’étaient pas les Cent Yeux qui sont venus le prendre. C’étaient des gens différents. Des gens qui faisaient peur.
    Il lui glissa les billets dans la main et la laissa partir. Il activa son vox.
    -A tous, on décampe. Poppy, ça va pour toi ?
    -Je sors du bâtiment, Trône, cette journée est totalement en train de nous échapper !
    -Ouais bin tu pourras toujours mettre ça sur le compte de ta journée des péchés de je sais pas quoi.

    Elle finit par le rattraper, deux rues plus loin. Viggo était là, appuyé contre un mur, à reprendre son souffle. Elle s’alluma un cigalho afin de calmer ses nerfs. Une larme coula de son œil cybermodifié, emportant un peu de rimmel au passage.
    -Notre stratégie était pourtant la bonne, lui dit Felton. On a juste joué de malchance, c’est tout.
    -Ne plaisante pas avec ça, Felt. Le poids de nos péchés est un véritable fardeau, que tu le veuilles ou non. Vois ça comme tu veux, mais tant qu’on ne s’en sera pas débarrassé, je sens que le destin se jouera de nous.

    Dix minutes plus tard, ils étaient de retour à la planque. Ils furent soulagés d’y retrouver Shidia occupée à cuisiner des beignets de poisson avec des légumes grillés aux épices, servi avec quelques fruits frais. Elle parut soulagée de les voir enfin revenir.
    -Comme je ne savais pas si vous aviez déjà déjeuné, je me suis que j’allais cuisiner idée de m’occuper.
    -D’où ça vient, tout ça ? ça a l’air de sentir bon, en tout cas, lâcha Lexxi. Lek avait l’air de son avis.
    -Ça vient du marché, leur dit-elle avec un large sourire. Je suis sorti faire quelques courses, le frigo était vide de toute façon.
    Poppy l’attrapa à part, foudroyant Artho du regard, au passage. Ce dernier préféra filer dans la pièce d’à côté en émettant quelques sifflements binaires.
    -Comment ça, le marché ? On avait dit que vous ne deviez pas sortir d’ici !
    -Oui et bien il est hors de question que je reste ainsi retenue enfermée dans cet appartement à ne rien faire.
    -Je vous rappelle que c’est pour votre propre sécurité !
    -Seule avec un servo-crâne ? Vous pensez qu’il saurait me défendre ? Dans ce cas-là, laissez-moi une arme, ça sera préférable.
    -On va peut-être y réfléchir. Merci pour la cuisine en tout cas.
    -De rien… J’ai allumé le feu dans la cheminée aussi. Je me disais qu’on pourrais lire nos péchés et ainsi…
    -Excellente initiative, mais on a quelqu’un à vous présenter avant.
    Ils firent les présentations entre elle et Viggo et s’installèrent dans les canapés du salon. Lek sortit quelques bières du frigo et Lexxi alla attraper quelques beignets et en fourra un dans sa bouche au passage. C’est là qu’ils lui évoquèrent ce que le psyker avait appris, ce fameux contact que Gorimov devait rencontrer.
    -Ce serait quelqu’un en charge d’une des guildes de cette ville, ajouta Viggo.
    -C’est qu’il y a une dizaine de personnes ici en charge des guildes et toutes sont connectées au Triumvirat. Enonça Shidia, assise en tailleur sur un des fauteuils, tout en réfléchissant.
    -Et toutes gèrent un réseau d’informateurs ? Demanda Felton.
    -Toutes, non. Mais une d’entre elles sert de messagers pour le Triumvirat, mais aussi d’espions, d’informateurs et dispose même d’un groupe de…
    Elle hésita à formuler le mot qu’elle avait juste sur la langue, jetant un regard gêné. Poppy l’encouragea à parler.
    -Un groupe de quoi ?
    -Un groupe de voyantes. Des tireuses de cartes ou quelque chose comme ça.
    Viggo tiqua à l’évocation de ces nouveaux éléments.
    -Et vous auriez le nom de cette personne, ce contact que Gorimov devait voir ?
    -Oui, si c’est lui, il s’appelle Obedia Shom-Valaï.
    -Cela ne me dit rien, lui répondit Poppy. Elle vit cependant que le nom semblait évoquer quelque chose pour Lek et Felton qui se regardèrent avec un air entendu.
    -Quoi, vous le connaissez ?
    -On a déjà entendu parler de lui, en effet, répondit Felton.
    Vita locus Mors ludus
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    Illuminati

    le 07/02/2023 à 20:14 Citer ce message

    Chaines des Montagnes Sages, au sud du continent

    La base perchée au sommet des Montagnes Sages avait été un ancien relai vox, des années avant la guerre. Abandonnée depuis, la base était restée désaffectée jusqu’à ce que ses plans soient découverts à Newburg, en affrontant un culte heretek affilié à l’Ordo Hydra. Selon l’étude des données, il était plus que certains que les lieux aient été récemment réemployé par ces hérétiques. Après analyse des plans, l’investigatrice des ordos, Jézabel Callidia avait décidé de monter une opération commando avec objectif d’y recueillir des renseignements.

    La Valkyrie Vendetta noir mat se posa en douceur sur une des plateformes d’atterrissage dans une bourrasque de vent et de neige. La rampe arrière à peine baissée, Jézabel sentit le froid mordant tourbillonner dans l’habitacle et ce, malgré sa combinaison thermique. En dépit de la nuit noire, le ciel étoilé légèrement violacé se reflétait sur l’épais manteau neigeux, colorant l’environnement de teintes grises, variant dans les bleus et violets pâles. Elle sauta de la rampe, suivie de quatre commandos Tempestus en armure complète noire et armés de lasers radiants. Elle activa son microvox, s’éloignant du bruit des turbines de l’aéronef en plissant les yeux, ce qui lui fit voler ses cheveux noirs devant son visage.
    -Zéro-Un à Sept-Quatre, je veux un rapport de situation.
    -Ici Sept-Quatre, lui répondit le lieutenant Silon Tauros dans un crachotement de parasites, nous avons subi un accrochage mais désormais la zone est sécurisée, Madame.
    -Je vous rejoins. Terminé.
    Elle avait confié cette opération aux cellules Mortis et Tenebrae, assistées par une escouade de commandos Tempestus et elle avait été plutôt inspirée de prendre cette décision. Les hommes de Mortis étaient des soldats aguerris, tout comme les Tempestus, ce qui n’était pas le cas de Tenebrae qui étaient plutôt des analystes ou des enquêteurs.
    Elle pénétra dans la station dont la partie visible était une sorte de bunker massif et compact, accolé à flanc de montagne. D’anciennes antennes paraboliques en partie en ruine étaient toujours visibles un peu plus loin. En revanche, les générateurs à plasma de la station avaient très certainement été remis en fonction. Une rampe permettait d’y pénétrer depuis la plate-forme d’atterrissage et menait aux niveaux inférieurs du complexe. D’un signe, elle demanda aux commandos de la suivre. Elle emprunta les escaliers qui descendaient vers les autres niveaux, faisant claquer les talons de ses bottes sur les marches grillagées. Autour d’elle, les traces des combats étaient visibles et quelques feux brulaient encore depuis des carcasses calcinées de servitors et de servo-crânes tueurs. Depuis d’autres salles du complexe, elle vit que les autres acolytes étaient affairés à fouiller les bureaux et autres salles emplies de cogitateurs. Le lieutenant Tauros vint à sa rencontre et la salua. Il avait son fusil radiant en travers de la poitrine et un petit cigalho au coin des lèvres.
    -Madame, le site est sous contrôle.
    -Bien joué, lieutenant. Des blessés ?
    -Quatre blessés mais ils devraient s’en remettre.
    -Faites-les prendre en charge. Des survivants chez les hérétiques ?
    -Négatif. Nous n’avons affronté que des servitors ou robots de combat, des golephs hereteks. Il a fallu les neutraliser à coup de fuseur et plasma.
    Elle l’interrogea du regard.
    -Je veux dire… Pas de trace… D’humains ?
    Il hocha la tête avant de répondre.
    -Les gars de Tenebrae sont en train de vérifier les infos, mais je dirais qu’ils ont quitté les lieux, il y a déjà quelques jours.
    -Quitté les lieux ?
    -A la hâte, je dirais.
    -Ils se doutaient qu’on allait venir. C’était prévisible.
    Elisha venait soudain de les rejoindre. Elle salua Jézabel d’un petit signe de tête.
    -Madame.
    -Vous avez trouvé quelque chose ?
    -Ils ont tout brulé avant de partir, mais Marcus et Ordax-Kappa sont en train d’analyser ce qu’il reste, on a espoir de retrouver des indices. Il a…
    Jézabel lui demanda un instant. Elle se tourna vers les quatre Tempestus restés derrière elle.
    -Allez leur prêter main-forte, je veux qu’on embarque tout ce qui peut être emmené.
    Elle reporta son attention vers Jézabel et l’encouragea à poursuivre. Elisha lui demanda de la suivre vers une autre partie du complexe. Elle lui désigna une vaste salle circulaire dans laquelle elle pénétra. Au centre, se trouvaient huit corps gisant au sol, tous brûlés. Tous avaient dû être connectés par des câbles à des appareils complexes, des sortes de générateurs.
    -C’est un autre portail de Farnov, lui commenta Elisha.
    -Il était actif ?
    -Non, Madame. Les psykers captifs qui l’alimentaient ont tous été tué avant notre arrivée.
    -Donc techniquement… Il pourrait être réactivé ?
    -En théorie… Oui. Il faudrait le reconnecter à d’autres psykers.
    -Intéressant à savoir. Quoi d’autre ?
    Elisha la conduisit vers un autre étage inférieur et la conduisit dans ce qui avait dû être un laboratoire où se trouvaient encore des cuves à incubation mais aussi une salle contenant un appareil ésotérique d’une nature étrange. Ordax-Kappa était là, occupé à l’étudier. Il tourna ses optiques bioniques vers elle. Le détecteur psy qu’il portait à la main n’arrêtait pas de biper. Il approcha et coupa son appareil.
    -Le warp a bien été utilisé ici et massivement si on en croit les relevés. Mais il ne reste rien, l’Omniméssie soit loué.
    Elisha lui montra des fragments de données qu’ils avaient collecté.
    -On a découvert ceci parmi des documents qui avaient brûlé ici. Elle les montra à Jézabel qui entreprit de déchiffrer les codes employés. Les données étaient fragmentaires mais quelques morceaux de phrases se devinaient.
    -« … ntrôler… mmerce de psykers… d’accélé… éveil psych… parmi la popul… ouvrir le passage et… au portail qui… de… atalyseur psyc… pour diffus… Hydre sur Arch… ».
    Sur un autre document, elle fronça les sourcils en reconnaissant quelques mots :
    « … profiter que Cox compte approcher Haxt… rimov doit même faciliter cette confrontation… s’affaiblir pour reprendre la main sur le… ».
    Elle les observa tous les deux.
    -Bien joué.
    -Vous voulez qu’on prévienne Obscurus de ce qu’on a découvert, Madame ?
    -Je m’en charge, je remonte les contacter de toute urgence. Récupérez tout ce qui peut être emmené, puis faites placer le site sous quarantaine.
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    Illuminati

    le 13/02/2023 à 10:14 Citer ce message

    Sandbarra
    Planque de la rue Poissonnière de le cellule Obscurus
    Tempus estimare 027.021M42– 20h09
    Journée de la Crémation des Péchés.

    Obedia Shom-Valaï. Ce nom évoquait évidemment quelque chose à Lek et surtout à Felton. Lors de leur enquête deux mois auparavant, il était parvenu à obtenir ce nom grâce à son contact de la Kasballica, Sybel de Castel Sinclar. C’était juste avant qu’ils n’enlèvent Titus Valerius au Casino, dans la capitale, là où Lorne avait perdu la vie. Selon ce qu’ils avaient pu obtenir comme information, Shom-Valaï et quelques autres seigneurs marchands, dont Valerius, devaient rencontrer Bosinski et Haxt peu de temps après. Il était clair, toujours selon Sinclar que Haxt envisageait d’élargir son réseau d’influence, en y impliquant des maisons marchandes et des banques.
    Ils décidèrent d’interroger Shidia Coppertown sur le bonhomme en question. Elle connaissait bien Sandbarra et ses rouages aussi, elle leur confirma qu’il était en effet à la tête d’une des guildes de la ville, appelé le Palais des murmures, une organisation employant tout un réseau d’informateurs en plus de supposées voyantes. Cela semblait coller avec les informations données par Viggo, selon lesquelles, Walder Gorimov et Shom-Valaï devaient se rencontrer. Ils en profitèrent pour en savoir un peu plus sur les autres organisations qui tenaient la ville, comme ce mystérieux Triumvirat, dirigé par des personnages dont les noms ne leur évoquaient rien pour l’instant. Ils décidèrent cependant de prendre quelques notes sur chacune des guildes et sur les têtes qui les dirigeaient. Connus ou non, des personnes étaient très certainement liées directement au Syndicat de l’ombre et donc à Grendel Haxt qui continuait de tirer les ficèles, profitant d’être officiellement décédé.

    La nuit était tombée aussi Poppy décida qu’il était grand temps qu’ils abordent un tout autre sujet qui lui tenait à cœur. Elle avait demandé à toute l’équipe, Viggo y compris, de partager leurs péchés et ainsi pouvoir repartir avec ce poids de culpabilité en moins. Du fait de leur couverture et de leur clandestinité, ils firent cela en petit comité, sans la présence d’un prêtre, à l’inverse de la population qui s’était assemblée dans les rues de la ville, célébrant cette journée en public. Ils laissèrent Shidia en dehors de leurs confessions, elle aussi. Ils étaient donc tous les cinq réunis dans le salon, devant le feu de la cheminée. Chacun avait écrit quelque chose sur un papier et se mit à la lire devant les autres. Poppy décida de commencer. Elle leur parla d’une intervention qui avait mal tourné avant de rejoindre les ordos quelques mois auparavant. Des balles perdues. Une enfant. Même si selon l’Arbites, de tels dommages collatéraux étaient inévitables et ne constituaient pas des fautes en tant que tel, Poppy le prenait évidemment comme une erreur de sa part, un manque de vigilance, un excès de confiance, une faute de sa part en tout cas. Erreur qu’elle regrettait amèrement et qui la hantait depuis. En parler ainsi pour la première fois lui fit le plus grand bien. Après avoir lu ses confessions, elle les jeta dans le feu, rassurée de voir que l’équipe la pardonnait. Lek évoqua deux évènements. Le premier était de ne pas avoir réussi à protéger de Bosinski, Mira la fille qu’il aimait et qui était peut-être morte à cause de lui aujourd’hui. Le second était cette femme qui était morte, à cause de lui, le soir de leur attaque au Casino justement. Il était entré dans sa chambre, alors poursuivi par les hommes de main de Valerius et elle lui avait servi de bouclier humain. Il n’était pas fier de lui mais savait, comme Poppy que dans le feu de l’action, ce genre de drame était inévitable. A son tour, il jeta son papier dans les flammes et le laissa se consumer alors que chacun lui pardonnait ses fautes. Viggo et Lexxi eurent des confessions assez similaires. Des histoires d’amour qui n’en étaient pas. Lui, avait fait croire des sentiments à un récent compagnon, quant à Lexxi, elle leur avoua que son histoire avec Derreck était similaire à celle de Viggo. Elle n’avait pas été sincère. Enfin, Felton fut le dernier à leur avouer quelque chose. Avant d’être enrôlé par les ordos, il avait eu une femme et un enfant et les avait abandonnés sur Eshunna. Poppy s’était attendue à ce qu’il parle des arbitrators abattus, qu’il regrette ce geste malheureux mais finalement, elle resta plutôt étonnée par cet aveu inattendu. Pouvait-elle encore le blâmer d’avoir du sang sur les mains ? A présent qu’ils travaillaient pour les Ordos, cela ne signifiait plus rien en réalité. La fin justifiait tous les moyens, dans la mesure où ils ne franchissaient pas cette ligne rouge sur laquelle ils marchaient tous désormais.
    Ils prirent quelques heures de repos puis, dans la nuit et profitant du crépuscule, ils décidèrent de retourner dans le Quartier Solaire mais par prudence, ils laissèrent Lexxi pour surveiller Shidia. +

    Cette fois-ci, il n’était pas question de se laisser surprendre par des gardes devant la villa. Ils prirent justement le temps de calculer les intervalles entre chaque ronde. Cela leur laissait entre sept et huit minutes pour intervenir. Tandis qu’ils restaient dissimulés dans les ombres d’une ruelle, Felton se faufila jusqu’à la double porte de l’enceinte de la villa, côté rue et s’apprêta à forcer la serrure. Il activa son microvox.
    -La porte est déjà ouverte, il doit y avoir du monde, je vais y aller doucement.
    -D’accord, entre et tâche de ne pas te faire repérer. Dès que la voie est libre, on te rejoint, lâcha Poppy.
    -T’es maline, toi… Et si y a du monde, justement ?
    -Eh bien, fais en sorte de les éviter et de les identifier. On sera derrière toi.
    En grommelant, Felton enfila sa cape nocturne, se faufila par les lourdes portes battantes et se retrouva dans un hall qui donnait tout droit vers un jardin intérieur situé droit devant lui. A sa droite et à sa gauche, se trouvaient deux couloirs étroits menant vers d’autres portes. Enfin, depuis le hall, des escaliers montaient vers les étages. Le tout était plongé dans la pénombre. Seul le jardin intérieur était faiblement éclairé par le ciel étoilé qui diffusait une douce lueur vers le hall. Il observa et écouta autour de lui, mais ne perçut rien, aucun son. Il voxa l’équipe qui vint le rejoindre discrètement. Une fois tous dans le hall, Viggo les alerta alors que ses sens psychiques étaient en éveil.
    -Attendez… Je ressens quelque chose, leur dit-il dans un murmure.
    Ils l’interrogèrent du regard, soudain inquiets.
    -Comment ça ? Quel genre de… Chose ? Lui demanda Felton.
    Viggo se concentra en fermant les yeux, comme cherchant à capter un son ou une odeur.
    -Des pouvoirs psychiques ont été utilisé ici.
    -Récemment ? Demanda Felton.
    -Oui… il y a quelques minutes, tout au plus.
    -De quelle nature ? Le questionna Poppy.
    -Je ne reconnais pas la signature… Pas Psykana… C’est…
    Il ouvrit les yeux, soudain mal à l’aise, comme ayant un goût acide dans la bouche.
    -Xenos…
    -Quoi ? S’étonna Poppy. Vous êtes sûr ?
    Il hocha la tête par l’affirmatif.
    -Qu’est-ce que des xenos foutraient ici ? Lâcha Felton.
    -Le Commerce froid ? Se hasarda Lek.
    -Oui, mais quand même… Y a pas de xenos sur Archaea, non ?
    -Il faut croire, qu’à présent, si, lâcha Poppy en dégainant son Carnodon et en vérifiant le chargeur. Les autres l’imitèrent en sortant leurs armes. Elle interrogea Viggo.
    -Où est ce xenos ?
    Il pointa son index vers le plafond.
    -Dans les étages, quelque part.
    Elle désigna Felton, de nouveau.
    -Tu ouvres la marche, je te suis et je couvre, ok ? Il faut qu’on le trouve.
    Felton n’avait soudain, pas l’air aussi convaincu. Elle désigna Lek.
    -Tu nous suis, mais tu couvres les arrières et notre psyker. On se met en mouvement, je veux savoir ce qui se trame, ici.
    Elle laissa Felton gravir les escaliers en silence, le suivant quelques mètres derrière. Une fois parvenu à l’étage, elle le perdit de vue alors qu’il disparut à l’angle d’un couloir. Elle entendit un bruit sourd, comme celui d’un corps qui tombe sur un tapis. Elle se précipita à l’étage, arme pointée, en l’appelant à voix basse. C’est là qu’un puissant bras augmentique la saisit à la gorge en serrant tel un étau, la souleva du sol et la projeta avec force, la tête la première contre le mur d’en face. Elle n’eut même pas le temps de ressentir la moindre douleur. Juste un choc trop brutal et tout devint noir. Cette fraction de seconde avait suffi à Lek qui était sur ses talons pour deviner la scène. Il s’y était attendu et avait vu Poppy être projetée dans la pièce. Il pointa ses deux Carnodons à silencieux, à bout portant sur son agresseur, un type bardé d’augmentiques et ouvrit le feu en rafales. Son adversaire était armé d’un lourd fusil d’assaut menaçant mais n’eut pas le temps de s’en servir. Cinq ou six balles blindées le touchèrent. Les rafales tirées par Lek le traversèrent de part en part dans une bruine rouge qui moucheta la paroi derrière lui, contre laquelle il fut projeté avant de s’écrouler au sol, tué sur le coup. La porte derrière Lek s’ouvrit, laissant passer un autre individu, armé d’une carabine laser modifiée. L’homme hésita, l’espace d’un instant. Cela fut suffisant pour Lek qui pivota et lui tira dessus, de nouveau à bout portant, le renvoyant dans le couloir, criblé lui aussi, comme son collègue. Viggo l’avait rejoint et tandis que Felton était en train de se relever, après avoir été juste assommé, il aida Poppy qui était réellement commotionnée. Du sang coulait de son crâne meurtri et son épaule lui faisait un mal de chien. Lek était en train de recharger ses armes à la hâte, tout en surveillant le couloir. Elle se releva en serrant les dents, tout en se frottant l’épaule. Elle interrogea Viggo du regard en lui désignant les deux corps. Avec leurs implants, ils ressemblaient assez finalement aux hommes de main de Caleb Cox.
    -Ils ne m’ont pas l’air de ressembler à des psykers xenos ?
    -Ce ne sont pas eux… Lâcha Viggo. Le psyker xenox est toujours là, quelque part dans le bâtiment.
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    Illuminati

    le 16/02/2023 à 22:15 Citer ce message

    Deux escaliers étroits menaient vers les étages supérieurs. Le bâtiment, plongé dans la pénombre était composé de deux ou trois étages qui entouraient une cour intérieure ou patio, où se trouvait un petit jardin. La cour servait aussi de puit de lumière et apportait un minimum de clarté dans les étages, diffusé par le ciel étoilé et distribué par des balcons intérieurs. Le tout se communiquait par plusieurs escaliers en pierre blanche, comme l’étaient les murs, ce qui réfléchissait un semblant de lumière blafarde dans le bâtiment. Les nombreuses pièces étaient traitresses cependant, car les ombres étaient d’autant plus nombreuses. Ils ajustèrent leurs photoverres, à l’exception de Viggo qui n’en portait pas, ce qui amplifia aussitôt la lumière ambiante, donnant des teintes grises plus ou moins claires à tout leur environnement. Plaqué contre un des murs, au bas d’un des escaliers, il venait tout juste de recharger ses deux canons de poing et écoutait ce qui se passait dans les couloirs ainsi que juste au-dessus. A voix basse, un peu plus loin, Viggo proposa à Poppy de l’aider alors que des étincelles courraient le long de ses doigts.
    -Je peux vous soigner, si vous le désirez ?
    Elle eut un petit rictus de dégout, presque instinctivement, plutôt mal à l’aise à l’idée qu’un psyker pose ses sales pattes sur elle.
    -Non, ça ira, lui dit-elle, tout en penchant sa tête de côté et faisant craquer ses cervicales endolories avec une grimace. Surveillez plutôt le bâtiment, nous avons toujours une menace qui rode.
    Lek et Felton activèrent les boitiers qu’ils portaient à la ceinture et qu’Ordax Kappa leur avait fabriqué. Les générateurs anéchoïques, plus communément appelés assourdisseurs avaient pour avantage d’étouffer les bruits autour de leur porteur. Cela pouvait être particulièrement utile en cas d’infiltration, dans la mesure où son porteur n’avait pas besoin de communiquer. Ils prirent un escalier chacun et se dirigèrent en silence vers l’étage suivant. Lek avait perçu des échanges de voix entre deux personnes, aussi une fois parvenu à l’étage dans une sorte de suite qui desservait plusieurs pièces confortablement meublées, il coupa l’assourdisseur et écouta de nouveau. Cela le mena vers une porte, à peine entrebâillée dans un hall donnant sur un bureau. Il poussa la porte à l’aide du canon à silencieux d’une de ses armes.
    -Brann, c’est toi ? Lâcha la voix, qui visiblement avait vu la porte bouger.
    Lek ouvrit lentement la porte. Un homme armé était affairé à fouiller un bureau. Il affichait plusieurs augmentiques et des tatouages sous son treillis urbain, un peu comme sur les tueurs déjà croisés à la morgue. Il tourna ses yeux bioniques vers la porte et se saisit soudain de son pistolet mitrailleur, réalisant qu’il ne s’agissait pas du supposé Brann. Le premier tir de Lek, le frôla à l’épaule et le fit pivoter ce qui fait que son tir manqua sa cible. Il chercha à dégainer l’épée qu’il portait à la ceinture mais le second tir de Lek le toucha à deux reprises en pleine tête, lui explosant ses augmentiques en même temps que le contenu de sa boite cranienne. Il bascula en arrière alors que le sang gicla de son visage fracassé et s’effondra sur le lit situé juste derrière, ce qui étouffa le bruit de sa chute.

    A l’opposée du couloir, Felton s’était dirigé vers une autre porte et allait pour écouter lorsque cette dernière s’ouvrit brusquement. Il se trouva alors nez-à-nez avec le supposé Brann, tout aussi surpris que lui. L’homme en question portait une sorte de court fusil laser radiant mais se trouva dans l’impossibilité de le pointer devant lui. Ne perdant pas ses moyens pour autant, il fit jaillir de son bras augmentique, bardé de métal, une lame menaçante de trente centimètres et chercha aussitôt à embrocher Felton avec. Viggo venait tout juste de parvenir à l’étage et s’apprêtait à rejoindre Lek lorsqu’il vit que Felton était en difficulté. Voyant mal dans la pénombre et dans l’incapacité d’agir alors qu’ils étaient déjà engagés en plein corps à corps, il préféra se concentrer, s’apprêtant à utiliser un de ses pouvoirs. Gênée à son tour dans les escaliers, Poppy revint en arrière afin de passer par l’autre escalier pour rejoindre Lek. Felton évita la lame de son adversaire d’un cheveu et pivota sur le côté, accompagnant son mouvement en se saisissant du canon de l’arme laser. Il profita de l’inertie pour lui arracher le fusil radiant des mains mais dans la confusion, l’autre lui planta sa lame dans la cuisse jusqu’à la garde avec un sourire mauvais. La douleur et le choc fit vaciller Felton qui s’écroula au sol en se tenant la jambe d’où le sang se mit à gicler. Son adversaire en profita pour récupérer son fusil radiant, bien décidé à s’en servir sur Viggo et Poppy qui se trouvaient à quelques mètres de là, pile dans sa ligne de mire. Dans sa précipitation, il ouvrit le feu mais son tir passa juste entre les deux. Sans lui laisser le temps de viser à nouveau, Poppy le chargea, matraque à la main. Viggo en profita pour se charger de Felton qui était au plus mal. Il le tira vers lui et concentra ses énergies autour de ses mains.
    De son côté, Lek n’avait aucun visuel sur ce qui se passait, il se trouvait désormais à plusieurs pièces de là et se déplaçait toujours avec prudence, arme pointée, paré à abattre toute menace. Il ouvrit une autre porte légèrement, donnant sur un couloir à l’extérieur de la suite, un de ceux qui servaient de balcon intérieur. A une quinzaine de mètres de là, il vit avec stupeur une silhouette vêtue d’une longue robe noire à capuche et bardé de mécadendrites garnies de lames crépitantes d’une énergie inquiétante, comme ondulant autour de lui. L’être en question était en train de se diriger à grand pas vers la double porte qui devait très certainement donner juste là où Viggo, Poppy et Felton se tenaient. Il coupa son assourdisseur et activa son vox à la hâte.
    -On n’est pas seuls… Je confirme… Ecartez-vous tout de suite du hall où vous êtes, on a un… Une sorte de putain d’heretek qui va vous tomber dessus !
    Dans le hall, de l’autre côté de la porte, Poppy était en plein corps à corps contre son adversaire mais ne parvenait pas à s’en débarrasser tandis que sa matraque se heurtait à sa lame. Luttant de toute ses forces, elle répondit dans son microvox.
    -On aimerait bien bouger mais là, ça ne va pas être possible.

    Cinq ou six tirs fusèrent droit vers le personnage aux mécadendrites et le frappèrent dans le dos, l’envoyant s’écrouler au sol juste avant qu’il ne se jette sur la porte. Des tirs de laser, puissants et quasiment impossible à détecter, même de nuit. Des armes de précision. Le souffle coupé, Lek allait répondre mais fut aussitôt interrompu. Une silhouette floue se matérialisa juste devant lui. La nature xenos de l’être enveloppé dans une cape de brouillage visuel ne faisait aucun doute. Ce dernier le fixait de son regard insondable aux yeux en amande, aussi déroutant que celui d’un félide verrouillant sa proie. Il eut un geste presque humain pour un xenos, il pointa son index devant sa bouche, lui indiquant de ne surtout pas bouger ni faire le moindre bruit avec un certain air narquois. Dans son champ de vision, presque derrière lui, Lek repéra un second xenos qui le tenait en joue avec son long fusil à précision, sans doute depuis quelques secondes. Il se retint même, de respirer.

    Poppy eut soudain le visage moucheté de sang. Un trou fumant venait d’apparaitre dans le front de son adversaire, au point qu’elle pouvait voir au travers de son crâne et de ses implants encore fumants le tireur qui se situait de l’autre côté d’une des fenêtres de la pièce. L’homme bascula sur le côté tel un sac. Elle allait réagir mais constata que deux autres tireurs se tenaient là, à chaque fenêtre, comme apparaissant soudainement, les maintenant en joue, immobiles. Elle sentait le sang lui couler sur le visage mais ne préféra pas bouger. Derrière elle, elle entendait Viggo lutter pour tenter de sauver Felton au sol. Elle activa son microvox, lentement. Parlant à voix basse, bien consciente que cela ne servait pas à grand-chose de toute façon.
    -Lek ? Il se passe quoi, là ?
    Lek était totalement subjugué par ce qu’il voyait. Un autre aeldari qui ne pouvait être qu’une sorte de chef apparut soudain, comme désactivant lui aussi un système de brouillage visuel. Il ou elle, portait une armure composite moulante, souple et assurément dans une matière exotique. La créature portait une longue cape bordée de fourrure et arborait un casque qui lui donnait des airs insectoïdes. Se déplaçant tel un félidé, sans bruit et avec une souplesse de prédateur, le xenos effectua un geste élégant de sa main gauche dans laquelle une arme de poing apparut, comme jaillissant de sa ceinture. Pointant le pistolet droit sur l’heretek au sol, pas encore mort et cherchant à se redresser péniblement, il fit feu à bout portant. Le rayon dévastateur émit une lueur aveuglante et le cloua de nouveau au sol tandis que des sortes de longs bras aethériques translucides serpentaient autour de lui, cherchant à se saisir du xenos. D’un mouvement qui aurait pu passer pour une sorte de danse, de son autre main, il fit tournoyer un long sabre nimbé d’une énergie bleutée et le lui planta à la base du crâne, faisant craquer os et augmentiques dans une gerbe de fluide rouges et noirs. Les longs tentacules disparurent aussitôt. Parvenu devant sa proie, d’un coup de botte il retourna le corps inerte à la tête encore fumante. Puis, avec la pointe de son sabre, d’un geste fluide, il lui ouvrit le torse, comme un chasseur ferait avec un gibier. Il se pencha sur le corps, préleva dans la plaie deux gemmes scintillantes qu’il serra dans sa main avant de les déposer avec précaution dans une bourse accrochée à sa ceinture. Enfin, il se mit à reculer vers la terrasse d’où il était arrivé, sautant sur la rambarde et se maintenant en équilibre sur un pied, juste avant de sauter vers les deux étages qui le séparait de la cour tout en bas. Les autres xenos en firent de même, sans doute informés d’une manière ou d’une autre, disparaissant les uns après les autres en un instant.
    Lek finit par reprendre son souffle et ses esprits. Il se précipita de nouveau dans la suite, traversant les pièces pour retrouver Poppy et les autres. Felton avait été grièvement blessé à la jambe mais le psyker était en train de s’en occuper. Poppy l’interrogea du regard tandis qu’elle était en train d’essuyer son visage plein de sang et qu’elle aidait Viggo avec Felton.
    -C’était quoi ça ? Trône ces xenos étaient là pour quoi ?
    -Je ne sais pas… J’ai vu l’un d’eux prélever des espèces de gemmes sur l’heretek qu’ils ont tué juste dehors.
    -Des gemmes ?
    -Oui… des sortes de cristaux. Je crois que c’était des aeldari. Les pierres ressemblaient à celles qu’ils portent sur eux comme bijoux.
    Viggo releva son regard vers lui, aidant Felton à se redresser, au passage.
    -Ce sont ce qu’ils appellent des pierres-esprits, je crois.
    -Et ils sont venus juste pour récupérer des quoi ? Des bijoux ? Lui demanda-t-elle.
    -Ce sont des artefacts psychiques très puissants. Il paraitrait que ces pierres peuvent renfermer les âmes des défunts selon leurs croyances.
    Poppy eut un petit rire moqueur.
    -Elucubrations xenos. Leur sorcellerie et leur pratique de la nécromancie ne sont qu’abominations, de toute façon.
    -Je sais bien, mais… Ils nous ont pourtant laissé en vie, renchérit Lek.
    -Ne cherche pas à y voir pour autant une quelconque logique. Ils peuvent aussi bien nous épargner aujourd’hui et rêver de nous égorger demain. Ils représentent une autre menace et nous allons devoir les avoir aussi à l’œil. A ce sujet, tu es vraiment sûr qu’ils sont bien partis ?
    -Je vais jeter un coup d’œil dans les autres pièces…
    -Fait cela. Considère qu’ils sont toujours une menace.
    Il hocha la tête et s’en retourna vers les autres pièces. Elle reporta son regard vers Felton. Il était blanc comme un mort et semblait plutôt déguster.
    -Il va pouvoir marcher ? Demanda-t-elle à Viggo.
    -Pas sans aide et il va devoir y aller doucement. La lame qu’il lui a plantée était enduite d’une sorte de poison. Il nous faudrait un medikit, des antiséptique et du De-tox au plus vite.
    -On a ça à la planque. Il a combien de temps ?
    -Je ne sais pas. Une heure, deux tout au plus, je dirais. Au-delà, il risque un empoisonnement généralisé.
    -Alors hâtons-nous. Commencez à l’aider à descendre. Je vous rejoins.
    Elle se releva et activa son microvox.
    -Lek, tu as du nouveau ?
    -Négatif, je ne vois rien.
    -Continue de fouiller les pièces, je te rejoins. Si ces types étaient là, je parle des assassins et de l’heretek, c’est qu’ils comptaient bien mettre la main sur quelque chose laissé par Cox, un détail que la cellule Mortis a peut-être raté.
    Elle finit par le rejoindre dans une des chambres de l’étage.
    -Ces types ne te rappellent pas quelque chose ?
    -On dirait presque ceux de la morgue ou du train de Bitter Bog, non ?
    -J’y ai pensé sur le coup, mais je pencherais plus pour ceux de Newburg. Les assassins malteks de l’Ordo Hydra. Ceux de la grotte avec le portail xenos.
    -Maintenant que tu le dis, c’est vrai qu’ils ont les mêmes marques sur eux.
    Elle se dirigea vers le corps de l’heretek et entreprit avec l’aide de Lek de le fouiller méthodiquement.
    Outre les nombreux implants augmentiques et divers appareillages inconnus et inquiétants, elle finit par mettre la main sur une sorte de porte-monnaie en cuir tout simple. Elle trouva l’objet aussi décalé que banal sur un tel personnage. Elle l’ouvrit et n’y trouva que quelques pièces de menue monnaie, ce qu’elle trouva d’autant plus étrange. Elle le vida, laissant les pièces tomber au sol en tintant puis inspecta le cuir et constata qu’une des doublures semblait plus épaisse d’un côté. Elle dégaina son poignard et entreprit de découper soigneusement la couture. Son intuition était la bonne. Elle y trouva une photo. Une image pix en noir et blanc, montrant l’image d’une villa. Pas celle où ils étaient en tout cas. Elle se releva, un petit sourire au coin des lèvres. Lek l’interrogea du regard. Elle lui montra la photo.
    -Je pense qu’on a trouvé ce pourquoi ils étaient là. Les hereteks recherchent aussi Caleb Cox.
    -On devrait peut-être dégager ?
    Elle lui désigna la suite, juste derrière eux.
    -Mets le feu, je ne tiens pas à ce qu’on laisse des traces derrière nous. Je vais rejoindre les deux autres, retrouve-nous dès que tu as terminé.
    Il hocha la tête et se dirigea vers une des pièces. Il y avait des flambeaux à tous les murs, il suffirait d’en allumer un, d’enflammer quelques meubles et tapisseries et le tour serait joué.

    Moins d’une heure plus tard, ils étaient de retour dans la planque de la rue Poissonnière et venaient d’informer Lexxi sur ce qui s’était passé. Elle avait dû restée à l’appartement pour garder un œil sur Shidia et en avait profité pour commencer à tenir un inventaire complet de leur équipement.
    Shidia justement, était affairée dans une des chambres, reconvertie en infirmerie pour l’occasion, à tenter de sauver la jambe de Felton.
    Le reste de l’équipe s’était retrouvé dans le salon, assis dans les canapés, à souffler un peu. Poppy avait donné la photo à Viggo.
    -Vous pouvez en tirer quelque chose avec votre… votre divination ?
    -C’est dans mes cordes. Vous voulez que je retrouve cette maison, c’est ça ?
    -C’est l’idée. Mais faites ça dans une autre pièce. Je ne voudrai pas être désagréable, mais le warp et moi, ça ne fait pas forcément bon ménage.
    Il eut un sourire blasé en levant les yeux au plafond, puis se dirigea vers la cuisine. Au bout de quelques minutes, il revint et lui rendit la photo.
    -Cette villa est ici, à Sandbarra. A environ un kilomètre et demi d’ici, au nord-ouest. A deux-cents mètres près.
    Elle l’interrogea du regard, en plissant les yeux.
    -Vous êtes sûr ? Donc, de nouveau dans le Quartier Solaire ?
    Il haussa les épaules.
    Lexxi venait de placer le plan de la ville sur la table basse, juste devant eux. Elle désigna la zone en question en l’entourant à l’aide d’un stylus rouge.
    -Cox serait à quoi ? même pas six cents mètres de là où vous étiez tout à l’heure ?
    -Eh bien… Demain, on ira s’en assurer.
    -Pas cette nuit ?
    -Non, on a tous besoin de repos et l’état de Felton m’inquiète un peu.
    Elle se leva du fauteuil.
    -Il faut que je parle à Shidia de toute façon. Tâchez de prendre un peu de repos.

    Elle la trouva dans la salle d’eau, alors qu’elle était affairée à se laver les mains encore tâchées de sang. Poppy referma la porte et vint s’assoir sur le coin d’un petit meuble, tout en croisant les bras. Shidia l’observa alors qu’elle s’essuyait les mains.
    -Il devrait s’en sortir, si c’est votre question mais je m’inquiète quand même pour sa jambe.
    -Il ne va pas la perdre ? Si ?
    Shidia secoua la tête.
    -Le fémur est touché ainsi que plusieurs muscles de la cuisse. A un centimètre près, son artère fémorale était sectionnée et là… Il serait mort en moins de deux minutes. Sa jambe ne pourra pas se remettre sans un maximum de repos. Mais ce qui m’inquiète c’est surtout le poison employé. Du venin de pestiflore. Une très jolie plante que l’on trouve sur la côte sud du continent, sur le littoral. Son parfum est plutôt agréable mais son essence produit un neurotoxique qui s’attaque au système nerveux et musculaire et qui, s’il n’est pas mortel, peut entrainer une paralysie plus ou moins grave.
    -Et… Vous pouvez faire quelque chose pour lui ?
    -Je l’ai mis sous Immaculite en intraveineuse et lui ai injecté cinq CC de Panimmune. Sa jambe gardera sans doute des séquelles et rien ne garantit qu’il n’ait pas recours malgré tout à une prothèse augmentique.
    -Vous avez l’air de bien connaitre ce genre de chose.
    Shidia eut un léger sourire sans humour.
    -Quand on est chirurgienne, il vaut mieux, croyez-moi.
    Elle observa la porte fermée et Poppy qui lui faisait face.
    -Vous n’êtes pas juste venue me parler de votre équipier, c’est ça ?
    -Je vois que vous êtes perspicace.
    Shidia s’assit à son tour sur le rebord de la baignoire.
    -Je vous écoute.
    -Je ne vous cache pas que votre cas est plutôt particulier. Vous vous êtes rendue coupable en aidant des criminels. Gorimov ou ce… Zacharie sont des hérétiques de la pire espèce et vous avez frayé avec eux, consciemment ou non, cela ne fait quasiment pas la moindre différence pour la Lex Imperialis.
    Elle laissa quelques secondes passer avant de poursuivre.
    -Et d’un autre côté, nous avons besoin de votre témoignage direct afin d’identifier Zacharie. De plus… Vos capacités nous intéressent. Votre connaissance de cette ville, de ses rouages et de la mafia qui la gère. Ça, en plus de vos aptitudes médicales pourraient faire de vous une informatrice, un véritable atout.
    -Un atout… Pour… ?
    -Comme vous le savez, nous sommes des… enquêteurs de l’Arbites. Notre équipe a besoin d’informateurs, de spécialistes ou d’auxiliaires sur le terrain. Avez-vous une certaine connaissance du terrain ?
    -J’ai quelques bases. Avant la guerre, j’ai passé mes dernières années de médecine au sein d’une unité du Magistratum.
    -Medic de terrain ?
    Elle désigna son bras gauche, un solide augmentique en plastacier renforcé qu’elle tapota de son autre main.
    -C’est là que j’ai perdu mon bras dans un attentat. Et encore, j’ai eu de la chance comparée à certains…
    -Manier des armes, vous savez faire ?
    -Ma vocation est surtout de sauver des vies, mais au besoin, je me débrouille avec un pistoler laser. Avec un pistolet à aiguilles aussi.
    Poppy hocha la tête.
    -On pourrait vous prendre à l’essai dans l’équipe. Disons que ça pourrait effacer vos erreurs passées. Vous en pensez quoi ?
    -Dans ce cas…
    -Il faudra évidemment suivre nos ordres à la lettre et ne pas poser de question. C’est envisageable pour vous ?
    - Ça devrait être possible. Je dois vous appeler comment ?
    -Agent Sandwall.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 20/02/2023 à 11:43 Citer ce message

    Le Reliquaire
    Bureau inquisitorial sur Archaea
    Tempus estimare 028.021M42– 05h15

    Jézabel Callidia se releva de devant l’autel où elle s’était agenouillée, effectua le signe de l’Aquila puis tourna son regard vers Ezek Thaddaeus.
    -Etait-ce urgent ?
    -Je pense que oui, Madame. Il se…
    -Pas ici, nous sommes dans un lieu saint. Suivez-moi.
    Elle ressortit de la chapelle et traversant une bonne partie du complexe souterrain, elle se dirigea vers son bureau. Elle l’invita à entrer puis referma la porte derrière elle.
    -Eh bien ?
    -Nous venons de recevoir deux messages, Madame. Le premier est une transmission astropathique en provenance du sous-secteur Endymion. Le deuxième est un message vox en provenance de la ville de Sandbarra.
    Il lui tendit les missives. Le premier était un parchemin retranscrivant une transmission vox cryptée. Elle s’assit et utilisa son sceau inquisitorial pour déverrouiller le chiffrement du message avant de le parcourir. L’agent Sandwall lui faisait part de leurs récentes avancées à Sandbarra. La présence de Cox était confirmée et il était sur le point d’être localisé dans les prochaines heures. L’autre point qui attira son attention était la mention de l’Ordo Hydra. Leur présence n’était pas anecdotique. Entre Newburg, la base Abraxas et maintenant Sandbarra, il était clair qu’ils avaient peut-être sous-estimés cette présence bien plus insidieuse que celle du Syndicat de l’ombre. Selon Obscurus il était fort probable que l’Hydra cherche à infiltrer le Syndicat et son commerce de psykers émergents. La déduction paraissait pertinente, selon Jézabel. Enfin, elle signala la présence d’aeldari, apparemment hostiles aux agents de l’Hydra et demandait des renforts, vues les factions en présence.
    Cela la laissa songeuse l’espace d’un instant. Elle reposa le document sur son bureau.
    -La cellule Mortis est toujours occupée ?
    -Oui, Madame, le lieutenant Tauros et ses hommes assurent la sécurisation de la base Abraxas.
    -Et votre équipe ? Elle serait opérationnelle sous quel délai ?
    -Eh bien… Nous avons encore deux ou trois jours pour terminer les analyses de…
    -Faites venir Elisha Ulth dans mon bureau.
    Ezek effectua le signe de l’Aquila puis ressortit. Elle hésita un instant puis ouvrit le second message, sur lequel elle reconnut le sceau de leur inquisiteur, Karl Anders. Ils échangeaient régulièrement depuis son départ pour le secteur Endymion. Elle savait que si, du jour au lendemain, il était parti vers ce sous-secteur, ce n’était pas seulement pour la menace d’un conflit qui plongeait plusieurs systèmes dans la guerre. Quelques années auparavant, avant qu’il soit inquisiteur, il avait accompagné leur inquisitrice de l’époque, Séverina d’Angelis sur Endymion. Il y avait rencontré une femme, une guerrière locale du nom de Veyda, avec qui il avait eu une liaison d’où était né un enfant, après son départ. Le jeune garçon était désormais âgé de quatre ou cinq ans et la mère, à en croire les rapports, siégeait désormais au conseil militaire du gouvernement actuel et était en passe de prendre le poste de gouverneur.
    Jézabel se calla dans son fauteuil en fermant les yeux pendant quelques minutes. Puis elle reprit son souffle.
    Les forces impériales en présence dans le secteur Endymion tentaient toujours de contrer une émergence de cultes fanatiques dédiés à un des Primarques maudits, dévoué au Dieu de la guerre et du sang. Anders, comme certains de ses confrères inquisiteurs, avaient pris le haut commandement de véritables armées, comptant des Chevaliers Gris, des Sœurs du Silence, des unités légendaires de Custodiens mais aussi de l’appui de Sainte Alicia Antiphonia et de la Sororitas, de troupes de choc, de Primaris des chapitres des Black Templars, de la Raven Guard et des Star Phantoms, sans compter une partie de la Flotte Maelstrom en soutien de légions titaniques venus d’Angstrom. Même ainsi, avec une armée capable de raser tout un secteur, les ordos patinaient et peinaient à contenir les hordes démoniaques appuyés de légionnaires renégats et de leurs séides fanatiques. Il était clair que le conflit s’enlisait dans une guerre d’usure sur certains mondes devenus désormais des champs de bataille à ciel ouvert. Un peu partout, sur d’autres secteur, la situation se répétait. Tôt ou tard, ce conflit allait tourner à l’avantage d’un des deux camps et pour l’heure, il était clair que l’Imperium montrait indubitablement des signes de faiblesse.
    Même s’il restait des plus secrets sur la nature exacte de son agenda, Karl Anders prenait grand soin de suivre l’avancée de leur enquête sur Archaea, toujours soucieux de la sécurité de cet agrimonde. Selon lui, l’objectif restait inchangé et il était crucial de faire tomber Grendel Haxt. La cellule devait donc restée totalement concentrée sur ce point. Cela pouvait presque paraitre dérisoire à l’échelle d’un conflit sur un secteur mais il n’en était rien. Archaea attirait bien des convoitises et si ce monde tombait, tout le secteur Badab s’en trouverait affaibli, risquant même de réduire certains ravitaillements vers Endymion qui de fait, se trouverait encerclé. Les autres sous-secteurs voisins, tels que Golgotha, Magog, Karthago, Khymara ou les Etoiles livides, en subiraient rapidement les conséquences, impactant non moins de soixante-dix systèmes d’importance vitale en termes de ravitaillement. Archaea avait beau être un simple agrimonde, il était la pierre angulaire d’un édifice déjà fragile et laisser des cultes émergents, des fanatiques ou des organisations hérétiques saper ses fondations n’était absolument pas permis. D’où la lourde tâche de l’Inquisition de couper les têtes à l’origine du mal.
    Informé des derniers évènements, il félicita Jézabel d’avoir intégré Poppy Sandwall dans l’équipe. Selon lui, elle ne pourrait que remettre de l’ordre dans cette cellule qui en manquait cruellement, s’il en croyait les derniers rapports. Le fait d’avoir écarté Rico l’avait peut-être étonné mais il n’en montra rien en tout cas, il réitéra sa confiance en Jézabel pour gérer ces points-là et pour prendre toutes décisions en son absence et en son nom. Il lui précisa aussi, pour donner suite à une de ses récentes questions sur des éventuelles futures nominations, que selon lui, il était bien trop prématuré pour aborder un tel sujet. Primus ou interrogateur n’étaient donc pas à l’ordre du jour. Malgré un potentiel, cette cellule était encore trop récente de toute façon, et puis Cox et Haxt étaient toujours dans la nature. De fait, des résultats étaient non seulement attendus, mais surtout, l’échec n’était absolument pas envisageable.
    On frappa à la porte.
    -Entrez.
    Elisha pénétra dans le bureau en effectuant le signe de l’Aquila.
    -Vous m’avez fait demander, Madame ?
    Jézabel reposa le document sur son bureau et lui demanda de fermer la porte.
    -Je vous laisse huit heures pour boucler le travail et vous coordonner avec Mortis sur les résultats, à la suite de quoi votre cellule part pour Sandbarra sous couverture complète. Dans douze heures, vous êtes sur place, en soutien de la cellule Obscurus. Je veux impérativement qu’ils prennent Caleb Cox vivant. Si on suit sa logique, il est à parier qu’il sait déjà où et quand approcher Haxt, Bozinski et tous les noms de ce réseau. Je veux les noms et je veux qu’ils tombent. Vous me faite tomber ce réseau criminel qui gangrène cet agrimonde. Vous l’infiltrez ou vous faites tomber les têtes qui le dirigent, ça m’est égal, mais tout le réseau d’alimentation en psykers émergents doit tomber. C’est pour cela que vous finissez le travail avec Mortis avant, car je veux tout savoir sur les projets de l’Ordo Hydra et leur lien avec cette affaire. Je vais informer le Justicar Cain pour qu’il monte une task force et tienne ses hommes parés à intervenir avec un détachement de troupes d’élites des FDP pour vous appuyer mais seulement en cas d’intervention en ville. Des questions ?
    -Non, Madame.
    -Alors, en piste.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 21/02/2023 à 16:38 Citer ce message

    Au même moment à Sandbarra, Lek, Lexxi et Viggo étaient partis de nuit, faire un simple repérage au niveau du quartier Solaire, laissant le reste de l’équipe prendre un peu de repos et Poppy se charger d’échanger avec Jézabel par vox.
    Avant qu’ils ne partent, tous les trois, elle leur avait demandé de ne surtout pas intervenir et s’en tenir à une stricte observation. Grâce aux indications de Viggo, ils finirent par trouver la villa supposée de Caleb Cox. En approchant, depuis la rue qui comptait quelques belles demeures et profitant de la pénombre, ils tombèrent sur une villa entourée d’un mur d’enceinte de trois mètres de haut, d’une double-grille à l’entrée donnant sur un vaste jardin. Au fond, la villa était éclairée et de là où ils étaient, ils pouvaient entendre que se jouait de la musique alors que des éclats de voix étaient parfaitement audibles.
    -Il y a une soirée, leur annonça Lek.
    -Votre type ne s’embête pas, on dirait, rétorqua Viggo.
    Lexxi sortit le servo-crâne augure de son sac et l’envoya flotter au-dessus d’eux.
    -On va vérifier s’il est bien là. Je vais envoyer Artho dans le jardin pour nous faire un repérage.
    Viggo sortit à son tour une tablette et une petite boite.
    -Felton m’a confié ça, tout à l’heure, je crois que ça sera peut-être plus discret que votre servo-crâne, surtout si on veut jeter un coup d’œil à l’intérieur de la maison.
    -La mouche-pix ? S’étonna Lexxi. Pas bête. Tu sais la diriger ?
    -J’ai vu faire, ça devrait pas être trop compliqué.
    Il sortit le petit drone de sa boite, activa la commande sur la tablette et effectua quelques manipulations.
    -Tu saurais aussi tenter de repérer… des xenos, des psykers, par exemples avec tes talents ? Qu’on n’ait pas la même surprise que la dernière fois.
    -Je viens justement de tenter, mais je ne ressens rien de bien précis.
    -D’accord, alors allons-y, lâcha Lek. On fait un repérage sur les systèmes d’alarmes, les gardes, etc.
    -Et on voit surtout si on repère Cox, selon la description que nous en a fait Shidia, ajouta Lexxi. Et dès qu’on a la confirmation qu’il est là, on retourne à la planque prévenir les autres.
    Ils relâchèrent les deux drones et suivirent leurs repérages. Au bout de quelques minutes, les images de la mouche-pix leur renvoya un visuel sur quelques dizaines de personnes dans un jardin au bord d’une piscine. Une réception avait lieu et ils eurent beau faire le tour de invités avec le drone, refaire quelques passages, ils ne reconnurent pas Cox, même sous sa nouvelle identité de Corben Zacharie.
    -On fait quoi ? Demanda Viggo.
    -On tente d’envoyer la mouche-pix dans la maison. Comme ça, on sera fixé. Il est peut-être quelque part, à l’intérieur.
    Ils firent revenir le servo-crâne, puis Lexxi reprit les commandes du petit drone et l’envoya fureter à l’intérieur de la villa. Par chance, la plupart des fenêtres ou lucarnes étaient légèrement entrebâillées, bien que sécurisées. Aucune personne n’aurait pu s’y glisser, mais le petit drone ne faisait guère plus de deux centimètres et put s’y faufiler aisément. Ils l’envoyèrent tout d’abord visiter l’aile ouest de la villa, là où devaient se trouver des chambres ou des bureaux selon eux, car sur l’aile est, devait se trouver les cuisines et parties communes. Ils virent juste. La première pièce que visita le petit drone pix était justement une vaste suite qui les intrigua. L’endroit, vaste comme un appartement servait indubitablement de chambre à coucher mais aussi de salon de spectacle, de bureau et de cabinet.
    -On dirait la suite du maitre des lieux, non ? Lâcha Viggo.
    -Si c’est le cas, ce sont forcément les appartements de Cox, ajouta Lek.
    -Raison de plus pour l’avoir à l’œil. En tout cas, la suite est vide, compléta Lexxi. Essayons d’emprunter ce couloir et voyons les autres pièces.
    Ils laissèrent la mouche suivre un corridor gardé par deux hommes de mains et trouvèrent une vaste pièce d’eau, mêlant sanitaires, ablutorium et sorte de bains. Une autre pièce était une bibliothèque, vide elles aussi. Enfin, la dernière pièce était un bureau et deux personnages y tenaient conversation. Malheureusement, la mouche-pix n’était conçue que pour retransmettre des captures et vidéo-pix et non le son. Pourtant, ce qu’ils virent dépassait déjà tous leurs espoirs. Caleb Cox, alias Corben Zacharie était là, en pleine conversation secrète avec cet intrigant d’Obedia Shom-Valaï qui était en train de remettre une pochette contenant des photos à son interlocuteur.
    -On peut agrandir cette partie, là sur les images qu’il lui remet ? Souffla Lek ?
    Lexxi s’y employa et parvint à saisir brièvement mais clairement une des photos, juste avant que Cox ne referme la pochette.
    -Mince, c’est Gloria Everdynn, lâcha Lek.
    -Qui ça ? S’étonna Viggo.
    -Une célèbre chanteuse mais c’est surtout la femme de Grendel Haxt, le baron du Syndicat de l’Ombre, lui répondit Lek.
    -Et pourquoi Shom-Valaï lui remettrait la photo de… ? Oh, attendez…
    -Cox compte lui mettre la main dessus, compléta Lexxi.
    -Oui, c’est exactement l’idée qu’on avait imaginée… Enfin, si Rico avait réussi à l’approcher.
    -Du coup, votre homme, là, est en train de vous couper l’herbe sous le pied, non ? Lâcha Viggo.
    -Il va essayer, du moins. Mais il ignore qu’on connait ses projets à présent, ajouta Lexxi.
    -Du coup, on fait quoi ? On remballe et on retourne voir ça avec Poppy ?
    -Non… On va profiter qu’on est toujours à l’intérieur pour jeter un œil sur le reste de la villa.
    Ils firent ressortir la mouche et l’envoyèrent vers l’aile est. Délaissant les cuisines et ce qui semblaient être des réserves en plus d’un salle à manger, il se concentrèrent sur la seule pièce gardée par deux hommes armés en faction. Ils trouvèrent une lucarne entrebâillée et furent stupéfait par ce qu’ils trouvèrent, même s’ils s’y attendaient. Six adolescents, garçons et filles étaient ligotés et enchainés à des lits. En augmentant la résolution, Viggo confirma qu’ils portaient tous des colliers inhibiteurs. Ils en eurent littéralement des frissons, d’autant plus que Viggo leur confirma qu’il percevait une rémanence psychique, très faible mais latente. Le plus étrange était qu’il la ressentait au travers de l’écran pix, comme si c’était le petit drone qui lui renvoyait cette information.
    -Je confirme… Ce sont bien de jeunes psykers émergents. Trône… Je…
    -On sait. Ce salopard et tous ses complices vont payer pour leur hérésie, crois-moi, lâcha Lexxi entre ses dents. On a leurs visages à présent.
    Ne pouvant rien faire de plus pour eux dans l’immédiat, ils dirigèrent le drone vers une des dernières salles. Une chambre dans laquelle se tenaient deux personnages aux yeux brûlant d’une énergie warp en train de faire clairement usage de leurs pouvoirs, vus les éclairs qui crépitaient au bout de leurs mains dressées. Lexxi coupa aussitôt la connexion et fit revenir la mouche-pix de toute urgence.
    -Des psykers renégats… Déglutit Viggo.
    -Tu peux savoir ce qu’ils étaient en train de faire ? L’interrogea Lek.
    Il secoua la tête.
    -Divination ou télépathie, je ne saurais dire… Ils cherchent quelque chose… Mais ce serait risqué de me mettre à en savoir plus, ils peuvent me détecter à tout instant.
    -Alors, on décampe, lâcha Lexxi qui attrapa le petit drone au vol. On retourne à la planque, on a déjà assez d’informations.

    L’heure qui suivit, ils la passèrent dans le salon de leur hab, à raconter tout ce qu’ils étaient parvenus à obtenir, ce qui impressionna Poppy. De son côté, elle leur fit part du dernier message de Jézabel qu’elle venait de recevoir.
    -Je serais d’avis qu’on la rappelle, on a des nouvelles données, commença Lek. On sait où est Cox cette nuit, on sait ce qu’il projette de faire. Enfin, on suppose.
    -Elle nous envoie la cavalerie dans combien de temps ? Demanda Lexxi.
    -Dans douze heures, ajouta Poppy. Je serais d’avis qu’on les attende pour agir, non ?
    -Et on perd l’effet de surprise ? Ajouta Lek. On a Cox sous la main, il ignore qu’on est là et dans douze heures, il sera peut-être le warp sait où ?
    -On n’est pas en état de faire un assaut sur sa villa, donc c’est non. A cinq, sans soutien, on sait pertinemment que c’est voué à l’échec. Et encore, on est quatre. Felton n’est clairement pas en état.
    Poppy retourna au bureau où ils avaient installé le poste vox et composa de nouveau la fréquence cryptée du Reliquaire. Les autres étaient là, avec elle lorsque Jézabel répondit. Ils lui firent part des dernières données, de la présence confirmée de Cox et de toutes les autres informations.
    -Parfait. Ça a mis un peu de temps, mais félicitations à tous, leur répondit l’investigatrice. Pas de bêtises inconsidérées à partir de maintenant. Vous vous focalisez sur Cox, il devient votre cible prioritaire. Mac Latchy est avec vous ?
    -Il a été blessé, il se repose… Répondit Poppy.
    -D’accord. Souhaitez-lui un prompt rétablissement dans ce cas. Dites-lui, quand il le pourra qu’il tente de contacter Sybel de Castel Sinclar. Je veux savoir où en est la Kasballica avec toute cette affaire. Quoi qu’il en soit c’est lui qui connait le mieux Cox, or je crois qu’il avait parlé de ses habitudes nocturnes, non ?
    -En effet, Madame, ajouta Lexxi. Selon lui, Cox vit une bonne partie de la nuit et dort toute la matinée.
    Jézabel marqua une petite pose.
    -Ce qui veut dire que sa réception pourrait toucher à sa fin… Là, il est six heures du matin… Donc, il ne va pas tarder à aller dormir.
    -Cela nous laisse une fenêtre de tir pour agir, disons entre sept heures et midi. La villa devrait être vidée de ses invités et lui devrait dormir.
    -Vous pensez à quoi ? Une intervention ? Maintenant ?
    -Absolument. Passé ce délai, on ignore s’il sera encore sur place. C’est quand il dort qu’on peut l’atteindre.
    -Ne faites surtout rien d’inconsidéré. Votre nouvel objectif est de l’exfiltrer, mais je veux un plan bien ficelé. Si vous avez une possibilité, saisissez-là, sinon, attendez l’intervention de Tenebrae qui devrait vous rejoindre en fin de journée.
    -Bien Madame, ajouta Poppy. On élabore un plan et on vous informe de la stratégie à mener.
    -Faites cela. Prenez un peu de repos et rappelez-moi une fois que vous êtes prêts. Terminé.
    Ils ressortirent du bureau et retournèrent au salon.
    -J’ai peut-être un plan, lâcha Felton qui venait de les rejoindre en boitant. Il était livide mais semblait tenir le coup.
    -Tu n’es pas censé te reposer et te remettre de ta blessure, toi ?
    Sans l’écouter, il vint s’assoir dans un des canapés du salon, avec eux. Même Shidia était là à les écouter et leur passer à tous, une tasse de récaf.
    -On t’écoute, ajouta Poppy.
    -Vous savez que Sinclar m’avait passé des doses de cette drogue qui modifie en partie les traits du visage ?
    -Oui, tu en avais d’ailleurs utilisé une fois, je crois.
    -Exactement. Et donc, j’en ai encore deux doses. On y va ce matin, pendant qu’il dort. On se fait passer pour des types qui étaient là, on n’attire pas l’attention, on le trouve dans sa chambre, on le drogue et on l’exfiltre.
    -Et bien sûr, ton plan va se dérouler sans le moindre accroc ?
    -Bon, ça demande de le peaufiner un peu, mais avoue que ça pourrait marcher, non ?
    -Non, c’est un coup à perdre deux membres de l’équipe, je te le dis tout de suite.
    -Pas si on prend la place des gardes. Le plan de Felton pourrait vraiment fonctionner, lâcha Lexxi. Elle retourna la carte de la ville et entreprit d’y dessiner à la hâte, un schéma, reprenant le plan de la villa de Cox.
    -Là, c’est le jardin autour de la villa. On a des gardes armés qui patrouillent deux par deux. Lek et moi, on en élimine deux rapidement et discrètement. On prend leurs tenues et avec la drogue de Felton, on prend leur visage. Même si c’est pas parfait, de nuit, ça peut carrément passer. Une fois habillés comme eux, on entre dans la villa. Normalement à cette heure-là, personne ne devrait nous poser trop de souci. On entre dans la suite de Cox, on l’anesthésie et on l’embarque. Là, en bas de l’aile est, on a vu qu’il a un garage avec des véhicules. On l’emmène là et on ressort, ni vus, ni connus.
    -Ton plan peut déraper à tout moment…
    -On n’aura pas de meilleure fenêtre de tir, compléta Lek. Le plan de Felton est Lexxi est le meilleur qu’on ait pour l’instant, à mon avis. Passé ce délai, on sait que Cox va nous filer entre les doigts.
    -Maintenant qu’il sait où est Gloria Everdynn, je pense qu’il va passer à l’action très rapidement, ses psykers sont surement déjà sur le coup, ajouta Felton.
    Poppy hocha la tête.
    -D’accord, mais on y va tous. Et toi, Felton, tu restes là avec Shidia.
    -Hors de question. C’est mon plan et je connais Cox comme personne ici. Donc je viens, c’est pas négociable.
    -Trône, mais quelle tête de grox, celui-là… Bien, tu viens mais Shidia va t’injecter un stimm, je ne veux pas que tu perdes connaissance au pire moment.

    Le soleil du système Archaea venait tout juste de se lever lorsqu’ils se mirent en position autour de la villa. Toute l’équipe était là et ils firent selon le plan de Lexxi. Elle et Lek passèrent le mur d’enceinte, côté nord. Ils se dissimulèrent dans les fourrées et attendirent que deux gardes approchent. Lexxi avait emmené le fusil long M36 qu’elle avait chargé avec une cellule pleine-bourre. De leur côté, Poppy, Viggo et Felton restaient en couverture, prêts à intervenir si le plan devait tourner court.
    Le tir de précision fut dévastateur et traversa le crâne du premier garde dans une bruine rouge. Il bascula en silence, alors que son équipier, prit de stupeur, dégainait son arme et allait se mettre à crier. Il se prit une balle tueuse de Lek en pleine bouche, lui pulvérisant l’arrière du crâne. Ils tirèrent les deux corps à l’abri des regards et entreprirent de les délester de leurs armes et de leurs vêtements. Felton vint les rejoindre à ce moment-là.
    -Trône, tu fais quoi ? S’étonna Lexxi.
    -Je vais y aller avec Lek ? Reste là en couverture.
    -Mais tu es blessé !
    -Ça ira, Shidia m’a injecté un cocktail. Et n’oublie pas que je connais Cox. C’est à moi d’y aller.
    -Comme tu veux. Je vais récupérer vos affaires dans ce cas et je reste en soutien avec les autres.
    -Envoie la mouche-pix à l’intérieur, tu seras nos yeux, comme ça au moindre danger, tu nous préviens.
    -Bien reçu.
    Une fois habillés et équipés comme les deux gardes, ils s’injectèrent la drogue et modifièrent les traits de leur visage pour ressembler aux deux gardes. Les effets n’étaient pas sans douleur mais en valaient la peine, le résultat était tout à fait correct, tant qu’ils ne faisaient pas trop usage d’expressions faciales. Ils ramassèrent les armes des gardes et se dirigèrent vers la villa. En chemin, Felton sortit un pistolet hypodermique de sa veste et le montra à Lek.
    -Shidia m’a confié son pistolet à aiguilles avec des doses d’anesthésiant.
    -Parfait !
    -Je te le confie, tu es bien meilleur tireur que moi.
    Lek se saisit de l’arme de poing et la glissa dans sa veste. Ils pénétrèrent dans la villa et comme ils s’y attendaient, les invités étaient tous partis et seuls quelques gardes patrouillaient. Tout le monde semblait dormir, aussi ils n’attirèrent absolument pas l’attention. Une fois à l’intérieur, ils empruntèrent un corridor qui menait vers un couloir donnant vers la suite. Un garde en barrait l’accès. Felton s’approcha.
    -Tu peux nous laissez passer ?
    -Pour quoi faire ?
    -On doit informer le boss, une affaire urgente.
    -Non… Tu connais les consignes. Personne ne le dérange, même pas…
    Il n’eut pas le temps de terminer sa phrase que Felton venait de dégainer sa lame et tenta de le planter avec, mais son geste fut un peu trop lent, à cause de ses récentes blessures. Il entailla le haut de la cuisse du garde mais manqua son coup qui aurait dû être fatal. Le type allait crier, prit totalement au dépourvu mais Lek lui colla son Carnodon à silencieux contre son visage et tira, à deux reprises. Le type s’effondra dans une gerbe de sang, la face éclatée.
    -Allez, aide-moi à le trainer à l’intérieur, on a foutu du sang partout.
    -On n’a même pas cinq minutes avant que les autres ne s’en rendent compte. On va devoir faire vite.
    Ils déposèrent le corps à la hâte, dans un des bureaux, refermèrent la porte et se dirigèrent vers la chambre de Cox. Sa porte semblait verrouillée mais Felton parvint à la crocheter rapidement à l’aide de sa multiclé. Ils entrèrent. Ce salopard de Cox était bien là, dans son lit avec une jeune fille nue. Lek venait de dégainer le pistolet hypodermique et tira deux fois sur Cox, le touchant une fois car le premier tir manqua de précision et toucha l’oreiller.
    -La dose suffira, tu crois ?
    -On va croiser les doigts. Allez, aide-moi à le sortir de là.
    -Et la fille ?
    -Quoi la fille ? Si elle ne se réveille pas, on ne la touche pas.
    Ils entreprirent de sortir Cox du lit, ce qui ne fut pas une mince affaire, même à deux. Au bout de quelques instants, la fille se réveilla à cause de tous leur remue-ménage. Elle se redressa dans le lit, les cheveux en bataille, les yeux écarquillés, la bouche grande ouverte. Elle allait se mettre à hurler mais Lek lui tira dessus à bout portant avec le pistolet à aiguilles. Elle s’écroula de nouveau sur le lit.
    -Voilà, fait de beaux rêves.
    Ils finirent par porter Cox hors du lit. Lek le prit à grand peine sur ses épaules et ils ressortirent. Ayant étudier les lieux au préalable, ils savaient déjà par où passer. Le corridor donnait vers l’aile est par les cuisines. Des cuisines, un autre couloir menait vers des bureaux puis vers le garage. Leur porte de sortie. Felton activa son vox.
    -Lexxi ? Tu nous reçois ?
    -Affirmatif.
    -On a le colis. On sort. La voie est libre ?
    -La voix est dégagée. Vous avez trois minutes pour atteindre le garage avant que la prochaine patrouille n’arrive.
    -Reçu, on avance.
    Ils traversèrent le corridor, un autre couloir puis entrèrent dans les cuisines. Là, ils tombèrent nez-à-nez avec trois cuistots occupés aux fourneaux où cuisaient déjà des plats. Les odeurs étaient tout simplement alléchantes. Ces derniers leur jetèrent un regard circonspect, voyant leur patron sur les épaules d’un des gardes.
    -Vous connaissez le boss ? Il a un peu trop abusé cette nuit. On doit l’emmener. Commença Felton.
    -L’emmener où ? L’interrogea une des cuisinières. Une femme entre deux âges, plutôt bien en chair.
    Felton activa son nouvel implant sous-cutané, diffuseur de phéromones et s’approcha d’elle. Il lui fit son plus charmant sourire. Le nom de Moira était brodé sur son tablier.
    -Ah, ça ma chère Moira, je suis pas censé en parler.
    Il laissa passer quelques instants, la main sur la crosse de son Tronsvasse plaqué dans son dos. Les secondes défilaient telles des minutes. La femme finit par hausser les épaules et retourna à ses casseroles.
    Felton reprit son souffle et indiqua à Lek d’y aller. Une fois dans le couloir, ils hâtèrent le pas et se dirigèrent à toute vitesse vers le garage. Felton laissa Lek entrer puis referma la porte du couloir derrière lui en la verrouillant. Le garage comptait deux voitures. Une Long Shark ivoire et or et une City Hunter noire aux vitres teintées.
    -On prend la Long Shark, c’est un V8, elle est plus puissante, lâcha Felton qui se dirigea vers le véhicule et ouvrit la portière arrière. Lek y jeta Cox sur la banquette puis referma la porte. Déjà Felton venait de s’installer au volant.
    -Eh merde !
    -Quoi ?
    -Les clés…
    Lek jeta un coup d’œil autour de lui et repéra un boitier au mur, juste en face, il s’y précipita et trouva les clés. Il les prit et les lança à Felton qui les attrapa au vol. Il allait le rejoindre mais se ravisa. Dans le tableau il préleva les clés de la City Hunter et les jeta au loin dans un bidon empli d’huile de vidange puis se précipita vers la voiture. Dans la villa, derrière la porte du garage, il entendit des cris, une alerte. Felton était en train de démarrer mais calla le moteur dans la précipitation. Lek fit le tour de la voiture et se dirigea vers la porte coulissante du garage qui donnait vers l’extérieur et l’ouvrit. Felton venait de démarrer le moteur en trombe et recula en marche arrière. Lek sauta à l’intérieur, alors que le véhicule était déjà en marche. Ils entendirent des coups de feu contre la porte du couloir, celle menant au garage, mais déjà le bolide, dans un dérapage et un rugissement de moteur, était en train de s’engager sur la rue. Au passage, ils récupérèrent Poppy, Viggo et Lexxi et sans encore réaliser le tour de force qu’ils venaient d’accomplir, filèrent droit vers leur planque. Au volant, Felton sentit le sang couler de sa blessure qui venait de se rouvrir. Il se mit à grimacer, à cause de la douleur. Shidia allait l’engueuler, c’était sûr, mais il n’avait aucun regret, le risque en valait largement la chandelle. Il tenait enfin ce sale fils de grox de Caleb Cox.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 06/03/2023 à 17:09 Citer ce message

    Le Reliquaire
    Bureau inquisitorial sur Archaea
    Tempus estimare 030.021M42–19h23

    Ils quittèrent Sandbarra à la hâte pour retourner au Reliquaire à la capitale. Une fois sur place, ils y amenèrent Caleb Cox, ligoté, bâillonné et cagoulé pour y mener son interrogatoire qui dura une majeure partie de la journée. Poppy laissa en grande partie Felton s’en charger. D’une part parce qu’il était le plus à même de maitriser le sujet sur la Kasballica mais aussi parce qu’il y tenait véritablement. Lek et Lexxi l’assistèrent dans cette tâche. Il mit du temps à parler mais il finit par céder surtout que les Ordos savaient y mettre les moyens.
    Cox leur avait évidemment confirmé son objectif d’atteindre Haxt en approchant sa maitresse, Gloria Everdynn, d’abord en la séduisant ou en employant la manière forte si cela n’était pas suffisant. C’était bien entendu, Shom-Valaï qui lui avait transmis toutes les informations sur elle. Informations qu’il n’avait pas encore eu le temps d’exploiter et dont le dossier était toujours dans sa villa.
    Son but était bien entendu de gravir les échelons au sein de la Kasballica en reprenant le contrôle du Syndicat de l’ombre, quitte à se débarrasser de Sinclar au passage pour cela. Il était parfaitement conscient des risques qu’il prenait et en assumait pleinement les conséquences.
    Concernant le trafic de psykers, pour lui ce n’était que du business et des parts de marché à prendre, rien de plus. Quant à l’implication de l’Hydre, il ne les voyait que comme des concurrents, certes dangereux mais rien de plus, sans véritablement savoir qui ils étaient en réalité.
    Au bout de huit heures, ils ressortaient de la salle d’interrogatoire, en sueur, les mains encore tâchées de sang et avec un paquet de réponses. Cox avait fini par succomber à ses blessures mais de toute façon, c’était une balle dans la tête qui l’attendait s’il avait survécu. Au moins, Felton avait cette sombre satisfaction de l’avoir tué de ses propres mains.

    Ils se réunirent pour faire le point avec Poppy et Jézabel. Atteindre Haxt en trouvant Gloria Everdynn restait donc la seule piste à privilégier, d’autant plus qu’ils savaient à présent que Shom-Valaï avait la capacité de la localiser. Le dossier qu’il avait remis à Cox, maintenant qu’une dizaine d’heures s’étaient écoulées, avait dû disparaitre, tout comme les jeunes psykers captifs. La piste de la villa était donc mise de côté, au profit de celle de Shom-Valaï.
    -Parfait, énonça Jézabel. Je vous laisse retourner à Sandbarra pour reprendre cette piste. Mac Latchy, tâchez aussi de voir où en est Sinclar avec cette affaire, vous ne me la lâchez pas, je n’aimerai pas que la Kasballica nous dame le pion sur cette affaire. En attendant, je vais coordonner l’intervention qui reste d’actualité avec le Justicar Cain. Elle désigna Poppy. Sandwall, venez avec moi, vous allez pouvoir nous aider à préparer ce coup de filet. Et dites à cette fille de venir, la medic. Elle connait les noms des principaux caïds de la pègre locale et je veux qu’elle nous les donne. L’objectif est de démanteler tout le réseau de Sandbarra.
    -Bien, Madame. Ah, au fait, dit-elle tout en sortant un pendentif de sa poche. Elle le montra à Jézabel. Il s’agissait d’une gemme opalescente ovoïde, suspendue au bout d’une fine chaine faite d’un alliage métallique doré indéterminé.
    -Nous avons trouvé cela sur lui. Il pourrait s’agir d’une pierre aeldari selon certains de la cellule.
    L’investigatrice la prit entre son pouce et son index, l’inspectant à la lumière, avec attention.
    -Ce n’est pas une simple pierre. C’est une authentique carrecenad… Les aeldari y attachent une valeur presque religieuse, quasi mystique. Ils sont prêts à tuer pour retrouver de tels artefacts.
    Elle se tourna vers Lexxi et lui donna la pierre.
    -Anderson, veillez à la placer avec les autres reliques, dans un coffret de stase.
    -Pardonnez-moi, Madame, ajouta Poppy, mais n’est-il pas risqué de conserver cet… objet ici, justement ?
    -Notre existence même est risquée, agent Sandwall. Tout dépend de l’acceptation du risque et de notre capacité à l’anticiper. Vous avez déjà croisé ces aeldari et ils vous ont épargnés. La prochaine fois, leurs intentions ne seront peut-être pas aussi charitables. Un jour ou l’autre cette pierre-esprit pourrait bien nous servir.

    Elles retournèrent vers le stratégium, laissant Felton, Lek et Lexxi s’occuper de préparer leur retour à Sandbarra. Au détour d’un couloir, Felton s’arrêta, claquant dans ses doigts.
    -J’ai peut-être une idée. Je vais contacter Sinclar et je ne compte pas venir les mains vides…
    Les deux autres le regardèrent, étonnés.
    -Je vais lui amener le corps de Cox. Elle savait qu’il comptait la doubler.
    -Oh, joli… Elle pourrait t’être sacrément reconnaissante, lâcha Lek.
    -C’est bien l’idée.
    -Mais comme il a changé de visage et que là, il n’est pas en très bon état, comment être sûrs qu’elle va te croire ? Ce pourrait être le corps de n’importe qui, ajouta Lexxi.
    -C’est sûr, mais je pense qu’elle aura les moyens de le confirmer. Soit médicalement, soit par son réseau. La disparition de Cox, alias Corben Zacharie ne va pas passer inaperçue bien longtemps. C’est un coup de Régicide à jouer et je pense que ça peut être des plus profitables.
    -Tu comptes faire comment ?
    -Je vais demander à Jézabel qu’elle valide mon plan. Puis je vais la contacter et lui fixer un rendez-vous.

    Sinclar leur fixa rendez-vous sur les docks, dans un ancien entrepôt, à minuit. Non seulement Jézabel avait trouvé l’idée audacieuse mais en plus, Felton était parvenu avec son accord, à emmener aussi le Plasticien qui était resté captif au Reliquaire ces derniers jours. Le Plasticien allait être son assurance-vie, celui qui allait prouver à Sinclar que le corps qu’il lui amenait était bel et bien celui de Cox. Ainsi il lui remettrait les deux et comptait bien sur ce gage de bonne volonté pour monter un peu plus dans l’estime de la baronne de la Kasballica.
    Non seulement Sinclar fut impressionnée mais elle en tira même une certaine satisfaction. Le Plasticien allait lui servir, d’une manière où d’une autre. Quand au corps de Cox placé dans une housse, elle demanda à ses gardes du corps de le déposer dans le coffre de sa limousine. Elle demanda à Felton de marcher un peu avec elle, le long du quai. Ce qu’il fit.
    -Je compte évidemment faire vérifier cette histoire sur Cox, lui dit-elle de sa voix au timbre synthétique et mélodieux.
    -Bien entendu.
    -S’il s’avérait que c’était bien lui… Je vous devrais alors une fière chandelle, Felton.
    -Disons que j’avais moi aussi, de bonnes raisons de lui faire payer sa trahison. Ma loyauté vous est tout acquise, Madame, vous le savez.
    -Faites en sorte que cela ne change pas, dans ce cas. Car voyez-vous, la mort de Cox laisse une place vacante dans notre organisation, ce qui signifie qu’il me faudra un nouveau bras-droit d’ici peu.
    -Je suis certain que vous avez déjà des candidats prêts à prendre ce poste parmi vos hommes ?
    -C’est le cas en effet. Mais c’est à vous que je compte le proposer… Qu’en dites-vous ?
    -Eh bien… C’est un peu inattendu, mais j’en serais évidemment plus que ravi.
    -Alors c’est entendu. Il reste encore certains détails sur lesquels je travaille en ce moment, comme notamment m’assurer de reprendre en main le Syndicat de l’ombre ici sur Archaea après la disparition de Cox et y maintenir certaines affaires. C’est pour cela que vous allez m’être des plus utiles. On attend de moi que je fasse du ménage.
    -Couper quelques têtes ?
    Elle s’arrêta sur le bord de la berge, regardant au loin les eaux noires de Port Saint et les lumières de l’estuaire dans le lointain. Un petit vent du large apportait ses odeurs salines, presque piquantes. Son cyber-molosse vint s’assoir à ses côtés, en silence.
    Felton sortit son paquet de lho mais elle le devança en ouvrant un étui plaqué or et lui proposa un San Cristobaal, un de ces fins cigalhos au lho bleu, roulé dans de la soie de Japanagar, ce qui leur donnait ce goût unique et en faisait des modèles d’un luxe infini. Il en prit un sans se faire prier, en la remerciant. Elle en fit de même et il les alluma. Elle reprit.
    -Certaines têtes, oui mais pas nécessairement toutes. Des gens me seront utiles. Certains de Sandbarra notamment, voilà pourquoi je compte les maintenir en place. Je vous en parlerai… Mais il n’y a pas que cela. Oui, Haxt s’est compromis et dévoyé, tout comme Cox et Carno avant lui. Ils ont ouvert la boite de Pandore. Ils ont touché à ce qu’ils n’auraient pas dû.
    Il la regarda, affichant un air étonné. Les yeux augmentiques d’un vert translucide de Sinclar, bien que d’une qualité sensationnelle, ne trahissaient aucune émotion. Juste une froide concentration. Ses pupilles se rivèrent dans son regard, tandis que ses iris s’ajustaient, dissimulant le Trône savait quel genre d’implants. Felton avait cette étrange sensation d’être passé sous un auspex.
    -Vous parlez du commerce de psykers émergents ?
    Elle hocha la tête, tout en soufflant la fumée. Ce geste trivial était des plus étonnants car elle disposait d’implants qui remplaçaient la plupart de ses organes, ce qui incluaient ses poumons qui n’en étaient plus. Le geste était-il purement décoratif ou était-ce là, une ancienne addiction toujours active, s’étonna Felton.
    -Je ne suis pas une sainte, Felton, loin de là. Mais voilà une limite qu’ils n’auraient jamais dû franchir. Et encore plus en ce moment, sachant que les autorités ont les yeux braqués sur eux pour s’être enfoncé un peu plus dans l’hérésie. Ils ne se sont pas seulement perdus, ils se sont damnés. Nos supérieurs attendent beaucoup de cette opération, vous savez ?
    -J’imagine que oui.
    -Si nous réussissons ce coup, je serai promue au sein de la Kasballica, à un poste bien plus important. Savez-vous ce que cela implique ?
    -Plus de responsabilités ?
    -En effet. Mais aussi plus de responsabilités pour mes adjoints. Je ne compte pas rester sur Archaea. Voilà pourquoi il me faudra quelqu’un pour reprendre les choses en main ici, après mon départ. Ce pourrait être vous.
    -Moi… ? C’est que je ne sais pas si…
    -Je ne me fais pas trop d’inquiétude à ce sujet. Vous avez les qualités requises, c’est juste que vous ne le savez pas encore.
    Elle tira une dernière bouffée sur son cigalho avant de le jeter, d’une pichenette, dans l’eau du port.
    -Venez, rentrons. Je vous laisse y méditer cette nuit, on en reparle demain. Je vous recontacterai. En attendant, je vous dois donc une faveur… Pour Cox. Je n’accorde que rarement des faveurs, sachez-le.

    Après une nuit de repos au Reliquaire, Poppy s’entretint avec Jézabel et lui demanda que Viggo et Shidia deviennent des membres à part entière de l’équipe. L’investigatrice valida sa requête, sachant que de toute façon, la cellule avait besoin de ressources. De plus ils étaient déjà tous deux impliqués dans cette affaire. Devoir les éliminer était une autre option, mais cela limitait grandement toute possibilité de recrutement.
    Ils décidèrent d’élaborer un plan à la suite des derniers évènements passés à Sandbarra. Cox, Shom-Valaï, Gloria Everdynn et Sinclar étaient les sujets de leur conversation. Cox parce que sa disparition allait forcément faire le tour de toute la pègre locale dans les prochaines heures et soulever tout un tas de questions. Shom-Valaï parce que c’est lui qui avait fourni les photos de Gloria Everdynn à Cox. Cela posait évidemment des questions sur son allégeance à Haxt et d’autres questions sur Everdynn qu’il allait falloir retrouver rapidement. Quant à Sinclar, elle fixa justement un rendez-vous à Felton, le jour-même, à 14h.
    Il la retrouva dans un des restaurants de la Place Dorée, dans le Commercia où elle avait réservé une table. Leur entretien se tint à huis clos dans un salon feutré autour d’un succulent repas et à l’issue duquel – une heure plus tard - il ressortit pour aller rejoindre le reste de l’équipe et leur faire part des dernières révélations que Sinclar venait de lâcher.
    -Tu dis qu’elle te fait confiance, du coup ? Lui demanda Poppy.
    -Pour l’instant, je vais croiser les doigts, mais oui, elle me propose de devenir son bras droit dans son projet qui est de reprendre le contrôle de la pègre sur Archaea. En clair, on reprend le plan initial qui était de me faire infiltrer le Syndicat de l’ombre.
    -Et donc, elle a un plan à te soumettre ? Lui demanda Lek.
    -Il y a pire que cela. Elle est déjà au courant pour l’opération de l’Arbites qui va être lancée sur Sandbarra.
    -Quoi ? S’étonna Lexxi. Mais comment elle peut déjà le savoir ?
    -Une taupe, tu crois ? Demanda Lek.
    -Aucune idée, répondit Felton. Mais ça mérite de se pencher sur la question.
    -Je vais informer Jézabel dès qu’on retourne au Reliquaire, ajouta Poppy. Elle a dit quoi d’autre ?
    -Sans surprise, elle va avoir besoin de Shom-Valaï, du moins au départ. On se demandait pourquoi et comment il avait trahi Haxt en balançant les pix de sa maitresse à Cox. J’ai eu l’information. La Kasballica l’a déjà approché depuis un moment et c’est pas le seul qui a été approché en plus. Sinclar a déjà avancé ses billes. Du coup, elle compte se servir de lui et de son réseau mais pas seulement. Elle m’a donné cinq noms en tout. Ce sont des caïds locaux qu’elle compte récupérer et rallier à sa cause.
    -Et elle envisage de les prévenir de l’opération en cours ? Demanda Poppy.
    -Non, ça c’est ma partie. Elle m’a donné les noms, à moi de gérer et de les informer.
    -Mais et pour l’opération de l’Arbites qui est en cours ? Cela va forcément interférer.
    -Dans ce cas, on pourrait toujours demander à Jézabel de décaler l’intervention, non ? Demanda Lexxi.
    -Non, si on retarde, la plupart de nos cibles risquent de s’évanouir dans la nature. On va aller sur place, on contacte Shom-Valaï, on l’informe de l’arrivée de l’Arbites ou on l’exfiltre. En tout cas, on se débrouille pour le sauver. Soit on prévient les autres, soit on lui demande de le faire.
    -Et qu’est-ce qui nous garantie qu’il va nous écouter ?
    -Rien. Mais on va devoir trouver un moyen de le convaincre.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 15/03/2023 à 21:58 Citer ce message

    Jézabel mit à leur disposition une Valkyrie qu’elle réquisitionna auprès des FDP, ce qui leur laissa le temps dans les heures qui suivirent, d’effectuer les derniers préparatifs pour leur mission sur Sandbarra. Effectuer le trajet en voiture leur aurait pris quatre ou cinq heures, tandis que là, en moins d’une heure, ils seraient sur place. La navette les attendait, moteurs allumés, sur le tarmac à côté du palais gouvernemental.
    Lek finit par les rejoindre, après s’être absenté en ville pendant une heure. Il arriva un peu essoufflé, après avoir couru.
    -Bon sang, t’étais où ? On a bien failli partir sans toi, lâcha Lexxi qui portait plusieurs sacs d’armes et d’équipements.
    -Un rendez-vous avec un de mes contacts… J’ai du nouveau sur les trois croque-morts de la planque Kadoshi.
    -Qui ça ? Lui demanda Lexxi.
    -Il parle des frères Milagria, répondit Felton.
    -Quoi, ils sont encore là, eux ?
    Poppy et Felton s’approchèrent pour l’écouter. Eux aussi portaient leurs affaires qu’ils déposèrent dans la Valkyrie.
    -Il semblerait qu’ils aient rencontré Bosinski. Il les aurait chargés de mettre la main sur une fille, compléta Lek.
    -Une fille ? Encore ? S’étonna Felton.
    -Et ça pourrait être qui ? Le questionna Poppy qui en profita pour s’allumer un petit cigalho.
    -Aucune idée. Je pensais évidemment à Sinclar, dit-il en regardant Felton. Mais ça pourrait tout aussi bien être Tsali.
    -Pas idiot… Faut que je les prévienne toutes les deux. Tsali, je ne l’ai pas vu depuis plusieurs jours, justement. On a été un peu pris, là…
    -Ça pourrait aussi bien être la gouverneure ou le warp sait qui, en fait. Ajouta Lek.
    -La gouverneure, ça m’étonnerait. Je ne vois pas bien les raisons ni les avantages qu’ils pourraient en tirer, lui dit Felton.
    -En tout cas, on sait qu’ils sont toujours dans les parages, ajouta Poppy. Je vais prévenir Jézabel, qu’elle mette Tsali sous protection et qu’elle envoie la Cellule Tenebrae sur la piste de ces trois-là. C’est clair qu’à notre retour de Sandbarra, j’aimerai bien qu’on leur mette la main dessus.
    -Si c’est pas indiscret, qui sont ces gens… les Milagria ? Le questionna Viggo. Sa présence au sein de l’équipe était encore trop récente, aussi certains noms ne lui évoquaient évidemment rien.
    -Je vous expliquerai. Ce sont trois frères issus d’une maison noble d’Eshunna qui sont de mèche avec Bosinski et Haxt. Ils sont suspectés de tremper dans certaines hérésies eux aussi, comme le commerce de psykers et de drogues psycho-réactives interdites.
    Viggo effectua aussitôt le signe de l’Aquila avec une grimace et les yeux écarquillés.
    -Trône…
    -Comme vous dites.
    Tandis que Lexxi aidée de Lek, chargeaient les derniers sacs et leurs armes dans la navette, Felton les prit à part, tous les cinq.
    -Il y a autre chose que j’ai appris. Sinclar m’a dévoilé aussi une partie de son plan à long terme.
    -Son plan pour reprendre le Syndicat de l’ombre ? Le questionna Poppy.
    -Oui. Elle m’a donné les grandes lignes, je vous détaillerai ça pendant le vol, mais en clair… Elle va avoir besoin qu’on mette la main sur Gloria Everdynn. De son côté, elle m’a dit avoir peut-être un moyen de trouver Bosinski. Elle veut qu’on prenne leur place, disons… Leur apparence, comme on a fait avec les gardes à la villa de Cox, avec cette drogue pour modifier le visage. Une fois Haxt éliminé, selon elle, Bosinski devra réunir un conseil composé de douze membres. C’est là qu’il faudra le remplacer.
    -Douze ? Mais d’où ça sort ? S’étonna Poppy. Les autres étaient tout aussi éberlués. Ils s’installèrent à bord de la navette qui ne tarda pas à décoller. Felton dû porter de la voix afin de se faire entendre pendant le trajet.
    -Jusque-là, nous pensions que Grendel Haxt dirigeait le Syndicat seul, ou du moins, avec deux ou trois lieutenants. En réalité et c’est là que leur organisation est toujours une sombre nébuleuse, Haxt préside un groupe de douze membres, lui compris. Selon Sinclar, ce serait sans doute récent, peut-être seulement depuis que Haxt a fait croire à sa disparition pour brouiller les pistes. Certains d’entre vous n’étaient pas encore dans cette équipe au départ, mais avec Rico, Tsali, Lek et les autres, il y a un peu plus d’un mois de ça, on avait obtenu une liste de noms. C’était en enquêtant sur certaines personnalités approchées par Bosinski et Murdock, un autre lieutenant de Haxt, à la Basilique. Des gens que Haxt souhaitait rencontrer. Parmi eux il y avait Sinclar, Shom-Valaï mais aussi des banquiers, des marchands, des seigneurs locaux dont on avait eu les noms. Bref, Sinclar m’a précisé que si Haxt devait disparaitre pour de bon, ce conseil allait devoir se réunir pour élire un nouveau dirigeant et c’est là qu’elle compte intervenir justement.
    -Mais pourquoi prendre la place d’Everdynn ?
    -Everdynn et Bosinski font partie de ce conseil. Cox devait aussi en faire partie visiblement et Sinclar y aurait déjà sa place, tout comme Shom-Valaï et si j’ai bien suivi, d’autres parrains de Sandbarra doivent aussi en faire partie.
    -Donc si un vote à lieu, Sinclar compte les mettre de son côté ? Lâcha Poppy. Et c’est elle qui reprend la main.
    -C’est ce que j’ai compris.
    -Mais et les autres ? S’étonna Lek. Sur douze, elle risque de n’avoir qu’à peine la moitié des voix, si je compte bien ?
    -C’est bien ça. C’est là qu’elle compte sur l’infiltration dans le conseil pour rallier des voix et éliminer les rivaux trop gênants. Elle compte faire porter le chapeau sur la mort de Haxt à certains membres, avec l’appui d’Everdynn et de Bosinski, sans doute comme témoins, comme ça, elle élimine d’entrée de jeu la concurrence.
    -Son plan est risqué mais c’est clair que c’est malin. Par contre, si vous êtes démasqués, ça risque de tourner court, ajouta Lexxi.
    -Infiltrer le Syndicat ou la Kasballica ne se fera pas sans risques de toute façon, répondit Poppy. Le plan est osé, ambitieux, mais je pense qu’elle sait parfaitement ce qu’elle fait. Je serais toi, Felton, je me méfierais quand même. Haxt ou Bosinski nous on montré qu’ils avaient de la ressource pour une organisation locale et pourtant, ils nous donnent du fil à retordre et sont déjà d’une dangerosité extrême. Ils ont des appuis et savent ce qu’ils font, malgré les hérésies dont ils sont coupables. Quant à Caleb Cox, il n’était pourtant pas un gibier de six semaines et elle l’a piégé avec une facilité déroutante. Je pense sincèrement que Sinclar est d’un tout autre niveau, éminemment plus dangereuse qu’eux tous réunis. Son plan le prouve et si tu l’aides, elle va clairement parvenir à ses fins. Je pense que tu devrais garder en tête qu’elle en sait peut-être bien plus qu’elle ne te le dit. Peut-être même sur toi.
    -Et qu’est-ce qui te dit que je n’y ai pas déjà pensé ? Je suis parfaitement conscient de qui elle est. Et donc, quoi ? On arrête l’opération parce que nos cibles sont des gens dangereux ?
    -Je n’ai pas dit ça, Felton. Juste de ne pas faire autant confiance à cette femme.
    Il s’approcha d’elle, avec son charmant sourire, celui qu’elle trouvait totalement désarmant.
    -Alors rassures-toi, Pop, parce que j’ai pris l’habitude depuis bien longtemps de ne surtout faire confiance à personne.
    Le vol dura une heure à la suite de quoi, la navette les déposa à moins de trois kilomètres de Sandbarra puis redécolla. Ce fut Lexxi qui retrouva la Hive Runner, là où elle l’avait dissimulée dans une dépendance en ruine d’une ferme abandonnée, à deux kilomètres de la ville côtière. Au milieu de plusieurs épaves, elle passait relativement inaperçue pour quelqu’un qui n’allait pas regarder de trop près. Ils en profitèrent pour se changer et s’habiller comme les locaux avec de longs vêtements contre le soleil et la poussière. Des lunettes photochromatiques et des masques respirateurs, au cas où. Ils prirent une partie de leurs armes et laissèrent le reste dans la voiture. Ils firent le reste à pied et retrouvèrent leur planque dans un petit immeuble de la rue Poissonnière, près du port. L’heure tournait, aussi allaient-ils devoir se répartir les rôles. D’ici trois ou quatre heure, l’Arbites, appuyé par une ou deux compagnies de FDP allaient frapper un grand coup dans Sandbarra, menant une opération coup de poing sur les principaux dirigeants du Syndicat de la ville. Si l’on en croyait les dires de Poppy et de Lexxi, ils devaient déjà être installés aux abords, parés à lancer l’assaut. Ce coup de filet devait faire tomber tout le réseau local et ainsi décapiter la principale source de revenus du Syndicat de l’ombre. Si tout se passait bien, le Triumvirat allait tomber et dans peu de temps, Bosinski, Murdock puis Haxt seraient les prochains à tomber.

    Felton décida de suivre les indications de Sinclar et comptait bien trouver Obedia Shom-Valaï avant ce coup de filet. L’idée était de l’exfiltrer lui et quatre autres dirigeants dont Sinclar avait besoin pour son plan. Selon Shidia, il devait se trouver là où il avait l’habitude de travailler, au Palais des Murmures. Il décida de s’y rendre avec elle et Viggo. Il se situait dans la Basse Ville, entre la Voie de San Mender et ses marchés colorés et le siège massif du Mercator Productio.
    En suivant les indications de Shidia, ils trouvèrent sans peine le bâtiment qu’ils ne pouvaient rater. Le Palais ne trahissait pas son appellation et était tout simplement somptueux, dans un style classique archaïque de la Haute époque, tout en colonnades, statues et bassins d’agrément, le tout réhaussé de marbres et mosaïques colorées, évoquant les scènes mythologiques impériales. Des hommes d’armes, en armure complète en gardaient l’entrée. Felton fit mine de passer mais ils lui firent signe de s’arrêter. Derrière eux, il pouvait voir un hall où discutaient quelques personnes en petits comités.
    -Désolés, mais vous ne pouvez entrer, citoyen.
    -C’est que… Il s’agit bien du Palais des Murmures ?
    -Avez-vous pris un rendez-vous ?
    -Eh bien non…. Mais il se trouve que j’ai une information qui devrait grandement intéresser Monsieur Shom-Valaï.
    -Sans aucun doute, mais sans rendez-vous, nous allons vous demander de partir, maintenant.
    Felton baissa le ton et s’approcha d’eux.
    -Alors je souhaite prendre un rendez-vous. Maintenant. Je dispose d’une information sur sa propre sécurité qui… Si nous tardons un peu trop, risquerait d’être fortement compromise. Des gens vont venir. Et je sais quand…
    Un des gardes leva le doigt vers Felton, lui signalant de ne rien ajouter.
    -Votre nom, je vous prie.
    Felton ne se démonta pas et d’une voix assurée, il se présenta.
    -Anton Holdemert, de la Maison Holdemert.
    Le garde lui demanda de patienter un instant. Il se dirigea vers une sorte d’adepte qui passait dans le hall intérieur et s’entretint avec lui pendant quelques instants. L’adepte retourna sur ses pas et le garde revint à son poste.
    -Patientez un instant.
    Au bout de cinq bonnes minutes, l’adepte revint parler au garde. Ce dernier leur demanda alors d’entrer et de suivre l’adepte. Il les conduisit dans une grande aile du bâtiment et leur demanda de patienter dans des canapés. De là où ils étaient, ils pouvaient voir un vaste jardin intérieur entourant un large bassin alimenté par une fontaine décorée de chérubins, bordée de fleurs et de plantes exotiques où s’ébattaient des perruches de Samarin et des tourterelles irisées. Malgré les larges tentures colorées qui voilaient certaines parties des bâtiments, apportant un peu d’ombre dans le jardin, ils pouvaient réaliser que l’endroit était bien plus vaste que prévu et comptait de nombreuses personnes, sans parler des gardes, discrets mais bien visibles et armés.

    Après quelques minutes à patienter, une scribe vint les chercher et les conduisit dans ce qui semblait être un grand librarium. Plusieurs adeptes y travaillaient, à la lumière de hautes fenêtres, sans conteste, des lexographes ou des scriptoriens, affairés à un pénible travail de copiste. Au centre de la salle, autour d’une table de travail emplie de documents, se trouvaient trois personnages. Un homme corpulent et chauve, vêtu de robes et qui n’était autre que Shom-Valaï, ainsi que deux femmes brunes et élégantes dont une vêtue de manière extravagante, comme aurait pu l’être une reine de gang d’un monde-ruche. Shidia se pencha vers Felton discrètement, tandis qu’ils pénétraient tous trois dans la salle. A voix basse, elle lui indiqua qu’il s’agissait de Dame Deeroniss Hamadid, celle qui contrôlait le Mercator Volubilis, à savoir les salles de jeux clandestins et les bordels de Sandbarra. La seconde, vêtue de manière plus classique, quoiqu’élégante n’était autre qu’Helma Penderbast, la dirigeante de l’Aleatorium, le grand casino de la ville. La jeune femme scribe vint alors s’entretenir à voix basse avec le maitre des lieux. Après un instant il posa son regard sur Felton, tout en picorant quelques grains de chanalain posés dans une coupe sur la table.
    -Monsieur… Holdemert. Que me vaut cette visite si… Impromptue ?
    Il lui fit signe, d’une main baguée, d’approcher de quelques pas. Depuis des alcôves, des gardes discrets, tenaient leurs armes bien en vue.
    Felton s’approcha à bonne distance.
    -J’ai cru comprendre que vous souhaitiez évoquer une question d’ordre sécuritaire me concernant ? Continua Shom-Valaï.
    -Et effet. Mais… Peut-on évoquer un tel sujet, ici, en toute confiance ?
    Shom-Valaï effectua une petite moue, scrutant les deux jeunes femmes à ses côtés.
    -Si cela me concerne, je pense que cela concerne mes chères consœurs tout autant.
    -Soit. Dans ce cas, sachez que je suis envoyé par une amie commune. Celle que vous avez déjà rencontré.
    -Il se trouve que nombre de femmes se prétendent être mes amies. Pourriez-vous être plus précis, mon cher ?
    -L’augmenticiste.
    D’un geste de la main, il congédia les scribes de tout le librarium. Il s’approcha de Felton, demandant aux deux femmes de ne pas bouger.
    -Et quel est son message, lui dit-il à voix basse.
    -Dans moins de trois heures, l’Arbites sera ici, pour vous arrêter, vous et tous les dirigeants de Sandbarra. Disons que notre amie commune, vous offre la possibilité d’y échapper.
    -Et où compte-elle me retenir en attendant ?
    -Eh bien… Je… ne peux en discuter ici pour l’instant.
    -Comprenez bien que je ne peux pas partir comme cela. Je vais avoir besoin de m’organiser avant.
    -Naturellement.
    -Parfait. Revenez dans une heure. J’aurais alors fait le nécessaire.
    Felton lui donna un papier sur lequel figurait d’autres noms. Ceux des deux femmes présentes, ainsi que deux autres que Sinclar comptait épargner.
    -Prévenez ces personnes. Elles partent avec vous.
    Il effectua un petit signe puis demanda à un de ces gardes de les raccompagner vers la sortie.

    Dans cet intervalle, Lek, Lexxi et Poppy avaient décidés de retourner à la villa de Cox, là justement où Lek et Felton étaient venus l’enlever, deux jours auparavant. Avec de la chance, les documents déposés par Shom-Valaï, ceux sur Gloria Everdynn étaient peut-être encore sur place, même s’ils n’y croyaient pas trop. La logique voulait que les hommes de Cox aient fait le ménage en partant. En revanche, certains détails pouvaient peut-être encore s’y trouver. Pour l’occasion, ils avaient emmené Artho, le servo-augure et leur mouche-pix, le petit drone espion. Ils se postèrent le long de l’enceinte qui entourait la villa, sur le flanc ouest. Lek escalada le mur, haut de trois mètres, aidé par Lexxi et tomba lourdement de l’autre côté, mais par chance dans des buissons du jardin. Tandis que Poppy surveillait la rue, elle relâcha Artho et lui demanda d’aller faire le tour de la demeure, idée de voir si du monde s’y trouvait toujours. Pendant ce temps, de l’autre côté du mur, côté rue, Lexxi était affairée avec la tablette, à piloter le petit insecte espion, espérant trouver quelque chose dans la villa. Au bout de quelques minutes de recherche, ils ne trouvèrent rien, sinon que la demeure avait effectivement été abandonnée à la hâte.
    De son côté, Lek, depuis le jardin, s’était approché du patio arrière et était persuadé d’avoir aperçu une silhouette bouger, à l’autre bout du terrain, à cinquante ou soixante mètres de là. Il dégaina un de ses Carnodons et se faufila en se baissant entre les bosquets. Au bout de quelques instants, il se posta le long d’un muret bordé de plantes et chercha un meilleur angle de vue. Il perçut Artho qui flottait à une trentaine de mètres de là, juste avant de se faire toucher par quelque chose. Le petit drone tourbillonna dans les airs avant de tomber au sol sur la pelouse.
    -Merde…
    Lek activa son microvox et parla à voix basse. Il vit passer une silhouette massive dans le jardin, presque furtivement. Il n’était pas seul mais ne parvenait pas à savoir de quoi il s’agissait à cause de la végétation et d’un mauvais angle de vue. Il se déplaça pour chercher à mieux voir de quoi il s’agissait.
    -Les gars, vous me recevez ?
    -On te reçoit. Tu as un visuel ? Répondit Lexxi.
    -Quelque chose vient de toucher Artho. Il est tombé à terre.
    -Qui ça ? Demanda Poppy. Tu vois quelque chose ?
    -Putain, je ne sais pas…
    -Des aeldari, comme l’autre fois ? Demanda Lexxi.
    -Je ne sais pas, mais ceux-là m’ont l’air un peu gros, quand même.
    -Gros comment ? Lui demanda Poppy qui tentait d’escalader le mur à son tour. Elle demanda à Lexxi de l’aider. Parvenue en haut du mur, elle observa le vaste jardin, la demeure et finit par y voir Lek. Mais depuis son point en hauteur, elle vit aussi deux puis trois formes bien plus menaçantes qui venaient dans sa direction, apparemment sans l’avoir encore aperçu. Leurs corps massifs étaient difformes et totalement dégénérés. L’un d’eux avait trois bras et l’autre était bossu.
    -Merde… Des mutants, lâcha-t-elle dans le microvox.
    -C’est bien ce que je pensais… Shidia nous avait parlé d’une guilde de mutants ou quelque chose comme ça en ville, non ?
    -Oui, une caste de mutants. Elle les a appelés les maledictus.
    -Comment ça, des mutants ? Répondit Lexxi avec un rictus de dégout.
    Lek était déjà en train de rebrousser chemin, se gardant bien de rester tête baissée. Lexxi venait de passer la corde avec le grappin à Poppy, afin de lui permettre de remonter. Il se précipita vers le mur, attrapa la corde et commença à grimper mais dû s’y reprendre à deux ou trois fois. Depuis le haut du mur, Poppy se laissa glisser lentement vers l’extérieur, afin de ne pas rester visible. D’autres mutants approchaient depuis d’autres angles du jardin, ayant clairement vu Lek. L’un d’eux tenait leur servo-crâne et le scruta d’un air intrigué. Puis, d’un geste de rage, il le broya dans sa main. En bas, Lexxi agrippa la corde et chercha à faire remonter Lek car il était seul de l’autre côté et clairement en danger. Elle tira de toutes ses forces mais seule la corde passa par-dessus le mur. Lek était resté dans le jardin, planté là, hébété, l’esprit soudain confus cherchant à comprendre pourquoi il avait dû lâcher la corde et ne bougeait plus. Cela avait-il un rapport avec le type qui approchait vers lui comme au ralenti et dont les yeux brûlaient de flammes violacées alors qu’une épouvantable odeur l’envahissait ?
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 22/03/2023 à 12:02 Citer ce message

    Poppy qui venait d’assister à la scène depuis le haut du mur d’enceinte où elle était perchée, dégaina son pistolet bolter alors que Lexxi, aidée du grappin, escalada le mur pour la rejoindre. Ils venaient de perdre Artho, leur servo-crâne, mais surtout, Lek était en très mauvaise posture. Il venait de perdre connaissance alors qu’un maudit sorcier l’avait pris pour cible. Il gisait maintenant dans l’herbe, seul de l’autre côté du mur dans le jardin de la villa avec une bande de sept ou huit mutants qui étaient en train d’approcher de lui à vingt ou trente mètres de là. Tous avaient des difformités assez marquées sur une peau grêlée. Leurs corps étaient bossus, tordus, couverts de plaques ou de pustules et leurs membres noueux aux muscles hypertrophiés étaient garnis de griffes. Certains avaient un bras en plus ou même un second visage atrophié, accolé au premier. L’un des mutants était une femme, dont la moitié droite du visage et tout son bras garni de griffes tranchantes, étaient remplacés par une sorte de chitine noire. Tous portaient de lourdes masses garnies de pointes, des barres de fer, des chaines ou des piques. Deux ou trois portaient de grosses armes à feu bricolées, assemblage de plusieurs canons, sans doute capable de tirer de la ferraille, des clous ou du verre pilé. Des armes maladroites mais parfaitement capable de vous transformer en burger de grox à bout portant. L’un d’eux au moins était un psyker, se dit Poppy, celui qui venait d’utiliser un de ses pouvoirs maléfiques sur Lek. Les affronter allait clairement tourner à leur désavantage. Elle connaissait suffisamment les mutants, juste assez pour savoir qu’ils pouvaient être dangereux à l’extrême en combat rapproché, mais que leur véritable point faible était justement leur manque flagrant de discipline et de sens tactique. Elle se hissa sur le mur, se rendant bien visible, alors que Lexxi venait de la rejoindre. Elle pointa son pistolet bolter et sa plaque, en criant vers eux :
    -Opération de l’Arbites, vous êtes cernés et tous en état d’arrestation ! Veuillez déposer vos armes et vous rendre, il n’y aura pas de sommation !
    Soudain, les mutants se fixèrent en la voyant et en entendant ses paroles. Décontenancés, ils eurent un instant d’hésitation, avant que la femme avec la griffe ne leur fasse signe de se replier. Ils commencèrent tous à refluer à la hâte, se dispersant dans le jardin et derrière la villa, comme une horde d’animaux apeurés. Seul le psyker hésita un instant, ses yeux brulant d’énergies aethériques. Poppy ne lui laissa pas le temps de réfléchir à son prochain mauvais coup. Elle pointa son pistolet bolter vers lui, le visa et tira. Le bolt lui déchira le flanc en éclatant, ce qui lui fit lâcher un cri de douleur. Malheureusement, il n’était pas mort mais perdait beaucoup de sang à cause de la plaie causée par le shrapnel. Un autre mutant, plus costaud, vint l’aider et ils s’enfuirent tous les deux. La voie ainsi dégagée, Poppy décida de sauter au bas du mur, aussitôt rejointe par Lexxi.
    -Bien joué. Le coup de l’Arbites, ça marche à tous les coups on dirait, lâcha Lexxi qui se pencha sur Lek. Il était tout juste en train de reprendre ses esprits mais restait vraiment en état de choc.
    -Un coup de chance mais ne va pas te faire des idées, répondit Poppy. Ils peuvent vite décamper mais reviendront tout aussi vite, une fois qu’ils auront compris le subterfuge. Ne trainons pas.
    Elles aidèrent Lek à se remettre sur pied et déjà, elles virent au loin, les mutants, commencer à revenir sur leurs pas. Une fois franchis le mur d’enceinte, ils se mirent tous trois à courir en direction d’une rue plus sûre, là, ils reprirent leur souffle.
    -Merci… lâcha Lek qui avait encore un peu les mains qui tremblaient.
    -Comment tu te sens ?
    -Aucune idée… J’ai encore l’impression que ce… Ce sorcier… Bordel, il était là dans mon cerveau et moi j’avais plus le contrôle de rien et je m’en rendais compte, c’est ça le pire.
    Il se retourna d’un coup et se mit à vomir. Il reprit ses esprits après quelques instants, leur disant que ça allait.
    -Oui bin, on n’a pas été très glorieux sur ce coup-là. En plus, on a perdu Artho et c’était moins une que tu y passes aussi, lui dit Poppy. A l’avenir ne part pas comme ça tout seul sans le moindre soutien. Lexxi ou moi, on aurait dû t’accompagner.
    -On ne pouvait pas savoir qu’il y avait des mutants, ajouta Lexxi. Et en plus, ils sortaient d’où ceux-là ?
    -Shidia nous a parlé de cette guilde… Enfin, cette caste de mutants en ville, ajouta Lek.
    -Oui, les maledictus, compléta Poppy. Mais ça n’explique pas pourquoi ils étaient là, ni ce qu’ils cherchaient ?
    -La même chose que nous ? Se hasarda Lexxi.
    -C’est bien ce qui m’inquiète, même si cela m’étonnerait. Retournons voir le reste de l’équipe, j’aimerai en avoir le cœur net.

    En chemin, ils finirent par capter un appel vox de Felton. Ils se retrouvèrent à mi-chemin, dans le quartier du port, à un kilomètre de là. Ils se posèrent sur une petite place, devant une fontaine. Lek en profita pour se passer un coup d’eau sur le visage. Les autres s’étaient dirigés vers les échoppes environnantes pour aller acheter quelques pains de viande avec des bières. Felton et Poppy s’étaient assis sur la margelle de la fontaine pour fumer et échangèrent sur ce qu’ils avaient obtenu, à savoir pas grand-chose. Des passants allaient et venaient sans pour autant leur prêter attention. Ce qui leur convenait parfaitement.
    -Donc, on doit retrouver Shom-Valaï dans une heure, c’est ça ? Lui demanda Poppy.
    Felton regarda l’horologium sur le clocher, en face de la place. Il jouait nonchalamment avec un petit objet entre ses doigts, une sorte de petite pyramide colorée en plastek sur laquelle étaient gravées des runes. C’était un souvenir d’Eshunna qu’il avait fabriqué, ou quelque chose comme ça, avait cru comprendre Poppy.
    -Dans un peu plus de quarante minutes, maintenant, lui dit-il.
    -Et il avait l’air de te faire confiance ?
    -Je ne peux rien assurer avec un type comme lui, mais il avait l’air de me prendre au sérieux, oui. Mais on sait jamais, je préfère qu’on y retourne tous ensemble. Le gros Shom-Valaï va peut-être nous la faire à l’envers, va savoir. Et toi, sinon, tu en penses quoi de vos mutants ?
    -Comment ça ?
    -Tu crois qu’ils étaient là pour le dossier sur Everdynn ? Rien ne prouve que ce soit le cas.
    -Je n’y crois pas trop. Je vois mal des gens comme Bosinski ou l’équivalent envoyer des créatures aussi visibles que peu efficaces que sont les mutants. Je pense qu’ils étaient juste là pour piller et qu’on est tombé dessus au mauvais moment.
    Shidia vint les rejoindre et s’assit à côté d’eux en leur tendant un pain de viande enroulé dans du papier à chacun.
    -Tenez, je vous dois bien ça. Vous parliez de quoi, tous les deux ? Leur dit-elle avec un grand sourire.
    Felton et Poppy la remercièrent.
    -Des mutants qu’on a croisé à la villa de Cox, avec Lek et Lexxi. A ce sujet, qu’est-ce que tu sais sur eux ?
    -Tout ce que je sais, c’est ce que tout le monde sait et raconte ici en ville. Les maledictus, c’est pas juste une histoire pour faire peur aux gosses le soir. On les a tous déjà vu. Ils font peur.
    -Et à par faire peur, ils font quoi dans cette ville ?
    Shidia croqua une bouchée de son sandwich avant de poursuivre. Poppy et Felton l’imitèrent.
    -Il y a des bruits qui courent sur eux. Mais on les dit surtout responsables de plusieurs atrocités. Des enlèvements, des meurtres horribles, des attentats... Des choses comme ça, leur dit-elle avec une petite grimace. Ils n’étaient pas là avant la guerre, quand je travaillais avec les FDP, mais les choses ont changé, depuis.
    Poppy l’observa, reprenant ses réflexes d’enquêtrice.
    -Des bruits sur eux ? De quel genre ?
    -La plupart des gens disent ici, qu’ils ont été enfantés par le warp, à cause de leurs péchés. D’autres racontent que ce sont des xenos énigmatiques qui prennent leur apparence pour agir dans l’ombre. C’est ce genre de bruits qui circulent. Mais d’autres prétendent qu’ils seraient en réalité les résultats de sombres expériences pratiquées par les maitres fysicae de la guilde Pharmatika.
    -Et toi, tu en penses quoi ?
    Shidia resta quelques instants, le regard dans le vague. Elle désigna le cigalho que fumait Poppy. Elle le lui passa. Shidia tira une longue bouffée avant de lui rendre. Elle se passa la main dans ses longs cheveux châtains avant de répondre.
    -Je pense qu’il y a une part de vérité dans chacune de ces rumeurs. Et crois-moi que si j’avais pas le cœur bien accroché, ça me foutrait vraiment la trousse.
    Poppy reprit son cigalho et tira dessus à son tour, avec un léger sourire.
    -On a vu une fille avec eux. De longs cheveux noirs et un bras terminé par des sortes de griffes, noires aussi, ça te parle ?
    -Les gens en parlent ici, un peu comme une sorte d’incarnation des maledictus, pourtant presque personne ne la voit. Elle s’appellerait Aexana. Certains disent que ce serait elle la cheffe des maledictus. Il y a une rumeur en ville qui court, une sorte de légende urbaine qui raconte que ce serait la sœur jumelle maudite de Seloxtyne de Chaambal.
    -Qui ça ? Demanda Felton tout en machant son pain de viande.
    -Une des dirigeantes du Triumvirat qui tient la ville. Un des bras droits de Haxt.
    -Donc, cette… Aexana, serait sa sœur ? S’étonna Poppy.
    -C’est ce qu’on raconte.
    -Et tu saurais où la trouver ?
    Shidia la regarda en écarquillant ses yeux clairs en grand.
    -Tu es sérieuse ?
    -Crois-moi, lâcha Felton entre ses dents avec une petit air sarcastique, elle est tout le temps comme ça, alors bon courage pour la dérider.
    Poppy lui lança un regard noir puis reporta son attention sur Shidia. Cette dernière secoua la tête et la main par la négative.
    -Non, non, non… On raconte qu’ils vivent dans les égouts ou pire encore. Ils ont été aperçus parfois par les pêcheurs sur des iles au large du port dans des ruines, ils s’y retrouvent parfois pour pratiquer je ne sais quelles horreurs. Rien que d’en parler, ça me file la chair de poule.
    Elle laissa son sandwich, soudain, avec l’appétit coupé.
    Lek, Lexxi et Viggo vinrent les trouver. De toute façon, il était l’heure de bouger pour retourner au Palais des Murmures, s’ils ne voulaient pas manquer Shom-Valaï.
    Poppy en profita pour attraper Viggo, un peu à part. Parler de sujets psychiques la mettait mal à l’aise mais la situation était déjà assez délicate comme ça.
    -Tu serais en capacité de… Comment dire… localiser un objet ?
    -Tout dépend de l’objet, de la distance aussi. Ce serait quoi ?
    -Le dossier à la villa de Cox. Celui avec les pix d’Everdynn. Je me disais que si les mutants l’avaient pris avec eux, on pourrait peut-être le savoir et le localiser ?
    -Vous avez un indice ? Un objet ayant appartenu à Everdynn ? Ou un objet ayant appartenu à un de ces mutants ?
    -Malheureusement non…
    Il hocha la tête par la négative avec une petite moue.
    -Cela risque alors d’être vraiment très vague. Je pourrai toujours effectuer une séance de Tarot, sinon ?
    -Il te faut combien de temps ?
    -Trente minutes, pas tellement plus.
    -Ce sera trop long, tant pis, on s’en passera.
    Elle leur fit signe à tous, de se mettre en route.

    Le plan était simple. Felton, Shidia et Viggo allaient se rendre de nouveau au palais de Shom-Valaï pour l’emmener en lieu sûr. Poppy et les autres allaient les accompagner mais resteraient à distance, en couverture, au cas où. Dans une heure, de toute façon, l’Arbites appuyé par les troupes locales de la gouverneure, allaient donner l’assaut et arrêter les dix principaux caïds qui tenaient tout le narcotrafic de Sandbarra et le commerce froid qui y était associé. Parmi les noms des principaux suspects, se trouvaient des bras droits supposés de Haxt, tels que Seloxtyne de Chaambal, Malfus Von Brawn du Pharmatika ou Konrad Helsten, le chef des Cent Yeux. Le plan, selon Jézabel, était de frapper un grand coup le Syndicat de l’ombre et ainsi fragiliser Haxt et sa clique.
    Le plan était finalement trop simple. Felton s’en rendit compte, rien qu’en voyant les deux gros tout-terrains, garés juste devant l’entrée du palais à une quarantaine de mètres de là. Un pick-up Armadillo et un command-car modèle Imperator. Si ou sept types armés venaient d’en descendre. Quatre restèrent auprès des véhicules et trois se dirigèrent vers l’intérieur du palais. A voir leur mine sinistre, leurs larges chapeaux et leurs longs manteaux, ils reconnurent tout de suite les Cent Yeux, malgré la rue animée.
    -Mince, qu’est-ce qu’ils foutent là, eux ?
    -Ils viennent chercher Shom-Valaï, eux aussi ? S’étonna Shidia.
    -Ou bien, c’est lui qui nous a balancé ? Répondit Viggo.
    -J’ai un peu de mal à le croire. Je ne vois pas trop pourquoi il prendrait un tel risque, rétorqua Felton.
    -Un agent double ?
    -On va bien voir.
    Il activa son microvox. Le reste de l’équipe était à l’autre bout de la rue, à une centaine de mètres. A cause des passants et des charrettes qui encombraient les trottoirs, il était difficile de les voir. Le bruit ambiant de la rue n’aidait pas non plus.
    -Pop ? Tu vois ce qu’on voit ?
    -Les Cent Yeux, c’est ça ?
    -Affirmatif…
    -Tu comptes faire comment ?
    -Comme prévu. Je ne change pas mon plan. Je rentre.
    -Attends, on te rejoint, au cas où ça se compliquerait.
    -Bien reçu.
    Felton, toujours suivi de Viggo et Shidia se dirigea d’un pas naturel vers l’entrée du Palais des murmures. Les deux véhicules étaient stationnés de chaque côté, le long du trottoir et quatre hommes d’armes des Cent Yeux étaient là, en faction. Felton se dirigea vers eux, bien décidé à entrer mais ils lui firent signe aussitôt de s’arrêter. Derrière, Poppy était en train de les rejoindre. Lek et Lexxi restèrent un peu en retrait, parés à intervenir.
    -Halte, dit un des gardes. Personne ne rentre.
    -Je dois absolument passer. J’ai un rendez-vous, lâcha Felton.
    -Certainement. Mais il va falloir patienter dans ce cas.
    -On ne va pas pouvoir patienter, ajouta Poppy qui vint à sa hauteur. On est attendu.
    Un des gardes s’approcha d’elle et le toisa de sous son chapeau.
    -Je crois que la petite dame, elle n’a pas bien saisi ce qu’on lui a dit. On ne vous demande pas de patienter, on vous ordonne de patienter. C’est assez clair, comme ça ?
    Felton chercha à calmer la situation avant que tout ne dégénère. Les types avaient déjà la main sur les crosses de leurs canons de poing. Un ou deux portaient même des fusils.
    -Attendez… Nous sommes attendus par Mr Shom-Valaï, C’est assez urgent, nous sommes là, à la demande de Mr Bosinski, bluffa-t-il.
    -Ah oui ? Comme quoi la nature fait bien les choses parfois.
    Ils virent les trois autres Cent Yeux, ceux qui étaient rentrés à l’intérieur, revenir en encadrant Shom-Valaï et l’emmenant vers la sortie. Les gardes firent signe à Felton et aux autres de s’écarter. Ce qu’ils firent. Ce dernier chercha à capter le regard de Shom-Valaï mais il ne le leur adressa pas le moindre signe alors que les hommes d’armes l’emmenaient vers un des véhicules. Poppy et Felton se posèrent alors la même question : Soit il cherchait à ne pas compromettre leur couverture et leur projet d’exfiltration, soit il était de mèche avec les Cent Yeux et les avait déjà doublé. Pourtant, quelque chose disait à Felton que s’il avait véritablement voulu les doubler, il les aurait déjà dénoncés, ce qu’il n’avait pas fait. Donc pour lui, la trahison de Shom-Valaï était certainement la raison de cette arrestation. Il interrogea alors Poppy du regard. Elle se recula vers la sortie, effectuant quelques petits signes de tête à Lek et Lexxi.
    Tandis que le premier véhicule où était leur cible, démarra, les quatre autres gardes armés, allaient en faire de même, vers le second tout-terrain, le pick-up. Lexxi n’attendait que ce signal. De sous son long manteau qu’elle ouvrit, elle sortit son épée tronçonneuse, l’activa et se rua vers un des types qui allait monter dans la voiture. Il la vit pourtant arriver et se servit de la portière pour éviter le coup mortel. L’épée tronçonneuse mordit le métal dans une gerbe d’étincelles et un grincement strident, explosant la vitre au passage. Lek et Poppy venaient de dégainer leurs armes mais Shidia les devança et sortant un pistolet laser Triplex de sous ses robes et le tenant à deux mains, elle ouvrit le feu deux fois, à bout portant sur un des types, armé d’un fusil laser jumelé qu’il pointait droit sur eux. N’ayant même pas le temps de réagir, il se prit les deux tirs déchargés à pleine puissance, en pleine poitrine, traversant non seulement son pare-balles mais aussi son torse, de part en part dans une gerbe d’étincelles et de flammes. Il bascula de la voiture et s’étala sur le trottoir, raide mort. Poppy allait ouvrir le feu mais se prit un des tirs d’un autre garde qui lui déchira la cuisse droite, ce qui lui fit pousser un cri. Elle sentit le sang couler et se mit à voir rouge. Le tireur pointait deux canons de poing droit vers elle. Elle pointa son pistolet bolter et fit feu, dégainant son Carnodon, elle fit feu à son tour. Les deux impacts lui ouvrirent le torse. Il fut projeté contre le mur juste derrière lui où il y laissa une trace de sang, juste avant de s’effondrer au sol. Elle en profita pour ramasser les deux armes à terre. Felton, voyant que le premier véhicule était déjà loin, se précipita vers le siège conducteur, profitant que la portière était ouverte et s’installa au volant. Lexxi termina le dernier qui était en train de fuir et qui avait évité les tirs de Lek, elle le rattrapa en courant et le faucha avec son épée tronçonneuse qu’elle lui planta entre les reins, le traversant de part en part dans une effusion de sang. Il s’écroula en pleine rue, sous les cris des passants qui se mirent à fuir à toute jambe. Lek était déjà monté à l’arrière, sur le plateau du véhicule avec Viggo et Shidia et appelait Lexxi alors que Felton démarrait en trombe dans une manœuvre compliquée. Poppy était à l’avant, à côté de lui et sa jambe continuait de pisser le sang, aussi, elle tenta de s’appliquer un bandage de fortune sur la plaie.
    Lexxi courut dans leur direction, sauta dans le véhicule en marche et s’installa sur la banquette avant, à côté de Poppy qui servait de co-pilote à Felton. Les rues étaient étroites et bondées, emplies de passants, de marchands en tout genre, de charrettes chargées de produits alimentaires divers, aussi il était plutôt ardu de pouvoir suivre le premier véhicule qui avait déjà plus de deux cents mètres d’avance. Felton s’en sortait bien et restait concentré sur sa conduite, prenant bien soin de ne pas faucher de passants. Pourtant, il lui était parfois impossible de renverser des caisses et des étals, envoyant fruits et légumes voler en tous sens, sous les cris des marchands en colère.
    La scène de carnage devant le Palais des Murmures n'était évidemment pas passée inaperçue et laisser ainsi quatre gardes des Cent Yeux dans une mare de sang à même le trottoir et devant des dizaines de témoins, n’était pas pour le rassurer. Au bout de quelques minutes, ils finirent par les rattraper et n’étaient plus qu’à quarante ou cinquante mètres à présent, mais ils roulaient toujours à vive allure et ce malgré la foule qui prenait bien garde à rester sur les trottoirs en les voyant rouler à toute vitesse. Lexxi était en train de préparer son pistolet, un Sigma 9 automatique, tout en se penchant à la fenêtre. Viggo, à l’arrière était en train de se concentrer, bien décidé à lancer un de ses pouvoirs sur leur cible, alors que Shidia avait toujours son pistolet laser en main mais dans l’incapacité de viser correctement, à cause des soubresauts.
    -On immobilise leur véhicule ou le chauffeur, je vous rappelle qu’on doit prendre Shom-Valaï vivant ! N’allez pas me le tuer ! Cria Poppy depuis l’habitacle, sur le siège à côté de Felton cramponné au volant. Sur le plateau arrière, Lek venait de retirer une bâche qui recouvrait un trépied et comme il s’y attendait, s’y trouvait une mitrailleuse jumelée monté sur pivot. Comme un gosse découvrant son nouveau jouet, il arma la double culasse en exultant. A la portière, juste devant, Lexxi se retourna en entendant le son caractéristique. En tant qu’ex-garde impériale, familières des armes lourdes, elle invectiva aussitôt Lek.
    -Non, lui fit-elle de la main, tout en hurlant, tu risques de tous les tuer, tu vas…
    Elle n’eut pas le temps de terminer sa phrase que la mitrailleuse se mit à éructer ses projectiles traçants à une cadence absolument infernale. Elle voyait les douilles pleuvoir comme de la grêle autour d’elle, tandis que le staccato des percuteurs jumelés envoyait leur décharge de mort dans tous les sens. Lek n’était pas familier comme elle d’une telle arme surtout depuis un véhicule en mouvement. Les mitrailleuses Echon MkIII n’étaient absolument pas calibrées pour la précision mais juste pour leur redoutable puissance d’arrêt, capables de faucher toute une escouade en moins de quatre secondes. Lek, surpris par le recul et les à-coups de l’arme, surtout en plein course à bord d’un tout-terrain, perdit totalement le contrôle alors que les balles fauchaient sans distinction une poignée de passants sur le trottoir. Lexxi avait beau crier, se fut Poppy qui se mit à hurler, presque de manière hystérique, voyant le carnage devant leurs yeux et les corps désarticulés fauchés dans des effusions de sang. Felton, en état de choc, eut un mal de chien à éviter les corps qui tombaient devant lui et le sang qui mouchetait son pare-brise. Lek finit par lâcher l’arme, basculant en arrière sur le plateau, à cause du recul, ne réalisant pas encore quel carnage involontaire il venait de créer. Il se cogna la tête en tomba et resta sonné. Derrière eux, sur le trottoir, il y avait du sang partout, les corps de cinq hommes, femmes et enfants, gisaient parmi les cris et la stupeur de la foule. Depuis le véhicule qu’ils poursuivaient, les Cent Yeux venaient de réaliser ce qui était en train de se passer eux aussi. Deux des hommes d’armes se retournèrent, en voyant ainsi arriver leurs poursuivant, désormais à moins de quarante mètres d’eux et ouvrirent le feu. Les impacts de balles tintèrent sur le capot de l’Armadillo alors que Felton tentait de rester concentré malgré les hurlements quasi hystériques de Poppy qui peinait à réaliser l’horreur qui s’était déroulée sous leurs yeux. Il chercha à rester focalisé sur sa conduite, prenant garde à ne pas ajouter d’autres drames. Il fauchait cependant et indistinctement tous les paniers, étals et chariots qui bloquaient son passage, envoyant voler leurs contenus un peu partout. Lexxi, plus froide et méthodique, plus familière aussi des scènes de guerre, resta concentrée et ripostait de son arme sur le véhicule de tête mais sans succès. A l’arrière, sur le plateau, tandis que Shidia aidait Lek, ce fut Viggo qui se redressa et décida de passer à l’offensive. Alors que des étincelles crépitaient au bout de ses doigts et brûlaient dans ses yeux, il relâcha une rafale de projectiles de force qui fusèrent en sifflant, tels des tirs de plasma et frappèrent l’arrière du command-car dont le coffre explosa, ainsi que le train arrière. Privée de ses deux roues qui volèrent dans le décor et étant désormais incontrôlable, le véhicule perdit de la vitesse, dérapa et termina sa course contre un poteau galvanique avant de s’immobiliser totalement dans une gerbe d’étincelles et un panache de fumée. Felton freina, dans un dérapage contrôlé et immobilisa aussi l’Armadillo à une quarantaine de mètres de leur position. La foule décampa en hurlant.
    Les occupants du command-car endommagé en sortirent avec des fusils, tout en ouvrant le feu en rafale sur l’Armadillo dont les impacts criblèrent le pare-brise et la tôle. Deux des Cent Yeux venaient de se positionner derrière leur véhicule pour couvrir leur troisième compère qui sortait Shom-Valaï de là, un peu sonné et s’en servant de bouclier pour l’emmener vers la ruelle juste à côté.
    Lexxi ouvrit sa portière malgré les tirs qui la visaient, s’en servant pour se mettre en position de tir. Depuis le plateau arrière, Shidia l’interpela et lui lança le fusil laser jumelé abandonné par le tireur qu’elle avait abattu devant le palais. Lexxi s’en saisit d’une main experte. Un modèle Salvus jumelé, ça ne valait pas la précision d’un Kantrael MkIII mais au moins, sa puissance de feu augmentée ferait l’affaire, surtout en rafale. Un peu plus loin, ils pouvaient déjà entendre les sirènes de plusieurs véhicules des Cent Yeux en approche. Il était plus que temps de réagir.
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  • Illuminati
    Illuminati

    le 28/03/2023 à 14:22 Citer ce message

    Alors que les tirs tintaient et ricochaient sur la carrosserie de leur véhicule, Lexxi ouvrit sa portière d’un coup sec et s’en servi de couverture. Posant un genou à terre, elle pointa le fusil laser Merovech et lâcha un tir vers leurs attaquants. Malheureusement, dans la confusion, elle toucha un des passants au mollet. L’homme tomba en criant, tout en se tenant la jambe. Les gens hurlaient et se mirent à courir. Lexxi pesta, cherchant à obtenir un meilleur angle de tir, ce qui n’était pas possible si elle ne bougeait pas de là. Poppy sortit de la voiture à son tour et fit feu de son Carnodon. Le tir, bien ajusté toucha un des tireurs mais pas avec suffisamment de précision pour le coller au tapis. A l’autre portière, Felton faisait feu aussi avec son Tronsvasse mais ne parvenait pas à faire mouche. La situation devenait tendue à mesure que les secondes défilaient tel le tic-tac pesant d’un horologium. Depuis le véhicule accidenté des adversaires, deux des Cent Yeux venaient de sortir tout en tirant et en emmenant Shom-Valaï avec eux, s’en servant de bouclier. Ils étaient en train de reculer, l’emmenant tout droit vers une rue commerçante des plus fréquentées.
    -Cette rue, là-bas, ça mène vers où ? Cria Felton à l’attention de Shidia.
    -La place du marché d’Arsheba. S’ils s’engouffrent dedans, on risque de les perdre, il y a un dédale de rues comme un labyrinthe.
    -Et merde !
    Lexxi tourna son regard vers Poppy et y vit la même détermination.
    -On fonce ?
    -On fonce !
    -On a un autre souci, ajouta Shidia, il y a des hommes armés qui arrivent derrière nous !
    -Combien ? Lui demanda Lek qui se remit en position derrière la mitrailleuse, la faisant pivoter dans la direction indiquée.
    -J’en sait rien… Quatre… Peut-être plus…
    Les tirs qui fusèrent dans leur direction ne firent que confirmer ses dires. Un tir de laser la frôla à la jambe. Lek fut touché dans son plastron par deux fois, manquant le mettre à terre et parvint de justesse à dévier un troisième tir de son bras augmentique. Ils étaient en train de se faire canarder de tous les côtés, ainsi exposés au beau milieu de la rue, avec des renforts qui cherchaient à les bloquer. Viggo se mit à courir sous les tirs et traversa la rue, entrant dans la première échoppe qu’il trouva. Il s’agissait d’une boutique de bijoux bon marché et de colifichets en tout genre. La vendeuse tétanisée ne parvint même pas à répondre à ses questions, tapie derrière son comptoir, les mains tendues, implorant de ne pas mourir. Il n’y prêta pas attention et cherchait une autre issue, ayant l’intuition que si une porte se trouvait derrière, il pourrait certainement contourner la rue, déboucher en plein marché et arriver dans le dos des ravisseurs de Shom-Valaï ou pas bien loin. Il laissa tomber les questions, traversa la boutique à la hâte, il trouva une porte qui menait vers une partie privative qui servait aussi d’arrière-boutique et dans laquelle se trouvait une autre porte, verrouillée, cette fois-ci et aucune clé dans les parages.
    -Et merde, se dit-il. Il comptait revenir sur ses pas, secouer un peu la femme pour qu’elle lui file les clés mais n’en avait pas le temps. Il dégaina son pistolet laser radiant le pointa vers la porte et tira dans la serrure à plusieurs reprises.
    Depuis la rue, Lexxi et Poppy s’étaient mises à courir, profitant que le tireur qui les prenait pour cible venait de se remettre à couvert pour parcourir en sprintant, les vingt-cinq mètres qui les séparaient. Lexxi pensait dégainer son épée tronçonneuse qu’elle avait dans le dos, mais réalisa que le fusil Merovech qu’elle tenait en main disposait d’une baïonnette rétractable sous le canon. Avec un sourire mauvais, elle la déploya tout en courant, d’un saut, bondit par-dessus la carrosserie endommagée du command-car et se servant de son arme comme d’une lance, elle s’apprêta à embrocher sa cible. Le type eut pourtant le temps d’anticiper son attaque, pivota de côté et fit feu à bout portant sur Lexxi. Une balle lui traversa le bras droit et en poussant un cri, elle lâcha son arme qui rebondit au sol. Au même moment, Poppy venait de parvenir à leur hauteur. Son Carnodon pointé devant elle à deux mains, elle contourna le véhicule, activa son implant oculaire et chercha toute trace des ses complices. Il était seul alors que quelques secondes auparavant, ils étaient trois en plus de Shom-Valaï. Ils ne pouvaient pas être bien loin et venaient de disparaitre dans cette rue sur sa droite. Une rue commerçante, remplie de monde et d’étals de marchands, comme leur avait annoncé Shidia. Elle venait de perdre le visuel et se mit à avancer avec la plus grande prudence. Un tir fusa dans sa direction et vint toucher l’angle du mur juste à côté d’elle dans une gerbe de plâtre explosé. Un tir de laser qui venait bien de l’est, de sa droite donc, peut-être à vingt ou trente mètres de là. La place était bondée, aussi les gens se mirent à crier et à courir en tous sens. La plupart, s’accroupirent au sol, cherchant à se protéger sous les étals comme il le pouvaient. La confusion n’aidait absolument pas à y voir clair, elle avait une mauvaise visibilité, un mauvais angle de tir, des tireurs embusqués potentiellement n’importe où et de plus, son implant, révélateur de signatures génétiques lui communiquait bien trop de possibilités. La foule ne faisait que brouiller les pistes, les mélanger, les superposer, ce qui ne pouvait que la leurrer ou la déconcentrer. Elle désactiva l’implant, se dissimula derrière l’angle d’un mur et activa son microvox en murmurant.
    -A tous, notre cible se dirige vers l’est, en direction du marché. Rejoignez ma position, je les prends en chasse.
    Lexxi regarda son bras et le sang qui coulait abondamment de la plaie qui venait de le traverser de part en part. Ne s’en souciant guère, elle décrocha son épée tronçonneuse au moment où le type, armait la culasse de son arme, s’apprêtant à faire feu à nouveau. Elle activa le moteur de sa lame rotative et la lui enfonça dans le torse de toutes ses forces alors qu’un sang épais giclait tout autour, noyant les cris du mourant.
    Lek tenta quelques tirs avec la mitrailleuse mais sans réel succès. Ses tirs, combinés à ceux de Felton, avaient pu blesser deux ou trois types et les ralentir, les forçant à reculer et tirer leurs blessés à couvert. Ils étaient plutôt bien entrainés, cela se voyait. Ils cherchaient à les encercler ou à leur couper toute retraite mais sans pour autant prendre des risques inconsidérés. Pourtant ses propres tirs n’avaient fait que les énerver encore plus. Pire que tout, un satané psyker était avec eux et leur envoyait à présent des attaques d’énergie psychiques. Ils finirent par le blessé et au bout d’un moment, il tomba au sol, blessé ou sonné. C’était le moment pour eux de décrocher de là au plus vite car ils appelaient d’autres renforts qui allaient leur arriver dessus d’un instant à l’autre. Lek sauta du véhicule, tout en grimaçant à cause de ses blessures, heureusement légères et courut lui aussi vers la boutique, tout comme Felton qui couvrait ses arrières en vidant le chargeur de son Tronsvasse. Shidia venait déjà de retrouver Viggo et les appela pour qu’ils les rejoignent, ce qu’ils firent. Ce dernier était venu à bout de la serrure, perforée et chauffée à blanc par ses tirs de laser. Il était dehors dans une rue qui donnait bien sur la place du marché, par le côté sud. Il vit Poppy, dissimulée à sa gauche, à une quinzaine de mètres de là, tapie à l’angle d’un mur. D’un geste de la main, elle lui indiqua la direction des tireurs embusqués. Viggo et Shidia se déployèrent à couvert, profitant des étals pour se dissimuler. Lek et Felton vinrent les rejoindre et prirent position plus un peu plus loin, au nord de cette position et virent un des tireurs qui les prenaient pour cible. Ils firent feu et le touchèrent. Ce qui laissa le temps à Poppy de bouger et d’avancer, son Carnodon toujours pointé devant elle.
    Lexxi vint les rejoindre en courant, couverte de sang. Elle lança une de ses grenades fumigènes devant elle et profita de l’écran de fumée pour se mettre à couvert et chercher tout potentiel tireur embusqué.
    Poppy bougea à nouveau, évoluant parmi les étals de fruits et légumes. Des gens étaient là, tapis au sol, en gémissant. Elle vit le tireur touché qui était à terre, rampant malgré sa blessure, il pointa ses deux canons de poing en voyant Poppy et tira au jugé. Elle bougea rapidement afin d’éviter une des balles qui aurait pu cependant la toucher. Parvenant à sa hauteur, elle lui logea une balle en pleine tête et continua sa progression, contournant un stand de vêtements colorés, elle se redressa pour obtenir un meilleur angle de vue. Ce fut Lek qui l’appela dans le microvox.
    -A droite de ta position, à moins de dix mètres, tireurs. Je crois qu’ils ont notre cible !
    Elle pivota et chercha un meilleur angle de vue. Elle les vit enfin. Un des tireurs tenait toujours Shom-Valaï et reculait avec lui, sans l’avoir aperçu visiblement. Mais en le voyant, elle vit qu’il reculait vers un groupe de cinq ou six hommes armés. Des Cent Yeux arrivaient par l’est de la place, à vingt ou trente mètres de là et ils ne les avaient pas encore vu venir. Un psyker était à eux, elle le vit tout de suite à ses yeux brulant d’énergie et aux sortes d’ondes de chaleur qui se dégageaient de lui. Eux aussi ne l’avaient pas encore vu mais se dirigeaient pourtant droit vers elle. Elle se remit à couvert et cria d’une voix forte.
    -Tireurs embusqués ! Ils sont au sud de la place !
    Sa ruse fonctionna car aussitôt, leur attention se reporta vers cette direction. L’endroit précis où ils virent justement le panache de fumée de la grenade de Lexxi, à une cinquantaine de mètres de là.
    Elle activa son microvox.
    -Bordel, Lexxi, tu fous quoi ? Décroche, ils arrivent droit sur toi.
    Viggo et Shidia en profitèrent pour bouger, cherchant un meilleur angle de vue sur les nouveaux arrivants, tout en couvrant leurs arrières, sachant pertinemment que des renforts se trouvaient aussi dans la rue derrière eux.
    Felton et Lek étaient à quelques mètres derrière Poppy. Ils gardaient un œil sur les Cent Yeux qui se déployaient à trente mètres de là. L’un d’eux, muni d’un fusil de précision, se mit à grimper sur un toit. Felton activa son microvox.
    -Pop, on fait quoi maintenant ?
    Poppy sentit la sueur couler dans son dos et sur son front. Elle souffla un instant, cherchant à évaluer la situation. Shom-Valaï était à moins de vingt mètres mais en face ils étaient au moins sept. Sans compter les renforts qui risquaient d’arriver. Selon son chrono, l’assaut planifié par Jézabel aurait lieu dans un peu moins de dix minutes. Une éternité à tenir dans la poudrière dans laquelle ils venaient de se mettre.
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  • Illuminati
    Illuminati

    le 04/04/2023 à 20:04 Citer ce message

    Les balles et les tirs de laser se mirent à fuser dans tous les sens, faisant éclater fruits et légumes sur les étals. Les quelques civils qui n’avaient pas encore fuit les lieux, se mirent à crier, cherchant à se jeter à couvert comme ils le pouvaient. En l’espace d’un instant, la place du marché venait de se transformer en une véritable scène de guerre. Viggo, épuisé par l’usage intensifs de ses pouvoirs, juste avant, puisa dans ses dernières ressources et relâcha une rafale de projectiles incandescents sur un groupe d’adversaires. Malheureusement, il ne toucha que l’un d’entre eux et avec assez peu de résultat. Voyant qu’il était à bout de souffle et plutôt exposé aux tirs ennemis, il chercha à reculer le plus possible afin de se mettre à l’abri. Il dégaina son pistolet laser radiant et lâcha quelques tirs, mais sans plus de succès. A l’opposé de la place, Lexxi était en train d’arroser en rafale, avec son fusil laser une position où deux tireurs étaient embusqués. Elle n’avait pas un bon angle de tir et ses rafales manquaient cruellement de précision. Elle bascula sur le tir automatique mais c’est le moment où un des types se rua sur elle, brandissant un long poignard incurvé et un solide canon de poing. En trois enjambées il était sur elle et faillit bien lui ouvrir la gorge, elle évita le coup et, rapide comme un félide, lâcha le fusil laser, décrocha son épée tronçonneuse, l’activa et décrivit avec, un large coup, de taille. Il faillit l’esquiver à la dernière seconde mais l’attaque lui entama tout de même la cuisse dans une gerbe de sang et mordit dans ses chairs qui se déchirèrent. Il s’écroula au sol en beuglant comme un grox qu’on égorge. Elle lui écrasa sa botte sur le visage pour le faire taire, à plusieurs reprises. Au deuxième coup, elle sentit un os craquer et il se tut enfin. Elle ramassa son arme au sol. De leur côté, Shidia et Felton se trouvaient un peu coincés au beau milieu de la place, cachés plus ou moins derrière des caisses et multipliaient leurs tirs en rafales, forçant les ennemis à rester à couvert mais sans pour autant parvenir à faire mouche. Au bout de plusieurs tirs cependant, Shidia parvint à faire mordre la poussière à un des tireurs, lui plaçant deux tirs de laser en plein torse et Felton toucha un second tireur, moins grièvement, mais cela le força à rester à couvert.

    Au nord de la place, Poppy subit une attaque psychique lancée par une psyker renégate qui arrivait droit vers elle. Des éclairs crépitaient sur son chemin, faisant fuir en glapissant, les quelques animaux présents sur le marché alors que du sang se mit à suinter des murs alentours. Poppy, malgré sa volonté de fer succomba à l’ordre mental implacable que la psyker lui envoya, lui intimant de jeter ses deux armes de poing un peu plus loin, ce qu’elle fit de manière inconsciente, totalement désemparée car consciente de ce qu’elle faisait. La psyker se jeta sur elle, avec un sourire mauvais et une dague sacrificielle à la main, bien décidée à la lui plonger dans la gorge, mais Poppy reprit suffisamment ses esprits pour se saisir de la matraque qu’elle portait à la ceinture, activa son champ à décharge et la frappa de justesse en plein torse. Le courroux vengeur de l’arme de justice fit son office et foudroya la psyker d’arcs électriques. Elle tomba au sol en convulsant. Poppy allait l’achever mais se prit aussitôt deux tirs que son nouveau plastron carapace venait d’encaisser non sans y laisser de profondes marques. Le souffle coupé pendant quelques instants et ressentant une vive douleur dans les côtes, elle loua la sagesse du technoprêtre du Reliquaire qui le lui avait confectionné mais n’eut guère le temps de poursuivre ses louanges. Un des tireurs venait de la prendre pour cible. Elle se jeta de côté, roula au sol, ramassa son canon de poing et ouvrit le feu en riposte, tout en reculant afin d’aller ramasser son pistoler bolter qui se trouvait un peu plus loin. Derrière elle, à une quinzaine de mètres, elle perçut Viggo, ciblé par un tireur posté sur un des toits. Le psyker se prit un tir qui le fit tomba au sol. Il venait de se prendre une balle dans la jambe et avait sans doute perdu connaissance. Elle se plaqua contre un étalage, reprit son souffle et voxa l’équipe.
    -Tireur sur le toit, à l’est de la place, il nous aligne ! Viggo est touché, Lek, tu as un angle de tir ?
    Lek était justement en train de canarder de ses deux Carnodons, l’angle opposé de la place, de là où deux autres tireurs venaient de faire irruption. Il en faucha un dans sa lancé et l’envoya mordre la poussière, tué sur le coup. En revanche, son équipier venait de se mettre à couvert et de là où il était, il n’avait pas un bon angle de tir. Captant l’avertissement de Poppy, il pivota et chercha le tireur sur le toit mais se prit justement son tir à ce moment-là. Une balle lui traversa son avant-bras gauche de part en part, le faisant lâcher une de ses armes en poussant un cri. Il se dissimula comme il le put sous l’étal où il se trouvait en se tenant le bras d’où coulait déjà un sang chaud et poisseux. Il se mit à jurer, alors que d’autres tirs claquaient et qu’il n’avait pas pu riposter plus tôt. Shidia fut la suivante à se prendre un tir. Le sniper la toucha à l’abdomen. Felton, juste à côté d’elle, la vit être projetée en arrière et s’effondrer au sol avec un petit cri.
    D’une roulade, Poppy alla ramasser son pistolet bolter. Se réceptionnant sur un genou, elle tira vers la psyker, toujours au sol, lui explosant la cage thoracique. Dans un sursaut d’agonie, elle afficha un visage tordu par la douleur, dont les traits se déformèrent très brièvement et hideusement en celui d’une entité infernale au regard pernicieux, avec de grands yeux de félide, des sortes de tentacules pourpres à la place de ses cheveux et une bouche garnie de petits crocs d’où pointait soudain une langue serpentine. La chose chercha à lui lancer une malédiction, mais Poppy se recula, hors d’atteinte du sortilège méphitique.
    -Crève, pourriture de sorcière du warp, cracha-t-elle, tandis que la psyker reprit son visage humain en mourant. Au même moment, Lexxi venait d’abattre un autre tireur en relâchant une rafale laser, elle se rua vers les suivants, dégainant son épée tronçonneuse. De son côté, Lek pivota, visa et plaça un tir bien précis sur le sniper, le touchant à la tête et il le vit basculer en arrière. Les deux derniers Cent Yeux encore valides, prirent leurs jambes à leur cou et se replièrent, voyant Lexxi leur foncer dessus. Elle les laissa partir et suivant les indications de Lek, escalada une pile de caisses, se hissa sur un mur et parvint sur le toit où était le tireur. Prudemment, elle progressa en profitant de quelques murets et finit par le trouver. Lek l’avait bien touché, mais la balle n’avait fait que lui effleurer la tempe. Il saignait mais était en train de reprendre ses esprits, à genoux sur le sol du toit. Il la vit et dégaina aussitôt son pistolet mitrailleur. Lexxi bondit sur lui, sans lui laisser le temps d’agir. D’un coup de pied, elle envoya voler le pistolet un peu plus loin et lui flanqua un coup de genou dans le nez. Le type bascula en arrière en grognant. Elle ne lui laissa pas le temps de se ressaisir, elle lui empoigna la nuque et lui frappa la tête sur le parapet. Le coup fut si violent, qu’elle en déchaussa plusieurs briques, désormais éclaboussées de sang. Pour faire bonne mesure, elle lui fracassa le visage une seconde fois au même endroit, sentant enfin des os craquer puis laissa son corps sans vie s’affaisser au sol. Elle activa son microvox, tout en se penchant pour lui faire les poches. Elle lui prit notamment une bandoulière garnie de balles tueuses.
    -Zone claire, tireur neutralisé.
    -Bien reçu, répondit Poppy. Beau boulot. Je prends Shidia en charge, que quelqu’un s’occupe de Viggo. On ramasse le colis – dit-elle en désignant Shom-Valaï, toujours un peu sonné - et on dégage au plus vite.
    Ce dernier, un peu en état de choc, était resté caché sous un étal de fruits. Il n’était pas blessé, juste couvert par quelques restes végétaux. Felton vint l’aider à se relever. Dans les rues adjacentes, ils pouvaient déjà entendre les cris des renforts des Cent Yeux qui approchaient.
    -On va devoir filer d’ici, vous auriez une idée d’un endroit pour qu’on évite vos vieux copains ?
    Shom-Valaï hocha la tête, ce qui fit trembler son double menton. Il pointa une des maisons, à l’autre bout de la place.
    -Suivez-moi, par là… Dans cette boutique… Il y a un sous-sol qui mène vers des tunnels.
    Felton acquiesça et transmit à Poppy. Elle était agenouillée devant Shidia, les mains en sang, en train de la stabiliser à l’aide du medikit. La balle avait traversé et elle était parvenu à traiter son hémorragie, mais peut-être avait-elle d’autres lésions. Ils allaient devoir l’évacuer mais il n’était pas certain qu’elle puisse tenir le coup en cas de complications. Il lui faudrait une évacuation et des soins plus intensifs. En attendant, Poppy parvint à faire le maximum pour lui faire tenir le choc. Lek et Viggo étaient blessés eux aussi et allaient devoir être stabilisés rapidement, même si leur état n’était pas préoccupant comme celui de Shidia. Poppy, Felton et Lexxi s’en sortaient avec quelques bleus et plaies sans gravité, pourtant l’accrochage avait été sévère. Mais ils s’en sortaient plutôt bien, même si ce n’était pas encore terminé. Alors qu’ils avaient ramassé leurs blessés, quelques armes ou munitions au passage, Poppy reçut un appel vox. C’était Jézabel. Le vox crachota, signe qu’ils étaient en train d’employer un brouilleur.
    -Angelicae pour Obscurus, quelle est votre position ?
    -Ici Obscurus, nous quittons la zone avec l’objectif. En mouvement vers repli. Demande assistance medicae d’urgence et besoin de renforts.
    -Obscurus, Opération en cours. Demande rejetée pour l’instant. Restez en l’abri et sécurisez votre position. Je vous rappelle dès que possible et vous transmets nouvelles coordonnées pour point d’extraction. Angelicae, terminé.
    Poppy coupa la communication.
    -Et merde !
    Felton leur indiqua un bâtiment vers lequel Shom-Valaï les conduisit alors que Lek aidait Viggo à avancer tandis que Lexxi couvrait leurs arrières. Soudain, l’enfer se déchaina en ville. Des explosions et des tirs de haute intensité venaient de confirmer l’assaut qui venait d’être lancé. Déjà, des panaches de fumée émergeaient de derrières certains bâtiments. Au loin, elle pouvait entendre les bruits d’aéronefs et les staccatos des tirs d’armes lourdes. Elle fit signe à toute l’équipe de se mettre à l’abri, le plus vite possible. Dans la boutique, tout en aidant Shidia en le soutenant, elle rattrapa Felton et surtout Shom-Valaï qui les menait vers le sous-sol.
    -Une seconde. Vous nous menez où, là ?
    -Je connais cette ville comme ma poche. Un tunnel caché part d’ici et va nous mener en lieu sûr.
    -Où ça ?
    Il la regarda en plissant les yeux.
    -Vous allez devoir me faire confiance, sur ce coup-là.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 13/04/2023 à 22:58 Citer ce message

    Shom-Valaï les mena vers un dédale de tunnels dans des souterrains qui s’étendaient sur quelques centaines de mètres. Au-dessus, dans les rues, les bruits des tirs et des explosions continuaient de se faire entendre et résonnaient dans les tunnels obscurs qu’ils empruntaient. Après quelques longues minutes, il les conduisit vers une lourde grille toute rouillée qui bloquait un accès encombré de détritus. Felton crocheta le cadenas qui en fermait l’accès et ils débouchèrent dans l’arrière-cour d’une sorte de ferme. Lek et Lexxi s’assurèrent que le lieu ne présentait nul danger puis Shom-Valaï les conduisit vers un des bâtiments inoccupés. Ils s’y enfermèrent et vérifièrent tous les accès. Felton, Lek et Lexxi allèrent verrouiller toutes les portes, fermèrent les rideaux et se mirent à surveiller les cours extérieurs depuis les fenêtres. Felton ne reconnut pas le quartier, il resta d’autant plus prudent.
    Poppy alla installer Shidia qui avait perdu connaissance mais aussi beaucoup de sang, sur un lit dans une des chambres. Elle récupéra son medikit, la laissant prendre du repos mais réalisant que Shidia aurait très certainement besoin de soins plus lourds. Cela devrait attendre, malheureusement. Tandis que Felton était en train d’interroger Shom-Valaï, elle en profita pour prodiguer quelques soins rapides sur les blessures de Lek et Lexxi mais aussi sur Felton. Lek avait reçu plusieurs brulures dues à des tirs de laser sur le torse, mais rien de bien grave grâce à son pare-balle. En revanche, un tir de fusil d’assaut lui avait traversé le bras gauche et pour l’instant, il lui était encore impossible de pouvoir s’en servir. Lexxi, Poppy et Felton n’avaient été que légèrement touché, par des éclats ou des balles qui n’avaient fait que les frôler ou taper dans leur armure, leur occasionnant tout de même de gros hématomes ou quelques plaies sans gravité, mais rien de bien sérieux. Viggo, lui, avait eu une balle qui lui avait déchiré le mollet. Il boitait et aurait besoin d’autre chose que d’un bandage de fortune, mais pour l’heure, il avait surtout besoin de repos. Puiser dans ses réserves psychiques l’avait littéralement épuisé. Il s’installa dans un coin et entreprit de méditer un peu.
    Felton et Poppy continuèrent d’interroger Shom-Valaï qui se montra enclin à négocier, tout en gardant un certain avantage. Tout dévoiler et tout de suite, le mettrait dans une situation de faiblesse et il le savait. Il distilla alors ses informations avec parcimonie. Felton souhaitait surtout connaitre une information : où se trouvait Gloria Everdynn, puisqu’il savait parfaitement que c’était lui qui avait procuré tout un dossier à cet enfoiré de Caleb Cox, pas plus tard que deux jours auparavant. Localiser Everdynn leur permettrait de remonter la trace de Haxt et le sortir enfin de la grotte où il se terrait.
    -Disposez-vous d’une carte de la région ? Leur dit-il.
    Felton interrogea Poppy du regard. Ils n’avaient pas de carte.
    -Si, répondit Lexxi, tout en sortant une tablette de données de son sac à dos. Elle activa l’affichage cartographique et la tendit à Felton. Ce dernier la montra à Shom-Valaï qui n’y prêta pas véritablement attention.
    -Regardez sur la côte ouest. Bien à l’ouest de Sandbarra, se trouve une ville charmante du nom de Memory. Leur dit-il.
    -Et elle se trouve là-bas ? Lui dit Felton.
    -Elle s’y trouve sous une autre identité et même sous une autre apparence. Totalement incognito, sauf pour ceux qui sont informés de certains petits détails, telle que la maison qu’elle occupe ou ce genre de banalité.
    -Quelle adresse ?
    -Je vous ai déjà fourni une information plus qu’essentielle car connue par un cercle des plus restreints. Ces secrets valent des vies, croyez-moi.
    -La votre, c’est certain, lâcha Lexxi avec un regard menaçant. Felton effectua un petit geste de la main, afin de l’apaiser.
    -D’accord, négocions. Vous souhaitez quoi en échange ? On vous offre déjà la vie.
    -Que faire d’une vie si elle devait s’achever dans dix ou vingt minutes ? Je veux plus que cela, je veux des garanties.
    -Des garanties de quoi ?
    -Que l’on trouve un accord. Je suis une source d’informations et vous, visiblement, êtes à la recherche d’informations. Disons que je puis vous fournir ce que vous recherchez, mais sur du long terme. Que diriez-vous par exemple, si j’étais en mesure de vous dévoiler un organigramme et des connexions hors-monde avec Haxt ?
    -Je dirais que cela nous intéresserait, bien évidemment.
    -Voilà pourquoi je souhaite continuer cette activité, le plus longtemps possible, cela va sans dire. Vous avez besoin de connaitre des secrets et je peux vous fournir ces secrets.
    -Admettons que cela nous intéresse… Allez-y… Epatez-moi avec un de ces secrets.
    Shom-Valaï eut un petit sourire en coin.
    -Eh bien, j’ai ouïe dire que Sybel de Castel Sinclar n’était pas votre unique employeur, par exemple.
    -Voilà qui est de plus en plus intéressant… Surprenant, même… Bien que cela ne m’étonne qu’à moitié.
    -Imaginez à quel point elle serait intriguée si elle venait à le deviner ?
    -Vous savez que ce genre de terrain pourrait devenir très glissant pour vous.
    Shom-Valaï continua de sourire, ce qui lui donnait des airs de batracien.
    -Nous sommes ici, entre hommes – et femmes – d’affaires et de bonne intelligence. Rien de plus.
    -Affaires qui vous mettent pourtant en danger, rien qu’avec de telles connaissances.
    -Vos affaires vous mettent en danger, vous aussi, Monsieur « Holdemert ». Voilà pourquoi, je préfèrerai travailler sur un pied d’égalité et me retrouver du côté de ceux qui ont les plus gros… Comment dire ?... Arguments. Pouvons-nous alors trouver un accord ?
    -Je ne suis pas décisionnaire, vous le savez. Cette décision doit être validée par notre supérieure.
    -Alors, contactez-là. Je suis certain qu’elle saura trouver un intérêt à ma proposition.

    Felton leva son index, lui signifiant de patienter. Il attrapa Poppy, Lek et Lexxi à part, le laissant dans la pièce adjacente, en compagnie de Viggo. Dans la ville et les rues alentour, les tirs étaient clairement en train de diminuer.
    -Vous en pensez quoi ? Leur dit-il à voix basse.
    -On ne lui fait surement pas confiance, mais je ne dis pas qu’il pourrait être une mine d’informations pour nous ou Jézabel, répondit Poppy.
    -Il avait l’air de dire la vérité ? Leur demanda Lek.
    -Oui, je pense qu’il disait vrai. Mais avec un type comme lui, vaut mieux se méfier.
    -On est bien d’accord, il sait déjà pour qui on travaille, non ? Lâcha Lek.
    Felton et Poppy finirent par hocher la tête.
    -Ça me parait clair qu’il en sait déjà beaucoup sur nous, compléta Felton. Je me demande comment il a eu accès à ces informations. On en a déjà parlé, mais il doit y avoir une taupe au sein de l’Arbites.
    Poppy effectua une petite grimace, rien qu’en y pensant.
    -N’oubliez pas que Bosinski et donc Haxt vous connaissent depuis un moment aussi, Lek et toi. La preuve avec l’épisode de Lorne Campbell ou même de Rico avec les Milagria. Comme nous, ils ont leurs propres réseaux de renseignements sur Archaea et c’est sûr que Shom-Valaï doit y jouer un rôle central. Rien que le fait de l’exfiltrer, devrait les priver d’une de leurs principales sources d’informations.
    Le vox de Felton se mit alors à vibrer, il l’activa et leur fit signe que c’était Jézabel. Il s’isola dans une pièce adjacente et prit quelques notes sur un carnet. Au bout de quelques minutes, il coupa la communication et revint les trouver, laissant leur captif toujours à part.
    -Alors, ça a donné quoi leur assaut ? On dirait que ça fait bien dix minutes que ça s’est arrêté, demanda Poppy.
    -C’est le cas. Sur une bonne dizaine de têtes du réseau, ils sont parvenus à presque tous les avoir. Morts ou vivants. Pour ceux qui nous intéressent… Ceux que Sinclar souhaite récupérer en vie, à savoir Mandelsen le medic, Mukaijah du Carnivora, Deeroniss Hamadid du mercator Volubilis et Helma Penderbast de l'Aleatorium. Mandelson fait partie de ceux qui ont été arrêté, il est actuellement retenu par l’Arbites dans un des commissariats de la ville, elle m’a communiqué l’adresse pour qu’on tente de le sortir de là.
    -Je devrais pouvoir gérer ça, répondit Poppy. Et pour les trois autres ?
    Il consulta rapidement ses notes.
    -Mukaijah et Hamadid ont été abattu lors d’échanges de tirs. Quant à Penderbast, elle est en fuite et Mandelsen est celui qui doit savoir où elle est allée. Ils étaient ensemble quand il s’est fait arrêter et qu’elle est parvenue à s’enfuir. Jézabel m’a aussi informé que deux du Triumvirat seraient en fuite. Helsten, le chef des Cent Yeux et Von Brawn, le savant fou qui gère les labos de drogue. Quant à leur chef, Machine de Chaambal, elle se serait donné la mort à leur arrivée.
    -La sœur de la mutante ?
    -Faut croire.
    -C’est toujours bon à savoir, on en a encore deux autres dans la nature. Donc deux des cinq alliés potentiels de Sinclar sont morts. On va devoir mettre la main sur les trois autres et rapidement. Donne-nous l’adresse de ce commissariat, on va aller y faire un saut.
    -Et on fait quoi de Shom-Valaï et Shidia ? Demanda Lexxi.
    -Merde, oui… On est loin de la rue Poissonnière ?
    -Notre planque ? Lexxi attrapa la tablette de données restée sur la table et la consulta rapidement. On est à un bon quart d’heure à pied, je dirais.
    -Trop loin. Si Helma Penderbast est en fuite, chaque minute compte. D’accord, Lek et Viggo, vous allez raccompagner Shidia à la planque et vous l’installez là-bas. Nous on fonce au commissariat avec Shom-Valaï. Une fois que vous aurez fini, vous nous rejoignez là-bas.

    Le bâtiment en question se situait à moins de dix minutes, en marchant vite. Certaines rues de la ville portaient les stigmates des récents combats. Des traces de tirs ou quelques feux sporadiques encore allumés. Des corps des Cent Yeux gisaient parfois aussi sur un bout de trottoir. Un peu partout, des soldats et quelques arbitrators terminaient de sécuriser les lieux.
    Une fois parvenus à proximité, ils virent que deux soldats de l’armée régulière d’Archaea étaient en faction juste devant, reconnaissables à leur treillis gris et à leur casque et armure anthracite comme ceux croisés sur le chemin, occupés à charger des prisonniers dans des camions et des tout-terrains ou à évacuer des blessés. Tous portaient des carabines laser courtes, modèle Voss ou de petites mitraillettes Alcher Mk IV équipées de chargeurs longs. Poppy se dirigea vers l’entrée du bâtiment et avant que les deux plantons ne l’arrêtent, elle sortit sa plaque. Ils la saluèrent.
    -Ce sont mes hommes, leur dit-elle, tout en désignant Felton et Lexxi. Ils entrèrent et elle se dirigea vers le bureau où deux adeptes étaient affairés à compulser des registres, tout en prenant des notes. Trois autres soldats des FDP se tenaient à l’intérieur, ainsi que trois arbitrators occupés à discuter autour d’une table et de documents, un peu plus loin dans le bâtiment. Un des adeptes leva sa tête vers eux, elle lui tendit sa plaque.
    -Agent en mission spéciale. Je souhaite parler à votre supérieur.
    L’adepte scruta sa plaque à l’aide de ses implants oculaires, sans doute pour en scanner son authenticité.
    -Et quelle est la nature de votre demande, Praetor ?
    -Comme je vous l’ai dit, je souhaite parler à votre supérieur. C’est cela… La nature de ma demande, adepte.
    -Bien naturellement… Je crains cependant qu’il soit occupé en ce moment, d’où ma question quelque peu… Insistante.
    Poppy se pencha sur le bureau.
    -Je souhaite m’entretenir au sujet d’un des prisonniers. Cela vous convient ?
    L’adepte ne se démonta pas, Il chercha parmi les dossiers et y préleva un formulaire.
    -Un prisonnier… Un des psykers ?
    -Non. Jorkh Mandelsen.
    -Il faudra alors me remplir ce formulaire 758/B-4 dans ce cas, en bonne et due forme, je vous laisse avec mon collègue, j’en ai pour quelques minutes, je vais chercher le preator Cort Lupus.
    A l’évocation de ce nom, Poppy se raidit, effectuant une petite grimace.
    -Tu le connais ? Lui glissa Felton à voix basse. Il eut un petit sourire, rien qu’en voyant la mine déconfite qu’elle afficha en voyant approcher le nouveau venu. Les marques sur son armure le désignait comme l’officier d’une escouade Venator, les traqueurs mortiurges de l’Arbites, ce qu’elle était encore, un mois plus tôt. Il avait l’air tout aussi surpris de la voir, surtout vêtue autrement qu’en armure carapace complète. Elle le prit à part et s’entretint avec lui, dans un bureau pendant quelques minutes. Ils ressortirent et il donna l’ordre aux gardes de les mener vers une des cellules. Elle vint retrouver ses compagnons.
    -Alors ? Lui demanda Felton.
    -Comme je m’y attendais, il ne va pas nous lâcher Mandelsen, mais il nous accorde dix minutes d’entretien avec lui.
    -C’est pas si mal.
    -On n’a pas besoin de beaucoup plus pour le faire parler de toute façon, compléta Lexxi en faisait craquer les articulations de ses doigts.
    Poppy l’arrêta.
    -Ne va pas nous l’abimer non plus, c’est juste un medic. Tu me le secoues un peu s’il venait à faire le réticent, d’accord ?
    -Ça me va.
    Elle désigna Shom-Valaï.
    -Restez ici et ne bougez pas.
    Ils se dirigèrent vers les cellules situées un peu plus loin. En chemin, Felton vint à la hauteur de Poppy, avec son satané sourire de canaille.
    -Ce type… Cort-quelque-chose, je me dis que c’était pas juste un ancien collègue à toi, je me trompe ?
    -Et en quoi ça te regarde ?
    -Oh, on dirait que j’ai touché juste…
    -Une histoire ancienne, si tu veux savoir. Et qui s’est mal finie de toute façon.
    -Comme c’est étonnant, finit-il par marmonner sans se départir de son sourire. Elle l’entendit et le foudroya du regard tout en lui collant le formulaire dans les mains avec le stylus.
    -Rends-toi utile et rempli ça, plutôt que de t’occuper de ce qui ne te regarde pas.
    Un des gardes leur ouvrit la cellule. Ils entrèrent et il referma derrière eux. Mandelsen était un de ces medics qui travaillaient au Sanitorum, là où ils avaient cherché Shidia en arrivant le premier jour à Sandbarra. Ils l’avaient croisé d’ailleurs ce jour-là dans l’hôpital, sans le savoir. Ses implants augmentiques avaient été désactivés, sauf ses yeux bioniques qui lui donnaient des airs d’insecte. Il prit peur en les voyant entrer tous les trois.
    -On a juste une question à vous poser et on a besoin d’une réponse rapide, commença Poppy.
    Cela ne dura pas plus de trois minutes en réalité. Lexxi se montra particulièrement convaincante en lui tordant un bras avec assez de force pour presque lui déboiter l’épaule. Il leur donna une adresse. Un petit village sur la côte, à quelques kilomètres de là. C’est là qu’Helma Penderbast devait se rendre, elle et quelques autres membres de l’organisation.
    Ils ressortirent, redonnèrent le formulaire rempli à la hâte aux adeptes et se retrouvèrent dans la rue. Viggo et Lek les y attendaient.
    -On sait où est ce village ? Demanda Felton.
    -A cinquante kilomètres au nord, répondit Lexxi tout en consultant la carte. Et sans la voiture, ça va être compliqué de les rattraper.
    -Pas si on emprunte un autre véhicule, lâcha Poppy. Elle se dirigea vers un des plantons et lui désigna le Arkhan Land H3 gris mat, garé un peu plus loin. Le lourd tout-terrain blindé était aux couleurs des unités FDP.
    -Les clés sont dessus ? Demanda-t-elle.
    -Oui, mais il faut…
    -Dites à votre officier, que je vous l’emprunte, mission spéciale de l’Arbites.
    Le garde se mit à protester mais n’avait aucun pouvoir sur une praetor de l’Arbites.
    Poppy leur fit signe de monter à bord, à la hâte. Lexxi s’installa au volant, des plus enthousiastes de pouvoir conduire un engin de l’Astra Militarum. Elle démarra en trombe leur bolide de deux tonnes.
    Trente minutes plus tard, roulant à vive allure sur la route qui longeait la côte et les interminables champs de lho en fleurs, ils finirent par apercevoir deux 4x4 banalisés qui roulaient bien plus lentement qu’eux. Lexxi avait coupé à travers champs en sortant de la ville afin de gagner du temps et ainsi pouvoir les rattraper, ce que leur gros véhicule leur permettait, contrairement à ceux qu’ils pourchassaient.
    -C’est eux, leur lâcha Shom-Valaï en les montrant du doigt.
    -Notre véhicule dispose d’un ampli-vox, vous voulez qu’on leur demande de s’arrêter ? Leur proposa Lexxi.
    -Je préfère être sûr qu’il s’agit bien d’Helma et qu’elle n’est pas avec les mauvaises personnes, répondit-il.
    -Il a raison, ajouta Poppy. Approche-nous d’eux, on va devoir s’assurer de qui est à bord. Elle demanda alors à Shom-Valaï de rester caché, le plus possible.
    Lexxi écrasa l’accélérateur et laissa le puissant moteur les rattraper tout doucement. Lek et Felton en profitèrent pour tenter de voir qui était à bord.
    -Quatre gardes des Cent Yeux dans le premier véhicule, lâcha Lek.
    -Et on a bien notre cible dans le second véhicule, accompagné de deux types des Cent Yeux. L’un d’eux pourrait bien être Konrad Helsten, le chef des Cent Yeux, ajouta Felton.
    -Le type du Triumvirat en fuite ? Demanda Poppy.
    -C’est lui, c’est bien lui ! Confirma Shom-Valaï.
    -Parfait… On va devoir d’abord dégager le véhicule d’escorte. Elle se pencha vers Lexxi.
    -Tu penses que tu peux nous en débarrasser ?
    Lexxi eut alors un large sourire.
    -L’Empereur est avec nous, non ?
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  • Illuminati
    Illuminati

    le 22/04/2023 à 14:02 Citer ce message

    -Laisse-moi plutôt le volant, lâcha soudain Felton qui était assis juste à côté d’elle.
    -Pourquoi ça ? Lui dit-elle alors qu’elle accélérait tout en gardant son regard concentré sur sa conduite.
    Avec un large sourire, il lui désigna le fusil d’assaut Agrippina ainsi que le fusil laser d’assaut posés à côté d’elle.
    -Tu seras surement plus efficace que moi, si on se fait tirer dessus.
    Elle eut un petit sourire en coin en retour et lui céda sa place sans discuter, se glissant côté passager tout en armant le fusil d’assaut d’une main experte. A l’arrière, Poppy et Lek avaient déjà préparé leurs pistolets et se tenaient parés à s’en servir. Derrière eux, Viggo se faisait tout petit et tentait de se concentrer pour utiliser son pouvoir de cicatrisation sur sa propre jambe, à cause de sa dernière blessure. Shom-Valaï était à ses côtés, pas des plus rassurés. Felton en se contorsionnant avait repris le volant et se tourna vers eux. Leur véhicule continuait de foncer sur la route poussiéreuse, à une trentaine de mètres d’eux, dégageant des panaches de fumée.
    -Accrochez-vous, je vais tenter une manœuvre pour me rapprocher et dégager le véhicule de queue.
    Au même moment, les Cent Yeux qui avaient identifié la menace, se penchèrent aux fenêtres de leurs véhicules et se mirent à les arroser avec leurs fusils d’assaut et pistolets mitrailleurs. Les balles se mirent à ricocher violemment sur le blindage de leur gros tout-terrain avec le bruit de coups de marteau sur la tôle. Lek, Poppy et Lexxi ripostèrent mais sans plus de succès. Il était difficile de tirer avec précision depuis un véhicule lancé à pleine vitesse, faisant des embardés, sur un autre véhicule en mouvement, et ce, alors que les conducteurs tentaient des manœuvres dangereuses. Après plusieurs échanges de tirs, Lek le pistolero eut plus de chance et toucha le chauffeur du véhicule de queue. Blessé, au bras et touché dans son plastron pare-balles, le conducteur perdit – l’espace d’un instant - le contrôle de son véhicule qui dérapa dans un panache de poussière et de fumée. Leur tout-terrain effectua un tête-à-queue puis une sortie de route avant de finir dans le bas-côté, sans plus de gravité, mais leur véhicule s’immobilisa net, sonnant ses occupants et laissant ainsi les deux autres s’éloigner à grande vitesse.
    Sur la route, Felton profitait de la puissance de leur engin pour tenter de se positionner à la hauteur de leur cible tandis que les échanges de tirs s’intensifiaient. Il prenait garde cependant à ne pas les percuter car ils devaient récupérer Helma Penderbast en vie pour la mener à Sinclar. En revanche, le chauffeur adverse n’avait clairement pas la même retenue. Il n’hésitait pas à donner de grands coups de volant pour tenter de les percuter et ainsi les envoyer dans le décor. Malheureusement pour lui, une de ses manœuvres échoua lamentablement et leur véhicule s’encastra à l’avant du gros command-car qui enfonça toute sa tôle du côté gauche, plia les portières et continua sa course dans sa lancée, trainant ainsi leur cible sur plusieurs centaines de mètres. Les échanges de tirs ne faiblirent pas pour autant.
    C’est là que Felton écrasa la pédale de frein. Le véhicule ennemi fit alors une embardée, se retrouvant soudain propulsé de quelques mètres, comme projeté en avant et termina dans le champ à quelques mètres de la route. Felton accéléra de nouveau, leur fonçant dessus, mit un coup de volant et percuta leur calandre sur le côté gauche, faussant la roue et pliant l’essieu avant de leurs adversaires. Les occupants, sonnés, sortirent de leur engin, pointant leurs armes et se mirent à tirer. Déjà Lexxi et Poppy étaient sorties et se mirent à riposter. Lek en fit de même, forçant les adversaires à baisser la tête. Ils n’étaient que Deux. Konrad Helsten, le chef des Cent Yeux et un de ses lieutenants. Helsten avait empoigné Helma Penderbast par les cheveux, ce qui lui arracha un cri, l’avait extraite de force de leur véhicule endommagé et s’en servait à présent de bouclier tout en les menaçant de son arme. Poppy en profita pour contourner leur véhicule et se dirigea droit vers le second tireur, faisant feu à bout portant avec son Carnodon et son pistolet bolter. Il eut le temps de la voir, presque à la dernière seconde, il évita le premier tir mais se prit le bolt en plein torse, ce qui perfora son plastron pare-balles, explosant dans une bruine sanglante. Projeté en arrière, il s’affala lourdement au sol. Lek en avait profité pour tenir Helsten en joue, il fit feu à son tour mais le manqua d’un cheveu. Helma Penderbast en profita pour asséner un coup de talon dans le genou de son ravisseur, puis un coup de coude en plein visage. Rien de bien suffisant pour lui occasionner des dommages mais cela le surprit assez pour qu’il relâche sa prise. Elle se jeta de côté au moment où Lek ouvrit le feu avec son second Carnodon. La balle tueuse perfora le plastron de Helsten en plein cœur, le traversa et ressortit dans son dos dans une gerbe de sang. Etonné et titubant, il chercha à pointer son arme mais déjà ses membres ne répondaient plus. Ses yeux roulèrent dans ses orbites et il s’écroula, alors qu’une flaque de sang commençait à se répandre sous lui.
    -On aurait pu essayer de l’avoir vivant, dit Felton à l’attention de Lek qui vint s’assurer qu’il était bien mort. D’un coup de pied, il écarta son arme. Helsten gisait au sol et vivait encore mais n’en avait plus pour longtemps. Une ou deux minutes, tout au plus, vu le sang qu’il recrachait.
    -Oui, bin moi, je fais ce que je sais faire de mieux…
    Felton se précipita vers la femme pour l’aider à se relever. Elle était couverte de poussière et ses robes étaient un peu déchirées. Elle était en état de choc. Elle lui faisait penser à ses hétaïres de luxe à cause de ses robes moulantes, sa coiffure, son maquillage et ses bijoux. Sans doute était-ce ce qu’elle avait été quelques années auparavant.
    -Ça va, vous n’avez rien ? Lui demanda-t-il tout en vérifiant si elle n’était pas blessée.
    Elle hocha la tête, lui signalant que ça allait, tout en se relevant.
    -Vous êtes… Qui ? C’est vous qui êtes venu au Palais des Murmures tout à l’heure, vous qui…
    Elle vit alors Shom-Valaï à l’arrière de leur tout-terrain. Ce dernier allait venir à sa rencontre.
    -On ne traine pas, je vois déjà le second véhicule en approche, leur dit Poppy, alors qu’un panache de poussière approchait à toute vitesse. Lexxi et Lek, ramassez ce que vous trouvez d’intéressant, je vais fouiller Helsten, Felton, on embarque la fille. Vite.
    Ils trouvèrent une mallette qui contenait des documents et un bon paquet de fric. Elle déposa le tout dans leur véhicule. Pendant ce temps, Lexxi venait de mettre la main sur un lance-grenades modèle Voss à chargeur tambour, qu’elle trouva à l’arrière du véhicule accidenté. Elle trouva aussi une bandoulière emplie de grenades Mk III antichar et à fragmentation, spéciales pour le modèle Voss justement, qu’elle s’empressa de prendre avec elle avec un large sourire.
    -Ils arrivent, leur cria Poppy, allez, on se bouge.
    Une fois à bord du tout-terrain, ils redémarrèrent en trombe. Felton était au volant, coupant à travers les champs de lho en fleur, faisant détaller les paysans qui se trouvaient sur son passage. Il comptait bien semer leurs poursuivants afin d’éviter tout éventuelle confrontation. A ses côtés, Poppy épluchait les documents de la mallette. Ils reconnurent un logo et un nom qu’ils connaissaient bien.
    -Encore Kanoptech ? Souffla Lek. Non, mais à un moment, il va leur arriver des bricoles à eux.
    -C’est justement ce qui aurait dû être fait depuis un bon moment, je pense, ajouta Poppy.
    Elle se tourna vers Shom-Valaï, lui montrant les documents. Si quelqu’un savait quelque chose, ce ne pouvait être que lui.
    -C’est quoi cet entrepôt ? Il est situé où ?
    -Un des laboratoires Kanoptech. C’est dans un petit village à cinq kilomètres d’ici. C’est là que Malfus Von Brawn travaille et développe ses recherches. C’est là justement où la Guilde Farmatika synthétise justement certaines de ses drogues un peu… spéciales, répondit-elle.
    -Ses drogues psychiques en plus certainement de diverses expériences sur les psykers émergents,
    C’est bien cela ?
    -C’est bien cela, en effet.
    -Indiquez-nous le chemin, on va y faire un saut.
    -On pourrait transmettre l’information à Jez… Commença Lexxi, mais Poppy la foudroya du regard. Ce n’était pas le moment de mentionner les Ordos devant Shom-Valaï et Penderbast, sous peine de devoir les exécuter tous les deux. Ni elle, ni Shom-Valaï ne devait connaitre leur véritable employeur ainsi que toute cette opération, sinon leur plan avec Sinclar risquait bien de tomber à l’eau.
    -On ne transmet rien pour l’instant. On est juste à côté, on va faire un reconnaissance des lieux pour de la prise de renseignements, c’est tout. On avisera ensuite. Elle reporta son attention vers Felton, concentré sur sa conduite. Depuis quelques minutes, il s’était assuré qu’ils avaient bel et bien semé leurs poursuivants. Ce qui était le cas.
    -Sinclar, on le retrouve où ? A la capitale ?
    -Aucune idée. Je dois juste la contacter. Elle me fixera un rendez-vous, j’imagine.
    -Alors, on va la contacter.
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    Illuminati

    le 08/05/2023 à 21:40 Citer ce message

    Ils poursuivirent sur la route bordée de cultures et de petites exploitations agricoles durant quelques minutes avant que Poppy leur demande de s’arrêter. Felton se rangea sur le côté, s’étant assuré que leurs poursuivants n’étaient plus dans les parages. Il l’interrogea du regard, laissant le moteur tourner.
    -Inutile d’aller plus loin. Tu vas devoir l’appeler. Lui dit-elle.
    -Qui, Sinclar ?
    Poppy se contenta de faire un petit signe vers Shom-Valaï et Penderbast, assis à l’arrière.
    -On doit les lui amener, non ?
    -Il va falloir repasser à l’autre véhicule, c’est là qu’on a la radio.
    Il se tourna vers Lexxi pour être sûr. Elle hocha la tête.
    -C’est à cinq ou six bornes d’ici, on peut y faire un saut rapide, je peux t’indiquer la route.
    -D’accord, compléta Poppy. On y retourne et on l’appelle.

    Dix bonnes minutes plus tard, ils se garaient dans le petit hameau en ruine où la Hive Runner était dissimulée dans une des granges. Ils prirent un peu de repos, le temps que Felton parvienne à joindre enfin Sinclar à l’aide du vox longue portée. Lek et Lexxi s’étaient dissimulés non loin, couvrant les abords. La campagne, sauvage était calme si ce n’était le bourdonnement incessant des insectes, le croassement des corneilles et le ronronnement lointain des machines agricoles qui dégageaient d’épaisses volutes de fumée dans le ciel. L’air était chaud et la sueur mêlée à la poussière collait à leurs vêtements. Felton pestait dans son coin, il avait une sainte horreur de se retrouver en rase campagne. Il vint trouver Poppy et Viggo qui l’attendaient à l’ombre d’une ancienne grange dont les tôles rouillées grinçaient en produisant une complainte sinistre. En tant que ruchard, le psyker avait du mal, lui aussi à dissimuler son malaise. Il s’épongea le front.
    -Alors ? Lui demanda Poppy tout en tirant sur son cigalho de manière nerveuse.
    -Elle nous fixe rendez-vous dans quatre heures, à ces points de coordonnées.
    Il lui tendit un papier sur lequel il avait noté à la hâte quelques chiffres. Elle le prit en effectuant une petite moue.
    -Elle n’est pas à la capitale ?
    -En tout cas, le rendez-vous ne s’y fera pas. Ce sera ici, dans la région.
    -D’accord. Donne ça à Lexxi. Qu’elle nous localise l’endroit. Autre chose ?
    -Oui, elle veut qu’on fasse libérer Mandelsen. Le medic détenu par tes collègues de l’Arbites. Elle en a besoin, tu penses pouvoir faire quelque chose de ton côté ?
    Poppy effectua une petite moue, peu convaincue.
    -Vu que c’est le preator Cort Lupus qui le détient, j’ai un sérieux doute.
    Elle s’assura que Shom-Valaï et sa collègue n’écoutaient pas leur conversation avant de poursuivre.
    -On pourrait plutôt demander à Jézabel ? On doit la contacter de toute façon.
    Felton hocha la tête.
    -Appelons-la.
    Jézabel était encore occupée à Sandbarra et avait fort à faire avec l’Arbites, entre les dizaines d’arrestations, les données capturées qu’il fallait sécuriser et traiter, sans compter la menace que présentait toujours cette ville encore en pleine ébullition. Ce fut Felton qui parvint à la convaincre. Elle ne leur promit rien, mais assura qu’elle en toucherait un mot à Lupus et les recontacterait dans une heure. Ils en profitèrent donc pour se reposer un peu dans le hameau abandonné. Le soir allait tomber lorsqu’elle les rappela. La liaison vox était mauvaise, ils perçurent qu’elle appelait depuis un véhicule en vol.
    -J’ai votre paquet. Je vous communique les coordonnées. J’y serai dans quinze minutes. Terminé.
    Le temps que Lexxi consulte la tablette cartographe pour localiser l’endroit exact, Poppy intriguée par les dangereuses connaissances de Shom-Valaï, en profita pour attraper Felton à part.
    -Il en sait beaucoup trop sur nous, tu ne trouves pas ? Je ne comprends pas pourquoi Jézabel s’apprête ainsi à la lâcher à cette… Sinclar. Elle sait ce qu’elle fait, au moins ? Moi, je l’aurai bien passé à la question avant.
    -Bin écoute… C’est elle la boss. Tu lui en parles.
    -Mais tu en penses quoi ?
    -Qu’elle n’a pas oublié notre objectif principal. On doit approcher Haxt et apparemment, Sinclar est un des moyens dont on dispose pour l’approcher de très près. Ensuite… J’ai l’impression que Jézabel est prête à prendre des risques, c’est vrai. Mais si le plan se déroule comme on l’envisage, il n’est pas impossible qu’on récupère Shom-Valaï dans peu de temps. Il est prêt à travailler pour nous, rappelle-toi. Se rapprocher de Sinclar est juste un moyen de gagner sa confiance. Mais pour finir, c’est avec nous qu’il est prêt à négocier.
    -Espérons que tu auras raison. J’ai du mal à me dire que gens-là sont fiables.
    -On garde un œil sur lui pour ses raisons justement. C’est pas comme si on n’en était pas déjà conscients.
    -Je ne partage quand même pas ton optimisme, Felt.
    -On joue très gros, mais je suis joueur, lui dit-il avec son large sourire. Déjà ils montaient dans les deux véhicules pour se mettre en marche, ignorant en route les questions de Shom-Valaï.

    Au point de rendez-vous, en rase campagne et de nuit, une navette noire se posa sans couper ses moteurs. A son bord, Jézabel et une poignée de commandos inquisitoriaux en armure complète et fusils radiant leur délivrèrent un homme entravé, bâillonné et cagoulé. L’investigatrice leur fut un petit salut puis ordonna à la navette de redécoller. Ils récupérèrent le colis, le chargèrent dans un des véhicules puis se mirent en route pour le point de rendez-vous avec Sinclar. Les coordonnées indiquaient une exploitation agricole à plus de quinze kilomètres de là. Il faisait déjà bien nuit quand ils s’en approchèrent. Tous feux éteints, ils se garèrent non loin d’un des corps de ferme. Un des bâtiments était éclairé et il y avait des locaux à l’intérieur, à deux cents mètres de là. Ils firent silence et attendirent. Le rendez-vous était dans une heure mais après quelques minutes, ils repérèrent des ombres qui se déplaçaient entre certains bâtiments de l’exploitation. Lek, Lexxi et Poppy préparèrent leurs armes.
    -Appelle Sinclar. Demande-lui si ce sont ses hommes, demanda Poppy à Felton.
    Lexxi lui passa le combiné. Il l’appela comme demandé. C’était bien le cas. Ses hommes de mains étaient là.
    -On peut y aller, leur répondit Felton en coupant le vox.
    Ils emmenèrent Shom-Valaï et les deux autres au point de rendez-vous situé dans une des granges. Felton et Poppy restèrent un instant à s’entretenir avec elle.
    -Parfait. Je vous tiens au courant pour la suite, leur dit Sinclar. Tâchez de mettre la main sur Gloria Everdynn à présent. Elle pourra nous être utile, car Haxt ne devrait plus tarder à réagir à présent. Il va convoquer ses conseillers et ce sera alors à nous d’agir. D’ailleurs, ceux-là nous seront très utiles.
    Elle désigna les trois transfuges que ses hommes étaient en train d’emmener vers leur véhicule. Elle fit signe à Felton.
    -Je vous recontacte rapidement. Puis, elle s’en retourna vers le véhicule où l’attendaient ses hommes de main.
    Poppy et Felton se dirigèrent vers leurs véhicules, à leur tour.
    -On va jeter un coup d’œil à cet entrepôt Kanoptech ? C’est à quelques kilomètres d’ici.
    -A cette heure-ci ?
    -Justement. D’après Shom-Valaï, c’est là que se trouve le laboratoire de Von Brawn.

    L’entrepôt se situait dans un petit village de pécheurs qu’ils trouvèrent plutôt facilement. Le bâtiment en question jouxtait un ensemble d’autres entrepôts du même genre, mêlant conserverie de poissons et lieux de stockage, en peu en sortie de la ville, non loin de quelques maisons. Celui portant le nom de Kanoptech laissait filtrer de la lumière qui venait de l’intérieur.
    -J’ai comme un mauvais pressentiment… Lâcha Viggo.
    -Mauvais comment ? Le questionna Poppy. Vous ressentez… Des choses ?
    Il hocha la tête.
    -Il faudrait que je m’approche un peu.
    Elle désigna Felton.
    -Accompagne-le. Mais pas d’imprudence, On reste juste derrière, on vous couvre.
    Lek et Lexxi en avaient profité pour sortir l’artillerie lourde de leur véhicule qu’ils laissèrent un peu plus loin, puis Felton et Viggo se faufilèrent en direction de l’entrepôt. Une des portes était entrouverte et ils pouvaient y voir deux gardes. Ils profitèrent de la nuit pour être discrets et sans se faire repérer, parvinrent à jeter un regard vers l’intérieur. L’entrepôt faisait plus de cinquante mètres de côté et était empli de caisses et de containers, le tout manipulés par des hommes de main et des machines de levage. Mais plus intrigant, ils virent un groupe d’individus différents. Felton les reconnus car ils ressemblaient exactement à ceux déjà vus à New Burg, dans les tunnels sous le palais d’Andarion. Devant eux se trouvait une sorte de manifestation psychique sous forme de longs appendices vaporeux, ondulants tels des tentacules. Viggo ne s’était pas trompé, il était sûr d’avoir déceler une entité psychique en plein éveil. Von Brawn était là aussi, occupé à parler avec un des hereteks.
    -Les agents de l’Hydra, murmura Felton.
    -Tu les connais ?
    -On te racontera. Viens, ne trainons pas là, on doit tout de suite en informer les autres.
    Ils rebroussèrent chemin, retrouvant le reste de l’équipe tout en les voxant.

    -Et vous avez vu Von Brawn à l’intérieur ? Leur demanda Poppy.
    -Il y est et il est en pleine conversation avec un des types de l’Hydra.
    -On fait quoi ? On ne peut pas les laisser faire leur… je ne sais quelle sorcellerie ? Demanda Viggo.
    -Je serais bien tenté d’appeler Jézabel. Si les Valkyries sont toujours dans les parages, je serais d’avis de tout raser, répondit Poppy. Les autres acquiescèrent.
    -Donne-moi les coordonnées, demanda-t-elle à Lexxi. Alors qu’elle se saisissait du combiné.

    Dix minutes plus tard, deux aéronefs approchèrent, tous feux éteints et lâchèrent toute une volée de missiles Hellstrike qui frappèrent sans distinction, les maisons et l’entrepôt qui disparurent dans un ensemble de boules de feu et d’explosions titanesques. L’onde de choc et le souffle furent tel que, même à bonne distance, toute l’équipe fut projetée à quelques mètres de là, soudain totalement sonnés, ne parvenant plus à rien entendre ni à rien voir tandis que d’épais panaches de fumée les envahirent.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 15/05/2023 à 15:02 Citer ce message

    Se relavant avec peine des décombres encore fumants, ils prirent quelques instants pour recouvrer leurs esprits. Lexxi avait l’air de s’en être plutôt bien sorti en comparaison de ses compagnons, couverts de suie, sonnés et écorchés de partout. L’ex garde impériale avait su garder de bons réflexes, même lorsque les bombes tombaient. Pourtant, l’air était soudain devenu glacial et une odeur piquante d’ozone planait alentours tandis qu’étrangement des gouttes d’eau partaient du sol vers le ciel. Ils avaient la tête qui bourdonnait et certains avaient même un filet de sang qui coulait de leur nez. Poppy fut le première à reprendre ses esprits et à reculer au plus vite afin de sortir de cet endroit maudit touchée par le warp, récitant de manière reflexe, une litanie de protection. Au contraire, Viggo qui avait aperçu du mouvement, à l’épicentre de l’explosion, chercha à s’en approcher, malgré les effets psychiques délétères. Ses sens restaient en alerte et ne le trompaient pas, le warp était à l’œuvre dans ce qui restait de l’entrepôt Kanoptech. A une cinquantaine de mètres de là, il parvint à identifier l’ondulation d’un bouclier kinétique toujours actif. Ses craintes se confirmèrent lorsqu’il s’évapora, laissant la place aux cinq hereteks qui venaient de survivre à l’enfer qui s’était déchainé sur eux. De loin, ils le virent et s’apprêtaient à attaquer mais il fut plus rapide qu’eux et relâcha, à pleine puissance, une rafale de force dans leur direction. Une onde de chaleur vibra tout autour de lui en sifflant. Trois d’entre eux furent aussitôt frappés de plein fouet, projetés en l’air, le corps brisé et transpercé par les projectiles psychiques incandescents, aussi mortels que des tirs de plasma. Les deux derniers parvinrent à s’échapper in extremis et disparurent, sans doute grâce à une sorte de sorcellerie.
    Tout en pestant, il se précipita dans leur direction tout en dégainant son pistolet laser et sa dague psykana. Il fouilla la zone mais ne parvint pas à les trouver. Seuls, les trois corps gisaient sur place. Lek et Lexxi l’avaient rejoint pour le couvrir, leurs armes pointées.
    -Il fait quoi, là ? Demanda Poppy à Felton qui étaient restés un peu plus loin. Ce dernier se contenta de hausser les épaules.
    -Qu’est-ce que j’en sais, moi. Va donc tenter de comprendre un psyker…
    Il revint au bout de quelques minutes, tout en essuyant la lame de sa dague, un sourire mauvais sur les lèvres. Avec ses yeux exorbités et sa figure blanchie par les cendres, on eut dit une sorte de mort-vivant.
    -Vous avez terminé ? Demanda Poppy, voyant qu’il avait prélevé sur eux de petits fragments sanguinolents qu’elle préféra ne même pas chercher à identifier.
    -Oui… Là, ils ne devraient plus se relever.
    -Il s’agissait bien des mêmes hereteks déjà croisé ? Demanda-t-elle à Lek et Lexxi.
    -Apparemment oui.
    -Je me demande bien ce qu’ils faisaient là.
    -L’un d’eux semblait parler avec le scientifique. Von Brawn, lui répondit Viggo.
    -De ce que j’ai vu, il lui demandait plutôt quelque chose, précisa Felton.
    -Von Brawn était bien parmi les victimes ?
    -Il est mort, oui. Je m’en suis assuré, ajouta Viggo.
    Malgré la nuit, la terrible explosion ainsi que les bâtiments en ruine et en flammes n’avaient pas manqué d’alerter les villageois alentours, pris de stupeur et de panique.
    -Bien, dans ce cas, ne trainons pas dans le coin, ajouta-t-elle. Retournons aux véhicules. On part récupérer Shidia et on file à la capitale. On tachera de prendre un peu de repos, ensuite je ferai le point avec Jézabel.
    -Et Everdynn ? Lui demanda Lek.
    -On doit lui mettre la main dessus, c’est vrai, ajouta Felton.
    -On a quoi ? Une ville du nom de Memory ? Et on sait qu’elle a changé d’identité et peut-être même d’apparence.
    Elle se tourna vers Lek.
    -Tu connais cette ville ?
    -Memory ? Juste de nom. C’est une ville côtière, mais je n’y suis jamais allé.
    -Et c’est grand ?
    -Oui, plus grand que Sandbarra, je crois.
    -Raison de plus, ajouta Poppy. La piste est maigre, nous risquons d’y passer des jours à la chercher.
    -Je pourrai peut-être tenter de mettre mes capacités de divination à profit, dans ce cas-là ? Se hasarda Viggo.
    -Pas ici, en tout cas, on doit partir avant de nous faire repérer, répondit Poppy.
    -Je pensais justement à la capitale. Gloria Everdynn est une chanteuse, si je ne m’abuse ?
    -Oui. Et ? Vous êtes chanteur comme Rico, vous aussi ?
    -Heu… Je… Non, non, mais elle aura très certainement laissé certains indices sur place. Je saurai surement les faire parler. C’était plutôt l’idée.
    Felton parut dubitatif à l’annonce de devoir employer encore des pouvoirs psychiques pour le Trône savait encore quelle sorte de diablerie totalement instable.
    -Une enquête aurait surement été plus fiable et moins risquée, non ?
    -En temps normal, j’aurai largement approuvé, mais là, on va devoir chercher à gagner du temps. On verra une fois à la capitale. Elle reporta son attention vers Viggo.
    -Vous aurez besoin de quoi pour… Comment vous dites ? Faire parler un objet ?
    -Oui. Un objet lui ayant appartenu fera parfaitement l’affaire. Je serai alors en mesure de pouvoir la localiser de cette façon.
    -Et comment on trouve ça ? Répondit Felton. Je doute que ses effets personnels soient encore là. Ça fait combien de temps qu’elle se fait passer pour morte, la Everdynn ? Trois ou quatre semaines ?
    -Un mois, répondit Poppy après un rapide calcul.
    -Oui, un mois, donc on a peu de chance de retrouver ses affaires.
    -J’ai mon indic sur place. La petite Noémie, ajouta Lek. Elle saura surement me renseigner. Je peux lui demander quand on sera en ville.
    Poppy acquiesça. Ils venaient de rejoindre leurs véhicules.
    Après avoir roulé une partie de la nuit, ils parvinrent à la capitale. Là, ils déposèrent Shidia, toujours grièvement blessée, à l’infirmerie du Reliquaire. Tous en profitèrent pour prendre quelques heures de repos, pour prendre une douche, se changer, soigner leurs blessures et prendre un repas à peu près normal. Le jour était déjà bien levé lorsqu’ils se réunirent. Felton accompagna Lek qui chercha à contacter son indic en ville. Lexxi et Viggo restèrent au Reliquaire pour récupérer armes et matériel. Le technoprêtre Ordax-Kappa leur avait préparé des munitions et pas des moindres. Des bolts, des munitions sanctifiées et il avait même prit le temps de modifier totalement le bolter de Lexxi, augmentant sa puissance de feu grâce à un système de propulsion amélioré et un chargeur à haute capacité. Exactement le genre de jouet qu’affectionnait la Catachan.
    Poppy, en profita pour faire un rapport à Jézabel à propos des transfuges livrés à Sinclar mais aussi sur ce qu’ils avaient vu dans cet entrepôt Kanoptech. Poppy avait des doutes quant à Sinclar et lui en fit part. Jézabel ne put la blâmer, mais comme évoqué plus tôt avec Felton, elle comptait sur le fait qu’Obscurus gagne la confiance de Sinclar pour infiltrer le Syndicat, fasse tombe Haxt, puis infiltre la Kasballica qui était un bien plus gros poisson. Felton avait l’intention d’avoir un coup d’avance dans cette partie, et elle ne pouvait pas se permettre de perdre la main. C’est de cette manière qu’il était parvenu à faire tomber Caleb Cox alors que ce dernier était tout juste sur le point d’approcher Haxt. De plus, Felton ne pouvait pas être laissé en roue libre sur cette affaire, surtout avec Sinclar qui risquait à tout moment de le démasquer. Jouer les agents doubles ne pouvait pas s’improviser – elle lui remémora le fiasco avec Bosinski et les Milagria. De fait, elle comptait bien les informer sur deux trois points avant de les renvoyer dans la nature.
    En plus de cela, des premiers éléments que Jézabel lui confia, l’assaut sur Sandbarra avait été un franc succès. Pour l’heure, la ville était placée sous quarantaine. Le Triumvirat composé de Seloxtyne de Chaambal, Malfus Von Brawn et Konrad Helsten, les principales têtes du Syndicat de l’ombre local avaient été éliminé grâce à une action coup de poing coordonnée. Et les derniers, notamment ceux en fuite, l’avaient été grâce à l’intervention de la Cellule Obscurus. Il en avait été de même pour leurs hommes de main. Plus d’une centaine d’entre eux en tout avaient été abattus lors de l’assaut de l’Arbites et des troupes locales et une trentaine avaient été blessés ou capturés. Tous allaient être interrogés dans les règles avant de finir pendus publiquement.
    Des documents avaient ainsi pu être récupérés et allaient être en cours d’analyse par les équipes de Jézabel. Cette dernière confia d’ailleurs à Poppy que les premiers éléments devraient lui donner les lieux où se trouvaient d’autres entrepôts Kanoptech dissimulés sur Archaea, ainsi que les noms d’intermédiaires ou transitaires en lien avec des maisons marchandes impliquées dans la contrebande et le commerce froid hors monde. Elle prenait l’affaire très au sérieux, d’autant plus que des officiels risquaient bien de tomber au cours de cette enquête. Bosinski et Murdoch étaient eux aussi dans le collimateur depuis un moment. Jézabel confia à Poppy le fait qu’elle avait un agent infiltré dans la Basilique, depuis le début de cette opération, qui lui remontait des informations essentielles sur leurs activités. Ce n’était plus qu’une question de temps avant qu’ils ne leur mettent la main dessus. Elle attendait les derniers éléments mais assura Poppy qu’elle comptait sur la cellule Obscurus dès que l’opération serait lancée. L’Arbites était aussi, plus que jamais sur le coup car d’autres têtes allaient prochainement tomber. Des centaines d’armes et plusieurs tonnes de drogues illégales avaient aussi été saisies à Sandbarra et feraient l’objet d’une destruction systématique, du moins officiellement. En tant qu’autorité des Ordos, elle avait toute latitude en réalité. Plusieurs dizaines de psykers émergents avaient ainsi été capturé et elle avait sollicité l’intervention d’un vaisseau noir dans les meilleurs délais. Quant aux pertes dans les rangs des troupes engagées, bien que lourdes, elles étaient pour l’heure, plus qu’acceptables. Elle lui mentionna enfin un dernier point, mais pas des moindres. Ezek, Pixi et Tsali n’avaient pas pu être localisés depuis ces dernières vingt-quatre heures, ce qui n’était pas habituel et présentait donc un véritable risque pour l’organisation. Tenebrae avait été mis sur le coup en urgence.

    Enfin, dans la journée, Lek eut un retour de Noémie, son indic. Contre six cents crédits, elle parvint à lui dégoter une petite veste en velours émeraude, courte et cintrée et bordée de fourrure, ayant visiblement appartenu à Everdynn. Lek préféra ne pas chercher à savoir comment elle se l’était procuré, mais selon elle, cette veste avait été porté par la célèbre chanteuse juste avant sa disparition. Si Viggo et ses tours de magie s’avéraient fiables, il devrait être rapidement en mesure de pouvoir la localiser à quelques dizaines de mètres près.
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  • Illuminati
    Illuminati

    le 19/05/2023 à 18:12 Citer ce message

    L’affaire des disparitions les préoccupait au point que Poppy proposa à Jézabel que la cellule Obscurus prennent toutes les mesures qui s’imposaient pour tenter de les retrouver. Cette dernière lui confia qu’elle avait d’ores mis la cellule Tenebrae sur le coup. De plus, elle avait lancé un protocole de sécurité qui prévoyait une évacuation en urgence du Reliquaire, avec l’activation de sites de repli. Cela impliquait une potentielle perte et donc une destruction du site et l’abandon de nombreuses ressources, mais cela restait nécessaire en cas de réelle compromission. Normalement, ils seraient fixés dans les prochaines heures, en fonction de ce que l’enquête de Tenebrae allait leur dévoiler. Poppy insista afin que Shidia puisse être évacuée vers la planque d’Hécate, apprenant que son état la condamnait, de fait, à rester sur place. Il en était de même pour Rico, toujours en cellule, avec interdiction d’en sortir, surtout vus les évènements. Il était à parier, selon Jézabel, qu’il fasse partie des cibles activement recherchées. Elle donna son accord pour que Poppy et son équipe se charge du transfert de Shidia, même si selon elle, ce n’était pas prioritaire. Ils allaient devoir gérer ce point au plus vite puis faire route vers la ville côtière de Memory, là où devait toujours se trouver Gloria Everdynn. Quant à Rico, son cas n’était plus une priorité.
    Ils effectuèrent le transfert de Shidia, ainsi qu’une partie de leurs armes et matériel vers la planque d’Hécate, située à l’autre bout de la ville, à Fort Glory. Une fois que tout était sécurisé, ils reprirent leurs deux véhicules et se mirent en route vers Memory.
    Après avoir roulé une partie de la journée, ils arrivèrent, un peu fourbus aux abords de la ville côtière. Loin de ressembler à Sandbarra, ils furent surpris de voir une ville plutôt prospère et développée. Certains bâtiments et maisons en témoignaient, présentant une architecture plus élaborée, même si des quartiers plus misérables subsistaient vers le port et certains faubourgs. Le gros de l’activité de Memory tournait autour de la pèche et notamment celle très périlleuse des poissons-mondes, ces rares et monstrueux mégalodons de plusieurs dizaines, voire centaines de tonnes, ramenés du large par de gigantesques nautifactoria. Les oiseaux marins, omniprésents, piaillaient de façon continue sur le port, attirés par les chalutiers et le contenu de leur panse chargée de poissons. Une odeur de marée et celle plus forte des conserveries qui tournaient à plein régime, planait partout sur la ville.
    Poppy en profita pour s’adosser au capot de la Hive Runner et se griller un cigalho. Lek se mit à bailler.
    -Bien, et si on se trouvait un hôtel où se poser. On a roulé toute la journée, je suis claqué.
    Viggo semblait du même avis.
    -Un petit resto pour commencer ? Répondit Lexxi qui ne paraissait pas plus fatiguée que cela, mais dont le ventre criait famine.
    Felton et Poppy échangèrent un regard.
    -On va faire les deux. On se trouve un point de chute. Quelque chose de discret et on voyage léger, inutile de commencer à attirer l’attention.
    Ils laissèrent les voitures dans un quartier calme, avec une partie de leur équipement et firent le reste à pied. De toute façon, ils découvrirent assez vite qu’une majeure partie de la ville était piétonne. Ils trouvèrent un hôtel, Le Fleur de Lys, rue Pacificus dans le Quartier de la Timonerie. Après avoir réservés des chambres en demi-pension, ils posèrent leurs quelques affaires et se retrouvèrent au restaurant qui était déjà à moitié plein, ce qui les empêcha de parler de sujets sensibles. Au moins, le plat du jour – la spécialité locale - était plutôt correct bien qu’un peu gras, composé de beignets de poisson-monde servis avec des bâtonnets de cassam frits et une bière brune locale, aussi épaisse que du prométhéum.
    Après s’être rassasiés, Felton, d’humeur maussade, alla se poser au bar de l’hôtel, pour y boire quelques shots de raenka. Tandis que Viggo monta dans sa chambre pour méditer et que Lek décida d’aller faire un tour dans le quartier, Lexxi et Poppy décidèrent d’aller le rejoindre au bar. Cette dernière décida de trinquer et de lever son verre à Tsali. Felton qui n’était pas trop dans son assiette, se demanda quel était le message de Poppy. Encouragement ou enterrement un peu trop rapide ? Il préféra ne pas relever, un peu lâs de chercher les querelles avec cette garce d’arbitrartor. Il préféra aller dormir quelques heures.
    Poppy, quant à elle, passa voir le psyker et s’assurant qu’il ait terminé ses rituels, décida d’inspecter la veste. A l’aide de son implant oculaire équipé d’un révélateur de phéromones, qu’elle activa, elle tenta d’identifier les dernières traces laissées par sa propriétaire. Malheureusement, elle y décela plusieurs signatures et ne put clairement isoler celle qu’elle recherchait.
    Un peu vers minuit, ils décidèrent de ressortir suivant les informations recueillies par Viggo. Alors qu’il méditait dans sa chambre, il en profita pour tirer le Tarot de l’Empereur et pour se focaliser sur la veste ayant appartenue à Everdynn. Ses dons de divination lui suggéraient fortement que leur piste était toute proche, peut-être à moins d’un kilomètre de leur position. C’était là, l’occasion rêvée pour aller faire un tour à la faveur de la nuit et tenter de trouver l’adresse de la chanteuse. De son côté, Lek avait repéré quelques belles demeures gardées par des hommes en armes, ils commencèrent par cette piste qui leur paraissait prometteuse, surtout que Viggo leur confirma une localisation qui devait correspondre à ce même quartier. A force de fureter, Lekk finit par repérer quelque chose qui mit tous ses sens en alerte. Il se fallut de peu qu’il ne se fasse repérer par deux gardes à l’entrée d’une grille. Il rebroussa chemin et attira le reste de l’équipe dans une ruelle plus sombre.
    -Eh bien ? on dirait que tu as croisé un mort ? Lâcha Felton.
    -Pire que ça… Les deux types à la grille, là-bas, je les connais.
    -Comment ça ? S’étonna Poppy.
    -Ce sont des hommes de main de Bosinski avec qui j’ai déjà bossé. Ils font parti de ceux qui m’avaient mis la main dessus et collé à fond de cale sur un de leurs rafiots, un peu avant qu’on se rencontre justement.
    -Ton histoire avec Tsali et les autres sur je ne sais plus quelle ile ? Lui demanda Felton.
    -Ouaip, c’est exactement ça. Donc s’ils me reconnaissent, c’est mort.
    -Inutile d’y aller, on a toujours la mouche-pix et Ordax m’a confié une blatte-comm, un petit mouchard vox. On devrait pouvoir repérer à distance tout ce qui se trouve dans la villa, ajouta Lexxi.
    Poppy hocha la tête et désigna Viggo.
    -Vous êtes sûr que c’est bien ici ?
    Le psyker ferma les yeux et laissa ses sens psychiques s’étendre dans les alentours. Il les rouvrit et hocha la tête.
    -Je ressens la présence d’un ou deux psykers dans les parages, restons prudents.
    -Trône… Ils sont en train de faire quoi ? Lâcha Poppy avec un rictus contrarié.
    -Rien de spécial. Ils sont juste là.
    -C’est déjà trop. Mais la présence de psykers est déjà une piste en soi.
    Lexxi et Felton en avait profité pour sortir les petits drones mouchards et les relâchèrent, suivant leur progression depuis une tablette. Il fallut une dizaine de minutes pour qu’ils obtiennent une vue complète de la villa et de son agencement. Malgré la nuit, des lumens éclairaient le jardin et les principales ailes de la maison. Le parc dans lequel elle se trouvait, comptait des gardes armés et ils virent tout de suite que ça ne plaisantait pas. Tous étaient lourdement équipés avec des fusils d’assaut à haute capacité, au moins un fusil de tireur d’élite, un ou deux bolters compacts, une mitrailleuse et deux cyber-molosses en patrouille. Au centre de la villa se trouvait une piscine où plusieurs jeunes femmes semblaient se détendre. En observant bien, ils ne reconnurent pourtant pas Everdynn. Les drones poursuivirent leur exploration. A l’intérieur de la villa, ils finirent par trouver les deux psykers en question, installés dans une chambre, en pleine méditation. En plus des psykers, ils trouvèrent deux servants affairés en cuisine ainsi que d’autres gardes, dont un avec un fusil à plasma et un autre avec un redoutable marteau énergétique à deux mains. Ce qui portait le nombre d’hommes armés à douze. Felton finit enfin par identifier Gloria Everdynn dans un salon. Seule et allongée sur un sofa, occupée à lire un magazine avec une certaine nonchalance.
    -Je crois qu’ils sont un peu trop nombreux et armés pour nous, finit par annoncer Lexxi.
    -Je suis d’accord, compléta Lek. Si on rentre, c’est du pur suicide. Et sortir avec elle vivante, ça va être impossible.
    -C’est pour ça qu’on va devoir tenter une autre stratégie. Faire une diversion, peut-être ? Proposa Felton.
    -Inutile de se précipiter, ajouta Poppy. On sait déjà qu’elle est là. Maintenant, reste à savoir pourquoi elle dispose d’un tel niveau de sécurité. Haxt tient à elle, mais reste à savoir à quel prix.
    -Tu penses qu’elle serait peut-être retenue contre son gré ? Répondit Lexxi.
    -Je n’écarte aucune possibilité, justement. Voilà pourquoi cette information est cruciale.
    -Si c’est le cas, tu penses qu’on pourrait la retourner contre lui ? Lui demanda Lek.
    Elle interrogea Felton du regard.
    -Si jamais c’était le cas, on aurait tort de se priver d’une telle opportunité, lui répondit-il.

    Haxtès, le servo-crâne utilitaire récupéré au Reliquaire par Lexxi et qui flottait au-dessus de son épaule, se mit à émettre quelques tonalités binaires intempestives. Son oculaire clignota alors frénétiquement.
    -On reçoit une communication vox cryptée, lâcha Lexxi. On l’accepte ?
    -Evidemment… Dit-lui de nous délivrer son message, répondit Poppy qui ordonna à toute l’équipe de rester dissimulé dans les ombres de la ruelle.
    Lexxi se saisit du plot de connexion du crâne, qu’elle connecta à son unité d’interface. Le déchiffrement commença puis au bout de quelques secondes, l’oculus projeta un holo d’un vert translucide tressautant qui montra le visage soucieux de Jézabel.
    -Je vais être brève car c’est urgent. Tenebrae a eu un retour mais pas exactement celui auquel on pouvait s’attendre. Il semblerait que ce soient les frères Milagria qui détiennent nos trois agents. Filature et enlèvement en pleine rue devant témoins. Tenebrae se charge de recueillir les derniers indices. Rien de subtil donc mais c’est ce qui les a rendus efficaces jusque-là. En revanche, ils ont formulé une proposition que nous avons pu intercepter. Ils comptent les vendre. Au plus offrant. Et tenez vous bien, ils ne mes proposent pas qu’à Bosinski, ils les proposent aussi à Sinclar qui parait très intéressée du coup. Le deal n’est pas encore conclu, ils leur laissent quarante-huit heures pour formuler une offre. Inutile de vous faire un dessin. Pour l’heure on est sur le coup avec Tenebrae, mais je tenais à vous informer de la tournure que pourraient prendre les éléments de cette affaire. Surtout si vous voyez Sinclar prochainement. Je vous tiens informés dès que j’ai du nouveau. Restez concentrés sur Everdynn. La mission ne change pas. Terminé.
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  • Illuminati
    Illuminati

    le 26/05/2023 à 23:25 Citer ce message

    -Cette histoire avec les Milagria tombe au plus mal, lâcha Poppy au reste de l’équipe. Ils risquent bien de faire capoter tout notre plan avec Sinclar.
    -Oui, mais justement, à un moment, il va bien falloir qu’on s’occupe d’eux aussi, ajouta Lek.
    Poppy chercha Felton du regard. Ce dernier était un peu plus loin, en connexion vox apparemment. Il coupa son vox après quelques instants et vint les rejoindre.
    -Hé bien ? Lui demanda-t-elle.
    -Je viens d’avoir Sinclar. Shom-Valaï lui a communiqué une information intéressante.
    -Sur les Milagria ?
    -Non, sur Everdynn. Bosinski va passer la voir demain matin, comme chaque semaine. Il sera avec une équipe réduite, un seul véhicule apparemment. Le type est prudent, on le sait bien. Il n’utilise jamais le même trajet ni le même véhicule, mais le plus intéressant selon Shom-Valaï c’est qu’il passe à chaque fois dans une boulangerie le matin avant d’aller la voir.
    -Une boulangerie ? Où ça, à Memory ?
    -Oui, j’ai même l’adresse, c’est dans le centre-ville, je crois.
    -Et elle propose quoi, Sinclar ? Qu’on intercepte Bosinski ? Qu’on l’élimine ?
    -Qu’on l’intercepte et qu’on prenne sa place. Comme ça, dans la matinée, on se pointe à la villa d’Everdynn en se faisant passer pour lui et ses hommes, on l’embarque prétextant des raisons de sécurité et ça devrait se faire sans avoir à tirer le moindre coup de feu.
    Lek et Lexxi eurent un petit sourire à l’évocation de cette simple idée, restant dubitatif quant à l’idée de plan sans risque de fusillade.
    -On aurait donc l’occasion de tomber sur Bosinski, répondit Poppy. Et on en fait quoi si on l’attrape et qu’on prend sa place ? Ensuite, elle le veut vivant ?
    -Pas nécessairement. Mais c’est vrai qu’il pourrait nous être utile en vie, non ? Ajouta Lek.
    -C’est pas idiot, en effet. En vie, il devrait fournir une mine d’informations, répondit Felton.
    Poppy consulta son chrono.
    -Cela ne va nous laisser que quelques heures pour préparer cette opération, c’est très court. Si on résume, on a une adresse où Bosinski se rend demain matin. On l’intercepte là-bas, on prend sa place et on se fait passer pour lui pour aller chercher Everdynn. Donc d’accord, on lui met la main dessus, mais comment on fait pour se faire passer pour lui ? Il te reste de cette drogue pour modifier ton visage ?
    -Du plas ? Non je n’en ai plus, répondit Felton.
    -Sinclar pourrait t’en fournir à nouveau ?
    -C’est prévu, oui.
    -Alors, rappelle-la, parce que si on intervient demain matin, on va en avoir besoin, très vite. Ça et un anesthésiant pour le pistolet à aiguilles.
    -D’accord, je la rappelle.
    -En attendant, Lexxi, tâche de nous trouver l’adresse de cette boulangerie, on va passer y faire un saut rapide pour reconnaitre les lieux. Comme ça, demain matin, on arrive avant l’ouverture et on cueille Bosinski. Allez, on se met en route.

    Le lendemain matin, à la première heure, l’équipe Obscurus avait déjà fait un repérage complet des lieux. La boulangerie en question était une toute petite échoppe coincée dans une ruelle qui donnait sur une place du marché devant un des bâtiments du Munitorum de la ville du quartier de l’arsenal. Dès le matin, des commerçants étaient déjà en train d’installer leurs étals. Des poissonniers pour la plupart mais aussi des maraichers. Aussi ils purent passer inaperçus pour identifier les points clés de la place, car tout le monde semblait affairé. Lexxi en repéra deux. Un balcon au deuxième étage d’une maison d’en face, ainsi que le toit du bureau des taxes du Munitorum, à l’autre bout. De là, leur précisa-t-elle, ils pourraient installer deux tireurs et couvrir ainsi toute la zone entre les rues qui mènent au marché, jusqu’à la boulangerie. Lexxi et Poppy se désignèrent pour cette tâche. Dans le coffre de leur véhicule, Lexxi récupéra sa cape caméléoline ainsi que le fusil laser de précision M36, quant à Poppy, elle préféra prendre le fusil Absolution à lunette et un chargeur de balles tueuses. Toutes deux se dirigèrent vers les bâtiments afin de prendre position. Poppy en utilisant sa plaque, réquisitionnant ainsi l’étage souhaité de la terrasse où elle allait s’installer et Lexxi préféra escalader la façade de derrière le bâtiment administratif pour s’installer sur un des toits.
    Felton, Lek et Viggo s’installèrent dans la boulangerie. Le couple de commerçants, apeuré, les prit d’abord pour des malfaiteurs mais Felton parvint à les apaiser en se faisant passer pour des enquêteurs de l’Arbites sous couverture. Ils leur expliquèrent être là pour interpeler un dangereux criminel, leur demandant de jouer le jeu et de faire comme si de rien n’était. En revanche, à l’arrivée du dit criminel, ils devraient se jeter au sol ou décamper au plus vite. Le couple de boulangers était tout de même très nerveux malgré les conseils de Felton. Voyant que l’heure approchait, il préféra se positionner à l’extérieur de la boutique, dans l’angle d’une ruelle donnant sur la place du marché déjà active. Viggo resta dans la boulangerie, prenant place, tel un simple client installé à une petite table avec un café, tandis que Lek préféra rester caché dans l’arrière-boutique, dissimulé derrière une porte battante.

    A 08h03, la voix calme de Poppy grésilla dans leurs microvox. Elle avait pris position sur la terrasse d’un bâtiment, juste en face de la place, comme convenu. De là où elle était, il était difficile de la repérer depuis la rue. Elle avait un visuel sur la scène depuis la lunette télescopique de son fusil de précision. La place du marché commençait à se remplir de quelques dizaines de civils.
    -Véhicule en approche. Tenez-vous prêts. Tout le monde confirme sa position.
    En position, finirent par lui répondre ses équipiers après quelques secondes. Elle dut faire répéter Lek, à cause de quelques interférences.
    -Le véhicule s’arrête à trente cinq mètres de votre position. Six heures. Des individus en descendent. Quatre. Non, cinq. Cinq, confirmé. Des hommes de mains. Armement d’assaut. La cible est avec eux. Costume blanc. Cible confirmée. Deux hommes restent devant le véhicule. La cible se dirige vers votre position, escortée de deux gardes du corps. Délai d’interception : quarante secondes. En attente. Numéro 4 ?
    -Costume blanc. Visuel confirmé, lui répondit Lexxi dans le microvox.
    -Interception dans vingt secondes. Tirs de couverture parés. A vous, Numéro 2.
    -Reçu, confirma Felton qui venait d’armer lentement la culasse de son Tronsvasse Hi-Power. Depuis son champ de vision, il voyait Bosinski avec son sempiternel costume et ses petites lunettes rondes approcher, le regard aux aguets. Ou le type s’attendait à un mauvais coup, ou bien il était d’une méfiance à toute épreuve. Ce qui devait être effectivement le cas, le connaissant. Bosinski se dirigea vers la porte d’entrée de la boulangerie et y entra. Sans même le leur demander, ses deux gardes du corps se positionnèrent à l’extérieur, de chaque côté de la porte.
    -Ici Numéro 1, perte visuelle de la cible. Numéro 2 et 3, confirmez.
    -Cible en visuel confirmée, lâcha Lek à voix basse depuis l’arrière-boutique. Bosinski venait d’entrer. Il se dirigea vers le comptoir et parlait au boulanger. Tout alla alors très vite.
    Viggo laissa tomber sa tasse de café au sol où elle se brisa en éclats. La diversion fut suffisante pour que Bosinski détourne son attention une seconde. Lek ouvrit la porte de l’arrière-boutique tout en pointant son pistolet à aiguilles et lui tira dessus. Le coup le manqua malheureusement d’un milimètre, égratignant la manche de son costume. Bosinski comprit aussitôt ce qui était en train de se passer, reconnaissant de plus et avec précision, l’homme qui tentait de l’assassiner. Quelques mois auparavant, Lek Constantine avait été un de ses hommes de main. Après avoir refusé d’obéir à ses ordres, un contrat avait été collé sur la tête de Lek, mais sans le moindre succès apparemment. Bosinski se jeta de côté tout en dégainant un pistolet d’origine exotique et ouvrit le feu vers lui. La décharge d’énergie vaporisa une partie de la porte dans un sifflement d’air ionisé laissant une odeur de brûlé. Lek vit le trou encore brûlant, là où se trouvait sa tête juste avant et se recula d’instinct dans l’arrière-boutique tout en dégainant son Carnodon de son autre main. Bosinski était en train de crier, d’appeler ses gardes du corps à la rescousse. Ce qu’ils firent en moins d’une seconde. Les deux qui étaient restés dehors, se ruèrent vers la porte, leurs armes à la main. C’est là que Felton pivota de la ruelle où il était resté dissimulé et ouvrit le feu avec son Tronsvasse à silencieux. Les Hi-power sont des armes disposant d’une puissance de feu considérable, en succession de tirs rapides, capable de vider leur volumineux chargeur tambour en quelques secondes. En revanche, ils sacrifient leur précision à cause du recul important causé par une extrême sollicitation de la culasse. Malgré la longue rafale de projectiles perforants, tous ses tirs manquèrent leurs cibles.
    Tandis que le premier homme de main, une femme élancée, avec de longs cheveux noirs, entra en trombe dans la boutique avec un fusil Armageddon à la main, le second garde du corps se recula, pivota et ouvrit le feu avec son Mastoff vers Felton. Ce dernier venait de se reculer dans la ruelle tout en dégainant son pistolet bolter.
    Depuis les toits, Lexxi et Poppy venaient elles aussi de verrouiller leurs cibles. Les deux hommes de main restés auprès du véhicule faisaient maintenant mouvement vers la boutique en courant, leurs armes à la main. Dans dix secondes ils seraient sur Felton. D’un mouvement du pouce, Lexxi bascula l’amplificateur sur la puissance maximale, verrouilla le dernier des hommes de main dans la lunette de son M36 et tira. Le tir de laser à pleine puissance, percuta sa cible qui fut soulevée de terre comme une poupée de chiffons et fut projetée vers un tas de caisses et de cartons dans la ruelle de derrière, tuée net. La seconde suivante Poppy tira avec le fusil Absolution mais manqua sa cible d’un cheveu, éclatant un fruit gros comme un ballon de speedball qui était sur un des étals. Le fruit mûr éclata en projetant son contenu rouge sombre, presque semblable à du sang. Quelqu’un cria. Des citoyens alentours se mirent à hurler. La panique s’empara de la place du marché en une seconde.
    -Et merde, lâcha Poppy tout en armant la culasse du fusil, éjectant la douille en laiton et rengageant une nouvelle cartouche dans la chambre, d’un geste sec. Elle prit une respiration.

    Depuis l’arrière-boutique, Lek était en train de faire feu avec son Carnodon mais celle qui se trouvait dans l’autre pièce n’était pas n’importe qui. Anya Tokugawa était une véritable tueuse aguerrie, formée depuis l’enfance, tout comme lui. Ils avaient travaillé ensemble dans la même équipe, deux ans auparavant, avant qu’elle et ses hommes ne le mettent à fond de cale dans ce fameux bateau, sur les ordres de Bosinski. Ce jour-là il aurait dû finir avec des semelles en lithobéton quelque part à trois mille mètres de profondeur. Mais ce jour-là, le destin, l’Empereur ou sa putain de chance de veinard en avait décidé autrement. Anya, il l’avait même revu une fois, à la capitale, quelques semaines auparavant. Ce jour-là, autour d’un verre, elle l’avait prévenu avec son charmant sourire et par courtoisie que la prochaine fois qu’ils se recroiseraient ce seraient pour qu’elle le tue pour de bon. Rien de personnel, mais c’était la règle et il le savait. Cela ne l’étonnait absolument pas qu’aujourd’hui, elle soit devenue la cheffe de la sécurité de Bosinski et que ce soit sa propre équipe qui assure la protection de Gloria Everdynn. Sans la moindre hésitation, elle s’interposa entre Lek et son boss et, tout en le forçant à sortir de la boutique avec elle, elle ouvrit le feu en rafale, forçant Lek à rester à couvert, peinant à riposter à cause de la puissance de feu de l’Armageddon combinée à celle de l’arme surpuissante de Bosinski. Les douilles pleuvaient dans tous les sens, tout comme le mobilier et les victuailles qui volaient dans la pièce, dans un vacarme assourdissant. Viggo, incapable de résister au déluge de feu qui ravageait toute la boutique, projeta une aura de force entre lui et les tirs déchainés. Il eut le temps de constater que le boulanger et sa femme avaient eu au moins la présence d’esprit de se mettre à l’abri.
    A l’extérieur de la boutique, le second tireur mitraillait toujours en direction de Felton toujours à couvert, mais ce dernier pivota et lâcha une courte rafale de son pistolet bolter, touchant l’homme de main en plein torse. Projeté en arrière, les projectiles détonèrent tandis qu’il était soulevé de terre, le tuant dans une bruine de sang et de fragments épars. Ce fut justement le moment où Bosinski et la fille sortaient en trombe de la boutique tout en continuant de faire feu en continu. Felton allait les cueillir mais l’homme de main qui avait été raté de justesse par Poppy venait de le repérer. Armé d’un bolter compact, il ouvrit le feu à son tour. Le premier bolt explosa contre un des murs, à quelques dizaines de centimètres de la tête de Felton qui fut lacéré par une poignée d’éclats. Le second bolt toucha son plastron pare-balle et détonna, le projetant deux mètres plus loin dans une pile de détritus. Lexxi et Poppy ouvrirent le feu mais manquèrent leurs cibles de nouveau. Pestant, Poppy arma nerveusement la culasse de son arme, éjectant la douille fumante et engagea une nouvelle cartouche à tête blindée. Elle reprit sa visée, invoquant l’Empereur de guider la mort vengeresse qu’elle s’apprêtait à délivrer.
    Sur la place, Bosinski, couvert par Anya et par le tireur au bolter qui désormais savaient d’où venaient les tirs, firent écran et l’escortèrent en courant vers leur véhicule. Viggo venait de sortir de la boutique à son tour, couvert d’éclats et de bouts de verre, cherchant à les rattraper, tout en focalisant ses pouvoirs autour de ses doigts qui se mirent à crépiter. Poppy le vit se diriger vers les ennemis.
    -Numéro 2 est à terre ; Numéro 5, décroche et va l’assister.
    Nouveaux tirs de Lexxi et de Poppy. Celui de Lexxi frôla Bosinski de justesse mais pas suffisamment pour l’arrêter.
    -Bien reçu, lâcha Viggo qui s’arrêta net en dérapant sur le pavé, avec une petite grimace, se disant qu’il était sur le point de les avoir. Il rebroussa chemin et se dirigea vers la ruelle où Felton était au sol occupé à cracher son propre sang. Il allait devoir faire vite pour le stabiliser et le remettre sur pied à l’aide de ses pouvoirs. Pendant ce temps, Lek était en train de contourner le bâtiment en courant et espérait bien leur couper la retraite en arrivant derrière leur véhicule. C’est exactement ce qui se passa. Il avait ses deux Carodons en main et se dirigea droit vers la voiture, pile ou moment où Bosinski et ses gardes arrivaient. Il se mirent à échanger des coups de feu mais Anya parvint à faire en sorte que les tirs mortels soient déviés. Bosinski fut touché mais légèrement, encore une fois. Anya s’interposa et ouvrit le feu en rafale sur Lek et le toucha. Les tirs l’envoyèrent mordre a poussière, il s’écroula au sol, son gilet pare-balles criblé d’impacts et maculé de sang.
    Bosinski s’engouffra dans la voiture, son autre garde du corps prit le volant et Anya s’installa à côté tandis que le véhicule démarrait en trombe. Alors que les tirs continuaient de claquer. Viggo venait d’apparaitre soudain juste devant, son bâton Psykana brandit et crépitant d’énergie. La voiture le percuta et l’envoya rouler sur le capot avant de le projeter au sol. Dans un crissement de pneus et dans un rugissement de moteur, la voiture effectua alors une marche-arrière. Lexxi tira et explosa le pare-brise, faisant mouche, elle blessa grièvement le conducteur à l’épaule. Ce dernier s’affaissa sur le volant faisant perdre le contrôle au véhicule qui percuta un réverbère, mais sans plus de gravité. Le conducteur, salement blessé, tenta de manœuvrer mais Felton qui s’était trainé, malgré ses blessures, mais stabilisé par Viggo, ouvrit le feu au jugé avec son pistolet bolter, tentant le tout pour le tout. Un des bolts toucha pourtant le conducteur et le tua sur le coup mais Felton, mal en point était à bout de force et sur le point de s’effondrer. Dans le véhicule, Anya n’eut d’autre choix que d’ouvrir la portière, faire basculer le corps de son coéquipier et prendre sa place. Elle enfonça la pédale d’accélérateur, mit un léger coup de volant et dégagea la voiture qui recula en trombe. Lek était au sol dans une mare de sang, Felton ne tenait plus debout et pissait le sang lui aussi, quant à Viggo, il se relevait péniblement de sa chute. Lexxi n’avait plus d’angle de tir, elle décida de redescendre du toit à toute vitesse. Poppy avait encore la cible dans son viseur. Trois secondes et le véhicule tournerait au coin de la rue. Trois secondes. Un dernier tir, une dernière chance, avant que cette opération de tourne au fiasco. Elle bloqua sa respiration et tira.
    La balle blindée traversa la boite crânienne d’Anya de part en part, avec une bonne partie de son contenu. La balle traversa la banquette arrière et le réservoir de promethéum situé juste derrière. Le liquide brulant et sous pression se vaporisa hors du système d’injection et s’embrasa dans la même seconde faisant détonner les deux tonnes du véhicule dans une boule de flammes incandescentes. La voiture décolla du sol sous la pression de l’explosion, soufflant toutes les vitres alentours. Poppy se contenta de remercier l’Empereur-Dieu avec un petit sourire. Son passé de mortiurge ne lui avait finalement pas fait défaut.
    Lexxi et Viggo allaient se charger des blessés. Ils allaient devoir décamper au plus vite et revoir leurs plans pour Everdynn. Mais une autre victoire venait d’être accomplie aujourd’hui. Certes, elle leur coutait cher, mais avec la mort confirmée de Wosley Bosinski, ils n’avaient jamais été aussi près d’atteindre Grendel Haxt.
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  • Illuminati
    Illuminati

    le 13/06/2023 à 21:51 Citer ce message

    Memoria
    Hacienda Helianthus, planque du Syndicat
    Tempus estimare 044.021M42–08h50
    72ème jour depuis le début de l’opération.

    Lexxi gara la Hive Runner à quelques dizaines de mètres de la villa où était détenue Gloria Everdynn. Tandis qu’elle paramétrait une mouche-pix et une blatte-com, assistée de son servo-crâne, Felton et Lek en profitèrent pour s’injecter chacun une dose de plas, la drogue qui permettait de modifier les traits du visage. Felton prit l’apparence de Bosinski et Lek celle d’un de ses gardes. La ressemblance était loin d’être parfaite mais ils comptaient surtout sur le bluff et l’urgence de la situation. Après quelques minutes, Lexxi leur confirma que les petits drones étaient en place dans la villa.
    -Tu as localisé Everdynn ? Elle est toujours dans le salon ?
    -Négatif. Elle et les gardes ont bougé depuis hier. Je compte moins de monde d’ailleurs.
    -Les psykers sont toujours là ? Demanda Poppy.
    -Je n’ai aucun visuel sur eux. Je continue d’investiguer.
    Poppy se tourna vers Viggo. Elle n’eut même pas besoin de parler. Il comprit, se concentra et laissa ses sens aethériques fouiller les environs. Pourtant sans succès après quelques instants.
    -Continue de sonder la zone. En cas de manifestation psychiques, tâche de les localiser et de les contrer, je vais vous accompagner dans ce cas, dit-elle à l’attention de Felton.
    -Pourquoi ça ?
    -Je serai juste une de tes gardes du corps. Je le sens pas et si ça foire, on devra sortir l’artillerie, crois-moi. Lexxi et Viggo resteront ici, parés à nous sortir de là en cas de grabuge. Lek ? Tu nous confirmes que Bosinski aurait prévu un plan B en cas de danger ?
    -J’ai déjà fait partie de ce genre de protocole. Je les connais bien, ils ont un plan d’urgence pour ce genre de situation.
    -On va jouer là-dessus, compléta Felton. Prétendre qu’on a subi une attaque, qu’on s’en est sorti in extremis et que je viens chercher Everdynn pour la bouger.
    -Et pour les gardes de la villa ?
    -Je vais leur demander de se replier, comme convenu, leur précisant que je les recontacterai plus tard.
    -Et s’ils posent des questions ? Parlent de prévenir Haxt ou quelque chose comme ça ?
    -Je leur dirai que je m’en charge.
    -On coupera court, ajouta Poppy. On n’est pas là pour palabrer et répondre à leurs questions, donc pas de discussion. Bosinski entre, donne des ordres, ils exécutent et on ressort. Fin de l’histoire.
    -Je te sens bien en confiance, répondit Felton.
    -Contente-toi de paraitre crédible. La clé de cette opération repose sur l’urgence. Dans moins de vingt minutes ils sauront pour l’attaque de la boulangerie, donc on doit prendre les devants. Vos blessures et le ton grave de la situation devraient masquer le reste.
    Une fois tous parés, Felton, sous les traits de Bosinski, le visage maculé de sang séché, les vêtements défaits et arborant plusieurs blessures, se dirigea vers l’entrée de la villa. Il était suivi de Lek qui était plus ou moins dans le même état et de Poppy qui couvrait leurs arrières. Il se manifesta aux gardes qui tenaient la grille et qui le reconnurent dès qu’il s’adressa à eux.
    -Laissez-moi entrer, on déclenche le plan d’urgence, magnez-vous !!
    Ils hésitèrent un instant puis ouvrirent la grille, les laissant passer. Comme vu la veille, plusieurs gardes armés patrouillaient dans le jardin et la villa.
    -Où est Miss Everdynn ? Je dois l’exfiltrer, maintenant, la planque est compromise.
    Un des gardes leur montrer le couloir qui traversa l’hacienda vers un patio où se trouvait un salon de jardin à quelques dizaines de mètres de là.
    -Que se passe-t-il, Monsieur ?
    Felton et ses deux compagnons s’y dirigèrent sans prendre la peine de répondre à la question. Le garde ouvrit alors la porte d’un salon dans le couloir et un autre homme de main en sorti en trombe. Lek le reconnut aussitôt. Il s’appelait Mattius Cobelson, c’était un des boss qui travaillaient pour Bosinski, tout comme Anya. Il avait déjà travaillé pour lui et savait que ce type était un véritable cyber-mastiff. Il ne lâchait rien. Raison pour laquelle Bosinski avait confiance en lui et en son efficacité.
    Mattius vint les rejoindre. C’était une masse de muscles couvert d’électrotatouages et affichant une courte barbe.
    -Chef, c’est quoi cette histoire ? Bordel qui vous est tombé dessus comme ça, vous avez tous une de ces gueules ?
    -On lance le protocole d’urgence. On dégage la cible d’ici. Prépare tes gars, on a peu de temps, répondit Felton.
    -Oui, mais qui ? Ils sont combien bordel ? ça a un rapport avec l’attaque de Sandbarra ? Ces fils de pute de l’Arbites ?
    -Une attaque à la boulangerie. Pas le temps de t’expliquer, la villa est compromise, on dégage tous.
    -Merde mais Anya n’est pas avec vous ? Et les autres ?
    -Anya est morte. J’ai dû appeler des renforts.
    -Quoi Anya… ? Merde, pas elle… J’y crois pas... Putain… Comment ça s’est passé ?
    Lek allait répondre mais Poppy s’interposa entre Felton et Mattius, lui indiquant de ne rien ajouter.
    -Tu n’as pas compris ce que te dit le chef ? On n’a pas le temps, là on met la cible en sécurité et toi et tes gars vous quittez les lieux.
    Mattius ne se laissa pas démonter.
    -Bordel, t’es qui toi pour me parler comme ça ?
    Felton fit un geste d’apaisement et lui désigna Everdynn, allongé sur un des sofas du salon de jardin.
    -Va me la chercher, on l’emmène, comme je te dis, on n’a plus le temps.
    Mattius se dirigea vers le jardin, en profita pour congédier sans ménagement les autres filles qui étaient là puis distribua des consignes à ses hommes qui entreprirent de préparer l’évacuation.
    -On se retrouve où ? Demanda-t-il à Felton.
    -Je vais devoir la mettre au vert pendant deux ou trois jours, le temps que ça se tasse. Suis le protocole en attendant. On se recontacte plus tard.
    Déjà Poppy et Lek avaient récupéré Gloria Everdynn qui semblaient totalement sous l’emprise d’une drogue ou d’un calmant. Elle semblait totalement dans les vapes. Ils l’emmenèrent avec eux et repartirent, croisant au passage les deux psykers qui leur lancèrent un regard perçant. Leur plan pouvait capoter à chaque seconde, pourtant ils purent quitter l’hacienda et retrouver leurs équipiers à la voiture. Ils embarquèrent Everdynn alors que Lexxi terminait de rapatrier ses drones. Felton reprit à peine sa respiration en prenant le volant et ils filèrent à la capitale, en direction de la planque d’Hécate. La route leur prit plusieurs heures et ils y arrivèrent en début d’après-midi. Ils firent d’abord une rapide halte au Reliquaire, le temps de s’assurer qu’Everdynn n’avait pas un traqueur implanté. Parvenus à la planque, ils la ligotèrent et l’installèrent dans une pièce, fermée à clé, comptant sur le fait qu’elle était toujours à moitié endormie. Poppy alla prendre des nouvelles de Shidia qui était installé dans une autre pièce, sous monitoring d’un servo-medicae. Elle était consciente mais toujours alitée et faible, se remettant tout doucement de ses blessures et lui adressa un sourire, plutôt reconnaissante de savoir que Poppy se préoccupait d’elle.
    Pendant ce temps, Felton était en ligne avec Jézabel. Il finit par couper la connexion.
    -Elle a relâché Rico. Elle a un plan pour les Milagria.
    -Laisse-nous deviner, il va servir d’appât ? Lui demanda Lek avec un petit sourire sans humour.
    -Exactement. Ils ont toujours Tsali, Ezek et Pixi et elle pense qu’en relâchant Rico, ça risque de les faire bouger.
    -C’est risqué…
    -On n’a pas beaucoup d’autres options. Dans trente-six heures leur ultimatum expire. Si on veut les faire bouger, c’est maintenant.
    -Et toi, par rapport à Tsali, tu le sens comment ? Lui demanda Poppy.
    -Je le sens mal… Evidemment. Ça craint si tu veux savoir.
    -Et Jéz propose quoi ? Je croyais qu’elle avait mis Tenebrae sur le coup ?
    -C’est le cas. Elisha et une partie de l’équipe sont à Lynnbarra, au cas où il fasse la bêtise d’y retourner.
    -Il en est bien capable, non ?
    -C’est même plus que probable, pour ça qu’ils y sont. Et le reste de son équipe l’ont repéré dans le quartier des temples. Il se serait rendu à sa radio.
    -Ils l’ont suivi ?
    -Oui et ils ont perdu sa trace justement. Pour ça qu’elle nous demande si on peut le repérer de notre côté, comme on connait ses habitudes.
    Poppy fit un signe en direction de Lexxi.
    -Attrape le vox et appelle Elisha, demande s’il ne serait pas là-bas. Je vois mal Rico ne pas chercher à revoir son éleveuse de grox.
    Lexxi hocha la tête et se dirigea dans la pièce d’à côté où se trouvait l’unité vox longue portée.
    -Je peux tenter de le localiser, si vous voulez ? Proposa Viggo.
    -Avec vos… Pouvoirs ? La question de Poppy était purement rhétorique. Elle avait juste espéré que le psyker ne cherche pas à utiliser ses pouvoirs en sa présence.
    -Par radiesthésie. Il va me falloir un objet lui appartenant. Vous auriez ça ?
    -Ici non, mais au Reliquaire, je suis certaine que oui.
    Lexxi vint les rejoindre dans le salon.
    -J’ai eu Elisha. Négatif de leur côté. Aucune trace de Rico pour l’instant.
    Poppy hocha la tête et lui lança les clés de la Hive Runner.
    -Prend le volant, on repasse au Reliquaire.
    Elle désigna Felton.
    -Attend-nous ici. Garde un œil sur les filles et reste en liaison vox avec nous et Tenebrae. Si on a du nouveau, on passe te récupérer. Si jamais Everdynn se réveille et bien… Tu as encore les traits de Bosinski, je te laisse improviser.
    -Sinclar doit m’appeler de toute façon.
    -Parfait. On va finir par les faire tomber ces enfoirés. Le Trône de Terra m’en est témoin.

    Trente minutes plus tard, après être repassés au Reliquaire et avoir récupéré une ancienne tenue de Rico, ils laissèrent Viggo procéder. Après un rituel psykana de cinq minutes, il leur confirma l’avoir peut-être localisé.
    -Il est encore en ville, dans le quartier est. Il se dirige vers Fort Glory. Dans la direction de Lynnbarra.
    -Et merde, donc pile dans la direction de la planque d’Hécate, ajouta Poppy.
    Elle activa son microvox, cherchant à joindre Felton tout en indiquant à l’équipe de vite remonter en voiture.
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  • Illuminati
    Illuminati

    le 13/06/2023 à 23:17 Citer ce message

    Quelques minutes plus tard, ils finirent par retrouver Felton.
    -On va se séparer et faire le tour du quartier. S’il se pointe, on va finir par le trouver.
    Lek resta auprès du véhicule, tandis qu’ils se séparaient en deux groupes à la recherche de Rico. Après deux heures de recherche et de surveillance, ils finirent par le repérer. Il portait d’autres vêtements et venait apparemment de sortir par la porte de derrière de l’immeuble où ils avaient leur planque.
    -Et merde, comment on a fait pour ne pas le voir ? Lâcha Lexxi.
    Rico ne semblait pas les avoir remarqués. Il portait deux gros sacs qu’il chargea sur une moto, une Black Shadow garée dans la rue d’en face, à environ quatre-vingts mètres de leur position.
    -On l’intercepte ? Demanda Lexxi.
    -Négatif, répondit Poppy, de sa voix calme. On le suit sans se faire repérer, c’est tout. Je vous rappelle qu’on doit surtout mettre la main sur les Milagria s’ils se manifestent. Rico n’est pas la priorité.
    Felton voxa Lek, tout en traversant la rue en petite foulée.
    -On te rejoint tout de suite, on a Rico qui vient juste de sortir de la planque. Je prends le volant.
    Ils montèrent à bord de la Hive Runner et Felton manoeuvra pour contourner le pâté de maisons. Il s’engagea dans une des artères de Fort Glory, menant vers la sortie de la ville. Le quartier était animé et les rues sensiblement encombrées de marchands, de charrettes emplies de denrées, de vendeurs en tout genre et de citoyens qui allaient et venaient dans ce tintamarre bruyant et animé.
    Rico parvenait à se faufiler tranquillement parmi les rues encombrées à l’aide de sa moto tandis qu’à une soixantaine de mètres de là, la Hive Runner peinait à fendre la foule qui encombrait les rues. Au bout de quelques minutes, ils débouchèrent sur un axe principal plus dégagé. Rico était plus loin, à moins de cent mètres de là. Ce fut Viggo qui pressentit ce qui allait se produire, quelques instants à l’avance. Un camion bâché déboula d’une rue perpendiculaire et percuta la moto qui vola dans les airs avec Rico. Le bruit du choc évoqua une caisse emplie de ferraille qui l’on aurait laissé tomber lourdement au sol. Les passants, pris de stupeur, se mirent à crier. Felton freina aussitôt mais sans stopper pour autant. A ses côtés, ses équipiers sortirent leurs armes, se doutant de la suite de la suite des évènements. Comme ils s’y attendaient, Lek et Felton reconnurent Ezekiel et Lazarius, deux des frères Milagria qui descendaient tranquillement du camion, les armes à la main.
    -Merde, c’est bien eux ! Arrête-toi là, lâcha Lek qui ouvrait déjà la portière. On va les intercepter.
    -On se déploie, approche prudente ! Je le rappelle : priorité sur les Milagria. Rico est secondaire, ajouta Poppy qui descendait, elle aussi. Felton resta au volant et Viggo se concentra, tandis que Lek et Lexxi se déployèrent, fendant la foule. Poppy se fit plus discrète mais avançait malgré tout dans la même direction.
    Rico était à terre et ne bougeait plus. Les deux frères pointèrent leurs armes tout en marchant et firent feu en direction de Rico. Le premier tir, issu d’une arme longue munie d’une lame, explosa une des roues de la moto qui était à terre, dans une gerbe de métal chauffé à blanc. Le second tir, venant d’une étrange arme de poing, traversa un des badauds qui s’était approché un peu trop près. Le tir le perfora d’un projectile enflammé, le tuant sur le coup. Les témoins se mirent à hurler. Poppy profita de la confusion pour pointer son Carnodon et ouvrir le feu. La première balle toucha celui à l’arme de poing sur le côté. Il pivota et se prit le second tir. La balle blindée lui traversa la gorge de part en part. Il s’écroula au sol en gargouillant tandis que son propre sang était en train de l’étouffer. Le second se retourna et allait riposter mais Felton venait d’appuyer sur l’accélérateur et projeta la Hive Runner droit sur lui. Il ne la vit que trop tard et ne parvint pas à l’éviter. Le choc frontal fut assez violent pour l’envoyer voler à quelques mètres de là.
    Lek avait pris par une petite ruelle et comptais justement arriver à hauteur du dernier Milagria, celui percuté par la Hive Runner. Il fut le premier sur place, quelques instants plus tard, son Carnodon à la main, mais ne trouva nulle trace de leur cible. Lexxi venait de le rejoindre et se mit, elle aussi à fouiller la place. Au milieu se trouvait une fontaine et sur les côtés, il y avait de nombreux étals de marchands, donc autant d’endroits où se dissimuler, sans compter les ruelles qui partaient sur les côtés. Un peu plus loin, Felton était descendu du véhicule et aidait Viggo à faire dégager la foule de badauds. Il y avait eu un accident et trois corps gisaient au sol. Ils n’avaient pas manqué de remarquer que le Magistratum, une milice ou juste les secours n’allaient pas tarder à pointer leur nez. Viggo avait envoyé leur servo-medic pour prendre en charge Rico qui était toujours inconscient.
    -Il est où ? Me dites pas qu’il s’est volatilisé comme ça ? Lâcha Poppy, à propos du second Milagria. Le premier avait eu son compte en tout cas. Elle s’était approchée de lui et l’avait regardé rendre son dernier souffle en vomissant son propre sang.
    Lexxi l’appela tandis qu’elle venait de les rejoindre. La catachan était accroupie, ayant repérer au sol quelques gouttes de sang, encore frais. Lek cherchait à remonter la trace de l’autre frère mais en vain.
    -Il ne peut pas être loin, sauf si c’est un de ces maudits psykers.
    -Non, Viggo l’aurait ressenti. Le type est juste rapide.
    -Y a un dicton sur Catachan qui dit que si ça saigne, c’est qu’on peut le tuer. Je crois qu’on va avoir besoin de toi et de ton implant, lui dit-elle.
    Poppy hocha la tête et activa le révélateur implanté dans sa cornée. Son oeil clignota aussitôt d’un bleu électrique, avant de se stabiliser. Son champ de vision se modifia aussitôt dans un maelstrom de couleurs. Autour d’elle, toutes les personnes ou créatures dégageaient une teinte bien distincte. Une empreinte génétique unique que son implant était capable d’enregistrer et de distinguer parmi les autres. Les gouttes de sang au sol brillaient d’un vert translucide dans un environnement fait de teintes de gris et de tâches de couleurs. Elle retrouva la piste sans peine, malgré le fait que les traces de sang étaient plutôt minces. La cible était blessée mais pas tant que ça. Elle demanda à Lexxi de l’accompagner pour la couvrir et entreprit de se faufiler vers les petites ruelles sombres, arme à la main. Elle activa son microvox.
    -Felt ? Toi, Lek et Viggo, dégagez de là avant que les autorités arrivent. On suit le frère avec Lexxi, il s’en est tiré. Prenez la voiture et tâchez de lui couper la route, il devrait déboucher sur la rue des Saints Martyrs.
    -Et Rico, on fait quoi de lui ? Demanda Viggo.
    -On le laisse, on décroche. Je préviendrai Jézabel, elle enverra surement du monde pour le récupérer, mais ce n’est pas notre priorité.
    Elle se concentra et fit quelques signes à Lexxi qui l’accompagnait, lui indiquant de continuer la progression en couverture mutuelle. Pendant ce temps, le reste de l’équipe était remonté à bord de la Hive Runner avec Felton au volant qui tentait de manoeuvrer dans les rues étroites. Ils perdirent du temps à cause de nombreux chariots et vendeurs en tout genre qu’ils devaient faire dégager de leur chemin. Pendant ce temps, Poppy et Lexxi avaient pris de l’avance et prenaient garde en avançant, tandis que Poppy continuait de suivre les traces de sang au sol ou sur les murs. Plusieurs tirs sifflèrent dans sa direction. Elle eut juste le réflexe de se jeter de côté et évita une rafale de mitraille qui éclata l’enduit et les briques du mur situé à côté d’elle. Elle venait d’entrevoir le tireur au coin d’une des ruelles, à une vingtaine de mètres de là. Celui avec son arme longue. Elle se baissa et chargea, tout en sortant sa matraque qu’elle activa d’une pression du pouce. Lexxi avait vu le danger elle aussi et s’élança à sa suite. En quelques enjambées, Poppy fut sur le tireur qui était en train de pointer son arme de nouveau. Elle se jeta sur lui pour le frapper de sa matraque à décharge, pourtant il parvint à brandir son arme qu’il pouvait utiliser comme une sorte de lance. Il bloqua son coup et d’un geste du poignet plutôt habile, la désarma d’un coup, envoyant voler la matraque dans les airs. Il pivota et tenta de l’éventrer mais Poppy eut un mouvement de recul, évitant la lame d’un cheveu. Elle n’eut pas le temps de réagir que Lexxi dévia l’arme d’une main et lui asséna un crochet du droit qui l’assomma net. Sa tête rebondit sur le mur d’à côté puis il glissa jusqu’au sol. Poppy l’enjamba, alla ramasser sa matraque avec un petit rictus mauvais, constatant que son arme était éraflée. La Hive Runner s’arrêta à dix mètres de là dans un crissement de pneus. Le porte arrière s’ouvrit en grand. Les sirènes du Magistratum s’entendaient à quelques rues de là. Poppy sortit se ses menottes et se pencha sur leur captif, lui attachant les mains dans le dos. Puis elle indiqua à Poppy.
    -Aide-moi à la porter, on l’embarque.
    Elles le déposèrent dans le coffre, après l’avoir désarmé et fouillé. Une fois à bord, Lek leur demanda :
    -On va vers où ? La planque d’Hécate ?
    -Non, file au Reliquaire, avec un peu de chance, Jézabel est toujours sur place. Mais surtout, il y aura de quoi l’interroger.
    -C’est parti, annonça Felton qui était au volant.
    -Son autre frère, vous l’avez fouillé avant de partir ? Annonça Poppy.
    -On a récupéré un paquet de billets, l’adresse d’un bar sur le port et aussi ses armes.
    -Une hache modèle Mezoa et un pistolet hrud, compléta Lexxi.
    -L’arme qui a traversé la passant comme un tir de plasma ? Répondit Poppy.
    -C’est bien ça. Mais ces saloperies de xenos emploient une technologie warp inconnue.
    -De la sorcellerie ? Dit-elle avec une grimace de dégout.
    -Non… Je dirais plus comme des armes de phase.
    -Des quoi ?
    -Des armes qui traversent la matière.
    -Trône… Qu’est-ce qu’ils faisaient avec des armes comme ça ? Son frère était armé d’une sorte de bombarde de poing exotique qui tirait je ne sais quoi capable de nous couper en deux. Autre chose ? Pas de trace du troisième frère ? Vous avez fouillé le camion ?
    -On l’a fait, ajouta Felton. Aucune trace du troisième frère et le camion avait certainement été volé, il n’y avait que des marchandises à bord.
    -Et Rico, c’était quoi ces deux sacs ?
    -Le salaud était repassé à la planque et avait prélevé une partie des armes et de notre équipement, répondit Lexxi. Une chance qu’on ait pu tout récupérer.
    -C’est pas bon ça. A la planque, on a Shidia et Everdynn.
    -Un medic est avec eux, ajouta Lexxi.
    -On y retourne, vite !
    Poppy activa son microvox, elle devait appeler Jézabel de toute urgence.
    Quatre heures plus tard, elle ressortait de la salle d’interrogatoire du Reliquaire. Son débardeur était trempé de sueur et ses poings étaient encore rouges et endoloris, même après les avoir passé sous l’eau. Elle se passa une main dans ses cheveux sombres puis demanda à Felton de lui passer un cigalho. Dans la salle d’interrogatoire, ils pouvaient entendre Lexxi qui continuait à frapper leur prisonnier avec toujours autant de vigueur. Une heure plus tôt, Poppy s’était retenue de ne pas coller un bolt dans la tête de Viggo. Le psyker avait utilisé ses capacités télépathiques pour lire les pensées du captif mais avait bien failli se griller le cerveau dans l’opération, à grands renforts d’arcs électriques et de givre dans toute la pièce. Là, il se remettait de l’état de choc même s’il continuait de pleurer du sang, ce qui était le cadet des soucis de Poppy. L’interrogatoire d’Ezekiel Milagria avait été long et pénible et avait cependant confirmé ce qu’ils suspectaient. Les Milagria détenaient bien Tsali, Ezek et Pixxi sur un bateau, au large du port. Le bateau était entièrement piégé et leur frère, Berekiah s’y trouvait avec des hommes de main. Quant à leurs activités sur Archaea, ils avaient bien été de mèche avec Caleb Cox qui avait compté sur leur appui pour prendre le contrôle du Syndicat de l’ombre. Un échec total pour l’instant. En revanche, leurs activités sur Eshunna impliquaient des trafics d’organes et d’êtres humains, y compris des psykers émergents, ce qui était largement suffisant pour que les Ordos décident de les rayer de la carte sans autre forme de procès.
    -On fait quoi de lui ? Demanda Felton qui s’allumait un cigalho en même temps que celui de Poppy.
    -Une balle dans la tête serait un châtiment bien trop clément. J’y réfléchis encore.
    Un bruit de bottes dans le couloir précéda l’arrivée de Jézabel. Elle était accompagnée de deux commandos Tempestus en armure complète noire et rouge. Elle leur indiqua de disposer. Ils la saluèrent et se retirèrent. Elle portait sa tenue noire intégrale sans autre distinction que quelques crânes argentés et un pistolet bolter customisé, à empreinte biométrique attaché à sa cuisse droite. Mazarin, son servo-crâne l’accompagnait, flottant au-dessus de son épaule, comme toujours.
    -Je reviens juste de Sandbarra, il restait quelques points à régler, leur dit-elle.
    -La ville est enfin sous contrôle ? Lui demanda Poppy.
    -L’Arbites a encore du travail. Je leur ai donné des consignes. Mais le principal est fait. Les laboratoria sont détruits, les stocks d’armes ont été capturé et la population va être placé sous quarantaine, le temps de remettre en place des autorités dignes de ce nom. J’ai personnellement supervisé la pendaison de soixante-quinze criminels en place publique ce matin et mis au bûcher une douzaine de psykers. La foi et l’ordre vont enfin être restaurés à Sandbarra et, le Trône soit loué, cela sonne déjà la
    fin de Grendel Haxt. De votre côté, Sandwall, votre affaire avance ? Everdynn est en lieu sûr ? Lui dit-elle sans ménagement.
    -Elle l’est, Madame.
    -Je vais avoir besoin de vous voir tous les deux à ce sujet, justement, leur dit-elle en les désignant du doigt. Et votre captif, il a parlé ?
    -Il a parlé, Madame. On sait où sont les prisonniers.
    -Ils sont en vie ?
    -Oui, Madame.
    -Alors, vous me les sortez de là. Nous avons peu de temps, lui dit-elle tout en retournant vers son bureau.
    -Et sinon… Pour Rico ?
    Jézabel s’arrêta au détour du couloir et se retourna.
    -Nous n’avions plus besoin de lui. Il n’a donc pas survécu à ses blessures.
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  • Illuminati
    Illuminati

    le 16/06/2023 à 17:39 Citer ce message

    Port Saint, à la capitale
    Tempus estimare 050.021M42–20h10
    73ème jour depuis le début de l’opération.

    Lexxi gara la Hive Runner sur le port. Elle se tourna vers Poppy.
    -Alors, elle vous voulait quoi, Jézabel ?
    -On a abordé la stratégie à mettre en place avec Sinclar, par rapport à Haxt, lui dit-elle. Elle préfère qu’on reste très prudent, il est très probable que Sinclar sache que les ordos sont sur le coup.
    -Il y a du nouveau ?
    -On en parlera plus tard, nous sommes déjà en retard.
    Elle se tourna vers Felton, vérifiant sa tenue. Il avait revêtu les habits, les lunettes et le chapeau d’Ezekiel Milagria, celui qui croupissait dans la salle d’interrogatoire du Reliquaire. Ils avaient profité du fait que les effets du plas agissent encore sur son organisme pour qu’il prenne la forme de son visage. Lek aussi, toujours sous les mêmes effets, en avait profité pour modifier son apparence. Il n’était pas question pour lui de se faire reconnaitre par un des hommes du Syndicat. L’urgence de la situation avait fait qu’ils n’avaient eu que peu de temps pour échafauder ce plan mais force était de constater que leur subterfuge pouvait tenir la route, encore fallait-il que le dernier frère, Berekiah, morde à l’hameçon. Ils descendirent du véhicule et se mirent à la recherche d’un bateau sur le port. Ils n’avaient que l’embarras du choix en réalité. Poppy ne perdit pas de temps, elle alla voir un pécheur et réquisitionna son embarcation, sans délai.
    Une fois à bord, Felton prit les commandes et ils filèrent vers le large. A cinq cents mètres du port, ils finirent par localiser le navire en question grâce à Viggo qui en avait eu la description lors de l’interrogatoire d’Ezekiel Miliagria. Il s’agissait d’un chalutier à vapeur. Ses moteurs étaient à l’arrêt mais sa masse blindée restait imposante, même à bonne distante.
    En chemin, Poppy leur demanda de revoir le plan, par étape.
    -On est bien d’accord, Felton se fait passer pour le frère, il monte à bord de leur navire et demande à voir les prisonniers car il amène avec lui une émissaire de Sinclar. Moi, en l’occurrence. Les autres, vous jouez le rôle de mes gardes ou secrétaire.
    -Et si Berekiah lui demande où est leur autre frère ?
    -Tu lui réponds qu’il est parti voir Sinclar pour négocier ou quelque chose comme ça. De toute façon, on n’y va pas pour prendre le tana avec lui. On y va pour l’éliminer et libérer nos agents.

    Ils approchèrent du bateau en question, un gros chalutier, conçu pour la haute mer et ne purent manquer de noter l’armement qui l’équipait.
    -Je vois des canons harpons, ça d’accord… Mais les canons automatiques de 30 millimètres, juste sous le pont, c’est normal ça pour la pèche ? Lâcha Felton.
    -Dans certaines régions, les bateaux de pèche sont fréquemment armés, répondit Lek.
    -Les poissons sont si dangereux, ici aussi ? S’étonna Lexxi, en faisant allusion à son monde natal.
    -Ils le sont, mais pas à ce point-là. C’est surtout pour les pirates, ajouta Lek. Les eaux au nord sont assez dangereuses.
    -On fait silence, lâcha Poppy, ça va être à Felton de jouer…
    Sur le pont du chalutier, ils pouvaient distinguer des marins qui s’activaient. Puis, en approchant, un homme armé apparu. Il portait un fusil Armageddon tenu de manière bien visible. Felton, sous les traits d’un des Milagria, lui fit un signe.
    -Je monte à bord, envoyez l’échelle de coupée.
    Le garde s’exécuta et laissa descendre une échelle de corde le long du bastingage.
    -C’est qui ces gens qui vont accompagnent ? Lui demanda-t-il.
    -Une émissaire de Sinclar. Ils sont là pour voir mon frère, justement.
    Deux autres hommes d’armes apparurent sur le pont, sortant d’une cabine. Ils congédièrent rapidement les marins qui décampèrent sans demander leur reste. Apparemment le bateau avait été réquisitionné avec l’équipage. Les autres gardes aussi étaient armés. Le premier avait un lance-flammes compact et la fille portait un autre fusil d’assaut, un modèle Agripinaa visiblement.
    -Ils restent sur leur bateau. Un seul d’entre vous monte à bord, lâcha l’homme de main.
    Felton désigna Poppy.
    -C’est l’envoyée de Sinclar, je vais avoir besoin d’elle, c’est elle qui m’accompagne.
    Le garde accepta finalement. Felton profita du fait que Poppy monte à bord pour faire un geste vers un des hommes de main.
    -Allez me chercher mon frère, j’ai à lui parler.
    Le garde hocha la tête et descendit l’escalier menant aux ponts inférieurs.
    Ils attendirent pendant plusieurs minutes sur le pont soumis à une légère houle. Felton parvenait à peine à masquer son mal-être. Se retrouver ainsi en pleine mer commençait à lui donner le tournis. La terre-ferme lui semblait être à des kilomètres de là, ce qui était le cas et il n’osait même pas penser à ce qui se trouvait sous leurs pieds. Lek et Viggo n’étaient pas mieux, comme n’importe quel ruchard. Poppy et Lexxi avaient l’air de mieux le vivre la tension qui pesait à chaque minute. Berekiah Milagria finit par monter sur le pont d’un pas pesant, reconnaissable à son long manteau, son large chapeau et son air de croque-mort, comme c’était le cas pour ses autres frères. Il jeta un coup d’œil rapide à Felton, sans reconnaitre le subterfuge, persuadé de voir son frère.
    -C’est quoi cette histoire d’émissaire ? Ou est Lazarius ? Qui t’a demandé de nous amener…
    Felton ne lui laissa pas le temps de poser plus de questions. Tout se passa alors très vite, tel qu’ils l’avaient planifié. Viggo, resté sur la petite embarcation relâcha une rafale de force sur deux des gardes. Malheureusement, manquant de puissance et de précision, il n’en toucha qu’un légèrement qui bascula à la renverse sur le pont. Ses décharges d’énergie ne passèrent pas inaperçues et les hommes de main se mirent à crier. Lek venait de dégainer ses armes mais mal ajusté, manqua son effet de surprise. Lexxi se rua sur l’échelle et chercha à monter sur le pont, tandis que Poppy sortit ses deux Carnodons et ouvrit le feu sans sommation, à bout portant sur Berekiah Milagria. Les balles perforèrent son armure, ce qui le recula, lui faisant pousser un petit grognement sans pour autant le tuer. Felton avait dégainé son pistolet bolter, pointa son arme et l’acheva d’un bolt qui explosa en plein torse, ce qui le propulsa par-dessus le bastingage et l’envoya à la mer. Les hommes de mains avaient ouvert le feu et Poppy se prit une balle ce qui la fit pivoter de côté, tandis que Lek évita de justesse un coup de lance-flammes. Ce fut Viggo qui sans le vouloir, déclencha un phénomène warp qui bloqua tous les mécanismes. Leurs armes s’enraillèrent toutes en même temps. Poppy et Felton en profitèrent pour demander aux hommes de main de poser les armes.
    -On n’a rien contre vous, c’était lui notre cible. On vous laisse partir.
    -Quoi ? Bordel de Trône, va falloir nous expliquer…
    Les types avaient l’air mal à l’aise ou décontenancés. Ne sachant plus quoi faire, d’autant plus que leurs armes de répondaient plus malgré leurs manipulations nerveuses et saccadées. Mais comme les Milagria étaient leurs employeurs et que l’un d’eux se tenaient devant eux, ils restèrent prudents, sans se montrer hostiles. D’autres hommes de main, attirés par les tirs montèrent à leur tour sur le pont. Ils étaient huit ou neuf en tout, aussi Poppy et l’équipe comprirent rapidement que la situation pouvait très vite tourner à leur désavantage.
    -Il n’y a rien d’autre à expliquer, dit Felton en portant de la voix. Mon frère allait nous trahir, je reprends la main. Ce n‘était pas contre vous mais nous devions agir vite pour le neutraliser. Fin de l’histoire, on retourne au port et je vous libère de votre serment. Amenez-moi juste aux prisonniers avant, leur annonça Felton. Il se pencha juste par-dessus le bastingage et s’assura que Berekiah ait bien eu son compte. Un chapeau flottait juste au-dessus d’une marre de sang qui se diluait dans l’eau noire et qui avait attiré quelques prédateurs. Même s’il avait survécu à son bolt, la faune marine carnivore s’était chargée du vieux Milagria qui était parti nourrir la vermine dont il faisait partie. Quelques bulles remontèrent à la surface. Il reporta son attention vers le pont.
    Les gardes se concertèrent pendant quelques secondes puis l’un d’eux hocha la tête et lui demanda de le suivre. Lui et ses hommes réalisèrent qu’il n’y avait pas d’hostilité mais pour autant, ils l’avaient encore mauvaise de s’être fait tirer dessus sans la moindre raison. Un seul d’entre eux avait été blessé légèrement, ce qui s’équilibrait avec Poppy, blessée aussi, finalement.
    Felton descendit en suivant l’homme de main vers le pont inférieur. Lek l’accompagna. Le garde sortit un trousseau de clés puis ouvrit une cabine au niveau du pont inférieur, leur dévoilant Ezek ligoté, bâillonné et sous inhibiteur. Dans la cabine d’à-côté, se trouvaient Tsali et Pixxi. Ligotées et bâillonnées, elles aussi. Tsali avait l’air terrorisée, d’autant plus incapable de reconnaitre Lek ou Felton. Lek repéra un paquet de câbles électriques qui partait des captifs et l’indiqua à Felton alors que ce dernier allait libérer Tsali. Il se tourna vers l’homme de main, réalisant qu’ils ne pouvaient être connectés qu’aux explosifs dont leur avait parlé le frère au Reliquaire.
    -Vous pouvez désactiver ça ?
    Le type le regarda, l’air interloqué.
    -Désactiver… Quoi ?
    -Ces câbles, là. Il va falloir les désactiver.
    Le type eut un petit rictus en coin et leva en mains en signe de négation.
    -C’est votre frère qui a installé ça. Ah, non, moi j’y touche pas.
    Lek en profita pour voxer Lexxi discrètement et lui demander de les rejoindre. La catachan était, entre autres, une experte en explosifs. Elle vint les rejoindre au bout de quelques instants.
    Felton remercia le garde et lui demanda de remonter. Ce qu’il fit. Une fois seuls, il se tourna vers Lexxi.
    -Dis-moi que tu peux y arriver. S’il te plait.
    Elle se pencha sur Tsali qui la reconnut et eut soudain un air d’incompréhension. Lexxi lui fit un petit clin d’œil.
    -On est là pour vous sortir de là, on t’expliquera. Ne bouge surtout pas.
    Elle inspecta le paquet de câbles et vit qu’il était relié à quelque chose dans la pièce d’à côté. Avec une infinie prudence, elle chercha les connexions sur Tsali et finit par trouver le gilet qu’elle portait sous sa veste, juste dans son dos. Il devait y avoir trois kilos de pains de fycélène, tous reliés à un système volumétrique redondé en quatre point. Malgré les gouttes de sueur qui coulait sur ses tempes et dans son dos, elle ne put s’empêcher de penser qu’elle était face à un travail d’orfèvre. Couper l’alimentation n’allait pas être simple car cela allait demander quatre mains et elle était la seule à pouvoir s’en charger. Se tromper de câble et tout allait sauter. Ne pas être synchrone et tout allait sauter. De plus, le système de mise à feu était doublé par une alimentation auxiliaire installée dans une autre pièce, à côté. C’est là qu’elle trouva le minuteur sous le gilet de Tsali.
    Un simple chrono dont l’affichage digital défilait. Il venait de passer sous la barre des trois minutes et le décompte des secondes continuait inexorablement. Quelqu’un avait dû fatalement l’activer à distance. Sans aucun doute Berekiah au moment de mourir.
    Elle fit un petit sourire à Tsali.
    -Ça va aller, lui dit-elle. Ne bouge surtout pas.
    Elle vérifia sur Pixxi et constata le même dispositif. Il devait en être de même pour Ezek dans la pièce d’à-côté mais elle n’avait pas le temps d’aller vérifier. Elle se tourna vers Lek et Felton.
    -Je vous conseille quand même de remonter, ce serait le moment. On ne sait jamais.
    Felton l’interrogea du regard. Il lui fit non de la tête. Lek était du même avis. Si le bateau devait sauter, qu’ils soient ici ou sur le pont juste au-dessus n’allait pas changer grand-chose. Personne ne savait nager de toute façon. Il admirait tout simplement le fait que la Catachan ne cherche pas à dégager d’ici au plus vite. Elle avait lié son destin au leur et c’était l’action la plus héroïque qu’il lui soit donné d’être témoin. Cette fille était soit folle et ils allaient tous finir en petits bouts de viandes avec Berekiah à nourrir les poissons, soit il allait lui devoir beaucoup plus qu’un simple merci. Lui, l’équipe et même Jézabel.

    Lexxi se releva et se dirigea vers la pièce d’à-côté tout en voxant son servo-crâne utilitaire. Lui et le servo-medic étaient restés avec Viggo et Lek sur l’embarcation avec laquelle ils étaient arrivés.
    -Haxtès, rapplique, je vais avoir besoin de toi maintenant, ça urge.
    Elle dégaina sa lame et la passa dans l’embrasure de la porte, vérifiant qu’elle n’était pas piégée elle aussi. Elle n’allait jamais avoir le temps de tout désamorcer et allait devoir faire un choix rapide, ici et maintenant. Trois gilets piégés, une alimentation derrière la porte, soit quatre systèmes à désamorcer. Elle n’allait pouvoir en désamorcer que deux dans le délai imparti. Elle prit sa décision. Haxtès venait de la rejoindre en bipant. Elle lui fit signe et retourna vers Tsali. Elle se pencha sur elle, sortant deux petites pinces coupantes de sa veste.
    -Viens m’aider. A mon signal, tu coupes les deux câbles de retour. Les rouges. En même temps que moi, compris ?
    Le servo-crâne utilitaire déploya ses petites pinces rétractables et se mit à émettre plusieurs pépiements saccadés.
    -Oui, je sais ce qu’il reste comme temps, tas de boulons, figure-toi…, dit-elle entre ses dents. On va éviter d’y penser, justement. Toi t’es déjà mort, imbécile, pas moi. A trois, on y va.
    Lexxi retint sa respiration, eut une dernière pensée vers l’Empereur-Dieu, puis elle et le crâne coupèrent les câbles.
    Le chrono s’arrêta aussitôt. Bloqué sur quinze secondes. Elle aida Tsali à se relever malgré ses jambes qui tremblaient. Felton attrapa Tsali en état de choc et la serra dans ses bras comme si c’étaient leurs derniers instants à vivre. Ce qui était le cas, d’un certain point de vue. Rien n’était réglé.
    Quinze secondes. Pas le temps de désamorcer les deux autres gilets.
    Lexxi se rua vers la porte et l’ouvrit d’un coup sec et se fit une frayeur. Le bateau venait de tanguer et la porte s’ouvrit un peu trop brutalement. Elle crut qu’ils allaient tous sauter mais se ravisa en soufflant. La pièce en question était la cambuse. Les satanés câbles continuaient de courir au sol et menaient vers une autre porte, au fond.
    Haxtès projeta un affichage holo depuis son oculus. Le chrono affichait dix secondes. Il poussa une série de bips frénétique.
    -Tu crois que je ne sais pas ? Lâcha Lexxi qui se dit que de toute façon, elle n’allait pas avoir le temps de faire dans la finesse. Elle ouvrit la seconde porte d’un coup d’épaule et se retrouva soudain dans une salle plongée dans la pénombre mais emplie de caisses d’explosifs du Munitorum et de barils dont la rune de danger indiquait qu’ils contenaient du transsuranium. Les câbles arrivaient là, à un boitier d’alimentation tout simple. Si elle attendait un peu, dans moins de dix secondes, ses atomes seraient éparpillés sur un bon kilomètre.
    Elle souffla et ne se préoccupa pas de la sueur qui coulait sur son visage. Elle resta concentrée. Les fils bleus. Elle devait couper les fils bleus. Maintenant.
    -Tu prends les fils jaunes, dit-elle à Haxtès, tu coupes les jaunes, en même temps que moi.
    Ils coupèrent les fils.
    Le chrono se bloqua à trois secondes. Elle attendit encore cinq secondes avant de respirer. Elle faillit pleurer ou rire, elle ne savait plus. Elle ressortit en refermant la porte, les amins tremblantes. Lek et Felton étaient livides.
    -On peut les sortir de là, leur dit-elle en désignant les prisonniers.
    Pixxi se releva et se débarrassa du gilet explosif. Les rétines de ses implants oculaires cristallins se fixèrent sur Lexxi. Son visage synthétique, impossible à déchiffrer.
    -J’avais identifié le système de mise à feu et calculé nos chances de survie, lui dit la technoprêtresse de sa voix métallique. La logique de la Machine prédisait cependant un fort taux d’échec de ta part.
    -Venant de toi, Pixxi, je vais prendre cela comme un compliment.
    -J’en prends note. Ordax-Kappa, mon créateur te sera infiniment reconnaissant.
    -Sans Haxtès, je n’y serais pas parvenu.
    -C’est une certitude. Ce sevo-crâne est de ma conception. Je veillerai à l’améliorer pour le récompenser.

    De retour sur le pont, Lexxi prit une grande inspiration. Le servo-medic était en train de traiter la blessure de Poppy assise un peu plus loin sur une caisse. Elle vint la trouver alors que les captifs retrouvaient le reste de l’équipe.
    -J’ai cru comprendre que tu t’étais distinguée, en bas. Lâcha Poppy en grimaçant alors que le crâne cautérisait sa plaie au laser. On te doit une fière chandelle, j’ai l’impression.
    -Tu diras ça à Jézabel…
    -On peut retourner au port ? La bombe est neutralisée ?
    -Elle l’est, mais il serait plus prudent de ne pas revenir avec le bateau. Simple précaution.
    -Pourquoi cela ?
    -On a de quoi atomiser Port Saint et une partie de la capitale, mais sinon, ça devrait aller.
    Poppy la dévisagea d’un air étonné.
    -Apporte-moi la radio, je vais appeler Jézabel. Elle va devoir nous sortir de là.
    -Et les hommes de main, répondit Lexxi à voix basse.
    -Elle saura quoi faire, je ne m’inquiète pas.
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 23/06/2023 à 18:52 Citer ce message

    Le Reliquaire
    Tempus estimare 052.021M42–07h35
    74ème jour depuis le début de l’opération.


    Les otages avaient tous été ramenés sains et saufs au Reliquaire où ils avaient été pris en charge. L’équipe Obscurus prit un peu de repos et dès le matin commença à charger son matériel et de l’armement dans la Valkyrie que Jézabel mit à leur disposition. La veille, elle avait convoqué Felton et Poppy et leur avait fait part d’une information cruciale.
    -Haxt sera de passage demain soir aux abattoirs de Red Field, à l’est de Newburg, leur dit-elle. La région est réputée pour ses élevages de grox et selon les informations, le Syndicat se sert de l’Abattoir pour y passer de la marchandise illégale pour l’exportation hors monde. Principalement des drogues illicites. Haxt y sera pour une visite importante. Il ne sera pas seul mais il y sera incognito. Il sait que son organisation est ciblée et qu’une partie est déjà perdue. Il aura une forte protection rapprochée. Il va falloir l’éliminer sur place, lui et tous les témoins qui vous verraient sur place. Donc évitez de vous faire repérer. Son corps devra être visible et facilement retrouvé, c’est important que la Syndicat reçoive ce message. Inutile de tenter de chercher à le faire parler, il faut juste l’éliminer, Haxt est de l’histoire passée pour nous. C’est Everdynn qu’il faudra interroger, voire Shom-Valaï. Haxt, on a besoin de l’éliminer déjà pour purger une belle saloperie mais aussi pour suivre le plan proposé par Sinclar.
    Elle marqua une pause avant de poursuivre.
    -Parmi sa garde rapprochée se trouve un informateur. C’est elle qui vous donnera les derniers détails une fois sur place. Débrouillez-vous pour la contacter. Felton, Lexxi ou Lek l’ont peut-être déjà croisé à la Basilique. Il s’agit de la vostroyenne, une des combattantes, une ex-officier de l’Astra Militarum. Son nom de code est Razvod. Sa mission était justement d’infiltrer le cercle de Haxt et de recueillir le maximum d’informations sur ses contacts et sur les lieux à cibler, ce que nous avons désormais, grâce à elle. La mission de Razvod touche à sa fin, mais l’exposer plus la condamnerait, ce que je ne souhaite pas.
    Si tout se déroule comme prévu, le lendemain, une fois Haxt éliminé, deux d’entre vous prendront l’apparence de Bosinski et Everdynn et se rendront au conseil qui sera provoqué suite à la mort de Haxt. On a encore besoin de savoir où cela aura lieu mais Razvod devrait normalement obtenir les informations.

    Quelques heures plus tard, ils faisaient route vers les terres des Domaines d’Aberratia à l’ouest. La ville de Red Field se situait à sept cent cinquante kilomètres de la capitale, à travers des terres agricoles et des agrifermes à pertes de vue. Ils demandèrent au pilote de les déposer à deux kilomètres de la ville et continuèrent à pied jusqu’à trouver une route fréquentée par des camions de transport. Lexxi parvint à en voler un, stationné sur la chaussée alors que son conducteur était occupé un peu plus loin. Ils chargèrent leur matériel à bord, s’y installèrent et roulèrent jusqu’au quartier en question. Les abattoirs se situaient en périphérie de la ville à deux kilomètres de là, dans une zone regroupant plusieurs petites manufactoria, non loin d’un port fluvial et d’un parc où une statue du Primarque était en chantier. Ils garèrent le camion à quelques centaines de mètres de là et firent un repérage du quartier et des bâtiments. Au bout de quinze minutes, ils identifièrent le bâtiment en question et notèrent qu’il portait l’enseigne Kanoptech, lui aussi, ce qui les conforta dans l’idée que l’abattoir faisait bien partie du réseau appartenant au Syndicat de l’ombre.
    Ils prirent position, en face, en hauteur au niveau du parc, dans un ensemble de fourrés, sous des arbres, ce qui les dissimulait des regards. De là, ils avaient une vue sur l’ensemble de l’Abattoir situé à moins de deux cents mètres et pouvaient déjà sentir les effluves qui en émanaient, un mélange écœurant de sang, de bouse et de carcasses de viande. Ils identifièrent un ensemble de bâtiments, un vaste enclos à grox mais aussi des camions en train d’être chargés, des véhicules et des hommes armés.
    Alors que Lek déballait une partie de leurs armes et que Lexxi paramétrait la mouche-pix, les autres restaient en observation.
    -Tu connais les lieux ? Demanda Viggo à Lek.
    -Non. Jamais venu ici.
    -Depuis quand un abattoir a-t-il besoin de types aussi lourdement armés ? Demanda Lexxi. Je vois des fusils d’assaut à haute capacité, une ou deux mitrailleuses et même ce qui ressemble à un fusil à plasma.
    -C’est un bâtiment du Syndicat de l’ombre, donc peut-être rien d’étonnant, ajouta Lek.
    -On a combien d’accès possible, si on veut entrer ? Demanda Poppy.
    -J’en compte trois… Non, quatre.
    -Possibilité d’entrer sans se faire repérer ?
    -Négatif, répondit Lek. Trop de gardes sur zone. De nuit, je pense que je pourrais y arriver, mais là...
    -On ne va pas attendre autant. On peut faire une reconnaissance des lieux ? Demanda Poppy.
    -Je prépare la mouche-pix, lâcha Lexxi.
    -Parfait. On va l’envoyer faire une reconnaissance des bâtiments, je veux savoir ce qui se trouve à l’intérieur. Si Haxt est là ou qui que ce soit, on doit s’en assurer.
    -L’information donnée par Jézabel veut qu’il ne sera là que dans vingt-quatre heures normalement.
    -Normalement. Mais je ne veux aucune surprise. Pour l’instant, on ne sait encore rien de cet abattoir et déjà, on a une petite troupe qui le garde.
    Lek lui passa le fusil de précision, le modèle Absolution. Poppy y engagea un chargeur plein de balles à têtes blindées. Elle calla son arme, vérifia le levier d’armement et commença à régler les molettes de la lunette aux affichages télémétriques. De son côté, Lek avait sorti l’arquebuse transuranique de sa housse et commençait aussi à s’installer. L’arme lourde était capable de transpercer les murs s’il le fallait mais encore fallait-il connaitre la position de sa cible avec précision.
    Lexxi suivait l’avancée du petit drone vidéo qui était déjà à l’intérieur de l’abattoir. Elle pouvait afficher le visuel sur sa tablette de données. Pour l’instant, elle ne voyait rien d’anormal. Des grox étaient conduits vers une chambre d’abattage où ils étaient tués, vidés, accrochés et convoyés vers une autre salle où des servitors équarisseurs se chargeaient de dépecer les carcasses en vue de les conditionner sous différentes formes. Des ailes du bâtiment principal donnaient vers des annexes pour le personnel. Dans un bureau avec cogitateur, se trouvait une sorte d’adepte ou peut-être un technoprêtre. Plus loin, un autre bâtiment leur donna plus de fil à retordre mais avec un peu de persévérance, ils finirent par y infiltrer le vidéo-drone qui leur transmis l’image de plusieurs personnes. Ce fut Lek qui l’interrompit.
    -Le type, là… Ce ne serait pas Haxt ?
    Poppy se pencha sur la tablette tout en s’allumant un cigalho.
    -Tu es sûr de toi ? Il n’est pas censé être présent aujourd’hui, non ? Lui dit Felton.
    -Tu es le seul à connaitre son visage, tu es bien certain de pouvoir l’identifier ? Ajouta Poppy.
    -Il a changé d’apparence, mais je reconnais son visage… Oui, je pense que c’est lui.
    -On dirait qu’un psyker l’accompagne. Viggo, tu peux nous confirmer ça ?
    -Je suis en train de sonder la zone, je ne repère aucune utilisation de pouvoirs psychiques.
    -Reste vigilant et informe-nous si cela change. Felt, tu couvres nos arrières, lui dit-elle tout en lui confiant son cigalho.
    -La fille… La vostroyenne, on peut la contacter ? Elle doit être là aussi, non ?
    -Reviens en arrière, dans l’arrière-cour, là… ordonna Lek à Lexxi.
    Elle redirigea la mouche-pix à l’endroit mentionné.
    -Cette femme là… C’est elle.
    -Tu es sûr de toi ? Lui demanda Poppy.
    -Je pense que oui. On doit pouvoir la contacter via le vox crypté.
    Poppy chercha la fréquence puis activa le signal avant de se remettre en position de tir.
    -Razvod, ici Obscurus, vous me recevez ?
    Le vox crachota pendant quelques instants puis une voix féminine lui parvint.
    -Ici Razvod, je vous reçois Obscurus. Quelle est votre position ?
    -On a un visuel sur la zone. La cible est bien sur site ?
    -Affirmatif Obscurus.
    -Vous confirmez ? Le timing n’est pourtant pas le bon.
    -Confirmé. La cible a modifié ses plans à la dernière minute, elle se sait surveillée. Impossible de vous contacter à temps. Etes-vous en mesure d’intervenir dès à présent ?
    Poppy vérifia la télémétrie affichée dans la lunette de son fusil.
    -Affirmatif. Sommes en place… Cent-quatre-vingts trois mètres, sud-est de votre position. Visuel sur la porte est mais pas sur la cible. J’ai besoin d’une identification et d’un visuel. Vous pouvez confirmer ?
    -Restez en attente, Obscurus. Je vois pour vous débloquer la situation. La cible a les cheveux clairs et a une veste blanche. Attention, elle porte un champ énergétique.
    -Veste blanche, cheveux clairs, bien compris. Quel genre de champ ?
    Quelques secondes passèrent, avec le bruit du grésillement dans le vox.
    -Champ de conversion.
    -Bien pris.
    Poppy resta en position de tir et ne bougea pas. Lek et Lexxi avaient pris position eux aussi, un peu plus loin avec le fusil laser de précision et avec l’arquebuse transuranique. Par microvox, elle passa la consigne à ses équipiers. A cette distance, avec un tir de triangulation, ils avaient peu de chance de manquer Haxt.
    -Une bouteille d’amasec pour celui qui fume Grendel Haxt ? Lâcha Lexxi avec un petit sourire carnassier.
    -Pari tenu. Prépare les glaçons ma grande, répondit Lek.
    -Tenu, ajouta Poppy après quelques secondes.
    Le vox grésilla dans l’oreillette de Poppy, suivit de trois clics espacés.
    -Parés à faire feu, lâcha Poppy à ses équipiers. Contact cible dans quelques secondes.
    Dans leur viseur, la porte communiquant vers une des cours qui donnaient vers un camion de chargement s’ouvrit. Un homme chauve corpulent en sortit, portant une veste rouge. Le second à sortir portait une veste blanche et avait les cheveux clairs. Poppy le prit dans sa ligne de mire, ajusta sa visée, vingt centimètres sous son menton. Elle retint sa respiration et tira pile entre deux scintillements du bouclier. Le champ énergétique ne parvint pas à stopper le projectile à haute vélocité. Il percuta le plastron, s’enfonça dans son torse, éclatant son cœur, l’aorte et emportant une des vertèbres en ressortant au niveau du dos. Grendel Haxt était mort sur le coup, sans même le réaliser et avant d’avoir pu toucher le sol tout en continuant de se vider de son sang causé par une blessure triplement mortelle. Ses gardes et hommes de main réagirent pourtant au quart de tour, bien que trop tard. L’alerte fut donnée, une alarme retentit et des hommes se mirent à courir.
    Poppy s’était relevé et avait remis son fusil dans la housse posée à côté d’elle. Elle n’avait pas besoin de chercher une confirmation. Elle avait fait ça toute sa putain de vie de mortiurge. Haxt ne se relèverait pas.
    -On remballe. Dans trente secondes, ils auront compris d’où est venu le tir et dans trente autres secondes, ils seront sur place.
    Lexxi et Lek se tournèrent vers elle, incrédules.
    -Tu l’as tué ? D’un seul tir ?
    -Juste comme ça ?
    Poppy se dirigea vers Felton et récupéra son cigalho qu’il avait toujours au coin des lèvres. Elle tira une bouffée avant d’activer son microvox tout en le fixant de ses yeux délavés.
    -Razvod, d’Obscurus. Confirmez?
    -Kill confirmé, Obscurus. Joli tir. Terminé.
    -L’Empereur protège et j’exécute. Terminé.
    Elle coupa le microvox et ramassa ses affaires.
    -On bouge. Quelqu’un a parlé d’amasec tout à l’heure ?
    Vita locus Mors ludus
  • Illuminati
    Illuminati

    le 07/07/2023 à 21:14 Citer ce message

    Le lendemain
    Tempus estimare 055.021M42–18h52
    75ème jour depuis le début de l’opération.

    Le lieu se situait sur la côte, à une centaine de kilomètres au sud de Banner Cove et à presque deux cents kilomètres au nord de Sandbarra. La région était sauvage, composée principalement de landes balayées par les vents, perchée sur une côte déchirée par une mer déchainée en contrebas.
    Jézabel avait fait réquisitionner une navette civile pour la cellule Obscurus. Selon le plan établi, Felton avait pris l’apparence de Wosley Bosinski, sous les effets du plas, il avait ainsi adopté son visage et revêtu un costume et des lunettes afin de lui ressembler le plus possible. Poppy en avait fait de même pour prendre l’apparence de Gloria Everdynn. Une robe noire sobre et un voile en dentelle complétaient sa tenue de veuve. Lek et Lexxi allaient jouer de simples gardes du corps et Viggo celui d’un factotum les accompagnant.
    La navette les déposa à une centaine de mètres du manoir, sur un vaste gazon impeccable. Des hommes armés gardaient le périmètre, visiblement nerveux. Le groupe se dirigea vers la villa, Lek ouvrit la marche. Il tombait une petite pluie. Les gardes reconnurent Bosinski et Everdynn et l’un d’eux alla ouvrir la porte d’entrée, leur indiquant le chemin. La demeure était vaste, composée de nombreuses pièces, de longs couloirs, le tout meublé avec un certain style. D’autres gardes étaient en faction à chaque couloir. Ils furent conduits vers une porte où un des hommes de main les arrêta.
    -Seuls Madame Everdynn et Monsieur Bosinski sont admit dans cette salle.
    Il désigna les trois autres qui les accompagnaient.
    -Vous devez attendre ici.
    Lek protesta.
    -Je tiens à m’assurer que tout est en ordre pour…
    -Vous restez ici, ce sont les consignes, le coupa le garde.
    -Consignes de qui ? S’enquit Felton.
    -Consignes du conseil.
    Felton se tourna vers Lek.
    -Ça ira. Attendez ici. Puis il reporta son attention vers Poppy.
    -Madame. Après vous…
    Le garde ouvrit la porte et les convia à entrer. Ce qu’ils firent. Une fois à l’intérieur, il referma la porte derrière eux. Par mesure de précaution, Felton et Poppy avaient activé discrètement un microvox sur eux, afin que Lek et les autres entendent toute leur conversation. Ils se retrouvèrent dans une vaste salle où s’était réuni le conseil autour d’une longue table entourée de hauts fauteuils. Ils étaient tous présents. Les derniers patrons du Syndicat de l’ombre ainsi que leurs plus récents associés.
    La veille, Sinclar avait rencontré Felton et lui avait annoncé qu’elle ne serait pas présente car sa venue serait même perçue comme une provocation par le conseil. Selon elle, Felton, sous les traits de Bosinski serait en mesure de reprendre la main, surtout s’il avait dans sa manche, l’appui de Gloria Everdynn. D’autres membres devaient normalement être acquis aussi à Sinclar, tels que Shom-Valaï, Albrecht Talinn, le chartiste ou encore Lyndamie DeStyr, la libre marchande. Ces deux derniers avaient été approché récemment pour reprendre la main sur l’activité commerciale mais Sinclar était parvenue, selon ses dires, à se les mettre dans la poche.
    En revanche, Felton et Poppy allaient devoir se méfier des autres et notamment de Vassil Murdock, le numéro trois de l’organisation. Murdock était parvenu à passer habilement sous les auspex ces derniers temps et pourtant c’était lui qui avait la charge de toute l’activité commerciale hors monde. D’autant plus que Murdock avait le soutien de noms plus ou moins connus comme Gad Rasham, le responsable de Kanoptech déjà croisé, ou encore de Quinston Grish, l’esclavagiste qui laissait encore un souvenir impérissable à Poppy. Un autre chartiste, du nom de Shem Albayawah, complice de Haxt et de Murdock complétait le tableau.
    Dès l’entrée de Poppy, sous les traits de Gloria Everdynn, les protagonistes cessèrent leur conversation houleuse. Elle et Felton eurent l’impression que le débat était très animé et tournait autour de la succession de Grendel Haxt. Elle profita de son entrée pour venir s’assoir, de manière toute théâtrale sur le fauteuil en bout de table, celui qui semblait trôner dans la salle. Une fois assise, tout le monde se tut. Chacun, à tour de rôle, vint lui présenter ses condoléances et ses hommages. Felton resta à ses côtés, observant finement la scène. Une fois chose faite, ils reprirent leur place dans la salle. Felton prit alors la parole.
    -Votre sollicitude touche Mademoiselle Everdynn, je n’en doute pas. Mais… Nous voilà donc réunis pour parler de succession.
    -Ah donc nous y voilà, lâcha Murdock avec un rictus de mépris. Notre cher Bosinski s’attend sans doute à hériter du poste ?
    -Je parle de vote, mais oui et pourquoi pas ?
    -Parce que tu te crois le plus légitime, ici ?
    -Justement, oui. J’ai tenu la boutique et sauvé Gloria pendant que tout s’effondrait et que toi, tu te cachais où justement ? Comme lui, tu faisais le mort ?
    Certains dans la salle, eurent un mouvement de stupeur face à de tels propos.
    -Je ne suis pas certain que Haxt aurait approuvé que tu parles de lui comme ça, surtout devant sa veuve.
    -Eh bien il est mort aujourd’hui, justement.
    Murdock le pointa d’un doigt accusateur.
    -Je ne vais pas te laisser salir sa mémoire comme ça, pas devant Gloria.
    Felton posa alors sa main sur l’épaule de Poppy et les toisa tous.
    -Grendel Haxt nous a tous trahi et c’est moi qui l’ai tué.
    La stupeur céda la place à l’incrédulité puis à l’incompréhension. Bosinski avait toujours été le plus fidèle bras droit de Grendel Haxt. L’entendre dire qu’il venait de l’assassiner était certainement le point qui les choquait le plus. Murdock dégaina un lourd canon de poing et le pointa droit sur Felton.
    -Et tu avoues ton crime devant nous en plus. Je devrais te coller une balle dans la tête, séance tenante, espèce de salopard !
    -Comment ça, un traitre ? Explique-toi ! Lâcha Gad Rasham. Les autres acquiescèrent. La libre marchande et Talinn reculèrent lentement.
    Felton fit quelques pas dans la salle et ouvrit les bras.
    -Tout ce fiasco… Notre organisation est en train de tomber et que nous reste-t-il ? Nos stocks, nos sites de production… Nos manufactoria… Tout est parti en cendres et qu’a fait Haxt pour éviter cela ? Il a préféré se cacher et négocier avec ceux qui nous faisaient tomber, justement.
    -Tu… Tu divagues… On connaissait tous Grendel… Lâcha Grish.
    -Jamais il n’aurait fait cela, on le sait tous ! Cria Murdock, tout en maintenant son arme pointée sur Felton à l’autre bout de la table.
    -Et pourtant, il l’a fait…
    Murdock ouvrit le feu.
    Mais Felton avait anticipé le coup et se jeta de côté, in extremis, évitant la balle de gros calibre qui aurait pu lui emporter un morceau de la tête et qui explosa un buste en plâtre posé sur une console.
    Voyant que Felton venait d’échapper à son tir, il désigna Rasham et Albayawah qui avaient la main sur la crosse de leurs armes.
    -Saisissez-vous de lui !
    Shom-Valaï se plaqua contre un mur, en commençant à suer à grosses gouttes. De leur côté, la libre marchande et Talinn se contentaient d’observer, ne cherchant pas à s’impliquer dans ce règlement de compte.
    Rasham et Albayawah se dirigeaient vers Felton qui venait de se relever, son pistolet bolter à la main. Il pointa son arme et tira à bout portant sur le premier. Le bolt lui déchira la gorge et explosa la tête du second dans une gerbe de sang et d’os. Shom-Valaï situé un peu en retrait, eut le visage maculé de sang, à son plus grand dégout. Les deux corps s’écroulèrent lourdement sur le tapis du salon. Felton avait toujours son arme à la main. Murdock, à l’autre bout de la salle en resta totalement tétanisé, incapable de bouger. Il recula d’un pas en bredouillant. Ce fut Quinston Grish qui avait dégainé son canon de poing, qui le pointa vers Felton à son tour et sans hésiter. Poppy n’avait pas bougé de son fauteuil.
    -A vous de prendre la décision qui s’impose, mon cher Quinston, lui dit-elle.
    Ce dernier cligna des yeux et essuya de sa manche, la sueur qui perlait sur son front. Il garda Felton en joue, bien déterminé à tirer.

    Depuis le couloir, de l’autre côté du mur, les gardes entendirent les détonations et se dirigèrent rapidement vers la porte, tout en s’interrogeant. Lek et Lexxi, s’interposèrent, leur arme à la main pointées sur leur nuque. Les gardes ne bougèrent pas et se laissèrent désarmer.
    -Tout doux, les gars, lâcha Lexxi. Il y a un remaniement au sein du conseil et on a pour consigne de ne surtout pas nous en mêler.
    Les types la dévisagèrent, prêts à contester ses propos. Lek enfonça le canon de son Carnodon un peu plus profondément dans la nuque du plus récalcitrant.
    -Tu veux quand même pas interrompre le nouveau patron alors qu’il est en plein discours d’intronisation ?
    Les gardes levèrent leurs mains en signe d’apaisement, visiblement convaincus.
    Lexxi et Lek baissèrent leurs armes, voyant que les hommes de main avaient compris.

    Quinston Grish resta ainsi, son arme pointée pendant plusieurs secondes qui parurent interminables. Gad Rasham et Shem Albayawah gisaient dans une mare de sang, la moitié de leur tête répandue un peu partout. Murdock était là, saisi d’effroi. Shom-Valaï, Lyndamie DeStyr et Albrecht Talinn ne bougeaient pas, pire, ils venaient de s’éloigner de lui et de Murdock. Ils n’allaient pas intervenir et le laissaient donc seul prendre cette décision lourde de sens. Grish était un fieffé salopard mais il savait résoudre une équation quand elle était aussi simple. Un seul bolt venait de le plonger dans le camp minoritaire.
    Grish pivota et logea une balle dans la tête de Murdock.
    Ce dernier bascula en arrière et s’étala sur le sol. Murdock approcha et lui vida son chargeur dans le corps. Puis il baissa son arme et se tourna vers Bosinski qui ne bougeait pas. Poppy venait de se lever et se dirigea vers lui. Elle observa le corps de Murdock tout en se penchant sur son cadavre. Elle préleva le canon de poing. Un Judgeslayer entièrement chromé et ciselé, avec une crosse en ivoire et or. C’était une arme lourde et puissante dont les munitions instables se fragmentaient à l’impact. Elle se relava et vint se tenir devant Grish.
    -Vous avez fait le bon choix, Quinston, lui dit-elle, tout en pointant son index sur son torse.
    Il se saisit de sa main gantée et l’embrassa tout en fermant les yeux. Poppy prit sur elle pour ne pas lui briser le bras et la mâchoire rien qu’en sentant sa puanteur rance. Elle lui sourit, sous son voile alors qu’elle plaqua le canon de l’arme sous son menton et tira. La stupeur de Grish se mua en un regard exorbité de batracien tandis que la balle lui traversait le crâne de manière ascendante, ressortant par son crâne chauve dans un geyser de fluides rosâtres. Il tituba alors qu’une fumée acre sortait du trou qui remplaçait le sommet de sa tête, puis s’effondra comme un sac.
    Poppy releva son voile de dentelle et cracha au sol, de dégout. Cette ordure avait osé la toucher, la fois de trop. Elle lança un regard vers les trois autres rescapés du conseil. Shom-Valaï, Lyndamie DeStyr et Albrecht Talinn avaient rangé leurs armes. Ils se tournèrent vers Felton et s’inclinèrent légèrement.
    Felton les remercia et rengaina son arme à son tour, se disant que pour le coup, l’Empereur l’avait sacrément protégé. Poppy vint se tenir à ses côtés et posa une main sur son épaule. Il passa son bras sur sa taille, l’approchant de lui, comme un signal clair envoyé à leurs interlocuteurs. Il les toisa d’un air assuré. Contre lui, Poppy les dévisageait d’un regard conquérant.

    -Le Syndicat de l’ombre n’est plus, leur dit-il. Une nouvelle ère va commencer et j’en prends désormais le contrôle, sous la supervision de Sybel de Castel Sinclar. Faites-le savoir à vos équipes. Je vais reconstituer ce qui a été perdu car à compter de cet instant… Vous devenez mes nouveaux lieutenants dans l’organisation.
    Les trois hochèrent la tête.
    -Quels sont vos ordres, Monsieur ? Commença Shom-Valaï.
    -Restez joignables. D’ici là, vous vous mettez au vert, je vous recontacte prochainement. En attendant, vous pouvez disposer.
    Il attendit qu’ils sortent tous puis se décolla de Poppy.
    -Je vous trouvais bien intime, soudainement, Monsieur Bosinski, lui dit-elle avec un air narquois.
    Il desserra sa cravate et se mit à souffler tout en retirant ses lunettes qu’il jeta sur la table. Il se dirigea vers le bar, prenant soin d’enjamber le corps de Murdock au passage et remplit deux verres d’amasec. Il en tendit un à Poppy.
    -J’ai surtout cru y passer une fois de plus. Notre bluff a fonctionné et je ne sais même pas comment on s’en tire une fois de plus. On a eu une putain de sacrée chance.
    -En réalité la chance n’a rien à voir dans tout ceci, Felt et tu le sais.
    Lexxi, Lek et Viggo vinrent les rejoindre, constatant les dégâts et les quatre corps sans vie sur le tapis. Felton leur proposa un verre à eux aussi.
    -Tout le monde s’en va du manoir, c’est normal ? Demanda Lexxi qui préféra se servir un verre de quelque chose de plus puissant. Elle trouva une bouteille neuve de Razvod et s’en servit une bonne rasade.
    Pour toute réponse, Poppy activa son microvox et appela les commandos de la cellule Mortis dont la navette Valkyrie était déjà en approche avec Jézabel.
    -Ici, Obscurus, code vert. Schéma convergence.

    La pluie avait cessé et laissa sa place à un ciel pourpre chargé de nuages couleur cendre. Des oiseaux marins aux longues ailes bleues membraneuses piaillaient dans les courants ascendants. Jézabel se tenait là, devant eux, sur le bord de la falaise, à une centaine de mètres du manoir. Sa longue robe noire flottant au vent, comme se cheveux de même couleur. Elle dévisagea longuement Poppy et Felton qui se tenaient là. Le reste de l’équipe s’affairait plus loin au niveau des navettes, à charger leur matériel. Une captive avait été retrouvé dans le manoir. La jeune Mira, la petite amie de Lek. Elle était actuellement avec lui et une équipe medicae. Des trois filles retenues captives par Bosinski, elle était la seule à avoir été laissée en vie.

    - Trône… Vous y êtes parvenus, annonça Jézabel à Poppy et Felton.
    -Vous voulez dire… Enfin ?
    -Exactement. Mais trois mois, ce n’est pas si mal en réalité. J’ai eu des doutes au début, pourtant.
    -Moi aussi, répondit Poppy.
    -Je ne parlais pas de vous deux. Et vous le savez très bien. Il y a eu des pertes, mais de toute façon, peu de candidats survivent aux premières missions.
    -Comment allons-nous procéder à présent ? Lui demanda Felton.
    -Il n’y a bientôt plus de nous… D’ici un mois, tout au plus.
    Elle laissa passer quelques instants, le regard perdu vers l’horizon de l’océan déchainé.
    -L’Inquisiteur Anders me rappelle. Ma mission ici est terminée. Je devais boucler le dossier Haxt et c’est chose faite.
    -Et… Pour nous ? S’enquit Poppy.
    Jézabel eut un début de léger sourire.
    -Vous êtes des ressources qui intéressent les Ordos désormais. Vous pourriez bien devenir des atouts. J’ai validé votre intégration à un programme de formation pour devenir officiellement des agents du Trône.
    -Cela signifie que…
    -Que si par hasard nous venions à nous recroiser un jour, nous serions alors des collègues de même rang.
    -Nous allons aussi rencontrer l’Inquisiteur ?
    -Il semblerait que non. Felton a laissé une forte impression à cette interrogatrice au début de cette histoire dont j’ai oublié le nom…
    -Assumptia ?
    -Elle-même. J’ai cru comprendre qu’elle avait touché un mot à l’Inquisitrice Natalius de l’Ordo Hereticus qui va reprendre certains sujets dans le sous-secteur. L’inquisiteur et elle, se connaissent et il a confiance en elle, ce qui est rare, croyez-moi. Il a donc souhaité lui confier la cellule Obscurus.
    Le nom de Natalius ne semblait rien évoquer ni à Felton ni à Poppy.
    -Et nous ne pouvions pas le rejoindre nous aussi, dans ce cas ?
    -Karl Anders est un inquisiteur de l’Ordo Malleus. Ce qu’il traque vous dépasse largement. Vous n’êtes pas encore prêts. Dans quelques années, peut-être, mais il vous faudra survivre encore à bien des épreuves. Et puis votre formation risque de prendre des mois, peut-être plus d’un an pour certains d’entre vous.
    -Et pour le Syndicat, Sinclar… La suite ? Demanda Felton. Je ne vais pas garder ce déguisement de Bosinski à vie ?
    -Vous infiltrez l’organisation comme prévu. Quant à votre apparence… Soyez créatif. Dites que Bosinski débute une nouvelle vie et va faire de la chirurgie esthétique comme Cox. Ainsi vous reprendrez votre visage. Faites juste en sorte que Sinclar continue de vous faire confiance. C’est tout ce que nous cherchons. L’Inquisitrice Natalius s’intéresse de très près à la Kasballica. Mais vous ne serez pas seuls, le reste de la cellule va être déployée sur Archaea à différents endroits en vue de vos formations. Lexxi Anderson va effectuer une formation d’officier Tempestus sur les terres du nord, quant à Viggo, il sera envoyé en orbite sur la station de l’Astra Telepathica pour y recevoir une formation plus poussée de psyker primaris. Lek Constantine restera avec vous Felton. Cela donnera du crédit à votre couverture, vous recevrez cependant des formations au Reliquaire à certains moments, tous les deux. Vous infiltrez la pègre, mais n’en demeurerez pas moins des agents infiltrés, au service du Trône.
    Elle se tourna vers Poppy.
    -Quant à vous, Sandwall, je pense prendre un peu de temps avant de partit pour démarrer votre formation d’interrogatrice. Vous en avez clairement les épaules.
    -Merci, Madame…
    -Tsali… Elle… Elle reste ici aussi ? Lui demanda Felton.
    -Ah, oui, en effet. J’envisage de lui confier la supervision du Reliquaire après mon départ. C’est une brillante érudite, elle devrait continuer de le faire vivre avec Ordax-Kappa et tous deux travaillerons pour vous. Le Reliquaire deviendra ainsi officiellement votre bastion. Du moins le temps que l’Inquisitrice vous envoie hors de cet agrimonde.
    -Vous avez des informations à ce sujet ?
    -Haxt n’était qu’un simple engrenage de ce vaste mécanisme corrompu. Un peu de patience, Sandwall, vous le découvrirez bien tôt ou tard.
    Vita locus Mors ludus

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